• Aucun résultat trouvé

1) Particularités des oiseaux marins

Les oiseaux marins sont dépendants de l’océan pour se procurer leur nourri- ture (Ballance, Pitman & Reilly 1997). De ce fait, la plupart des oiseaux de mer passent 90% de leur vie en mer (Balance 2007).

Le cycle de vie annuel des oiseaux marins est régit par trois étapes majeures exigeant des ressources énergétiques importantes : ils doivent se reproduire, muer et migrer (King 1974).

Pendant la reproduction, les oiseaux marins doivent partager leur temps entre la recherche alimentaire en mer et les séjours à terre, pour incuber ou nourrir leurs poussins. Les deux membres du couple sont intimement impliqués dans cette phase. Le fait de devoir retourner à terre pour la reproduction est une contrainte écologique forte qui conditionne les traits d’histoire de vie des oiseaux que l’on qualifie pour cela de « central place foragers » (Orians & Pearson 1979). Cette contrainte oblige en effet les oiseaux marins à rayonner dans un périmètre limité autour de leur colonie pendant la période de reproduction (Weimerskirch 2007; Green et al. 2009). La distance à parcourir depuis le nid varie donc de quelques centaines de mètres (pour des oiseaux essentiellement côtiers, par exemple les Sternes huppées (Thalasseus bergii) , Giuliano et Guinea 2015) à plusieurs milliers de kilomètres (par exemple les Pétrels de Barau (Pterodroma baraui) , Pinet et al. 2012) chez les oiseaux les plus pélagiques.

Les trajets les plus longs ont généralement lieu pendant l'incubation. Ils peuvent alors durer plusieurs jours, voire plusieurs semaines et pendant qu'un adulte est en mer, son partenaire reste au nid pour l'incubation et jeûne. Les contraintes énergétiques associées à la reproduction influencent largement les variations saisonnières de la distribution spatiale des oiseaux marins. Pendant la période de reproduction, de nombreuses espèces réduisent leur répartition, en particulier pendant l’élevage car ils doivent revenir régulièremen au nid pour nourrir le ou les poussins (Weimerskirch 2007; Green et al. 2009). C'est également pendant la reproduction que les scientifiques peuvent facilement observer, capturer, marquer et équiper de matériel de tracking les oiseaux

marins, d'où l'existance de jeux de données très importants sur ces espèces.

La fin de la période de reproduction est marquée par le départ en migration postnuptiale (figure 1.12). Cette période est essentielle pour l’animal, car elle lui permet de restaurer sa condition corporelle fortement altérée par les coûts de l’effort parental. La mue est également une étape décisive et énergétiquement impactante pour les oiseaux. En effet, ceux-ci doivent remplacer régulièrement leur plumage du fait de l’usure des plumes pour le maintien de leur isolation thermique, leur perméabilité et la maintenance d’une bonne voilure. Ils renouvellent ainsi régulièrement une partie ou l’ensemble de leur plumage.

De plus, les oiseaux marins sont par ailleurs étroitement liés aux poissons d’intérêt commercial (Jaquemet et al. 2004). En effet, ils recherchent le même type de processus océanographiques (upwelling, monts sous-marins, zones de gradients thermiques, fronts, tourbillons,…) qui concentrent leurs proies (Kai et al. 2009). Les oiseaux marins sont souvent associés aux thons de surface, car

ceux-ci poussent vers la surface des bancs de proies qui deviennent accessibles aux oiseaux marins (Jaquemet et al. 2004, Jaquemet et al. 2005). Les pêcheurs de thons, qu’ils soient artisanaux ou industriels, connaissent très bien ces asso- ciations et recherchent les groupes d’oiseaux pour localiser les bancs de thons, à la surface des océans. Les grands senneurs industriels qui opèrent, par exemple en zone tropicale, sont même équipés de radars à oiseaux superpuissants, afin de localiser in fine, les bancs de thons (Marsac pers. Com.). L’étude à long terme des oiseaux marins permet donc, indirectement d’apporter des informations sur l’état des stocks halieutiques, sur leur évolution dans le temps et sur leur distri- bution dans l’espace (Furness & Camphuysen, 1997). Les oiseaux marins peu- vent de ce fait être considérés comme des bio-indicateurs des ressources halieu- tiques pélagiques, en particulier en zone tropicale (Le Corre & Jaquemet 2005). Pour ces raisons, ils ont longtemps été utilisés comme organismes modèles pour fournir des renseignements importants sur l'environnement hauturier.

2) Oiseaux marins et menaces en mer

Croxall et al. (2012) ont constatéque les oiseaux marins sont plus menacés que d'autres groupes d'oiseaux et leur statut a été détérioré plus rapidement au cours des dernières décennies.

En mer, l’une des menaces est la compétition pour les ressources avec la pê- che industrielle (par exemple Pauly et al., 2005 ; Trebilco et al , 2010 ; Zydelis et al., 2011). En effet, plus de la moitié des extinctions locales ont effectivement été attribuées à l’exploitation des stocks de poissons (Dulvy et al., 2003), qui a aussi pour conséquence la simplification des réseaux trophiques marins entrai- nant un déséquilibre écologique (Pauly et al., 2002). Les prises accessoires (by- catch) sont également responsables du déclin de nombreuses espèces comme le grand albatros ou encore le pétrel à menton blanc (Lewison et al. 2004). L’autre menace est l'impact de la pollution par les hydrocarbures sur les oiseaux marins.

Celle-ci a été largement documenté et la plupart des études ont montré que les déversements de pétrole produisent invariablement une mortalité massive d'oi- seaux marin (par exemple Votier et al, 2008 ; Munilla et al , 2011) . Ensuite, la pollution plastique avec des concentrations qui peuvent atteindre jusqu'à 580.000 pièces par km2. Les oiseaux marins sont particulièrement vulnérables à ce type de pollution, de nombreuses observations ont mises en évidence cette ingestion de plastique flottant (Wilcox et al. 2015).

Les travaux examinant les effets des changements climatiques (passés ou fu- turs) sur les oiseaux marins sont de plus en plus présents dans la littérature scientifiques (Oro, 2014). D’après Parmesan (2006), l’impact de ces change- ments sur les oiseaux marins peut être d’ordre phénologique, démographique et en termes de distribution (tableau 1.2).

Documents relatifs