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3.3 Scenarii de création de la poussière exozodiacale . . . . 51

3.3.1 Approvisionnement du disque en poussière . . . 51 3.3.2 Piégeage de la poussière à proximité de l’étoile . . . 55

Dans ce chapitre, je commence par résumer brièvement les récentes découvertes en matière d’exozodis puis je détaille un code numérique permettant de simuler le transfert radiatif au sein d’un disque de poussière. Enfin, j’expose les différents scénarii possibles pour expliquer la présence de poussière chaude à tiède autour d’étoiles en séquence principale.

3.1

Observations, détections et analyse statistique

Dès le début des années 2000, la recherche et la détection des exozodis chauds (in- frarouge proche) prend de l’ampleur (Absil & Mawet, 2010). La première tentative de détection d’un disque chaud fut effectuée par Ciardi et al. (2001) sur l’étoile Véga au PTI (instrument situé au Palomar Observatory). Malheureusement, l’absence de bases inter- férométriques courtes et la précision limitée n’ont pas permis d’obtenir une confirmation de la présence de poussière chaude. En interférométrie classique, la présence d’un disque chaud autour d’une étoile va induire une diminution de la visibilité par rapport à la vi- sibilité attendue pour la photosphère stellaire. En effet, en vertu des principes introduits à la Section 2.3, la visibilité des franges d’interférence est égale à 1 lorsque la source est non résolue, ce qui est en général vrai pour les étoiles considérées comme des sources ponctuelles. Par contre, un disque est un objet beaucoup plus étendu qu’une étoile et dans ce cas peut être partiellement, ou totalement, résolu, ce qui induit une baisse dans la courbe de visibilité. Le déficit de visibilité observé par rapport à la courbe attendue

Figure 3.1 –Représentation de la courbe de visibilité en fonction de la base interférométrique. Le modèle en petits pointillés est celui du disque seul. Le modèle en pointillés épais est celui de l’étoile+disque dans une configuration réelle. Le modèle en trait plein noir est celui étoile+disque simplifié et enfin le modèle bleu est celui de l’étoile seule. En observant le trait plein noir nous remarquons la baisse de visibilité liée à la présence d’un disque autour de l’étoile (Ertel et al., 2014).

pour un disque uniforme peut alors être relié au rapport de flux entre l’étoile et le disque (voir Fig. 3.1, Ertel et al. (2014)) :

V2 ≈ (1 − 2f ) × 2J1(πBθ/λ)

πBθ/λ !2

, (3.1)

où le facteur f représente le rapport de flux entre le disque et l’étoile.

Di Folco et al. (2004) considèrent des observations VLTI/VINCI et n’obtiennent que des limites supérieures sur l’excès infrarouge, encore une fois à cause de bases interféro- métriques inapropriées. Absil et al. (2006b) révèlent quant à eux la présence d’un disque interne autour de Véga (étoile de type A) grâce à des données obtenues au télescope CHARA avec l’instrument FLUOR. Grâce à ces observations réalisées à la fois sur une grande base (∼ 150m) et sur une courte base (∼ 30m), ils parviennent à observer un déficit de visibilité de ∆V2 = 1.88±0.34% significatif par rapport à un modèle de disque uniforme

pour l’étoile en bande K (et en considérant un diamètre angulaire θUD = 3.202 ± 0.005

mas). Ce déficit de visibilité équivaut à un excès de 1.29 ± 0.19% et constitue le premier excès résolu relatif à de la poussière chaude détectée. Après cette découverte, d’autres études menées avec CHARA/FLUOR ont permis de détecter des excès en infrarouge proche autour d’autres étoiles de type A (ς Aql et β Leo) et autour d’une étoile de type G (τ Cet) (di Folco et al., 2007; Absil et al., 2008; Akeson et al., 2009). Dans la foulée, Absil et al. (2009) ré-analysent des données de Fomalhaut prises avec VLTI/VINCI et détectent un excès de 1% en bande K. La Table 3.1 reprend les différents instruments qui ont étudié des exozodis (Kral et al., 2017a).

Table 3.1 –Liste des interféromètres travaillant en infrarouge proche et moyen et utilisés pour la détection d’exozodis (Table tirée de Kral et al. (2017a)). La bande d’observation réfère à l’infrarouge proche (H et K) ou moyen (N). Le mode renseigne sur le mode d’observation : en interférométrie classique et en utilisant les visibilités (V) ou en interférométrie de nulling (N).

Instrument Bande Date Mode # d’étoiles Réf.

