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notion de dépendance de la Grammaire Cognitive diverge de celle qu’on trouve dans les

divers types de la grammaire de dépendance (Robinson, 1970 ; Anderson, 1971 ; Hudson,

1976 ; Matthews 1981 ; Buvet 2013) ; dans le premier cas une prédication relationnelle

est considérée être dépendante des nominaux, dans le second cas, c’est les arguments

nominaux qui sont dépendants d’un élément relationnel comme un verbe ou un adjectif.

“Au pôle phonologique, cette asymétrie A/D [(autonomie/dépendance)] peut être

utilisée pour expliquer la distinction entre morphèmes racines et non-racines, incluant des

affixes et des symbolisations plus abstraites comme des morphèmes processuels. Les

racines sont autonomes, fournissant une batterie initiale de contenu phonologique ; les

morphèmes non-racines sont dépendants et peuvent être vus comme des opérations sur le

contenu initial fourni par la racine, ce qui va beaucoup dans le même sens que les

consonnes qui modifient la sonorité fournie par une voyelle (note : Dire qu’une racine est

autonome n’implique pas, comme nous avons défini le terme, qu’elle peut toujours se

positionner seule comme un mot, tandis que c’est souvent le cas […]). Observez que cette

caractérisation des morphèmes non-racines accommode avec grâce de tels phénomènes

que le ablaut, la réduplication et la troncation, et que les affixes se classent parmi eux

comme un type spécial (quoique prototypique) de modification, à savoir celui consistant

principalement de l’appendice de matériel segmental.” (Langacker 1987 : 307, ma

traduction). Cette proposition reconstruit la description usuelle des racines comme le

morphème coeur d’un mot et rend compte de la stratification de la structure des mots, p.

ex. un mot comme unlawfully ‘illégalement’, a été construit d’abord avec la racine law

‘loi’ et le suffixe -ful ‘-al’, lawful ‘légal’ étant autonome à son tour s’est combiné avec

un- ‘in-’, et unlawful ‘illégal’, autonome également, à son tour s’est combiné avec -ly

‘-ment’ et a donné unlawfully. Les clitiques ressemblent aux affixes, puisque leur position

et leur rythme dépendent d’un élément plus autonome

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Dans le cadre de la théorie de la Morphologie des Fonctions Paradigmatiques (MFP), Stump (2001) développe l'idée que le paradigme, opposé au mot, occupe une place centrale en morphologie flexionnelle. Il adopte la définition de Aronoff (1994, p.11) pour la notion de lexème5 : “un lexème est un membre (potentiel ou actuel) d’une catégorie lexicale majeure qui a une forme et un sens mais qui n’est ni l’un ni l’autre, et qui existe à l'extérieur de tout contexte syntaxique en particulier”. Il définit le paradigme d’un lexème comme une liste des cases, chaque case étant associée à un ensemble de propriétés morphosyntaxiques. Les propriétés morphosyntaxiques ont la forme des traits associés à des valeurs, par exemple, le trait ‘temps’ permet les valeurs ‘présent’, ‘passé’, ou ‘futur’ en français. Un trait peut avoir une seule valeur ou un ensemble de valeurs (Gadzar et al. 1985:25), par exemple, en grec, le trait ‘accord’ peut avoir l’ensemble {‘génitif’, ‘pluriel’}.

Stump prévoit trois types d’espèces morphologiques pour un lexème : les racines, les thèmes et les mots. La racine est définie comme la forme la plus simple, dépourvue de toute marque flexionnelle, et donc potentiellement non autonome, et les mots sont définis comme les formes syntaxiquement autonomes, sans que cela empêche une forme d’apparaître dans les deux catégories : par exemple, garçon est la racine et la forme du singulier pour le lexème GARÇON. Les racines sont les formes les plus simples du point de vue de la flexion ; cette définition permet aux mots construits d’avoir une racine. Enfin, les thèmes sont définis comme les formes sur lesquelles s’ajoutent potentiellement les marques flexionnelles, garçon est ainsi la racine, un thème et la forme du singulier pour le lexème GARÇON. Trois types de règles sont primordiales dans ce cadre, la fonction paradigmatique, les règles flexionnelles et les metagénéralisations morphologiques. Elles sont organisées hiérarchiquement :

Fonction paradigmatique Règles flexionnelles Règles réalisationnelles Règles de marquage Règles de renvoi Règles morphomiques

Règles de formation des thèmes Règles d’indexation des thèmes Metagénéralisations morphologiques

La fonction paradigmatique d’un lexème s’applique à sa racine et détermine les formes qui occupent chaque case de son paradigme. “Quand un lexème L a X comme racine dans une langue l, la fonction paradigmatique de l est une fonction qui s’applique à l’appariement <X, !> pour fournir la case-! dans le paradigme de la langue l (ou ! correspond à tout ensemble complet des propriétés morphosyntaxiques appropriées à L)”7 (Stump, 2001, p.243). Par exemple, pour le lexème GARÇON, la fonction paradigmatique s’applique à la racine garçon, et détermine la forme garçon pour la case du paradigme ‘singulier’ et la forme garçons pour la case du paradigme ‘pluriel’. La définition de la fonction paradigmatique d’une langue correspond à la définition de sa morphologie flexionnelle. Elle est une représentation statique des conditions de bonne formation et de régularité du paradigme. Les règles réalisationnelles et les règles morphomiques constituent les règles flexionnelles d’une langue.

Les règles réalisationnelles déterminent la valeur d’une case du paradigme, la forme qui occupe la case. Elles sont organisées en blocs, et chaque bloc est appliqué successivement sur la sortie du bloc précédent. Les blocs ne sont pas ordonnés linéairement, mais l’ordre de leur application est indiquée par la fonction paradigmatique. Suivant Zwicky (1985), il y a deux types de règles réalisationnelles ; d’une part, les règles de marquage (exponence), qui soit sélectionnent un thème, soit associent un ensemble des propriétés morphosyntaxiques avec une marque de flexion ou elles marquent une forme par l’absence significative de marque de flexion. Par exemple pour le lexème MÜTTER en allemand, deux règles de marquage déterminent la valeur Müttern de la case {‘dative’, ‘pluriel’} : une qui sélectionne le thème

Mütter- et une qui place la marque flexionnelle -n après le thème. D’autre part, les règles de renvoi

(referral), apparient soit le même ensemble des propriétés morphosyntaxiques dans des blocs différents, soit deux ensembles contrastants avec la même expression morphologique. Plusieurs règles peuvent être en compétition à l'intérieur d’un bloc ; suivant le principe de P"#ini, la règle adéquate est la règle la plus spécifique. Ce qui permet de rendre compte, d’une part, des différences horizontales dans le paradigme, le fait que les formes d’une case peuvent provenir de l’application de différentes règles réalisationnelles, d’autre part, des similarités verticales, le fait que différents cases présentent des similarités structurelles. La règle réalisationnelle la moins spécifique, appelée règle de l’identité par défaut (IDF), est universelle et consiste à préserver la forme d'entrée sans devoir postuler des marques zéro. Chaque règle réalisationnelle comprend trois indices, le bloc d’appartenance, la classe d’application, et les propriétés qu’elle réalise.

La sélection d’un thème par une règle réalisationnelle ne s’ensuit pas toujours d’une différence des propriétés sémantiques, morphosyntaxiques ou phonologiques de ce thème par rapport aux autres thèmes du lexème. Certains thèmes sont morphomiques : ils n’ont “pas d’autre rôle dans la grammaire que les

La distinction des éléments grammaticaux en centraux vs périphériques,