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IV.3. Résultats et discussions _____________________________________________________ 135

IV.3.2.3. Oxydation en Pu(VI)

Le Pu(IV) étant la forme redox du Pu la plus sensible à l’hydrolyse, le changement de valence du plutonium constitue une approche possible pour la résolution des problèmes d’hydrolyse et de position de migration du Pu par rapport à l’U. Le degré d’oxydation VI du Pu semble être le candidat le plus adapté pour permettre l’migration du Pu avant l’U. Il possède une constante de complexation avec l’acétate moins grande que Pu(IV) mais plus grande que celle du Pu(III). Il est donc susceptible de migrer plus lentement que les lanthanides dont la chimie avec les acétates est similaire à celle du Pu(III) et avant l’U(VI) qui possède une constante de stabilité plus grande avec l’acétate. Cette observation est confirmée par les précédents résultats où le Pu (VI) présente une mobilité électrophorétique qui positionne son pic entre les Lns et l’U.

De nombreux protocoles permettent d’oxyder le Pu en Pu(VI) mais la plupart nécessite d’ajouter un autre élément dans l’échantillon tel que du fer(III), du manganèse ou de l’argent [10-12]. Cet ajout introduit dans la solution un deuxième couple rédox dont le potentiel est favorable à l’oxydation du Pu. Un des rares protocoles existant pour oxyder le Pu(III) et

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Pu(IV) en Pu(VI) (PuO22+) sans introduire d’autres éléments métalliques en solution utilise l’acide perchlorique. Il consiste à reprendre l’échantillon dans une solution d’acide perchlorique concentrée portée à reflux pendant plusieurs heures puis de laisser évaporer la solution. Cette méthode a déjà été appliquée au cours de précédentes études [2, 12]. L’échantillon est ensuite repris dans une solution d’acide perchlorique moins concentrée afin d’assurer le maintien de Pu sous le degré d’oxydation VI tout en abaissant la force ionique de la solution permettant ainsi l’analyse par EC. Dans cette étude, l’oxydation du Pu a été réalisée avec des solutions d’acide perchlorique 1 mol.L-1

.Le protocole consiste à évaporer le solvant de l’échantillon puis à le reprendre dans 0,5 mL d’acide perchlorique et de chauffer pendant 2 à 3 heures jusqu’à évaporation de l’acide. Cette opération est répétée 3 fois. Dans un premier temps, l’échantillon oxydé est alors repris dans les conditions fixées pour la séparation soit une solution d’acide acétique 0,25 mol.L-1

(pH non ajusté). La Figure IV-22 présente l’électrophérogramme de la séparation obtenue en mode préconcentration (BGE+) immédiatement après la mise en solution de l’échantillon contenant de l’U(VI), du Pu(VI) et des lanthanides. Comme l’illustre la figure, les conditions de traitement d’échantillon et de séparation mises en place ont permis d’obtenir la migration du Pu(VI) en amont de celle de l’U(VI) et en aval de celles des lanthanides. Cependant d’après l’électrophérogramme obtenu, le Pu est présent en solution sous au moins deux formes ou degrés d’oxydation car deux pics de Pu sont observés. Le temps et la position relative de sa migration semble indiquer que le degré d’oxydation du Pu pour le deuxième pic (moins intense) correspond au Pu(V) ou à une autre forme stable de Pu(VI) (PuO2(OH)x2-x ?). En effet, son temps de migration ne correspond ni au Pu(III) (qui élue avec les lanthanides), ni au Pu(IV). Ce pic correspond donc probablement à la dernière forme oxydée dont la position n’a pas encore été identifiée, le Pu(V).

Cette interprétation est confirmée par les travaux de Kuzweski et al. [1] lors desquels la migration du Pu(V) en électrophorèse capillaire a été observée entre celle du Pu(VI) et celle du Pu(IV) et les travaux de Graser et al. [2] qui ont mesurées les mobilités électrophorétiques des différentes formes oxydées du Pu dans l’acide acétique et constaté que la mobilité du Pu(V) était comprise entre celle du Pu(VI) et celle du Pu(IV).

