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L'ordre européen et les nations sans État: vers une autre souveraineté?

Antonello Nasone

L'histoire de l'Europe est une séquence continue de tentatives de réaliser l'unité face à une multiplicité évidente de peuples et de communautés. À l'ère du cré-puscule de l'État, cette forme politique, dans la configuration actuelle de l'Union européenne, joue toujours un rôle important, mais il y a une différence substan-tielle par rapport au passé: la souveraineté en tant qu'attribut de l'État est struc-turée en fonction des paramètres dictés par l'élément commun qu'est la monnaie commune. Lié aux exigences du nomos de la monnaie et inspiré du paradigme néo-libéral, l’ordre européen, tout en promouvant l’expansion des droits indivi-duels, rejette fermement les revendications des communautés non étatiques.

Dans le même temps, les propositions d’autodétermination reposent sur une idée de souveraineté toujours liée au concept d’État, privant souvent les nations sans État d'une vision globale du problème européen. Penser à une souveraine-té qui dépasse l'État est l'occasion de construire un nouvel ordre de coexistence.

Europe : l’idée qui doit se faire ordre

Lorsque Habermas a publié en 2003 dans les pages de la Frankfurter Allge-meine Zeitung le manifeste, signé par Jacques Derrida, intitulé Nach dem Krieg1, la Chine avait rejoint l'Organisation mondiale du commerce deux ans plus tôt, la Russie commençait à réintégrer le rang des grandes puissances, l'euro n'était devenu une monnaie unique que depuis un an et les États-Unis s'apprêtaient à combattre Saddam Hussein lors de la seconde guerre du Golfe.

Le philosophe allemand a vu dans les manifestations qui animèrent les grandes places européennes contre les opérations de guerre préparées par les Améri-cains en Irak « le signal de la naissance d'un espace public » ; et il pensait que ces manifestations laisseraient une marque dans les livres d'histoire.

Seize ans plus tard, nous pouvons dire que ces paroles de Habermas n'étaient pas très prédictives.

1 Le texte, publié en français par "Libération", est intitulé Plaidoyer pour une politique extérieure commune.

Il avait appelé à la naissance d'une nouvelle conscience européenne qui, tra-duite politiquement, imprégnerait les institutions européennes censées s'opposer à l'hégémonie américaine, que le monde entier craignait alors comme la seule superpuissance mondiale.

Aujourd'hui, nous examinons cet écrit avec sympathie, le réduisant à un "livre de songes".

Cependant, il y a un passage qui suscite toujours notre intérêt. Partant du point de vue des non-Européens qui « donnent à l'Europe, dans son incomparable et son ample multiplicité culturelle, son visage d’aujourd’hui », Habermas disait que la sagesse de l’Europe se trouve « dans la reconnaissance des différences, la reconnaissance mutuelle de l'autre dans son altérité [qui] peut aussi devenir la marque d'une identité commune ».

Par conséquent, la question de l'Europe est la question de la possibilité d'une unité réelle et de ses relations face à une multiplicité claire.

Possibilité de construire une unité réelle, car l’Europe est avant tout une unité idéale, une idée en tension continue avec une pluralité empirique, qui est conti-nuellement attirée par cette idée en tant qu’aimant.

L'histoire de l'Europe est donc une suite continue de tentatives pour concrétiser cette idée. Idée qui doit devenir ordre.

Nous vivons au crépuscule d'un ordre, nous en voyons la fin mais nous ne sa-vons toujours pas ce que l'avenir nous réserve. Nous ne pousa-vons pas com-prendre ce qui est sur le point de se produire… mais nous voyons probablement des signes.

Nous assistons donc aujourd'hui au déclin de l'ordre des États. Nous assistons à la tombée de la nuit, parce que l’État est ce qui garantit la vie civile et la sécurité des populations qui y vivent, l'État étant ce qui – dans sa phase de maturité – nous a donné ces certitudes from the cradle to the grave.

