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structures sub-longueur d’onde

1.3 Ouvertures d´ ecor´ ees

Nous avons vu dans les paragraphes pr´ec´edents que l’intensit´e totale transmise par des r´eseaux sub-longueur d’onde ´etait fortement modul´ee spectralement. Le champ lointain est par contre uniquement compos´e de l’ordre 0 de diffraction et donc tr`es homog`ene angulairement. D’autres motifs permettent de moduler la distribution angulaire de l’intensit´e transmise dans le champ lointain. Nous verrons dans ce chapitre quels sont ces ´el´ements et, ici encore, comment leur comportement est d´ecrit.

Dans un cadre diffractif, chaque ouverture d’un r´eseau agit comme une source secondaire. C’est vrai plus g´en´eralement de toute d´eformation de la surface. Il suit qu’une ouverture unique entour´ee de tels d´efauts – que l’on appellera sillons par la suite – pr´esentera le mˆeme genre de ph´enom`enes que ceux d´ej`a observ´es dans les r´eseaux. C’est-`a-dire que dans ce cas aussi le champ de surface sera fortement coupl´e au champ propagatif dans les r´egions 1 et 3.

1.3.1 Effet de collimation

En champ lointain, un trou sub-longueur d’onde peut ˆetre consid´er´e comme une source ponctuelle, et son diagramme d’´emission sera pratiquement isotrope angulairement. L’angle

d’´emission est simplement donn´e par sin θ = kx/k0. L’interaction avec une structure p´eriodique

opaque sur l’interface de sortie permet cependant de diminuer cons´equemment la divergence du champ transmis. On parle d’effet de collimation (beaming effect). La figure 1.15 montre une image au microscope ´electronique balayage d’une fente entour´ee de sillons p´eriodiques produisant cet effet de collimation.

Fig. 1.15: Image au microscope ´electronique `a balayage d’une fente de 150

nm par 50 µm entour´ee par dix sillons de 415 nm de large espac´es p´eriodique-ment de 830 nm.

1.3. Ouvertures d´ecor´ees 113 Cet effet a ´et´e mis en ´evidence pour la premi`ere fois par l’´equipe de T.W. Ebbesen et H. Lezec, puis ´etudi´e formellement par L.Mart´ın-Moreno et F. Garc´ıa-Vidal dans le cas d’un m´etal parfait [36, 85], puis dans le cas d’un m´etal de conductivit´e finie [86]. Ce type de ph´enom`ene a aussi ´et´e d´emontr´e dans le domaine THz par H. Cao, A. Agrawal et A. Nahata [87]. Z.-B. Li et al. ont montr´e que des effets similaires pouvaient ˆetres obtenus en modulant la surface d’un film di´electrique d´epos´e sur le film m´etallique [88]. On trouvera des images obtenues par microscopie de champ proche des champs produits par ces structures dans l’article de P.K. Wei

et al. [89].

Une fente de largeur sub-longueur d’onde entour´ee de N/2 sillons espac´es p´eriodiquement de chaque cˆot´e de l’ouverture, ´eclair´ee sur sa face non d´ecor´ee par une onde plane incidente polaris´ee TM produit un faisceau faiblement divergent (la divergence `a mi-hauteur est de l’ordre

de 3 pour N = 30).

Cette figure d’´emission particuli`ere d´ecoule de quatre ´etapes :

– La lumi`ere est transmise par l’ouverture sub-longueur d’onde centrale, en cr´eant `a l’in-terface avec le milieu 3 un champ ´evanescent.

– Ce champ est coupl´e aux modes propres du champ dans les motifs voisins – Ces motifs produisent `a leur tour un champ radiatif.

– Le champ total dans le milieu 3 est le r´esultat des interf´erences `a N+1 ondes homog`enes issues des sillons et de la fente.

On peut alors ´ecrire :

E3 = Ef +

N

X

j=1

Eje−iφj φj est le retard de phase associ´e au sillon j (1.43)

L’´equation (1.43) permet de comprendre le comportement du champ lointain, sans donner les d´etails des champs proches. Ainsi, l’extension spatiale de la source est proportionnelle au nombre de sillons. En cons´equence la divergence observ´ee est inversement proportionnelle au nombre de sillons [90]. L’angle d’´emission du premier nœud de diffraction par une ouverture

de dimension a est en effet θ0 = 2πλ0/a. Pour obtenir une bonne collimation, c’est-`a-dire des

interf´erences constructives sur l’axe optique, toutes les sources doivent ˆetre en phase.

Dans la description de H. Lezec [37], cela signifie que les sillons doivent ˆetre espac´es d’un nombre entier de longueur d’onde de la CDEW, et que le premier doit ˆetre d´ecal´e d’un quart d’onde par rapport `a l’ouverture, d’apr`es l’´equation (1.31), de mani`ere `a faire correspondre les positions des sillons aux maxima d’intensit´e du champ de surface. Dans l’interpr´etation en terme de plasmons, la p´eriode des sillons doit ˆetre r´esonante avec un plasmon polariton de surface pour la longueur d’onde employ´ee. Le champ propagatif correspond alors `a un mode collectif de l’ensemble des sillons [85]. Hors de la condition de collimation, on peut observer des faisceaux dirig´es selon d’autres directions, ou mˆeme une annulation de l’intensit´e transmise. Mais si la forme de la distribution d’intensit´e dans le champ lointain d´epend principalement des positions des sillons, l’efficacit´e du proc´ed´e reste tributaire d’un couplage efficace entre les modes rencontr´es, d´ependant comme on l’a vu de la g´eom´etrie de la fente et des sillons. Remarquons que cet effet de collimation est observ´e aussi pour des figures `a sym´etrie circulaire, appel´ees œil de bœuf (bullseye) que nous rencontrerons par la suite. La figure 1.16 donne une simulation num´erique du champ produit par une telle ouverture.

