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ANNEXE I : Document de la campagne des défusions

Carte 3 La nouvelle Ville de Montréal en 2002

Source : INRS-UCS

On retrouve aussi une grande diversité quant aux modes d’élection et de représentation des élus locaux. L’une des tâches des comités de transition des nouvelles villes de Montréal et de Longueuil a justement été de définir le nombre de conseillers municipaux à l’échelle des nouvelles villes et dans chaque arrondissement. C’était une décision compliquée car il a fallu réduire le nombre de conseillers dans les anciennes municipalités de banlieue et créer un système de représentation dans les arrondissements des villes centre. À compter du 1er janvier 2002, la nouvelle Ville de Montréal est dirigée par un conseil de ville comprenant 72 conseillers élus au sein de districts électoraux, tandis qu’à Longueuil, on retrouve 42 conseillers. Dans les deux cas, le maire est élu par l’ensemble des citoyens de la ville et le nombre de conseillers varie selon le poids démographique de l’arrondissement. À Montréal, le travail a été plus complexe en raison du nombre d’arrondissements concernés et il a été décidé de créer des modalités d’élection des

conseillers différentes selon qu’il s’agisse d’un arrondissement issu de l’ancienne ville de Montréal ou d’anciennes municipalités de banlieue53. Il y a aussi deux types d’élus différents : d’une part, les conseillers de ville qui siègent à la fois au conseil de la nouvelle ville et à celui de l’arrondissement et d’autre part, les conseillers d’arrondissement qui eux ne siègent qu’au conseil d’arrondissement. Dans le cas de la nouvelle Ville de Longueuil, tous les conseillers d’arrondissement siègent également au conseil de ville (Bruneault et Collin, 2001).

Selon le gouvernement provincial, l’introduction des arrondissements selon un découpage similaire à celui des anciennes villes permet le maintien d’un sentiment d’appartenance des citoyens et le respect de la démocratie locale. On considère que ce troisième pilier de la réforme permet d’éviter, ou au moins d’atténuer, l’opposition connue aux fusions, notamment de la part des municipalités de banlieue. Nous citons à cet égard deux extraits issus d’une entrevue réalisée à Lucien Bouchard par les journalistes Carole Beaulieu et Pierre Cayouette, apparue dans L’Actualité le 1er janvier 2001. Tandis que le premier reflète l’importance des arrondissements pour achever la réforme, le deuxième témoigne de l’idée de démocratie locale chez le Premier ministre :

Depuis 40 ans, tous les gouvernements convenaient de la nécessité de procéder à un regroupement de municipalités dans l’île de Montréal. Or, c’est tellement difficile que personne n’a réussi à le faire. Je me suis donc montré très prudent dans mes réactions aux premières propositions, notamment celle d’une île, une ville. Je m’y suis rallié l’été dernier quand on m’a informé du concept des arrondissements et de la possibilité de laisser à ce niveau la responsabilité de ce qu’on appelle les "services de proximité" : les questions de zonage, des parcs, des logements, de l’enlèvement des ordures. (…)

Il y a plusieurs niveaux d’identité. Il y a l’identité existentielle, humaine : on est des citoyens du monde, on baigne dans une culture universelle. Il y a le niveau national, dont les lignes ne sont pas toujours parfaitement claires. Il y a enfin un niveau d’identité municipal. C’est important, mais ce n’est quand même pas par rapport à ce dernier qu’on définit notre identité humaine, notre identité de citoyen. Ce n’est pas l’ambition de notre vie d’homme et de femme que d’être à l’intérieur d’un périmètre qui s’appelle X, Y ou Z au niveau municipal.

53 On retrouve quatre modèles d’élection : a) le maire de l’arrondissement élu par l’ensemble de l’arrondissement et qui siège au conseil de ville et deux conseillers d’arrondissements élus au sein de districts électoraux, b) le maire de l’arrondissement, un autre conseiller de ville et un conseiller d’arrondissement, tous élus par l’ensemble des votants de l’arrondissement, c) le maire de l’arrondissement et deux autres conseillers de ville élus par l’ensemble de l’arrondissement et deux conseillers d’arrondissement élus au sein de districts et d) le maire de l’arrondissement élu par l’ensemble de l’arrondissement et de deux à cinq conseillers de ville élus au sein de districts (Rivard, Tomàs et Collin, 2004).

