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Notions sur les théories fonctionnelles en densité

2.1 Théorie de la fonctionnelle en densité ou la méthode SR-EDF

2.1.2 Les corrélations d’appariement

2.1.3.1 Notions sur les théories fonctionnelles en densité

Considérons un système quantique à N-corps décrit par une fonction d’onde

N

i

. Son énergie est une fonctionnelle des composantes de cette fonction d’onde,

E

=

E[Ψ

N

] .

(2.42)

De manière équivalente, l’énergie peut être écrite comme une fonctionnelle des degrés de liberté à 1, 2

· · ·

N-corps (cf. section2.1.1.1où les densités réduites sont introduites). Ce qui s’écrit sous la forme

E

=

E[ˆρ

1

, ˆC

2

, ˆC

3

,· · · ] ,

(2.43) où

ρˆ

1est la matrice densité à 1 corps,

Cˆ

2celle des corrélations à deux corps etc... Par exemple, pour un Hamiltonien à deux corps, l’énergie s’exprime par

E

=

ij

t

ij

ρ

1ji

+

1

4

ijkl

¯

v

ijkl

(

C

lkji2

+ ρ

1li

ρ

1kj

− ρ

1ki

ρ

1lj

)

.

(2.44) Ainsi nous avons le schéma suivant

Ψ

N

−−−−→ ˆρ

1

, ˆC

2

,· · · −−−−→ E[ˆρ

1

, ˆC

2

,· · · ] ,

(2.45) où le sens des flèches indique que la quantité à droite est uniquement déterminée par celle(s) de gauche. Toutefois, les densités à 1, 2

· · ·

N-corps restent des quantités complexes auxquelles on n’a jamais accès (expérimentalement), en particulier dans le cas réaliste en physique nucléaire. D’un point de vue pratique, le problème réduit aux degrés de liberté à un corps est souvent le seul qu’on puisse résoudre de manière simple. Ainsi, les physiciens de matière condensée se sont posés la question suivante : ”Peut on remplacer le problème à N-corps par un problème à 1-corps et néanmoins obtenir exactement l’énergie du système ?”. Pour les systèmes électroniques, Hohenberg et Kohn ont montré que la réponse est oui [9].

Les électrons sont liés par un potentiel local extérieur, noté

V

ext

(r)

. La contribution de l’environnement à l’énergie s’écrit alors

dr V

ext

(r) ρ(r)

, et l’énergie du système devient

E

=

E[ˆρ

1

,· · · ] +

dr V

ext

(r) ρ(r) .

(2.46)

Le potentiel extérieur détermine l’énergie du système, en effet on a l’enchaînement suivant

V

ext

(r)

E → Ψ

N. Alors, on peut écrire cette énergie totale comme une fonctionnelle du potentiel extérieur

E

=

E[V

ext

(r)] .

(2.47)

Hohenberg et Kohn (HK) ont montré que le potentiel

V

ext

(r)

est uniquement (à une constante près) déterminé par la densité locale à un corps

ρ(r) = ˆρ

1

(r, r)

de l’état fondamental, donc on reconnaît une dépendance fonctionnelle

V

ext

(r)→ V[ρ(r)]

. Finalement, on a l’enchaînement suivant

La boucle, permise par le théorème HK, force des relations fonctionnelles équivalentes entre toutes les quantités. Ainsi, on a prouvé que

Ψ

N est une fonctionnelle de

ρˆ

1. Finalement, on peut écrire l’énergie du système comme une fonctionnelle de la densité locale à un corps,

E =E[ρ(r)] .

(2.49)

Ce théorème d’existence est très puissant car il réduit la dépendance spatiale de l’énergie de

(r

1

, r

01

· · · )

à

(r)

. C’est donc une simplification majeure. Le second corollaire de ce théorème dit que l’énergie exacte de l’état fondamental du système correspond au minimum de la fonctionnelle

E =E[ρ(r)] + V[ρ(r)]

et que la densité locale à 1-corps associée à ce minimum est celle de la solution exacte.

Kohn et Sham [45] ont proposé une méthode pour résoudre la minimisation de l’énergie. L’idée est d’in- troduire des états à un corps fictifs pour exprimer la densité à un corps. Par exemple, dans la méthode HF, il était possible de traiter la recherche de minimum en utilisant les états à un corps à partir desquels est construit le déterminant de Slater ou plus simplement en notant que dans ce cas

ρ =

i

i

ihψ

i

|

. Par analogie, ils ont proposé d’utiliser des orbitales à un corps fictives

ψ

i pour résoudre le problème variationnel (section5.1.1). On peut alors remplacer la différenciation de l’énergie par rapport à

ρ

, par

i

E[ρ]/δψ

i?

)

et résoudre les équations aux valeurs propres associées aux orbitales

ψ

i de façon tout à fait analogue à la théorie HF. L’avantage est de pouvoir utiliser les mêmes méthodes de résolution que dans la théorie des particules indépendantes. Ainsi, le problème à N-corps a été reformulé en un système de particules indépendantes soumis à un potentiel effectif

ν

ief f

[ρ]

=

δ

2

δψ

i?

