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Chapitre I : Contexte scientifique

I. 6. Objectifs de la thèse

L’objectif global de la thèse est de brosser le portrait des relations plantes-pollinisateurs en région parisienne en fonction de l’urbanisation. L’exploration de ces relations sera conduite à la lumière d’analyses à l’échelle inter-spécifique des assemblages des communautés de plantes et de pollinisateurs mais également à l’échelle intra-spécifique.

Comme nous l’avons détaillé dans ce qui précède, l’urbanisation peut avoir des effets contrastés sur l’abondance et la diversité les espèces de plantes et de pollinisateurs selon le degré d’imperméabilisation et selon les contextes géographiques. En particulier, il existe pour les espèces de pollinisateurs une grande variabilité de réponses en termes d’abondance des taxons, avec certains taxons « urbanophiles » et d’autres « urbanophobes » (Figure I.3). Néanmoins, les facteurs responsables de ces différences d’affinités aux milieux urbains entre taxons sont encore peu connus. Par exemple, la relation entre la tolérance à la fragmentation des habitats et la capacité de vol à grande distance des espèces de pollinisateurs n’a toujours pas été élucidée. Il apparait ainsi que l’identification des échelles spatiales pertinentes écologiquement et propres à chaque taxon est essentielle à la compréhension de la sensibilité de ces taxons à la fragmentation induite par l’urbanisation.

Ainsi, dans le chapitre II de ce manuscrit est présenté une étude dans laquelle nous avons choisi de nous servir d’une base de données issue du programme de science participative nommée « SPIPOLL » pour approfondir ces interrogations. Elle répertorie l’ensemble des visiteurs floraux des espèces végétales échantillonnées. Ces visiteurs peuvent être des coléoptères, des diptères, des lépidoptères et bien sûr des hyménoptères. L’intérêt majeur de cette base de données est qu’elle comporte un très grand nombre d’observations, rendant possible des analyses statistiques fiables. Comme signalé plus haut il existe très peu d’études conduites sur un aussi large panel d’insectes floricoles. Les objectifs de cette étude sont multiples car elle vise à (i) déterminer les effets de l’imperméabilisation sur les différents taxons de visiteurs floraux le long d’un gradient d’urbanisation (ii) hiérarchiser l’importance relative de facteurs floraux, paysagers, météorologiques et temporels sur l’occurrence des taxons, (iii) identifier les échelles spatiales auxquelles l’imperméabilisation affecte le plus l’occurrence des taxons (iv) mettre en relation l’affinité des taxons à l’imperméabilisation avec leurs préférences florales ainsi qu’avec l’échelle spatiale affectant le plus leurs occurrences.

Le chapitre III de ce manuscrit présente une étude fondée sur la base de données « Sauvages de ma rue », visant à éclaircir comment l’urbanisation structure les communautés de plantes spontanées. Comme précisé dans l’introduction, la nature composite des stress

29 environnementaux composant l’urbanisation rend les résultats très dépendants des villes considérées. Par exemple, cela peut se traduire par des différences de fréquence d’occurrence de certains traits végétaux selon les contextes d’urbanisation (Figure I.2). Le degré et l’échelle d’imperméabilisation de l’agglomération parisienne représentent un contexte idéal pour identifier les effets extrêmes que peuvent entraîner l’urbanisation d’un territoire sur les communautés végétales. Pourtant, les études conduites sur les communautés végétales face à l’urbanisation dans cette région sont encore rares. L’objectif de ce troisième chapitre est double : Dans un premier temps, il s’agit de déterminer si l’imperméabilisation représente un facteur de structuration des communautés végétales. Dans un second temps il s’agit d’identifier un large panel de caractéristiques végétales associées aux milieux urbains et ruraux en se concentrant sur les traits végétaux qui sont impliqués dans les relations avec les communautés de pollinisateurs.

Le chapitre IV et V viseront à déterminer si certaines espèces végétales ont subi une évolution adaptative face aux perturbations induites par l’urbanisation. Pour établir de façon empirique l’existence d’une évolution adaptative, nous avons mis en place une expérience de transplantation réciproque. Nous avons collecté les graines de cinq populations rurales et cinq populations urbaines de quatre espèces végétales (Cymbalaria muralis, Geranium robertianum,

Geum urbanum et Prunella vulgaris). Les plantules issues des graines récoltées ont été plantées

sur des sites d’expérimentation en milieu urbain et rural. Ce dispositif a permis de faire des observations morphologiques et phénologiques sur les espèces végétales en nous assurant que les différences observées étaient en partie héritables. Par ailleurs, des observations de visites de pollinisateurs sur les sites de plantations urbains et ruraux nous ont donné l’opportunité d’identifier les potentiels avantages reproductifs conférés par les caractéristiques florales. Le

chapitre IV présentera les résultats de cette expérimentation pour les quatre espèces végétales

et visera à (i) identifier comment varient les fréquences de visites de pollinisateurs entre les sites de plantations urbains et ruraux et entre les populations d’origines urbaines et rurales (ii) déterminer si la production de fleurs varie selon l’origine urbaine et rurale des populations. Le

chapitre V se concentrera plus précisément sur Cymbalaria muralis, l’une des espèces

impliquées dans le dispositif expérimental. La quantité de grains de pollen, d’ovules, de fruits, de graines par fruit ainsi que le nombre, la taille et la couleur des fleurs ont été estimés pour chaque individu. Les objectifs de ce cinquième chapitre sont (i) d’identifier les caractéristiques florales associées aux populations d’origines urbaines et rurales, (ii) déterminer les corrélations et potentiels trade-offs entre les différentes caractéristiques, et (iii) d’évaluer parmi les caractéristiques florales lesquelles sont les plus impliquées dans les visites de pollinisateurs.

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Le dernier chapitre consistera en une discussion générale visant à synthétiser et mettre en perspective l’ensemble des résultats exposés dans la thèse. Cette dernière partie sera également l’occasion de synthétiser les résultats préliminaires du travail de Jérôme Eschenbrenner, stagiaire co-encadré avec Bruno Colas. Les travaux menés portent sur une simulation informatique modélisant les mouvements d’un insecte pollinisateur au sein d’un paysage composé de multiples patchs fleuris et faisant suite aux résultats empiriques exposés dans le chapitre V. Ce modèle informatique est basé sur les équations de butinage optimal énoncées dans le théorème de la valeur marginale (Charnov 1976). L’objectif principal de ce travail de simulation vise à comprendre les relations existantes entre la proportion de fleurs visitées dans un patch par les pollinisateurs et l’isolement des patchs fleuris dans le paysage. L’intégralité de ce travail de stage est reportée en annexe.

La dernière partie de ce manuscrit constitue une rapide conclusion de l’ensemble de cette thèse.

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Chapitre II : Urbanisation et communautés d’insectes