La parabole de l'État moderne

L'Europe recouverte d'un candidam ecclesiarum vestem, éparpillée dans une immensité de principautés, de royaumes, de duchés, de juges, était une étendue organisée selon une prudence typique des médiévaux: protéger chaque com-munauté spécifique de la contrainte d'une universalité indiscrète, du rôle pos-sible de débiteur de participation. La croyance au Dieu trinitaire était en fait un tenseur extraordinaire sur lequel l'écoumène gravitait: ouvert en même temps au

pluralisme juridique, il se faisait sens politique en combattant les hérésies et en pratiquant les excommunications, car la plus grande crainte était celle d'un écra-sement de l'ekklesia, une particularité que l'étrange dualisme qui a ordonné cette communitas «théo-anarchiste» a pu éviter. La respublica christiana est une con-figuration politique que nous avons du mal à comprendre dans ses articulations, qui nous est étrangère puisqu'elle est structurée sur des figures de haut niveau déployées dans un dualisme des pouvoirs, du monde et du spirituel, tous deux accordés autour de la fréquence du Dieu trinitaire.

La manifestation du pouvoir dans le monde complexe de cette respublica mé-diévale nous montre une potestas qui se décline comme non absolue, perpétuel-lement assiégée par l’auctoritas du pouvoir spirituel.

Le profil atypique de cet édifice, dans les figures du pape et de l'empereur, tous deux sous l'égide du Dieu trinitaire, se représentait les formes du pouvoir su-prême comme marquées par un sort de divinité. C'est ce que Kantorowicz a mis en évidence avec la théorie des «deux corps du roi», une royauté qui a su sépa-rer l'immortalité de la condition royale de la mortalité de l'interprète qui y avait été investi. Cette précaution conduisit à la dissociation, pour éviter toute confu-sion entre la figure du roi et celle du tyran. Contre ce dernier – l'Hérodien, l'usur-pateur qui abuse de l'onction royale pour la soif de domination sur les choses et les hommes –, l'Église a promu et légitimé le tyrannicide, comme un droit légal à la résistance. Une royauté pensée comme divine au moyen de la foi – le seul lien, la seule identité qui pouvait être exposée et certifiée – établissait principa-lement deux choses: la peur récurrente des trônes de l'excommunication – une arme pire que la guerre, car elle privait les excommuniés de leur identité de croyants et les mettait hors de communication avec le reste de l'ekklesia – et une relation avec la communauté qui n'a pas fait les choses d’ici-bas, les entités, le monde comme une unité d'entités, la seule opportunité de sens. En fait, cet ordre, structuré selon des paramètres incompréhensibles aux catégories de la modernité, a censuré l'action politique dans ses revendications de domination et d'expansion débridée, comme une suggestion diabolique pour opérer une prise totale sur la réalité.

Cette communauté en équilibre précaire entre le monde et l’au-delà du monde s'est brisée lorsque la souveraineté moderne s'est moquée de ce qui soutenait ce dualisme des pouvoirs: l'absurdité d'un pouvoir temporel qui devait se conver-tir perpétuellement au spirituel, temporalité réglée sur la foi en un Dieu fait chair.

Le souverain de la modernité s'est non seulement libéré de toutes les chaînes de nature spirituelle, mais a également rompu avec plusieurs précautions qui gouvernaient la politique médiévale. Le souverain moderne doit organiser ce qui, pour lui, forme des singularités contradictoires, les différentes particularités qui

menacent la securitas, dans un réceptacle commun dans lequel elles seront absorbées comme dans un vortex par la force gravitationnelle de l'unité. Opère une logique qui présente l'unité et la multiplicité au nom de la navette "Un-Plusieurs", dans une relation d'identité et de différence, où l'universel trouve sa place comme genre commun.

