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La méthionine (Met) peut être oxydée par deux voies majeures, impliquant une oxydation à un ou deux électrons. L’oxydation à deux électrons entraîne la formation d’un dication (réaction 1) qui en présence d’eau, va se transformer en Met-O (réaction 2), alors que l’oxydation à un électron entraîne la formation d’un radical cation très instable (réaction 3) qui peut se transformer en une série d’intermédiaires et de produits. L’oxydation à un électron de ce radical cation conduit au dication (Schoneich, 2005)

Plusieurs oxydants biologiques sont capables d’oxyder la Met selon des mécanismes à 1 ou 2 électrons. La plupart des études cinétiques s’est focalisée sur l’étude des mécanismes d’oxydation à deux électrons réversibles, qui sont les plus répandus, les mécanismes d’oxydation à un électron pourraient causer quant à eux des dommages oxydatifs irréversibles. Ces réactions d’oxydation dépendent de plusieurs paramètres dont la nature de l’espèce oxydante, le solvant ou l’accessibilité de la Met.

Les oxydants biologiques sont majoritairement les espèces réactives de l'oxygène (ERO), encore appelées espèces activées de l'oxygène, principalement le peroxyde d’hydrogène (H2O2), l’anion superoxyde (O2!-) et le radical hydroxyle (OH!), qui sont des produits de la réduction de l'oxygène (réactions 4). Ces ERO sont produits en faibles quantités par tous les organismes aérobies, et ils peuvent s’accumuler transitoirement dans des conditions dites de stress oxydant, lorsqu’il existe un déséquilibre de la « balance » entre leurs vitesses de production et d’élimination par les systèmes antioxydants.

Dans la suite de l’Introduction, seront traités les mécanismes d’oxydation de la Met par le radical hydroxyle, le radical superoxyde, le peroxyde d’hydrogène et le peroxynitrite, ainsi que l’oxydation catalysée par le Cu (II+).

I.1.1 Le radical hydroxyle

Le radical hydroxyle (OH!) est le plus réactif des ERO. Sa forte réactivité est limitée in vivo par sa faible diffusion à travers les membranes cellulaires. En conséquence sa durée de vie étant extrêmement faible (inférieure à la microseconde), il réagit presqu’uniquement sur son site de production avec toutes les biomolécules présentes en ce site (ADN, protéines, lipides...).

Il peut être généré dans la cellule par clivage réducteur d’H2O2 (réaction 5), par la dissociation du peroxynitrite (réaction 6), par coupure homolytique d’H2O2 (réaction 7), ou par la réaction de Fenton en présence de Fe 2+ou de Cu + (réaction 8).

L’oxydation de la Met par OH!procède selon un mécanisme d’oxydation à 1 électron, via dans un premier temps l’addition de OH!sur l’atome du soufre de la Met conduisant à la formation d’un radical hydroxysulfuranyl (réaction 9).

Ce radical hydroxysulfuranyl est très instable et au sein d’un peptide ou d’une protéine. C’est ainsi qu’il peut subir une déshydratation (Schoneich et Bobrowski, 1994). Cette dernière peut engendrer la formation d’intermédiaires radical cation à liaison à trois électrons entre le soufre et un atome d’azote de type S!N (Figure 1, schéma A) ou entre le soufre et un atome d’oxygène de type S!O (Figure 2, schéma B) (la notation « ! » représente une liaison à trois électrons où deux électrons sont localisés dans une orbitale " -liante et un électron est localisé dans une orbitale "*-antiliante). Ces intermédiaires

radicalaires vont pouvoir évoluer vers différentes formes (Asmus, 1979; Schöneich et al., 1993 ; Schöneich, 2005).

Figure 1 : Transfert de proton intramoléculaire de l’acide aminé N-terminal au niveau du radical hydroxysulfuranyl du dipeptide Thr-Met (Schéma A) et réarrangement de la liaison S!O à la liaison S!N (Schéma B). Schéma (A) : le radical hydroxysulfuranyl subit une déshydratation qui conduit à la formation de l’intermédiaire de type S!N. Un transfert d’électron de l’atome de soufre vers l’atome d’azote permet un clivage homolytique de la liaison C#-C$ de la Thr, et la formation de l'acétaldéhyde. Schéma (B) : la déprotonation de l’azote permet un réarrangement des électrons et la formation de l’intermédiaire de type S!N (Schoneich, 2005).

Le radical hydroxysulfuranyl peut réagir avec l’oxygène pour former un azasulfonium, qui pourra s’hydrolyser pour former un sulfoxyde (Miller et al., 1996, Miller et al., 1998), ou encore réagir directement avec une molécule d’oxygène pour former un intermédiaire radical peroxyle, qui pourra ensuite réagir via une oxydation à deux électrons pour former un sulfoxyde (Schoneich and Bobrowski, 1994). La fonction sulfoxyde ne pourra se former qu’en présence d’oxygène et de manière pH-dépendante (Schoneich et al., 1993).

I.1.2 Le radical superoxyde

Le radical superoxyde O2!-, est formé majoritairement par réduction monoélectronique de l’oxygène au niveau de la chaîne respiratoire (réaction 10) (Cadenas and Davies, 2000).

