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2   Propriétés et comportement mécanique des roches argileuses

2.4   Essai de compression uniaxiale d’un échantillon d’argilite de Tournemire

2.4.5   Observation de la microstructure en cours de chargement

Entre l’étape initiale et l’étape 1, l’évolution de la courbe contrainte / déformation est non linéaire. Cette non linéarité correspond à la fermeture des microfissures présentes initialement (phase de serrage), les observations MEB confirment ce résultat. Sur la figure 2.11, on peut constater que la microfissure dans la zone 2, strictement localisée au sein de la matrice argileuse, se referme parfaitement.

Ensuite, entre l’étape 1 et 9, la courbe contrainte / déformation est quasi linéaire (en faisant abstraction des phénomènes de relaxation observés durant les paliers nécessaires à l’acquisition des images MEB). A « l’œil nu », aucune modification notable de la microstructure n’est visualisée sur les deux zones d’études (zone saine et zone centrée sur une microfissure) aux différentes échelles d’observation : les clastes restent scellés au sein de la matrice argileuse, aucune amorce de fracture et / ou de phénomène de décohésion aux interfaces matrice / claste ne sont observés durant le chargement.

(a)

(b)

Figure 2.12 : Microfissure à la base de l’échantillon soumis à un chargement mécanique (IRSN PH4 8660)

Cependant, en dehors des zones d’observation retenues, on note qu’une microfissure s’est développée à la base de l’échantillon au niveau du contact avec le plateau de chargement. Cette microfissure se propage au sein de la matrice argileuse en contournant les clastes de résistance plus élevée.

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Les observations « à l’œil nu » ne permettent pas d’étudier l’évolution de la microstructure soumise à un chargement mécanique. Par la suite, on présente les observations réalisées à partir de la corrélation d’images numériques.

Figure 2.13 : Champs des déformations équivalentes (légende : entre les étapes n1 et n2 / grossissement utilisé / bornes de la légende (%) ; IRSN PH4 8660)

Zone 1 (b) entre 0 et 9 / ×200 / eq [0,00; 0,90] (c) entre 0 et 9 / ×700 / eq [0,00; 2,40] Zone 2 (e) entre 1 et 8 / ×200 / eq[0,00; 0,90] (d) entre 0 et 8/ ×040 / eq [0,0; 0,70] (f) entre 1 et 9 / ×700 / eq [0,00;1,10] (a) entre 0 et 9/ ×040 / eq [0,00; 0,50]

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La figure 2.13 présente les champs des déformations équivalentes calculées aux différentes échelles d’observation. On rappelle que la qualité du traitement des images par corrélation dépend du contraste et des gradients de niveaux de gris disponibles dans l’image. Dans l’analyse présentée, on rappelle que seul le contraste naturel de l’argilite de Tournemire est utilisé. Au grossissement le plus élevé (correspondant à une zone d’étude de 200×200 m²), cette méthodologie atteint ses limites. Du fait de leur composition chimique homogène (l’analyse est réalisée à partir des électrons rétrodiffusés), les différentes particules présentes dans la matrice argileuse présentent une absence de contraste. Les déformations au sein des particules ne sont donc pas accessibles et les déformations (calculées à partir d’une intégrale de contour) aux interfaces particule / matrice argileuse sont sources d’incertitude. En dehors des déformations liées à la fermeture des microfissures, on constate que les champs des déformations équivalentes au sein de la matrice argileuse apparaissent homogènes aux différentes échelles d’observation, i.e. aucun phénomène important de localisation des déformations n’est mis en en évidence. Comme attendu, la direction de la déformation principale est parallèle à l’axe de chargement (direction 22).

(a) entre 0 et 1 (b) entre 1 et 8 (c) entre 0 et 8

Figure 2.14 : Décomposition du champ des déformations équivalentes pour la zone d’étude n°2 (IRSN PH4 8660)

La figure 2.14 présente une décomposition du champ des déformations équivalentes sur la zone d’étude n°2 d’environ 3×3 mm² (grossissement ×040). L’image (a) représente le champ des déformations équivalentes estimé entre l’étape initiale et le premier palier de chargement, les déformations équivalentes maximales sont localisées au niveau de la microfissure. L’image (b) représente le champ des déformations équivalentes estimé entre l’étape 1 et 8, le champ des déformations équivalentes est homogène. L’image (c) représente le champ des déformations équivalentes estimé entre l’étape initiale et l’étape 8. Les déformations équivalentes maximales sont localisées au niveau de la microfissure qui s’est refermée au cours de la première phase de chargement et le champ des déformations équivalentes est homogène dans le reste de la zone d’étude.