Les médiévaux de la respublica christiana avaient donné, à ce qui devint plus tard un centre axial de la modernité (la relation unité-multiplicité), une solution qui dénotait plus que de la prudence: il était de leur intérêt de protéger chaque communauté spécifique de la contrainte d'une universalité indifférenciée – donc du rôle éventuel de débiteur de la participation à celui-ci. L'unité conçue à l’époque médiévale a montré une certaine impatience envers ce type de relation dans laquelle la même unité s’incarne en multiplicité alors que celle-ci, à son tour, est réunie dans la même unité. La remise en cause de ce modèle à partir du XIIIe siècle, dans cette phase crépusculaire de la civilisation médiévale, coïncide juridiquement avec la montée de la formule superiorem non reco-gnoscens, et philosophiquement avec la montée imparable de l'individualité moderne: la notion de sujet, auto-position, institution de soi, se donner sa propre loi, autòs nòmos, autonomie. Les notions d'autonomie et d'État commenceront à se resserrer en un nœud indissoluble au sein d'une logique qui a ses fonde-ments dans les développefonde-ments de la subjectivité moderne. La naissance de la forme politique qui a connu son affirmation la plus complète et dominante durant la modernité, l'État, cette formidable et grandiose créature de la pensée euro-péenne, est née des cendres de la respublica christiana, émiettée sous la pous-sée des classes marchandes – de la bourgeoisie naissante – qui aspiraient à gérer l'espace en dehors des précautions médiévales, et après la fracture de la foi chrétienne, qui a transformé l'Europe en un champ de bataille sanglant.

Le but de l’État était d’organiser la coexistence civile et d’assurer sa vitalité contre les dangers d’une mort violente à l’ère des conflits religieux. L'État mo-derne tire donc son origine de la capitalisation de la peur de la mort. En exploi-tant la peur de la mort, il assure la survie de l'homme au nom de l'obéissance inconditionnelle. Assurer son existence de la peur de la mort violente signifie accepter l'obéissance de l'État. Protego ergo obligo, entre protéger et obliger à obéir, il y a un lien essentiel.

Mais ces systèmes juridiques, nés de la mutual relation between protection and obedience, n'auraient pu vivre sans le souffle vital qui anime cette énorme ma-chine. La forme qui encadre la multiplicité, le lien d'une multitude ne sont plus dispersés ni confondus – l'âme de l'État est l'élément politique: la souveraineté.

La souveraineté d'un État ne peut pas être divisée, la souveraineté ne peut pas

supporter qu'il existe au sein de l'État des principes d'autres principes d’ordre.

Comme Bodin l’a dit, il s'agit de: "puissance absolue et perpétuelle".

Cette identification moderne totale entre État et souveraineté affirme deux prin-cipes fondamentaux :

1. La souveraineté moderne au sein d'un État ne peut pas inclure le plura-lisme juridique qui commande des situations particulières (villes, pays, communautés), mais doit subordonner la pluralité elle-même en se réfé-rant à un dénominateur commun, ou à l'idéologie de son centre régnant.

2. Elle doit supprimer tout régime particulier, neutraliser toute dissonance politique, tout le polemos susceptible de miner son pouvoir de l'intérieur et lui faire concurrence.

Le sardisme: une doctrine d'une nation sans État pour une nouvelle Eu-rope

Santi Romano – le père de la réhabilitation du pluralisme juridique en Italie – écrivait en 1909 que l'État moderne était entré en crise. Il était convaincu que l'ordre juridique fondé sur la "neutralisation du politique" était en train de se dé-grader du fait de la résurgence d'instances politiques et polémiques mettant en cause l'architecture de l'État2.

La dernière réponse que l’État moderne a pu apporter a été l’homogénéisation de son espace territorial sur une base ethnique: l’État-nation. Mais cette dernière variante n’est qu’un développement du projet initial de l’État: les particularités juridiques, les systèmes normatifs – fondés sur les mœurs – qui régissent la cohabitation civile des communautés qui habitent un territoire déterminé doivent être annulés car ils contrastent avec la loi unique qui doit s'appliquer sur le terri-toire de l'État.

Ce n'est pas un hasard si les revendications des nations sans État émergent après la Première Guerre mondiale.

2 Extrait du discours inaugural de l'année académique 1909-10 à la Regia Università de Pise: “La crisi dello Stato attuale si può ritenere che sia caratterizzata dalla convergenza di questi due fenomeni, l’uno dei quali aggrava necessariamente l’altro: il progressivo organizzarsi sulla base di particolari interessi della società che va sempre più perdendo il suo carattere atomistico, e la deficienza dei mezzi giuridici e istituzionali, che la società medesima possiede per fare rispecchiare e valere la sua struttura in seno a quella dello Stato”, Santi Romano, Lo Stato moderno e la sua crisi, Milano, Giuffré, 1969, p. 23.