Faut pas exagérer! Les gens d’Outremont vont se retrouver ensemble, encore, autour des mêmes parcs, des mêmes bibliothèques (Beaulieu et Cayouette, 2001: 16).

Ce dernier extrait introduit un élément qui est essentiel pour la compréhension de la réforme Harel et la mise en place du modèle de gestion métropolitaine montréalais : l’importance des valeurs et des représentations. Nous constatons en effet chez le Premier ministre une conception de l’identité conçue notamment à l’échelle nationale et une conception des municipalités en tant qu’instances de gestion des services de proximité. Nous verrons plus loin que cette définition de la municipalité est propre à la culture politique canadienne et québécoise. Néanmoins, cette représentation du rôle de la municipalité entre en conflit avec celle des élus des municipalités de banlieue, et notamment ceux de l’île de Montréal, pour qui la municipalité est un palier significatif pour le développement du sentiment d’appartenance des citoyens et la réalisation de la démocratie. La réforme Harel bouleverse donc les échelles d’appartenance de certains groupes de citoyens et produit des discours différents sur la démocratie locale (Boudreau, 2003a).

Selon notre cadre d’analyse, outre la question des représentations, d’autres facteurs à la fois structurels et conjoncturels expliquent la réforme du gouvernement provincial et la création d’un modèle hybride de gestion métropolitaine. Ces interprétations seront explorées dans le point suivant.

4.3 Comprendre la réforme

Les événements qui ont eu lieu entre 1999-2001 servent à configurer un nouveau paysage municipal à l’échelle du Québec, ainsi qu’à mettre en place un modèle de gestion métropolitaine à trois paliers dans la métropole. Même si le débat sur la question métropolitaine est présent depuis le début des années 1990, la décision de réorganiser les municipalités et surtout celle sur les regroupements sont inattendues. Cette idée est confirmée lors d’entretiens tant par les fonctionnaires du ministère des Affaires municipales que par les élus de la région métropolitaine de Montréal. La citation suivante d’un rapport de recherche l’atteste d’ailleurs :

En 1992, même si l’état des finances publiques laissait entrevoir des changements majeurs, personne n’aurait pu prédire que les fusions municipales, déjà présentes dans les grands desseins de la génération de la Révolution Tranquille, seraient encore à l’ordre du jour politique quarante ans plus tard et donneraient lieu à des initiatives majeures à l’aube de l’an 2000 (Divay, Collin, Germain et al., 2002: 8).

L’objectif de cette thèse est de découvrir quels sont les facteurs explicatifs de la réforme Harel et quel est le rôle des acteurs locaux dans la mise sur pied du modèle montréalais de gestion métropolitaine. Une combinaison de facteurs structurels (d’ordre institutionnel) et conjoncturels (d’ordre politique) expliquerait pourquoi et comment la réforme a été réalisée. Avant de nous pencher sur notre propre interprétation de la réforme Harel, développée au cours des chapitres suivants, nous résumerons les propos des divers auteurs qui ont analysé ce changement institutionnel.

La plupart d’auteurs sont d’accord sur le fait qu’il y avait une conjoncture politique favorable à une réforme (Fischler et Wolfe, 2000a). Après l’échec du référendum de 1995, le climat politique n’était pas propice à un autre débat constitutionnel. Ainsi, le principal objectif de Lucien Bouchard à son arrivée à la tête du gouvernement provincial était l’atteinte du déficit zéro (Belley, 2005). Lors de sa nomination en 1996, il promit d’apporter des solutions aux problèmes de la métropole; ces promesses seront partiellement réalisées (voir chapitre 6). Alors que le Premier ministre est réélu en 1998, la réforme municipale peut être interprétée comme la volonté de Lucien Bouchard de réaliser une réforme historique et ainsi compléter la Révolution tranquille, malgré le fait que cette réforme n’ait pas fait partie du programme politique des élections de 1998 (Parti québécois, 1998).

D’autres facteurs d’ordre politique permettent de comprendre la décision du Premier ministre, notamment le fait que, après l’élection de 1998, Bouchard décida de ne pas se représenter. Ceci expliquerait sa décision d’avoir le courage politique pour mener une telle réforme et la rapidité avec laquelle elle s’est réalisée. Il faut tenir compte aussi d’éléments de timing politique, particulièrement l’importance de réaliser des réformes d’envergure durant les deux premières années du mandat électoral, ce qui explique aussi

la concentration des événements entre 1999 et 200154 (Baccigalupo et Nkot, 2001). Bref,

il semblerait que le moment politique favorise la réalisation d’un changement institutionnel (Quesnel, 2000).

