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Ouverture de la N-tosyl-aziridine (S)-135 par la (S)-méthylbenzylamine

Application des αααα -trifluorométhyl- αααα -alkoxy-aldéhydes : vers d’autres synthons trifluorométhylés polyfonctionnels

4.4 Synthèse et réactivité de 2-alkyl(aryl)-2-trifluorométhyl-aziridines

4.4.4.3 Ouverture de la N-tosyl-aziridine (S)-135 par la (S)-méthylbenzylamine

L’utilisation de la tri-butyl-phosphine en quantité substoechiométrique avec la benzylamine constitue des conditions réactionnelles intéressantes (cf. § 4.4.3.3). Elles ont de ce fait été appliquées à l’ouverture des N-tosyl-aziridines rac-135 et (S)-135 par une autre amine, la (S)-méthylbenzylamine, afin de confirmer la pureté optique de l’aziridine (S)-135, déterminée par HPLC sur colonne chirale (cf. § 4.4.4.1).

Dans le cas de l’aziridine racémique rac-135, la diamine chirale 147 est observée dans le brut réactionnel sous forme d’un mélange des deux diastéréoisomères (R,S) et (S,S) (δ -68,97 et -69,01 ppm, d’après la RMN 19F). Dans le cas de l’aziridine énantiopure (S)-135 (schéma 111), seul l’un de ces diastéréoisomères est observé dans le brut réactionnel (δ -68,96 ppm, d’après la RMN 19F). La diamine optiquement pure (S,S)-147 est cependant isolée avec un rendement moyen (52%).

NH

CF3 NHTs Ph N Ph

CF3 Ph

NH2 Ph

(S)-135 (S,S)-147

(2 x 2,0 éq.) P(n-Bu)3 (0,46 éq.) MeCN / reflux / 24h

r = 52%

Ts

Schéma 111

4.4.5 Conclusion

Les β-amino-trifluorométhylcarbinols (R)-118 et (R)-142 nous ont permis de préparer des aziridines trifluorométhylées optiquement pures non-activées (en une étape) et activées (en trois étapes). Des β-trifluorométhyl-β-amino-alcools ont pu être synthétisés par ouverture de la N-benzyl-aziridine par l’acide perchlorique aqueux, avec une très bonne régiosélectivité. La N-tosyl-N-benzyl-aziridine est quant à elle un bon précurseur pour accéder à des diamines α-trifluorométhylées α-substituées (schéma 112).

BnNH pourraient également être testés. Enfin, l’inversion de stéréochimie du carbone quaternaire lors de la cyclisation en aziridine reste à confirmer.

4.5 Conclusion

Les aldéhydes α-trifluorométhylés α-alkoxylés (R)-27 et (R)-57 obtenus par une synthèse diastéréosélective à partir du (L)-diméthyl-tartrate constituent des précurseurs de choix pour la préparation d’hétérocycles azotés substitués énantiopurs. Des amino-éthers ont d’abord été préparés à partir des aldéhydes par une réaction d’amination réductrice avec de bons rendements. Ces synthons ont ensuite été exploités comme précurseurs de N-hétérocycles.

Une première étude visant à synthétiser des 2-phényl-2-trifluorométhyl-morpholines non substituées en position 5 a montré que la présence du groupement trifluorométhyle modifie considérablement la réactivité chimique de ces composés. Nous avons rencontré de nombreux problèmes avec des réactions a priori classiques. Les effets additifs de l’encombrement et de l'effet attracteur du groupement CF3, désactivant la nucléophilie du carbinol, associé à l'aptitude de ce même groupement CF3 à contrarier l'approche du nucléophile sont probablement co-responsables des problèmes rencontrés.

Les amino-éthers allyliques ont donc été utilisés pour préparer des morpholines substituées en position 5, comme des méthyl-morpholines, des iodométhyl-morpholines ou des hydroxyméthyl-morpholines. Ces produits ont été synthétisés avec de bons rendements. Les deux diastéréoisomères des iodométhyl-morpholines sont facilement séparables et constituent des intermédiaires élaborés susceptibles de subir diverses transformations.

