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Oxyhydroxydes Dans les sédiments anaérobiques, les bactéries

1.3. Diagénèse précoce des sédiments estuariens

1.3.2. Oxyhydroxydes Dans les sédiments anaérobiques, les bactéries

réduisent les oxyhydroxydes de Mn et de Fe pour minéraliser la matière organique et libérer directement ces éléments dans les eaux interstitielles des sédiments, de même que les métaux traces qui leurs sont associés. Les équations de réduction peuvent s'écrire:

Réduction Mn-Oxydes:

CH2O + 3CO2 + H2O + 2MnO2 → 2Mn2+ + 4HCO3-

Réduction Fe-Oxydes:

CH2O + 7CO2 + 4Fe(OH)3 → 4Fe2+ + 8HCO3- +3H2O

Par la diffusion des éléments et la resuspension des sédiments, la réoxydation du Mn et du Fe dissous peut fixer des quantités importantes de métaux traces à l’interface eaux/sédiments et dans la colonne d’eau (Eldefield et al., 1981; Tessiers et al., 1985; De Vitre et al., 1991; Dorglas et Adeney, 2000). Le Mn et le Fe dissous peuvent également se diffuser en profondeur du sédiment. Si, dans ce cas, les conditions sont anaérobiques, ces éléments peuvent précipiter sous forme de carbonates de Fe et/ou de Mn et de sulfures de Fe en coprécipitant activement certains métaux traces. Cette précipitation est favorisée par la sulfatoréduction qui sursature les eaux interstitielles en sulfures et en carbonates selon:

2CH2O + SO42- → H2S + 2HCO3-

Les concentrations du Mn dissous dans les eaux interstitielles, reflètent généralement, l’importance des oxyhydroxydes de Mn facilement réductibles qui sont disponibles pour oxyder la matière organique (Williamson et al., 1994). Les profils respectifs du Mn et du Fe dissous se manifestent, en générale, par une augmentation des concentrations en profondeur du sédiment jusqu’à atteindre un maximum puis une diminution vers le bas (Pedersen et Price,

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1982; Williamson et al., 1994). Pour maintenir ces gradients vers le haut et vers le bas, ces éléments précipitent sous des formes minérales différentes.

Le Mn et le Fe diffusent vers le haut pour précipiter sous forme d’oxyhydroxydes près de l’interface eau/sédiment où le potentiel redox est plus élevé (Sorensen et Jorgensen 1987; Fortin et al., 1993). Dans certains cas, le recyclage du Mn par cette réoxydation à l’interface représente la source principale des oxyhydroxydes de Mn servant à la minéralisation de la matière organique (C. Rabouille et J.F. Gaillard, 1991). Etant donné que l’oxydation du Mn est lente (Stumm et Morgan 1981), une partie du Mn2+ peut s'échapper

vers la colonne d’eau (Evans et al., 1977; Morris et al., 1978), précipite et se dépose plus loin (Pedersen et Price, 1982; Williamson et al., 1994). Par contre, la diffusion du Fe vers la colonne d’eau dépend des conditions redox à l’interface eaux/sédiments (Sundby et al., 1986; Sholkovitz et al., 1992) et précipite rapidement dans la zone oxique. Le Fe et le Mn sont donc très sensibles aux variations des conditions physico-chimiques dans les sédiments et dans la colonne d’eau. Dans les estuaires, ces changements sont particulièrement fréquentes, dus aux jeux des marées et aux variations des débits fluviaux. Ce qui exercent une influence de court terme (heures-jours) à moyen terme (saisons) sur la réactivité géochimique de nombreux constituants ( Morris et al., 1982a,b).

Par ailleurs, si la diminution des concentrations du Mn dissous reflète un gradient actif sous la zone de réduction du Mn, une diffusion de celui-ci en profondeur du sédiment doit avoir lieu ( Williamson et al., 1994). Pour maintenir ce gradient, le Mn précipite généralement sous forme de rhodochrosite MnCO3 (Gerringa 1991), ou bien coprécipite avec les carbonates

de calcium pour former une solution solide sous forme de MnxCa(1-x)CO3

(Pedersen et Price, 1982; Boughriet et al., 1995). En effet, sous les conditions anaérobiques le maximum du Mn dissous des eaux interstitielles des sédiments est typiquement limité par la précipitation des carbonates de Mn, et même par

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les sulfures de Mn dans certaines conditions anoxiques extrêmes. La phase carbonaté du Mn a été, en effet, identifiée dans des sédiments anaérobiques lacustres (Shterenberg et al., 1966; Callender, 1973 in Pedersen et Price, 1982) et marines (Zen, 1959; Manheim, 1961, in Pedersen et Price, 1982).

Par contre, les conditions thermodynamiques de la précipitation de la sidérite sont très restreintes, alors, le Fe précipite plus facilement sous forme de sulfures dans le milieu marin et estuarien (Berner 1971).

1.3.3. Carbonates.

Les sédiments estuariens sont généralement riches en matière organique d'origine continentale, estuarienne et marine. En effet, les apports continentaux chargés en matière organique sont en grande partie piégés dans les estuaires (Wollast, 1988). D'autre part, les estuaires et les côtes adjacentes sont connus pour leur grandes productivité. Une fraction importante de cette matière organique produite dans la colonne d'eau aboutit dans le sédiment à cause des faibles profondeurs qui caractérisent ces environnements (Wollast, 1991). Cette matière organique très réactive subit une forte dégradation dans le sédiment (Middelberg et Nieuwenhuize 1998).