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Figure IV-22. Electrophérogramme de la séparation en préconcentration du La (en bleu), Lu

(en rouge), U (en violet) et Pu (en gris) après oxydation de Pu et reprise de l’échantillon dans l’acide acétique 0,25 mol.L-1

. Séparation obtenue avec un échantillon U/Pu/La/Lu de concentrations - 10/1/1/1 ppm, un électrolyte de 0,25 mol.L-1 d’acide acétique et 0,10 mol.L-1 de nitrate d’ammonium ajusté à pH 3 avec une solution d’ammoniaque et sans ajouter de pression au cours de la séparation. tneutre : temps de migration des espèces non chargées.

Deux hypothèses ont été considérées pour expliquer l’apparition d’un deuxième pic de Pu. La première hypothèse envisagée est une oxydation incomplète du Pu en Pu(VI). Afin de savoir si cette hypothèse est exacte, le protocole d’oxydation a été réalisé en utilisant une solution d’acide plus concentrée (11 mol.L-1

environ) et en augmentant le temps de chauffage de 3h à 9h. Cela n’a cependant pas permis d’éviter l’apparition du pic minoritaire au pied du pic de l’U. Cette hypothèse peut donc être exclue.

La deuxième hypothèse est une réduction partielle du Pu(VI) à l’image des changements rédox observés jusqu’ici pour les autres degrés d’oxydation du Pu. Afin d’éviter la réduction du Pu(VI), une des solutions possibles consiste à maintenir l’échantillon en milieu oxydant, en reprenant celui-ci dans l’acide perchlorique dilué après l’oxydation de Pu par exemple. Il est aussi important de maintenir le pH de la solution échantillon proche du pH de l’électrolyte support afin de ne pas modifier les conditions de séparation et de conserver la même conductivité pour l’échantillon que précédemment (dans l’acide acétique 0,25 mol.L-1

). Les conditions pouvant satisfaire au mieux ces critères semblent être la mise en solution de

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(concentration en acide qui correspond à un pH non ajusté de 3). Un suivi dans le temps de la tenue en solution du Pu (VI) en milieu oxydant a été réalisé. La Figure IV-23 présente la séparation en mode sans préconcentration (BGE) de l’échantillon de Pu (VI) en présence d’acide perchlorique 2 mmol.L-1

à t=0 (a) (préparation initiale de l’échantillon) et t=3 mois (b).

Figure IV-23. Electrophérogrammes des séparations sans préconcentration du La (en bleu),

Lu (en rouge), U (en violet) et Pu (en gris) après oxydation de Pu et reprise de l’échantillon dans l’acide perchlorique 0,002 mol.L-1. Séparation obtenue avec un échantillon U/Pu/La/Lu de concentrations - 10/0,5/1/1 ppm, un électrolyte de 0,25 mol.L-1 d’acide acétique ajusté à pH 3 avec une solution d’ammoniaque et en ajoutant une surpression de 100mbar au cours de la séparation. tneutre : temps de migration des espèces non chargées. Séparation à t= 0 (a) et à t = 3mois (b).

L’ordre de migration attendu (lanthanides, puis Pu puis U) a bien été obtenu comme le montre la Figure IV-23 a). De plus, dans ces conditions de mise en solution un seul pic de Pu est détecté, le pic correspondant au Pu(VI). L’oxydation du Pu en Pu(VI) semble avoir été totale et la valence VI ne semble pas sujette à l’hydrolyse en milieu perchlorique dilué. De plus, comme le montre les deux électrophérogrammes de la Figure IV-23 les mêmes profils ont été obtenus à t= 0 et à t = 3 mois avec une forme oxydée PuO22+ stable dans le temps. Aucune réduction du Pu(VI) n’est observée après 3 mois, un seul pic de Pu est détecté et il correspond au Pu(VI).