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CHAPITRE I. CONTEXTE DE L’ETUDE

V. Objectifs et démarche

V.1. Ozonolyse d'alcènes en phase homogène : mécanismes

réactionnels et devenir des intermédiaires de Criegee

Les réactions d’ozonolyse des alcènes jouent un rôle majeur dans la chimie troposphérique en conduisant à la formation de radicaux hydroxyles et de composés carbonylés ou d’acides carboxyliques dans l’atmosphère (Atkinson and Aschmann 1993). Certaines de ces espèces insaturées peuvent également conduire à la formation d’aérosols organiques secondaires, impliquant des effets sur la santé de l’homme et sur le climat en modifiant le bilan radiatif de la Terre et les propriétés des nuages. Les premières étapes du mécanisme d’ozonolyse des alcènes sont assez bien connues et ont été rappelées plus haut. Les rendements en carbonylés primaires de nombreux alcènes sont ainsi assez bien documentés dans la littérature ; cependant, la forte réactivité des Intermédiaires de Criegee rend leur détection et leur quantification extrêmement difficile. Des questions essentielles subsistent au sujet de leur devenir dans l’atmosphère et des produits formés par les réactions de ces intermédiaires riches en énergie avec d’autres espèces, incluant des réactions unimoléculaires et bimoléculaires (Atkinson and Arey 2003; Johnson and Marston 2008; Taatjes, Shallcross et al. 2014).

Au cours de cette thèse, les réactions d’ozonolyse de trois alcènes méthylés ont été investiguées : le 4-méthyl-1-pentène (4M1P), le trans-2,2-diméthyl-3-hexène (22dM3H) et le trans-2,5- diméthyl-3-hexène (25dM3H). Certains alcènes étudiés dans ce travail (le 4M1P par exemple) ont été identifiés dans des émissions de composés hydrocarbonés par les pots d’échappement de véhicules motorisés à essence (Schauer, Kleeman et al. 1999), ainsi que dans les fumées de feux de cheminée à bois (Schauer, Kleeman et al. 2001) ou des fumées de combustion de biomasse (Hays, Geron et al. 2002). A notre connaissance, un seul groupe a publié des résultats sur ces alcènes en reportant à la fois des données relatives à la cinétique et aux produits de leurs réactions d’ozonolyse (Grosjean and Grosjean 1996a; Grosjean and Grosjean 1996b; Grosjean and Grosjean 1996c; Grosjean and Grosjean 1997). Ces résultats présentent des rendements totaux en carbonylés primaires étonnamment supérieurs à 100 % et laissent le devenir des CI formés par ces réactions en grande partie non résolu (rendements totaux en CI inférieurs à 30 % dans les trois cas). De plus, ces trois alcènes présentent un atome d’hydrogène disponible pour le réarrangement du CI et la formation d’un produit non oxydé selon le mécanisme proposé par (Duncianu, Olariu et al. 2012). L'étude des produits gazeux primaires et secondaires (issus des voies réactionnelles citées plus haut) permettra ainsi d'évaluer la pertinence de cette voie lors de l’ozonolyse d’alcènes plus longs et compléter les résultats existants sur le devenir des CI.

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Pour ce faire, un réacteur à écoulement a été utilisé, et le coefficient de vitesse des réactions a été déterminé afin d'apporter un poids cinétique aux données existantes. Les résultats seront présentés dans le chapitre III : ozonolyse d'alcènes méthylés.