IOTA/IONIC H 1993 - 2006 V 1 Defrère et al. (2011)

VLTI/PIONIER H 2010 - V 144 Ertel et al. (2014) ;

Marion et al. (2017)

PTI K 1995 - 2008 V 1 Ciardi et al. (2001)

VLTI/VINCI K 2001 - 2003 V 1 Absil et al. (2009)

CHARA/FLUOR K 2002 - V 75 Absil et al. (2013)

VLTI/GRAVITY K 2016 - V 1 Defrère et al. in prep

PFN K 2009 - 2015 N 1 Mennesson et al. (2011)

VLTI/MIDI N 2002 - 2015 V 4 Smith et al. (2009, 2012)

MMT/BLINC N 2004 - 2009 N 6 Liu et al. (2009) ;

Stock et al. (2010)

KIN N 2007 - 2011 N 47 Mennesson et al. (2014)

LBTI/NOMIC N 2012 - N 26 Defrère et al. (2015) ;

Ertel et al. in prep

À la fin du programme d’observation CHARA/FLUOR, Absil et al. (2013) ont réalisé une analyse statistique des excès en infrarouge proche autour de 42 étoiles. Parmi ces 42 étoiles, ils ont trouvé 13 excès, l’un causé par un compagnon ( Cep), un autre proba- blement causé par de la perte de masse autour d’une géante (κ CrB), et 11 excès causés

par des disques exozodiacaux donnant un premier taux de détection de 28+8−6% dans leur

échantillon. Il est à noter que cet échantillon était biaisé par le faible nombre d’étoiles observées et donc par la possibilité d’avoir des étoiles présentant des caractéristiques très particulières dans l’échantillon de contrôle. Ils ont également pu mettre en évidence une première corrélation entre la présence de poussière froide et de poussière chaude (exozodi) pour les étoiles de type solaire. En effet, Absil et al. (2013) ont montré qu’en présence d’un réservoir de poussière froide, tous les types spectraux (A, F, GK) montraient un excès en bande K assez similaire d’un cas à l’autre (29+20−11% pour les étoiles de type A, 36+16−11% pour les étoiles de type solaire) alors qu’en l’absence de poussière froide, il n’y

avait plus qu’une seule étoile de type solaire qui montrait encore un excès en bande K (avec un taux d’occurrence de 6+11−2 %) contre 80+8−25% pour les étoiles de type A présentant un excès.

Un autre grand programme pour la détection d’exozodis est celui mené sur l’instru- ment PIONIER au VLTI. Le programme a utilisé les quatres ATs (1.8m de diamètre) et a dans un premier temps observé 92 étoiles (Ertel et al., 2014). Au début de ma thèse, ce programme d’observation venait d’être réalisé et tous les résultats scientifiques étaient encore à publier. L’ensemble de ce programme ainsi que ma contribution personnelle sont fournis au Chapitre 5 et nous pouvons ici résumer les grands résultats de cette étude. Ertel et al. (2014) ont montré que les étoiles de type A avaient tendance à présenter plus souvent un disque chaud que les étoiles de type G (∼ 28% contre ∼ 10%) et qu’il n’y avait

à priori pas de corrélation entre présence de poussière chaude et froide. Ce résultat est assez surprenant au premier abord puisque la poussière chaude ne peut être créée in-situ et doit provenir de quelque part. Toutefois, considérant les incertitudes statistiques et le fait que nous ne soyons sensibles qu’aux exozodis les plus brillants, il est tout à fait possible que cette corrélation soit masquée.

Dans l’infrarouge moyen, la zone sondée est équivalente à la zone habitable de l’étoile (alors que l’infrarouge proche sonde des régions beaucoup plus proches de l’étoile) et présente donc un intérêt tout particulier dans la recherche de planètes de type terrestre. La plupart des résultats obtenus en infrarouge moyen concernant la détection de disques tièdes ont été obtenu à l’aide de l’interférométrie de nulling. Les premiers résultats furent obtenus au MMT, avec l’instrument BLINC sur β Leo. Stock et al. (2010) déterminèrent que β Leo est pourvu d’au moins deux disques, l’un de ∼ 600 K à une distance de 2-3 UA de l’étoile et l’autre de ∼ 120 K s’étendant de 5 à 55 UA. Après ces premières résul- tats, les premières analyses statistiques furent réalisées à l’aide de données obtenues au Keck Interferometer Nuller (KIN, Mennesson et al. (2014); Millan-Gabet et al. (2011)). De 2008 à 2011, le programme d’observation pour la détection d’exozodis utilisant le KIN a observé 47 étoiles dont 40 ne présentant pas de compagnon connu dans le champ de vue de l’instrument (qui pourrait imiter le signal d’un disque dans les données). La limite de détection du Keck est estimée à une centaine de zodis (limite à 1σ) et dans cette limite, seules cinq étoiles ont montré un excès à 8-9 µm. Cette étude suggère également une corrélation entre la présence de poussière froide et tiède. Au vu de la limite de dé- tection atteinte par le KIN, la NASA a proposé un autre projet de détection d’exozodis qui permettra de gagner un ordre de grandeur en terme de sensibilité : le programme d’observation Hunt for Observable Signatures of Terrestrial planetary Systems (HOSTS) au Large Binocular Telescope Interferometer (LBTI). Le programme HOSTS observera une cinquantaine d’étoiles en séquence principale en bande N’ (9.8-12.4 µm). Le premier résultat de ce programme d’observation fut obtenu sur η Crv avec un excès de 4.40±0.35% enregistré dans le champ de vue du LBTI (Defrère et al., 2015). Depuis, d’autres résultats ont été obtenus et feront l’objet du Chapitre 7.

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