Des 2-trifluorométhyl-[1,4]oxazépanes ont été également obtenus avec des rendements moyens en exploitant une séquence hydrozirconation – iodolyse cyclisante de l’amino-éther précédent.

La déallylation des amino-éthers précédents conduit à des β-amino-trifluorométhylcarbinols.

Ces synthons intéressants ont été convertis en N-benzyl- et N-tosyl-aziridines énantiopures avec de très bons rendements. Ces dernières ont été soumises à des réactions d’ouverture nucléophile avec l’eau et la benzylamine pour conduire à des β-trifluorométhyl-β-amino-alcools et à des α,β-diamines chirales. Ces travaux sur les aziridines porteuses d’un carbone quaternaire trifluorométhylé n’en sont qu’à un stade préliminaire. L’accès au précurseur tosylamino-alcool pourrait encore être amélioré en partant d’un O-benzylcarbinol, ce qui permettrait probablement de déprotéger l’amine et l’alcool en une seule étape. Les quelques réactions d’ouverture réalisées mériteraient d’être optimisées, voire diversifiées. Enfin, la configuration du carbone asymétrique doit être confirmée.

CONCLUSION

La chimie organique du fluor a connu un essor considérable ces dernières années, du fait des nombreuses applications des produits organofluorés. Les méthodes d’introduction de fluor et notamment du groupement trifluorométhyle dans une molécule ont été particulièrement étudiées.

L’intérêt des composés trifluorométhylés, chiraux en particulier, comme intermédiaires de synthèse ou comme composés bioactifs justifie largement l’engouement qu’ont suscité les travaux sur la réaction de trifluorométhylation nucléophile (chapitre I).

Les travaux antérieurs du laboratoire sur les agroressources régionales et plus spécifiquement sur l’acide tartrique avaient montré la possibilité de synthétiser, à partir d’une seule molécule de celui-ci, deux synthons optiquement purs, un aldéhyde α-trifluorométhylé α-alkoxylé et un acide α- alkoxylé non fluoré. Cette méthode reposait sur la trifluorométhylation diastéréosélective de 1,4-dicétones dérivées de l’acide tartrique. Elle présentait néanmoins quelques limites : elle n’était pas applicable aux dicétones aliphatiques et passait par un intermédiaire de type « amide de Weinreb », difficilement exploitable à une échelle de plusieurs dizaines de grammes. L'un des principaux objectifs de cette thèse consistait donc à aménager la méthode pour la rendre à la fois plus pratique et plus générale.

Notre première étude a consisté à exploiter une voie de synthèse s'appuyant sur des γ-cétoamides dérivés d'acide tartrique (chapitre II). Leur structure a été optimisée, ainsi que les conditions de leur trifluorométhylation à l'aide de CF3TMS : (i) l’utilisation d’une fonction diméthylamide permet de pallier les inconvénients liés au coût et à la préparation des amides de Weinreb ; (ii) un dérivé di-O-isopropylidène s'avère plus performant que l'analogue benzylidène (meilleure diastéréosélectivité de la trifluorométhylation nucléophile, meilleurs rendements des étapes ultérieures) ; (iii) une trifluorométhylation dans le diméthylformamide, amorcée par le carbonate de potassium, donne le meilleur compromis efficacité/diastéréosélectivité, et le trifluorométhylcarbinol obtenu peut être alkylé en « one-pot ». L'intermédiaire trifluorométhylé est transformé en une étape en l'aldéhyde cible.

Cette méthodologie a été appliquée avec succès à une gamme de substrats aromatiques, hétéro-aromatique et aliphatiques, y compris sur une échelle « multigramme », et ce avec de bons rendements et diastéréosélectivités (schéma 113).

O

Afin de valoriser la fonction amide résiduelle du trifluorométhylcarbinol intermédiaire, diverses transformations fonctionnelles ont ensuite été envisagées (chapitre III). La conversion de l’amide en cétone, suivie de l’addition diastéréosélective de nucléophiles variés (hydrures, organomagnésiens, CF3TMS) a permis d’obtenir des alcools secondaires, tertiaires et des trifluorométhylcarbinols (schéma 114).