Il peut également être produit par l'auto-oxydation de certains neuromédiateurs (adrénaline, noradrénaline, dopamine...), de thiols (cystéine), de coenzymes réduits (FMNH2, FADH2), la détoxication des xénobiotiques par le système des cytochromes P450 (Halliwell et Gutteridge, 1999 ; Halliwell, 2006), ou encore dans certains cas par la

NADH-B

A

déshydrogénase. Sa durée de vie est relativement longue (jusqu'à quelques dizaines de secondes) et de ce fait, peut diffuser bien au-delà de son lieu de production. Sa dismutation conduit à la formation de H2O2 qui est catalysée in vivo par une superoxyde dismutase (SOD) (réaction 11).

La toxicité des radicaux superoxydes s'exerce plutôt d'une manière indirecte. En effet, en réagissant avec H2O2, les radicaux O2!

peuvent donner naissance à OH! (réaction 12, dite réaction de Haber Weiss, catalysée par Fe3+) ou bien encore, en réagissant avec des radicaux NO!, conduire à l'apparition de peroxynitrites (réaction 13).

I.1.3 Le peroxyde d’hydrogène

Le peroxyde d'hydrogène H2O2, communément appelé eau oxygénée, est une petite molécule non chargée, dont la production provient principalement de la dismutation d’O2!

-, spontanée ou catalysée par les SOD. Il peut également résulter de la réduction biélectronique de l'oxygène (réaction 14) en présence d'oxydases (aminoacide oxydases, glycolate oxydase, urate oxydase...) qui se trouvent principalement dans des organites cellulaires bien individualisés comme les peroxysomes.

Du fait de sa nature non chargée, H2O2 diffuse aisément à travers les membranes des cellules. Il peut également facilement générer OH! en présence de cations métalliques tels que Fe2+ (réaction 8, dite réaction de Fenton) ou Cu2+ (Wardman and Candeias, 1996).

La réaction d’H2O2 sur la Met est un processus d’oxydation à deux électrons résultant d’un transfert d'oxygène (Chu and Trout, 2004, Chu et al., 2004). Initialement, le mécanisme était considéré comme une réaction de type SN2 (ou substitution nucléophile bimoléculaire en une seule étape) avec une scission hétérolytique de la liaison O-O du peroxyde. Un autre

mécanisme a été proposé impliquant la formation d’un intermédiaire molécule d’eau oxydée (H2O-O) (Figure 2). Au cours de ce mécanisme, deux à trois molécules d'eau vont stabiliser les charges de l’état de transition grâce à la formation de liaisons hydrogène avec H2O2, et il y auraun transfert d’un atome d'hydrogène à l'oxygène distal de H2O2.

A

B

Figure 2 : Représentation du groupement réactif (A) et de l’état de transition (B) de l’oxydation d’une molécule de diméthyl sulfure (DMS) par H2O2(d’après Chu et Trout, 2004). Dans ce modèle, trois molécules d’eau (O4, O5 et O6) stabilisent la distribution de charge induite par la séparation entre les deux oxygènes de H2O2 (O2 et O3). C7-S1-C8

représente la molécule de DMS. La réaction d’oxydation du DMS par H2O2 se produit via l’allongement de la liaison O-O de H2O2 et la réduction de la distance de la liaison S-O, entraînant la rupture de la liaison O-O et la formation de la liaison S-O. Deux à trois molécules d’eau stabilisent la séparation de charge de l'état de transition par l'intermédiaire d'interactions spécifiques, y compris des liaisons hydrogène

I.1.4 Leperoxynitrite

Le peroxynitrite provient de la réaction entre NO! (produit par les macrophages, les neutrophiles…) et O2!

(réaction 13). Il présente une faible durée de vie. Les sites de production du peroxynitrite sont associés aux sources d’O2!

-, puisque NO!, contrairement au O2!

-, présente une demi-vie très courte-, et ne peut pas diffuser à travers les membranes. Le peroxynitrite va oxyder les Met suivant une réaction d’oxydation à deux électrons (Perrin et Koppenol, 2000). Un mécanisme catalytique de cette oxydation a été proposé (Figure 3). La première étape de ce mécanisme consiste en l’attaque nucléophile de l’atome de soufre de la Met sur l’atome d’azote de HOONO entraînant la formation d’un adduit entre ces deux molécules. La perte d’un groupement hydroxyle au niveau de cet adduit ainsi que l’addition d’une molécule d’eau au niveau du soufre de la Met entraîne la formation de

Met-O et de nitrite. Si l’addition de la molécule d’eau a lieu sur l’atome d’azote, il y a alors formation de Met et de nitrate. Le nitrite formé va lui pouvoir réagir avec une autre Met, selon un mécanisme d’oxydation à un électron, entraînant entre autre la formation d’éthylène.

Figure 3 : Mécanisme d’oxydation de la Met par le peroxynitrite (d’après Perrin et Koppenol, 2000).

L’attaque nucléophile de l’atome de soufre de la Met sur l’atome d’azote de l’acide peroxynitreux conduit à la formation d’un adduit, qui après la perte d’un groupement hydroxyle et l’addition d’une molécule d’eau, libère la Met-O et le nitrite.