Cette décomposition souligne que les microfissures perpendiculaires à l’axe de chargement, dont l’origine est supposée liée à la déshydratation des échantillons, ont une influence négligeable sur la distribution du champ des déformations équivalentes après leur fermeture.

A. Noiret 56 -70 -60 -50 -40 -30 -20 -10 0 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 εeq (%) σ ax ( M P a) Zone1 x700 Zone1 x200 Zone1 x040 Zone2 x700 Zone2 x200 Zone2 x040

Figure 2.15 : courbes contrainte axiale / déformation moyenne équivalente des 2 zones étudiées à différentes échelles d’observation (IRSN PH4 8660)

La figure 2.15 présente les courbes d’évolution de la contrainte axiale mesurée en fonction de la déformation moyenne équivalente estimée par corrélation d’images numériques pour les deux zones étudiées à différents grossissements. La phase de serrage entre l’étape initiale et le premier palier de chargement à 15 MPa n’est pas représentée, i.e. les déformations correspondant à la fermeture des microfissures ne sont pas prises en compte. Bien que la déformation moyenne équivalente calculée au grossissement le plus élevé (×700) soit influencée par des problèmes de contraste, elle reste supérieure d’une décade aux valeurs calculées lors du test de mouvement de corps de rigide.

On observe que la plage de variation de la déformation moyenne équivalente au cours du chargement tend à diminuer avec l’élargissement de la zone d’étude (ou de la diminution du grossissement). Les courbes d’évolution tendent à devenir linéaires et confondues avec l’élargissement de la zone d’étude. Ce phénomène met en évidence la notion de volume élémentaire représentatif. A l’échelle microscopique, l’argilite de Tournemire est un matériau hétérogène. Définir un volume élémentaire

représentatif consiste à définir un ordre de grandeur pour les dimensions de la zone d’étude D de telle

sorte que l’étude à l’échelle microscopique des phénomènes physiques sur un volume d’étendue D

fournisse des éléments pertinents pour construire une modélisation macroscopique des mêmes phénomènes [Dormieux et Bourgeois, 2002] :

• ce volume doit être suffisamment petit pour prendre en compte la structure microscopique du

matériau et suffisamment grand pour pouvoir décrire le comportement global du matériau.

• ses propriétés doivent être indépendantes de l’endroit du matériau où il a été « prélevé ».

On souligne qu’au grossissement ×040, les dimensions des zones d’étude ne permettent pas de prendre en compte le comportement de la microstructure et les deux zones se chevauchent partiellement (cf. figure 2.10).

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Si l’on étend les résultats obtenus dans la direction z, ils montrent qu’un volume élémentaire représentatif pour l’argilite de Tournemire pourrait être constitué par une zone d’étude d’environ

800×800×800 m3 (soit 0,5 mm3) obtenue avec le grossissement ×200 (les phénomènes de

microfissuration ne sont pas pris en compte).

L’essai de compression uniaxial réalisé au sein du MEB et associé à une méthode de corrélation d’images numériques, nous a permis d’étudier l’évolution de la microstructure de l’argilite de Tournemire soumis à un chargement mécanique. Durant ces essais, différentes difficultés ont été rencontrées : le chargement appliqué s’est avéré insuffisant pour parvenir à la rupture de l’échantillon (influence de la lyophilisation) et les problèmes de contraste rencontrés à l’échelle des particules ne nous ont pas permis d’étudier les déformations intraparticulaires et aux interfaces particule / matrice. Les observations ont montré que les champs des déformations équivalentes sont homogènes dans les zones d’études (en faisant abstraction des fissures préexistantes liées à la préparation du matériau). Aucun phénomène de localisation des déformations et de décohésion des particules au sein de la matrice n’a été observé. En dehors des zones d’étude, une microfissure a été observée à la base de l’échantillon probablent due au frettage. Elle se propage au sein de la matrice argileuse et contourne les clastes de résistance plus élevés. Cette observation est en accord avec les travaux de [Fabre, 2005] et [Wright, 2001], qui constatent que la fracturation est essentiellement localisée dans la matrice argileuse de l’argilite de Meuse / Haute-Marne.

Le point notable de cette partie de l’étude est de permettre la détermination des dimensions caractéristiques d’un volume élémentaire représentatif pour l’argilite de Tournemire. A titre de

comparaison, le volume d’un échantillon œdométrique (π×202×20 mm3) est environ 50000 fois

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Chapitre 3 :

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