V.2. Oxydation du limonène : mécanismes réactionnels et formation

d'AOS

Comme indiqué plus haut, les émissions globales de COVB dépassent d’un ordre de grandeur les émissions de COV dues aux activités anthropiques (Lamb, Guenther et al. 1987; Zimmerman, Greenberg et al. 1988; Griffin, Cocker et al. 1999; Tsigaridis and Kanakidou 2003; Guenther, Jiang et al. 2012). La contribution des COVB à la qualité de l’air et au changement climatique est significative car ces composés agissent comme molécules précurseurs au nuage photochimique (Papiez, Potosnak et al. 2009) et à la formation AOS (Henze and Seinfeld 2006). Parmi les COVB, le limonène est globalement le troisième plus important monoterpène émis dans l’atmosphère (Griffin, Cocker et al. 1999), avec les conifères comme sources majeures (Geron, Rasmussen et al. 2000; Pokorska, Dewulf et al. 2012). Il est également très présent en air intérieur suite aux émissions par les produits désodorisants et les nettoyants tels que les nettoyants de cuisine et liquides vaisselle (Huang, Ho et al. 2011). Une fois émis, le limonène est dégradé par réaction avec les oxydants de l’atmosphère (°OH, NO3, O3, Cl), conduisant à la

formation de composés oxygénés de plus faibles volatilités et à la formation d’AOS (Maksymiuk, Gayahtri et al. 2009). De plus, il semble que la présence de deux insaturations (endo- et exo-cycliques) confère au limonène une capacité de former des AOS plus importante que d’autres terpénoïdes (Lane, Donahue et al. 2008; Maksymiuk, Gayahtri et al. 2009), comme l'-pinène par exemple (Nojgaard, Bilde et al. 2006).

La compréhension et la description du mécanisme de dégradation d’un composé organique dans l’atmosphère nécessite avant tout des informations sur les cinétiques et les produits primaires de ses réactions avec les oxydants atmosphériques. Dans le cas de l'oxydation du limonène par les radicaux °OH, la réaction se produit soit par addition du groupe hydroxyle sur l'une des doubles liaisons de la molécule soit par arrachement d'un atome d'hydrogène. Trois études ont déjà déterminé le coefficient de vitesse globale de la réaction par méthode relative à 760 Torr et à température ambiante (Winer, Lloyd et al. 1976; Atkinson, Aschmann et al. 1986) ainsi que dans la gamme 298 - 362 K (Gill and Hites 2002). Il a également été montré que pour cette réaction, le rapport de branchement de la voie d'arrachement d'hydrogène pouvait s'avérer plus important que supposé auparavant (Rio, Flaud et al. 2010). Dans le chapitre IV. Oxydation du limonène par les radicaux °OH et °OD, des résultats expérimentaux nouveaux ou complémentaires obtenus en

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réacteur à écoulement pour la réaction du limonène avec les radicaux °OH seront présentés, incluant une étude de la dépendance du coefficient de vitesse avec la pression et la température, dans une gamme de températures élargie (220-360 K), et une étude de la contribution de la voie d'arrachement d'hydrogène, également en fonction de la température. La réaction du limonène avec les radicaux °OD a également été étudiée au cours de ce travail et ce, pour des raisons expérimentales qui seront explicitées dans ce chapitre.

La formation d'AOS lors de l'oxydation du limonène a été observée dans plusieurs études et il en ressort que c’est principalement la réaction d'ozonolyse qui forme des AOS (Chen, Hopke et al. 2011; Waring, Wells et al. 2011; Bernard, Fedioun et al. 2012). Cependant, la plupart de ces études ont été réalisées en chambre de simulation avec des avancements de réaction élevés (temps de réaction allant de plusieurs minutes à plusieurs heures). Or, il a récemment été rapporté que l'utilisation de réacteurs à écoulement pour l'étude de l'ozonolyse du limonène pouvait fournir des données complémentaires à des temps de réaction plus courts (de l'ordre de dizaines de secondes). Ainsi des informations intéressantes ont été recueilles sur le rendement en AOS (Pathak, Salo et al. 2012) et le seuil de nucléation (Bernard, Fedioun et al. 2012) pour les premières étapes de la réaction, étapes cruciales pour la compréhension des processus de formation en AOS. Dans le présent travail, la formation d'AOS lors de l’ozonolyse du limonène a été étudiée à température ambiante et pression atmosphérique dans un réacteur à écoulement afin de préciser et compléter les données existantes sur les premières étapes de cette réaction. Le coefficient de vitesse a également été déterminé afin de consolider les résultats obtenus, qui seront présentés dans le chapitre V. Ozonolyse du limonène.

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