• Aucun résultat trouvé

1.3 Dynamique et températures à l’échelle de l’Europe

1.3.1 L’oscillation nord-atlantique (NAO)

1.3.1.1 NAO et températures européennes

À l’échelle du climat européen, le NAM/AO se réduit à sa partie « Atlantique Nord –

Europe » (North Atlantic – Europe, NAE), identifiée comme l’oscillation nord-atlantique

(North-Atlantic Oscillation, NAO) (e.g., Hurrell et al.,2003). À moins que ce ne soit l’inverse,

et que le mode NAO soit un mode très marqué du bassin Atlantique, au point de dominer la

variabilité de l’hémisphère entier ?. . . Nous n’entrerons pas dans ce débat qui agite la

commu-nauté scientifique depuis près de dix ans (e.g., Ambaum et al.,2001), et nous nous contenterons

donc de considérer que la NAO et le NAM/AO sont confondus sur l’Atlantique nord, région sur

laquelle nous utiliserons spécifiquement le terme NAO, tandis que nous parlerons du NAM/AO

pour désigner la structure zonale à l’échelle de l’hémisphère

25

.

La NAO coïncidant avec la signature hémisphérique du NAM/AO sur l’océan Atlantique

nord, elle se caractérise dans sa phase positive (négative) par les renforcements

(affaiblisse-ments) simultanés de l’Anticyclone des Açores et de la dépression d’Islande (structure NAE

de l’onde planétaire). Ainsi, en phase positive, la trajectoire du jet stream est repoussée vers

le nord, ce qui produit un réchauffement important de l’Europe, jusqu’en Scandinavie

(Fi-gure1.14). À l’inverse, en phase négative, lejet stream est à la fois affaibli et décalé vers le sud

1.3 Dynamique et températures à l’échelle de l’Europe

(a) NAO+ (b) NAO- (c) NAO pattern

(a) NAO+

Figure 1.14 – (a–b)Représentation schématique de la NAO et de son influence, pendant les

phases (a) positive et (b) négative. Crédits :Lamont-Doherty Earth Observatory. (c)Pattern de

pression dominant de la NAO, tel qu’utilisé par la NOAA (voir détails dans la section5.3.1).

(a–b)Schematic representations of NAO and its influence, during (a) positive and (b) negative

phases. Credits : Lamont-Doherty Earth Observatory. (c) Leading pressure pattern of the NAO,

as used by NOAA (see details in section5.3.1).

de l’Europe, ce qui se traduit par une influence polaire (froid et sec) sur le climat européen.

Précisons que la NAO peut être appréhendée à partir d’un indice similaire au SOI de l’ENSO,

qui se définit comme la différence normalisée des pressions atmosphériques de surface entre les

Açores (sud du bassin) et l’Islande (nord du bassin) (Jones et al.,1998; Osborn,2006).

Comme le suggère le très grand nombre d’études à son sujet (Hurrell, 1995; Kapala et al.,

1998; van Loon and Rogers,1978, parmi tant d’autres. . . ), la NAO constitue un acteur majeur

du climat européen, particulièrement pendant la saison d’hiver où les activités de la dynamique

sont les plus intenses. Ce n’est donc pas un hasard si nous la croiserons à de très nombreuses

reprises tout au long de cette thèse. En particulier, le désir de prévision du climat européen

que nous évoquions dans la section 1.1.5 nous pousse dès maintenant à étudier un potentiel

déterminisme de la NAO.

1.3.1.2 La NAO peut-elle se prévoir à l’échéance saisonnière ?

Si les modes NAO et NAM/AO sont d’origine ondulatoire, et liés aux perturbations «

chao-tiques » de la dynamique extra-tropicale, la question d’un éventuel forçage extérieur se pose.