Dans le cas de la réduction par des hydrures, les alcools secondaires sont préparés avec des diastéréosélectivités et des rendements variables. Après protection sous forme de benzoate, ces composés sont soumis aux étapes de décétalisation et de coupure oxydante. Deux aldéhydes peuvent ainsi être obtenus, un aldéhyde trifluorométhylé et un aldéhyde non fluoré. Cette synthèse présente néanmoins des limites : seuls des groupements aliphatiques peuvent être réduits efficacement et le trifluorométhylcarbinol doit être protégé par une fonction allyle.

Des alcools tertiaires ont également pu être préparés par une addition hautement diastéréosélective d’organomagnésiens sur la cétone. Toutefois, l’impossibilité de protéger ceux-ci, du fait de la faible nucléophilie du groupement hydroxyle, ne nous a pas permis de mener la synthèse à son terme.

Enfin, l’introduction d’un second groupement CF3 nous a permis de synthétiser des bis(trifluorométhyl)carbinols. Cependant, d’importants problèmes ont été rencontrés lors de cette réaction. Des excès de réactifs doivent être utilisés et les produits s’avèrent difficiles à purifier. Cette étude n’a donc pas été poursuivie.

O

Les aldéhydes trifluorométhylés difonctionnels présentent un grand intérêt en synthèse. Ils constituent des précurseurs de choix pour la préparation de divers hétérocycles. Nous nous sommes

intéressés plus particulièrement à des N-hétérocycles, comme des morpholines, des oxazépanes et des aziridines (schéma 115 et chapitre IV). Ceux-ci sont obtenus via deux types d'intermédiaires clés : des O-allyl-α,β-amino-éthers et des α,β-amino-alcools. Ces synthèses ont été mises au point en série racémique puis appliquées à des substrats énantiopurs décrits précédemment.

R

Nous n'avons pas réussi à préparer des 2-phényl-2-trifluorométhyl-morpholines malgré les diverses voies envisagées pour construire le cycle morpholinique. La faible réactivité de la fonction hydroxyle du trifluorométhylcarbinol ou des problèmes de sélectivité lors de certaines réactions sont à l’origine de ces résultats négatifs.

En revanche, les amino-éthers allyliques permettent de préparer en une étape des analogues 5-substitués : des méthyl-morpholines et des iodométhyl-morpholines (via respectivement une aminomercuration et une iodocyclisation) et des oxazépanes (via une hydrozirconation suivie d'une iodolyse cyclisante). Les iodométhyl-morpholines ont ensuite été soumises à diverses transformations fonctionnelles pour conduire notamment à des hydroxyméthyl-morpholines. Ces transformations se font en général avec de bons rendements.

Des aziridines N-benzylées et N-tosylées ont enfin été synthétisées à partir des amino-alcools par des réactions de Mitsunobu. Elles ont été soumises à diverses conditions d’ouverture nucléophiles.

Les N-benzylaziridines, activées par un acide de Brönstedt (HClO4), sont ouvertes par l’eau avec une excellente régiosélectivité pour obtenir d’autres amino-alcools. En revanche, elles sont inertes vis-à-vis des amines. Les N-tosylaziridines réagissent bien avec la benzylamine dans des conditions d’activation acide ou nucléophile.

Certains de ces travaux méritent d'être approfondis. Des possibilités d'optimisation de certaines étapes ou séquences ont été signalées. Plus particulièrement, les résultats exposés dans le dernier chapitre révèlent la faisabilité de préparation de systèmes hétérocycliques azotés divers, énantiopurs, substitués par un trifluorométhyle quaternaire et comportant éventuellement une fonctionnalité complémentaire amino-alcool ou diamine. Ces composés peuvent constituer des building-blocks intéressants, y compris pour créer des chimiothèques par synthèse parallèle.