δψ

i

(

E[ρ] +

i

ψ

i?

/

·

~

2

2m

.

ψ

i

)

,

(2.50)

où on a retranché la partie cinétique à l’énergie et utilisé les notations / et . pour reconnaître qu’un opérateur s’applique soit à gauche soit à droite. Au final, on obtient ainsi des équations sur les états à un corps

ψ

iqui se mettent sous la forme

(

~

2

2m∆ + ν

ef f i

[ρ]

)

ψ

i

=

ε

i

ψ

i

.

(2.51)

En conséquence, on a à résoudre un potentiel auto-cohérent qui est censé donner à la fois un minimum de l’énergie correspondant à l’énergie exacte, et à la densité locale à un corps exacte du problème à N-corps. En résumé :

La version originale de la méthode de Hohenberg, Kohn (HK) et Kohn, Sham (KS) conduit à rem- placer le problème à N-corps par un problème effectif à un corps avec le schéma suivant (KS)

ψ

i

−−−−→ ρ −−−−→ v

ef f

[ρ]−−−−→ E[ρ] −−−−→ ψ

i

,

(2.52) beaucoup plus simple que le problème initial.

2.1. Théorie de la fonctionnelle en densité ou la méthode SR-EDF 25

Ce schéma ressemble beaucoup à la théorie HF, cependant la DFT est un outil beaucoup plus puissant. Là où HF est une approximation, la DFT est une reformulation exacte du problème à N-corps. Elle est censée donner l’énergie exacte. De plus, alors que l’énergie est une fonctionnelle de

ρ

1

(r, r

0

)

dans l’approximation de particules indépendantes, ici on a une simplification supplé- mentaire car l’énergie est fonctionnelle de

ρ(r)

seulement.

La DFT donne des informations physiques sur l’énergie

E

et sur la densité locale

ρ(r)

seulement.

Ainsi, c’est une théorie dédiée à des observables spécifiques. On pourra calculer des observables locales uniquement. Par construction, toutes celles nécessitant l’utilisation de la matrice densité à un corps totale (i.e. non locale) ne peuvent être déduites de cette théorie.

La principale difficulté de la théorie de la fonctionnelle en densité est de trouver la forme de la fonc- tionnelle elle-même. Les théorèmes HK et KS ne donnent en effet aucune indication de comment l’obtenir.

Il existe un grand nombre de propositions d’extension de la DFT. Quelques unes d’entre elles, d’intérêt pour les travaux présentés dans ce document, sont mentionnées ci-dessous :

La méthode de l’approximation locale[46] (LDA pour ”local density approximation”) propose d’écrire l’énergie comme une fonctionnelle de la densité locale à un corps,

ρ(r)

uniquement, tel que des puissances de la densité etc. Ses extensions (GEA, GGA et Méta GGA) tiennent compte de l’in- homogénéité de la matière en proposant des dépendances de l’énergie en gradients de la densité locale et en courants des orbitales fictives. Alors l’énergie est exprimée en général comme une fonctionnelle de

ρ

et

∇ρ

mais aussi en fonction des courants tel que

τ =

i

|∇ψ

i

|

2.

La DFT peut être étendue pour prédire plus d’observables physiques. Par exemple, Gilbert [10] a montré qu’il était possible d’écrire l’énergie comme une fonctionnelle de la densité non-locale

ρ

1

(r, r

0

)

. Cela conduit à une théorie fonctionnelle de la matrice densité à un corps (DMFT pour ”density matrix functional theory”) car au minimum toute l’information sur les observables à un corps est prédite.

A l’instar de la DMFT, il est possible d’inclure des quantités contenant de l’information supplé- mentaire telle que la densité anormale

κ

qui permet d’inclure l’appariement dans les théories fonctionnelles[47]. La dépendance de l’énergie est alors étendue comme

ρ→ (ˆρ, κ)

.

Il est finalement possible de construire une théorie fonctionnelle dans le repère intrinsèque du système considéré, cela offre un cadre théorique permettant de justifier certaines approches fonc- tionnelles traitant les systèmes auto-liés tels que les noyaux[48].

Les théories DFT sont couramment utilisées en physique de la matière condensée, elles ont permis de nombreuses applications pour décrire les systèmes électroniques qui seraient de loin impossibles si le problème à N-corps était traité exactement[49]. Ces approches sont également largement utilisées en physique nucléaire où elles prennent le nom de théories de l’énergie fonctionnelle de la densité (EDF pour ”energy density functional”). Bien que la stratégie et le problème physique soient très différents comparés aux systèmes électroniques, notamment car les nucléons sont auto-liés (et ne sont pas liés par les ions environnants), le principe reste le même. L’idée étant de remplacer le problème à N-corps, trop complexe, par un problème à un corps effectif permettant de traiter certaines propriétés exactement. La stratégie standard utilisée en physique nucléaire pour construire l’EDF est décrite dans la fin de ce chapitre.