En outre, certains auteurs relèvent l’influence des réformes institutionnelles appliquées dans les grandes villes canadiennes pendant les années 1990, à Toronto (1998), Ottawa (2001), Halifax (1996)55 (Collin et Léveillée, 2003). L’expérience de réforme métropolitaine à Toronto56 aurait été particulièrement prise en exemple et aurait affecté la réforme au Québec, en ce qui concerne, par exemple, l’introduction des comités de transition (Faure, 2003; Sancton, 2006). Même si les mécanismes se ressemblent, les gouvernements provinciaux d’Ontario et de Québec ont des objectifs opposés dans leur conception de la réforme57 (Fischler et Wolfe, 2000a; Le Blanc, 2006).

En ce qui concerne les éléments structurels, il y a une multiplicité d’interprétations sur les variables qui permettent d’expliquer la réforme Harel. Comme cela l’a été vu au chapitre 2, certains auteurs voient les réformes métropolitaines comme le résultat des processus de mondialisation et de restructuration entre échelles de gouvernement (Boudreau et Keil, 2000; Keil et Boudreau, 2005). Selon cette logique, les pressions provenant de la mondialisation (notamment, la concurrence entre villes pour attirer des investissements) provoquerait des mouvements en faveur de la fusion (Toronto, Montréal) (Keil, 2000;

54 Selon un fonctionnaire du MAM : « il faut mener une réforme dans les deux premiers ans du mandat pour le calcul électoral. Alors il n’est pas possible de patienter plus longtemps, ni de consulter les gens, il faut aller vite » (entretien numéro 10).

55 Selon un fonctionnaire du MAM : « L’effet de l’Ontario et des autres villes canadiennes a été très important. Ottawa par exemple venait d’être fusionnée et était juste devant de l’agglomération de Hull- Gatineau. Dans la logique du gouvernement, il n’était pas possible qu’Ottawa fut grande et Hull petite! (…) Grâce aux fusions, Québec, Longueuil et Montréal sont dans le groupe des 22 plus grandes villes canadiennes » (entretien numéro 4).

56 Le gouvernement de Harris a procédé à une réorganisation institutionnelle du Greater Toronto Area qui conduit à la fusion des six municipalités du Metro Toronto (la structure métropolitaine qui existait depuis 1953), la fusion des six commissions scolaires de la région et la création d’une nouvelle commission et la mise en place d’une instance régionale légère de coordination (le Greater Toronto Services Board) (Slack, 1998). Selon un fonctionnaire du MAM : « la fusion à Montréal a permis de mieux concurrencer Toronto. C’est une question de taille » (entretien numéro 6).

57 En effet, dans le cas de l’Ontario, la réforme municipale est interprétée selon une optique néo-libérale, puisqu’elle implique un délestage de responsabilités du provincial au local (Keil et Boudreau, 2005).

Boudreau, 2006). Pour ces auteurs : « while some governance changes could potentially be explained by mere local matters, the new urban North America was deliberately contextualised in a global world economic and political reconstruction » (Keil et Boudreau, 2005: 104). Ce discours est en effet présent, tant au Québec qu’en Ontario (Fischler et Wolfe, 2000a).

Des auteurs comme Andrew Sancton et Jean-Pierre Collin soulignent l’importance du contexte institutionnel comme facteur clé expliquant l’emploi des fusions municipales et le peu d’impact des autres solutions non institutionnelles (comme le nouveau régionalisme) (Collin, 2002; Sancton, 2006). En premier lieu et contrairement à leurs consœurs états-uniennes, les municipalités canadiennes ne bénéficient pas du home rule, n’ont aucune reconnaissance constitutionnelle et ne sont pas considérées comme faisant partie de l’ordre gouvernemental, puisqu’elles sont des créatures provinciales. Ensuite, au Québec, à l’instar de ce que l’on retrouve dans les autres provinces canadiennes, la principale source de financement des municipalités locales demeure, et de loin, l’impôt foncier, ce qui, en pratique, a pour effet d’exacerber la concurrence intermunicipale (Collin et Léveillée, 2003). Le partage de l’assiette fiscale entre la ville centre et la banlieue supposait en effet un conflit constant pendant l’existence de la CUM (Belley, 2002). L’appui des élus de la Ville de Montréal à une réforme afin d’en finir avec le déficit budgétaire rencontrait la résistance des élus de la banlieue, pour qui les avantages comparatifs de la localisation des investissements étaient nécessaires à leur développement économique (Belley, 1997).