Ils apparaissent sur la scène politique lorsque le cycle de Jus Publicum Euro-paeum est définitivement consommé. Et il est consommé pour au moins trois raisons principales: la crise de l’État-pouvoir en Europe qui a déclenché la Pre-mière Guerre mondiale; la montée des puissances non européennes (le ving-tième siècle sera appelé à juste titre le "siècle américain"); l'entrée des masses dans la vie publique qui oblige l'État à revoir sa structure.

Parmi les exigences de subjectivité politique dans les nations sans État, il semble nécessaire de rappeler une théorie politique telle que le sardisme, cou-rant culturel et politique né des vétérans et des combattants sardes de la Pre-mière Guerre mondiale.

Le sardisme était un cas rare d'idéologie politique qui ne se limitait pas à être une doctrine de revendication nationale, mais qui a considéré la dimension eu-ropéenne comme capable de le libérer des limites étroites de toute doctrine politique nationaliste.

Le sardisme a ressenti avec une intensité particulière la résurgence des exemples de reconnaissance des petits pays, des communautés asphyxiées par le talon des grandes puissances européennes; mais il n’a jamais manqué de lui donner une perspective européenne: la reconnaissance des nations sans État devait conduire à une reformulation des États au sens fédéral.

En Sardaigne, les thèmes de l'autonomie et du fédéralisme ne naissent pas avec le sardisme, mais existent de longue date ; en effet le sardisme, depuis sa création, a été considéré comme l'héritier des plus hauts moments de cons-cience politique de l'histoire de la Sardaigne.

La nature politico-juridique de la "nation sarde" a fait l'objet des dernières ré-flexions de Giovanni Maria Angioy3, le représentant le plus prestigieux de la

3 Giovanni Maria Angioy est né à Bono, dans le centre-nord de la Sardaigne, en 1751.

Formé dans l'environnement réformateur inauguré par le vice-roi Gian Lorenzo Bogino, il a occupé le poste de magistrat de la Reale Udienza, la cour suprême du Royaume de Sardaigne, qui après le Traité de Londres (1720) était passée aux Savoie. Après la tenta-tive infructueuse d'envahir l'île par la France révolutionnaire, en Sardaigne, sur la vague de la victoire, deux tendances politiques se sont formées: une modérée espérait un pro-cessus de réforme qui conduirait progressivement au remplacement de la classe diri-geante piémontaise par la classe sarde; l'autre plus radicale, se battait pour une révolution politico-sociale basée sur l'abolition du féodalisme. Angioy est placé à la tête de cette dernière et, de Sassari, avant-poste du mouvement antiféodal, il a marché vers Cagliari avec ses partisans. En juin 1796, les troupes du vice-roi le rencontrent, dispersant la suite d'Angioy, qui, avec ses fidèles partisans, se réfugie en France où il rédige un Mémorial pour convaincre le Directoire de soutenir l'insurrection. Il a vécu en exil jusqu'à sa mort en 1808. Sur la figure de Giovanni Maria Angioy voir: R. De Felice, Dizionario biografico degli italiani, vol. III, Roma, Istituto dell’Enciclopedia italiana, 1961, pp. 273-275. Parmi les

Sarda Rivoluzione, ou des mouvements politiques qui se sont produits en Sar-daigne à la fin du XVIIIe siècle et qui avaient pour origine la défense de l'île par ses habitants lors d’une tentative d’invasion de la France révolutionnaire dans les premiers mois de 1793. Exilé à Paris, en 1802, se souvenant des événe-ments malheureux du passé proche, Angioy a rédigé d’importants écrits – en français – sur le «droit patrie» de la Sardaigne. Nous en avons un rappel, un plan de travail. Ces écrits ont également l'avantage de clarifier les articles syn-thétiques qui composent le manifeste théorico-politique du mouvement révolu-tionnaire antiféodal qui a remué les terres sardes de cette période: l'Achille della Sarda Liberazione. Dans ce manifeste – dont l'auteur probable était Michele Obino, professeur à l'Université de Sassari – il y a des influences nettes issues de la Déclaration d'indépendance des États-Unis et de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, notamment dans les parties concernant les droits des peuples et dans celles où il est consacré que le principe de souverai-neté, tel qu'énoncé à l'art. 3 de la Déclaration française, réside dans la nation.