En premier lieu, la NAO peut-elle, à l’image de l’ENSO, être forcée par les SST de l’océan

Atlantique ? Nous ouvrons la porte d’un vaste débat (e.g., Doblas-Reyes et al., 2003). Si la

signature d’une influence de l’océan Atlantique nord sur la NAO paraît difficile à extraire des

fluctuations chaotiques des échelles intra-saisonnière à inter-annuelle (e.g., van Oldenborgh,

2005), certains travaux ont suggéré un impact à plus basse fréquence, lié à une oscillation à

∼60 ans des SST atlantiques définie comme l’Atlantic Multidecadal Oscillation (AMO) (Kerr,

2000). L’influence de l’AMO sur le récent réchauffement européen sera ainsi discutée lors du

chapitre3 de cette thèse.

À l’échelle saisonnière, le forçage de la NAO par l’océan Atlantique tropical est en revanche

mieux établi (e.g., Cassou, 2001, pour une revue détaillée). Une anomalie chaude de SST

atlantique tropicale intensifie en effet la cellule de Hadley locale, ce qui peut déclencher une onde

de Rossby extra-tropicale venant affaiblir l’Anticyclone des Açores, favorisant ainsi une phase

négative de la NAO (voir aussi Czaja and Frankignoul,2002; Mathieu et al.,2004). Cependant

cette association est loin d’être systématique, et a fortiori insuffisante pour permettre une

prévision de la NAO (Doblas-Reyes et al.,2003; van Oldenborgh,2005).

Enfin, un forçage de l’ENSO sur la NAO apparaît encore plus complexe puisqu’il serait

contraint, avant d’atteindre la région NAE, de passer soit par l’Atlantique tropical via les

circulations de Walker (hypothèse évoquée par Klein et al., 1999), soit par le Pacifique nord

via les circulations de Hadley (voir Fraedrich,1994). La seconde hypothèse fait ainsi intervenir

la télé-connexion tropique – extra-tropique entre l’ENSO et le mode dominant de la variabilité

du Pacifique nord, connu sous le nom dePacific – North American mode (PNA) (Wallace and

Gutzler,1981, pour une revue détaillée). Ce mode né de la dynamique ondulatoire synoptique

(et non planétaire comme la NAO) se caractérise dans sa phase positive (négative) par une

baisse (hausse) des pressions atmosphériques sur la Floride et le Pacifique nord, et une hausse

(baisse) sur le Canada et le Pacifique sub-tropical (Figure 1.15). Si le forçage de la PNA

par l’ENSO est décelable dans des corrélations d’indices d’observations, et, par conséquent,

communément établi (Bjerknes, 1969; Horel and Wallace, 1981, parmi d’autres), l’éventuelle

propagation des phases de la PNA vers la NAO via le jet stream apparaît non systématique,

car largement modulée par la variabilité interne de la dynamique.

(a) PNA+ (b) PNA- (c) PNA pattern

Figure 1.15 – (a–b) Représentation schématique des phases (a) positive et (b) négative de la

PNA. Crédits :La Climatologie.(c)Pattern de pression dominant de la PNA, tel qu’utilisé par la

NOAA (voir détails dans la section 5.3.2).

(a–b) Schematic representations (a) positive and (b) negative phases of the PNA. Credits : La

Climatologie. (c) Leading pressure pattern of the PNA, as used by NOAA (see details in

sec-tion5.3.2).

La NAO apparaît ainsi particulièrement non-déterministe, et sa prévisibilité saisonnière à

partir des conditions océaniques de surface semble relever du domaine de l’impossible (voir

aussi Kushnir et al., 2006). Si certaines configurations peuvent favoriser l’une de ses phases,

l’association n’est absolument pas systématique, puisque noyée dans la variabilité interne de

la dynamique atmosphérique nord-atlantique et ses fluctuations chaotiques. Notons néanmoins

qu’un nombre croissant d’études tendent à mettre en évidence un forçage de la NAO hivernale

par certaines conditions de surface des hautes latitudes de l’hémisphère nord, en particulier

d’enneigement en Eurasie (e.g., Cohen et al., 2007) et d’étendue de glace de mer en Arctique

(e.g., Francis et al., 2009). Ces éléments seront discutés plus en détail dans le chapitre 5 à

partir de l’exemple de l’hiver 2009/10, où nous verrons qu’une association de plusieurs facteurs

peut conduire la NAO à une configuration exceptionnelle.

1.3 Dynamique et températures à l’échelle de l’Europe