Ces deux éléments de base s’accompagnent d’un système politique local marqué par la dynamique provinciale-fédérale et une culture politique qui considère les municipalités comme des instances secondaires (Tindal et Tindal, 2004). Belley (2004) soulève, parmi d’autres éléments, que les municipalités canadiennes sont dépendantes des décisions prises au niveau provincial mais aussi des changements électoraux qui surviennent à ce niveau. Selon Belley, les élus municipaux sont influencés par des groupes d’acteurs avec des intérêts opposés – ce qui accentue une tendance clientéliste et sectorielle des politiques et qui les rend difficilement compatibles (Belley, 2004: 10). L’auteur affirme

que ces caractéristiques ne sont pas conjoncturelles, au contraire, elles ont toujours marqué les politiques locales, métropolitaines et régionales.

Certains auteurs, cependant, voient dans la réforme le début d’un nouveau cycle dans les relations provinciales-locales, marqué par l’émancipation du palier local. Selon Faure : « le laboratoire de Montréal semble laisser suggérer que la médiation des villes est en passe de devenir un levier politique décisif » (Faure, 2003: 47). La réforme aurait renforcé le rôle des villes et du palier municipal au Québec, et ce, malgré le maintien d’un contrôle étroit du gouvernement dans la gestion des affaires municipales et l’absence de décentralisation (Savard, 2004). Ainsi, le gouvernement affirme vouloir accroître le rôle des municipalités mais sans leur donner de nouvelles ressources fiscales (Divay et al., 2002: 26). Pour Collin, la réforme péquiste représente plutôt la fin d’un cycle concernant le débat sur les fusions qui existe depuis la fin du dix-neuvième siècle et le point culminant dans la lutte contre la fragmentation (Collin, 2002).

Le processus de réforme institutionnelle est aussi interprété de façon diverse. Pour certains auteurs, il serait top-down, c’est-à-dire, conçu et dirigé de très près par le gouvernement provincial (qui détient la compétence exclusive en matière municipale) (Quesnel, 2002). Selon cette interprétation, les décisions seraient prises à l’avance par le gouvernement provincial, les acteurs locaux ayant une marge de manœuvre très restreinte (Sancton, 2006) et la participation serait limitée aux spécialistes (Hamel, 2001), aux fonctionnaires et aux élus locaux (Mévellec, 2005; Hamel et Rousseau, 2006). Plus clairement, Sancton observe le manque d’intérêt des groupes économiques. Comme il l’affirme : « socio-economic elites in Canada have traditionally expected their provincial and municipal governments to look after the well-being of their cities » (Sancton, 2001: 553).

Selon une perspective opposée, d’autres analyses accordent beaucoup d’importance au rôle joué par les acteurs locaux dans la conception et mise en œuvre de la réforme. Certains ont observé une dynamique d’apprentissage entre les acteurs (du milieu local et provincial) (Belley, 2004). Alain Faure décrit l’exécution du processus de réforme

comme la méthode « Power-Point », c’est-à-dire que chaque projet est révisé et discuté avec les acteurs locaux avant de devenir définitif (Faure, 2003). Plusieurs auteurs voient, depuis le milieu des années 1980, l’existence d’un nouveau régime urbain formé par les intérêts privés et publics à l’échelle métropolitaine de Montréal (Jouve, 2004b). Pendant la réforme, il y aurait eu un dialogue privilégié avec le monde des affaires, et un rôle important joué par les syndicats (dans le dossier des négociations sur les conventions collectives) (Faure, 2003). Fischler et Wolfe partagent l’avis que la ministre Harel a proposé les grandes lignes de la réforme mais que les acteurs locaux en ont défini les détails (Fischler et Wolfe, 2000a). Le rôle des associations de municipalités semblerait aussi important (surtout dans le débat sur la fiscalité locale) ainsi que celui joué par le groupe des villes centrales (Quesnel, 2000).