Mais au-delà de l'adhésion ou non aux formules du droit naturel moderne et du constitutionnalisme – qui indiquent que le milieu intellectuel sarde était inclus dans le débat culturel de l'époque – ce qui est intéressant dans ce «programme d'une œuvre jamais écrite» d'Angioy est la croyance que la souveraineté, en tant qu'expression politique d'un peuple, d'une nation, peut organiser des formes de

« contrat » en conférant, par exemple, l'exercice du gouvernement à un mo-narque, mais sans diluer le pouvoir avec cette attribution souveraine, puisqu'en tant que manifestation des "droits sacrés et incontestables des peuples", il est garanti par le droit de résiliation ou par le droit de résistance si le contractant ne respecte pas les clauses. Selon Angioy, il est possible de voir comment la sou-veraineté populaire, qui exprime l'autonomie naturelle de la nation, a donc un caractère original.

Dans les écrits de Giovanni Battista Tuveri, le thème de la souveraineté popu-laire rejoint celui du fédéralisme4. Mais le contexte dans lequel opère ce

études les plus récentes sur les mouvements de la fin des années 1700 en Sardaigne: La Sardegna e la rivoluzione Francese, Sassari, CLS, 1990; A. Mattone, P. Sanna, Settecento sardo e cultura europea: lumi, società, istituzioni nella crisi dell'Antico Regime, Milano, Franco Angeli, 2007.

4 L'écrit le plus important est Del dritto alla distruzione dei cattivi governi, publié en 1851.

Sur la pensée de Tuveri, voir l'essai d'introduction sur le travail de Norberto Bobbio: G. B.

Tuveri nel primo centenario della morte, Sassari, Carlo Delfino, 1990, pp. 11-29. Entre 1871 et 1872 dans le journal "Corriere di Sardegna" Tuveri a écrit plusieurs articles sur la Suisse: La Confederazione elvetica; La riforma della Costituzione elvetica; Riforma federale in Svizzera; L’ordinamento militare svizzero; L’ospitalità svizzera (La

sophe et homme politique sarde du XIXe siècle a considérablement changé par rapport à l'époque d'Angioy: après la décision des classes dirigeantes de l'île en 1848 de se conformer aux lois des autres États appartenant à la monarchie savoyarde (Piémont, Ligurie, Savoie) , le Regnum Sardiniae a perdu à jamais son autonomie et les prérogatives royales séculaires pour revenir au rang de simple province. Le point de référence de Tuveri est la Confédération suisse car il voit dans le lien qui maintient les cantons dans une "dépendance sociale, libre et mutuelle" ce qui, paradoxalement, peut garantir une véritable autonomie à une communauté libre. Dans la pensée de Tuveri, en effet, la question de l'indé-pendance ne peut être dissociée de celle de la liberté: la conjonction de ces deux termes doit en effet toujours être inspirée par un principe souverain qui ne se termine pas par l'exclusivité de la caste en tant que sujet de décision politique

sophe et homme politique sarde du XIXe siècle a considérablement changé par rapport à l'époque d'Angioy: après la décision des classes dirigeantes de l'île en 1848 de se conformer aux lois des autres États appartenant à la monarchie savoyarde (Piémont, Ligurie, Savoie) , le Regnum Sardiniae a perdu à jamais son autonomie et les prérogatives royales séculaires pour revenir au rang de simple province. Le point de référence de Tuveri est la Confédération suisse car il voit dans le lien qui maintient les cantons dans une "dépendance sociale, libre et mutuelle" ce qui, paradoxalement, peut garantir une véritable autonomie à une communauté libre. Dans la pensée de Tuveri, en effet, la question de l'indé-pendance ne peut être dissociée de celle de la liberté: la conjonction de ces deux termes doit en effet toujours être inspirée par un principe souverain qui ne se termine pas par l'exclusivité de la caste en tant que sujet de décision politique