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L’immobilisation de protéines présente un intérêt majeur dans le but de créer de nouveaux matériaux bioactifs permettant de promouvoir la régénération de tissus et/ou d’organes. Deux stratégies principales sont actuellement utilisées pour fonctionnaliser ces matériaux: le greffage orienté ou non orienté de protéines. L’immobilisation non orientée est généralement basée sur la réaction entre des groupements fonctionnels présents sur les chaines latérales des résidus de la protéine et les groupements présents sur le matériau. La chimie employée met le plus souvent à profit les fonctions amines de la protéine, ce qui engendre dans la grande majorité des cas, un couplage hétérogène. Les résultats obtenus sont peu reproductibles et les protéines ainsi greffées présentent une activité biologique diminuée; elles ne peuvent donc pas interagir de manière optimale avec les récepteurs présents à la surface des cellules. Par conséquent, l’immobilisation orientée de protéines est l’alternative favorisée. Pour ce faire, les stratégies employées s’inspirent fortement des techniques utilisées pour la purification de protéines en se basant notamment sur l’utilisation d’étiquettes telles que la partie Fc des immunoglobulines G ou les queues polyhistidines. Celles-ci ne doivent cependant pas altérer l’activité biologique des protéines étiquetées ni nécessiter une interaction avec une matrice toxique.

Par conséquent, le développement d’une approche supprimant les inconvénients rencontrés lors de l’immobilisation orientée de protéines sur des supports biocompatibles est nécessaire afin de promouvoir de façon optimale l’adhésion, la migration et la prolifération cellulaire. Les travaux présentés dans ce premier chapitre sont basés sur l’utilisation de deux

peptides non naturels dénommés E coil et K coil afin de permettre le greffage orienté du facteur de croissance de l’épiderme (EGF) sur un biomatériau. L’objectif était donc de mettre au point une stratégie innovante permettant l’immobilisation orientée de ce facteur de croissance utilisé comme protéine modèle. La méthode expérimentale ne devait pas altérer la bioactivité de la protéine, elle devait être simple dans sa mise en œuvre, facilement reproductible et polyvalente c’est-à-dire transposable à tout type de protéines correctement étiquetées.

Les travaux présentés dans le chapitre 3 de cette thèse ont été publiés dans le journal scientifique 'Tissue Engineering Part A' en 2008. Ces travaux se sont attachés à étudier l’influence des peptides coils sur la bioactivité de EGF. L’objectif était de démontrer que les coils n’interferaient pas avec celle-ci et que l’immobilisation orientée de ce facteur de croissance était possible. La bioactivité de EGF étiqueté par les coils en position N-terminale (Ecoil-EGF, Kcoil- EGF) a été comparée à celle de EGF étiqueté avec un domaine Fc en position N- ou C-terminale (EGF-Fc et Fc-EGF) car l’immobilisation orientée de EGF via l’interaction Fc - protéine A/G avait déjà été rapportée. Il a ainsi pu être démontré qu’en solution le Fc-EGF n’est pas bioactif alors que le Ecoil-EGF, le Kcoil-EGF et le EGF-Fc le sont, le Ecoil-EGF étant aussi actif que la protéine native et plus actif que les autres chimères. Par conséquent, ces résultats ont permis de démontrer que le type et la localisation de l’étiquette ont un effet sur l’activité biologique de la protéine et que le système coiled-coil est un système de choix afin d’immobiliser des facteurs de croissance pleinement bioactifs.

Les travaux présentés dans le deuxième article de cette thèse (Chapitre 4) et publiés dans Bioconjugate Chemistry en 2009 se sont attachés à immobiliser le Ecoil-EGF par interaction coiled-coil sur des surfaces de verre aminé. L’objectif était de mettre au point une chimie permettant le greffage du K coil sur une surface aminée, d’y immobiliser le Ecoil-EGF et de

mettre en évidence que notre stratégie de greffage était plus efficace pour promouvoir la réponse de cellules épidermiques (A-431) que des stratégies basées sur l’utilisation de EGF en solution ou de EGF immobilisé de manière non orientée. Une fois la stratégie de greffage du K coil optimisée sur du verre aminé, une forte augmentation de l’adhésion des A-431 a été mise en évidence en présence de Ecoil-EGF immobilisé contrairement aux autres conditions. Une augmentation de l’intensité et de la durée de la phosphorylation du récepteur de EGF (EGFR) a également été démontrée témoignant de l’efficacité de l’approche coiled-coil comparativement à une approche de greffage aléatoire de EGF ou à l’utilisation de protéines en solution.

Dans le troisième article (Chapitre 5) soumis pour publication dans Biomaterials en 2010, un biomatériau (PET) a été utilisé comme support avec pour objectif d’approfondir l'étude des effets de l’immobilisation orientée de EGF sur le comportement de cellules épithéliales de cornée (HCE-2) à des fins d’application en ingénierie tissulaire. Après avoir vérifié qu’il était possible de transposer le protocole développé dans le chapitre 4 afin de greffer le K coil sur des surfaces aminées de PET, des tests cellulaires ont été effectués. Des approches basées sur l’utilisation de Ecoil-EGF immobilisé, de EGF physisorbé et de EGF en solution ont alors été comparées. Il s’est avéré que notre approche est la plus efficace afin de promouvoir l’adhésion, l’étalement et la prolifération de cellules HCE-2. De plus, l’étude de l’activation des voies de phosphorylation suite à l’interaction de EGF avec son récepteur a été reliée aux réponses cellulaires observées. Tous ces résultats ont démontré l’intérêt de l’immobilisation orientée de EGF à des fins d’application en ingénierie tissulaire.

CHAPITRE 3 LA BIOACTIVITÉ ET L’AFFINITÉ DU RÉCEPTEUR DU