D’autres interprétations soulignent les caractéristiques identitaires et linguistiques propres au contexte montréalais et notamment la spécificité de la communauté anglophone (Sancton, 1985; Levine, 1990; Fischler et Wolfe, 2000a). Selon Boudreau, les anglophones montréalais conçoivent leur municipalité comme le niveau privilégié d’appartenance politique et d’exercice de la démocratie (Boudreau, 2003b). Cette différence dans la culture politique expliquerait pourquoi les habitants des municipalités de banlieue de l’île de Montréal (la plupart anglophones) se sont opposés si fortement aux fusions. En outre, la peur de perdre un autre aspect essentiel de leur qualité de vie, comme celui de recevoir les services en anglais et d’avoir des institutions anglophones dans une province francophone, a aussi joué dans leur mobilisation contre la fusion (Boudreau, 2003a). La variable linguistique est ainsi considérée comme un élément essentiel pour comprendre la réforme Harel selon une équipe de chercheurs de l’Université de Montréal (Lemire, Juteau, Arcand et al., 2005).

Pour d’autres auteurs, la pertinence du clivage linguistique est réduite par d’autres dimensions, notamment la variable socio-économique. Selon les travaux de Marie-Claude Prémont, la fusion municipale sur l’île de Montréal se comprend par le refus des municipalités les mieux nanties de financer les services et les équipements métropolitains (Prémont, 2005c). La décision du gouvernement provincial a ainsi forcé l’équité sociale et

fiscale que ces municipalités, notamment celles du West Island, essayaient d’éviter. Autrement dit, l’opposition aux fusions municipales serait moins le résultat d’une peur de perte identitaire que d’une peur de la perte des privilèges fiscaux (Prémont, 2001).

En définitive, nous constatons qu’il n’y a pas qu’un seul facteur qui explique la mise en place du modèle de gestion métropolitaine montréalais : l’importance du processus de mondialisation, l’influence du contexte institutionnel (statut des municipalités et relations provinciales-locales), la mobilisation de certains groupes d’acteurs, la place de la variable linguistique, les disparités socio-économiques et fiscales entre les municipalités. L’analyse des interprétations rend compte de la complexité de facteurs intervenant dans la conception de la gestion métropolitaine. En effet, comme le souligne Laurence Bherer, une seule explication est insuffisante pour comprendre la réforme municipale au Québec (Bherer, 2005).

Conclusion

Le PQ a mené entre 1999 et 2001 une réforme du système municipal à l’échelle de la province qui comprend à la fois des regroupements municipaux et le renforcement du palier supramunicipal. Le gouvernement a choisi la fusion municipale comme moyen de consolider les pôles urbains du Québec, tout en créant un réseau de neuf grandes villes. Dans les deux villes les plus populeuses, Montréal et Québec, il y a aussi la mise en place de communautés métropolitaines pour assurer le développement d’une vision commune des enjeux métropolitains. Avec ce même objectif, le gouvernement renforce les pouvoirs des MRC dans les agglomérations plus petites. La réforme est complétée par une décentralisation administrative dans plusieurs villes issues des fusions municipales afin de garantir une meilleure efficience dans la gestion des services et de préserver le sentiment d’appartenance des citoyens à leurs communautés. La réforme Harel est une réponse davantage institutionnelle aux questions d’équité et de compétitivité dont souffrent les agglomérations québécoises. Il s’agit d’une approche principalement réformiste, même si certains principes liés au nouveau régionalisme et des choix publics sont aussi mobilisés dans le discours gouvernemental.

L’application de la réforme à Montréal suppose la mise en place d’un modèle hybride de gestion métropolitaine à trois paliers : métropolitain, municipal et inframunicipal. La Communauté métropolitaine de Montréal est créée avant tout afin d’améliorer la compétitivité internationale et le développement économique du Grand Montréal. Cette structure constitue aussi une tentative de solidarité métropolitaine par le biais du financement de certains équipements métropolitains et par la création d’un fonds de logement social. En outre, la CMM a des compétences en matière de planification de l’aménagement du territoire. Quant à l’échelle municipale, elle est consolidée par la création de deux nouvelles villes issues des fusions – Montréal et Longueuil –, qui constituent avec la Ville de Laval les trois pôles de la région métropolitaine. La création des nouvelles villes se réalise dans le but d’arrêter les conflits entre les villes centre et leurs banlieues et de diminuer les disparités fiscales et économiques entre les diverses composantes de l’agglomération. La réduction des municipalités permet une meilleure

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