Par ailleurs, vu que la colonne d'eau est sursaturée en CaCO3, tous les

carbonates de calcium produit dans la colonne d'eau, ou issus des suspensions continentales se déposent dans l'estuaire ou bien sont entraînés vers la zone côtière.

La diagénèse précoce des carbonates de calcium dépend largement de l'état d'oxydation des sédiments. Sous les conditions aérobiques, la respiration de la matière organique peut être décrite simplement par:

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Cette respiration a lieu dans les dépôts sableux riches en oxygène et pauvres en matière organique (facteur limitant), comme elle peut avoir lieu à l'interface eau/sédiment dans le cas des dépôts vaseux.

Dans ces conditions, les eaux interstitielles deviennent rapidement sous- saturées en carbonates de calcium à causes des rajouts d'acide carbonique dans la solution (Wollast et Vanderborght, 1994). Par conséquent, cet acide carbonique produit par la respiration de la matière organique est essentiellement utilisé pour dissoudre, préférentiellement, la calcite magnésienne bien présentes dans ces sédiments et plus soluble que la calcite pure (Moulin et al., 1985). Cette réaction de dissolution peut s'écrire:

H2CO3 + MgxCa(1-x)CO3 = 2 HCO3- + (1-x)Ca2+ + xMg2+

Dans la figure (1.15), Wollast et Vanderborght (1994), montrent l'évolution des espèces carbonatées quand la respiration aérobique a lieu dans les sédiments. La dissolution des carbonates de calcium peuvent être accompagnée d’une mobilisation des métaux traces qui leurs sont éventuellement associés.

Figure 1.15. Evolution des espèces du carbone inorganique dissous, du pH et du degré de saturation de la calcite et de l'aragonite en fonction du degré de dégradation de la matière organique dans les conditions oxygénées, (Wollast et Vanderborght, 1994.)

Par contre, dans les conditions anaérobiques, les processus qui ont lieu sont très différents, sinon opposés, à ceux présents dans les conditions oxygénées (Moulin et al., 1985). En effet, la matière organique est principalement dégradée par les bactéries sulfatoréductrices suivant l'équation:

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Il est clair, d’après cette équation, que la réaction d’oxydation de la matière organique par sulfatoréduction est accompagnée d’une forte augmentation de l’alcalinité des eaux interstitielles. Dans ces conditions, le milieu devient rapidement fort sursaturé en carbonates (figure 1.16), qui peut même donner lieu à une précipitation de la calcite et de la l’aragonite (Wollast, 1990).

Figure 1.16. Modifications de la composition des eaux interstitielles des sédiments dues à la dégradation de la matière organique par la sulfatoréduction dans les conditions anaérobiques. Les lignes correspondent au model, les points sont des observations de sédiments du Mangrove Lake (Bermuda). ( Wollast, 1990).

1.3.4. Sulfures.

Dans la zone de réduction des sulfates, les sulfures dissous libérés par la sulfatoréduction réagissent avec le Fe ferreux issu généralement de la réduction des oxydes de Fe (Canfield, 1989). Les principales phases minérales produites

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par ces réactions sont des sulfures métastables comme la mackinawite (Fe1+xS)

et la greigite (Fe3S4) qui se transforment progressivement avec la diagénèse en

pyrite (FeS2) très stable (Berner, 1971; Raiswell et Canfield, 1998).

La formation diagénétique des sulfures est stimulée par les bactéries sulfatoréductrices (Donald et Southam, 1999). Par contre, le taux de conversion des monosulfures volatils (métastables) en pyrite est apparemment contrôlé par la disponibilité des oxydants et du temps d’enfouissement (Middelburg, 1991).

La quantité et la réactivité de la matière organique et du Fe dans le sédiment, ainsi que la disponibilité des sulfates dissous dans les eaux interstitielles, sont les principaux facteurs contrôlant la formation des sulfures de Fe (Berner, 1971). Probablement, le facteur limitant le plus important est la concentration de la matière organique métabolisable (Berner, 1971). En effet, tous les sédiments marins et estuariens sont assez riches en Fe réactif et les sulfates dissous y sont abondants. C’est ainsi, que la formation des sulfures de Fe dans les estuaires est fréquente dans les vases riches en matière organique, contrairement aux sables qui sont généralement moins riches (Baeyens, et al., 1991; Williamson et al., 1994).

Il faut noter, par ailleurs, que l’enfouissement des sulfures de fer joue un rôle très important dans la fixation du Fe, des sulfures et de nombreux métaux traces adsorbés (Huerta-Diaz et Morse, 1992; Morse et Arakaki, 1993; Morse, 1994). Cependant, la transformation des monosulfures en pyrites durant la diagénèse précoce, peut libérer les métaux traces associés à ces monosulfures (Elderfield et al., 1979). D’autre part, la mobilisation des métaux peut avoir lieu, également, lors des réactions d’oxydations des sulfures suite à la resuspension des sédiments (Morse, 1994; Saulnier et Mucci, 1999), ou bien aux phénomènes de bioturbations.

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