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Fig. 1.16: Simulation du champ produit par une ouverture sub-longueur

d’onde de 150 nm entour´ee de 20 sillons espac´es de 600 nm et de 300 nm de large. Les sillons font 300 nm de large. Image tir´ee de [91].

Un effet sym´etrique est observ´e si les sillons sont plac´es face au faisceau d’excitation. Dans ce cas, les sillons sont directement ´eclair´es par le faisceaux incidents. La condition d’accord de phase qui produisait un faisceau collimat´e en face de sortie se retrouve ici pour permettre un couplage important entre les modes dans les sillons et le champ guid´e `a travers la fente [36]. Une partie de la lumi`ere incidente `a cˆot´e du trou est donc redirig´ee `a l’int´erieur de celui-ci. On obtient alors une augmentation du champ transmis par l’ouverture.

La combinaison de cet effet de collection `a l’effet de collimation pr´ec´edent permet de r´ealiser des structures avec un fort taux de transmission et un champ modul´e spatialement dans la r´egion 3, comme illustr´e sur la figure 1.17.

C’est cet effet de collimation et la distribution spatiale d’intensit´e produite, qui nous ont attir´es vers l’´etude des ouvertures sub-longueur d’onde. En effet, on imagine ais´ement que le principe d´ecrit ici puisse se g´en´eraliser pour r´ealiser des distribution d’intensit´e plus “exotiques”, qui permettraient de guider ou pi´eger des atomes froids. Nous avons donc travaill´e sur ces ´el´ements en collaboration avec H. Lezec et T.W. Ebbesen. Nos travaux sont rapport´es dans les

chapitres 2 et 3, o`u nous reviendrons en d´etails sur leurs propri´et´es.

Cependant, pour pouvoir r´ealiser des motifs int´eressants pour l’optique atomique, il faut avoir une bonne connaissance des diff´erents proc´ed´es en jeu et de leurs importances relatives. En particulier, un point central dans les ph´enom`enes observ´es ici r´eside dans l’interm´ediaire du couplage entre les diff´erents motifs d’une ouverture d´ecor´ee, c’est-`a-dire le champ de surface. Pour ´etudier cette “interaction”, on s’oriente vers des g´eom´etries tr`es simples, que nous allons d´ecrire maintenant.

1.3.2 Doublets

Fentes d’Young

Une forme simple d’´el´ement optique permettant de v´erifier le comportement du champ de surface consiste en un doublet de fentes sub-longueur d’onde. Cette exp´erience a ´et´e r´ealis´ee par H.F. Schouten et al. [92], avec deux fentes de 200 nm × 50 µm espac´ees de quelques microm`etres, grav´ees sur un film d’or de 200 nm d´epos´e sur un substrat de quartz fondu. Entre la couche d’or et le verre est intercal´ee une couche d’adh´esion de titane de 10 nm.

1.3. Ouvertures d´ecor´ees 115

x

z faisceau

champ incident

Fig. 1.17: Effet de collection en face d’entr´ee et de collimation en face de

sortie d’une ouverture entour´ee de sillons espac´es p´eriodiquement

Contrairement `a la situation classique, on observe une modulation sinuso¨ıdale de l’intensit´e totale transmise en fonction de la longueur d’onde incidente. Selon les auteurs, cette augmen-tation est due aux interf´erences au niveau de chaque ouverture entre le champ homog`ene et le champ de surface produit par l’autre fente, comme illustr´e sur la figure 1.18.

A B

Quartz

Au Air

Fig. 1.18: Sch´ema de l’interf´erence sur l’une des fentes entre le champ

di-rectement transmis et le champ de surface produit par l’autre fente.

La longueur d’att´enuation d’un plasmon polariton de surface `a l’interface or/air est de l’ordre de 80 µm, mais de seulement 7µm pour l’interface titane/quartz. On peut donc ne consid´erer que les champs de surface `a l’interface or/air. La puissance totale transmise P s’´ecrit alors :

P = 2E12(λ)1 + β2(ksp) + 2β(ksp) cos(kspd + φ) (1.44)

o`u β est l’amplitude relative du plasmon polariton de surface et E1 l’amplitude du champ

´et´e analys´ee th´eoriquement par Ph. Lalanne et al. dans un article d´ej`a cit´e [61]. En s’appuyant sur le mod`ele que nous avons rappel´e au § 1.1.2 et de l’´equation 1.44 les auteurs reproduisent le comportement sinuso¨ıdal de l’intensit´e transmise par le doublet.

Doublets fente-sillon

Des ph´enom`enes comparables auront lieu si on r´ealise un doublet fente-sillon. Dans ce cas, on pourra observer en champ lointain les interf´erences entre le champ directement transmis par la fente et le champ issu du sillon, provenant de la diffraction du champ de surface. La rupture de sym´etrie par rapport au cas pr´ec´edent permet d’obtenir plus directement (en observant la modulation angulaire d’intensit´e) des informations sur le champ de surface. Ce type d’´el´ement est l’objet d’une partie importante de l’´etude rapport´ee ici, et sera d´etaill´e par la suite, dans le chapitre 4.

Avant de conclure ce chapitre, voyons bri`evement deux exemples parmi de nombreux autres, d’applications des ph´enom`enes d´ecrits jusqu’ici.