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Notes de Benoît Le Bouteiller sur éksodos de Guillaume Nemer

Benoît Le Bouteiller, février 2021 (Nordeste, Brésil)

Eksodos. Contribution psychanalytique à la doctrine de la création chez Luria de Guillaume Nemer (Orange, le Retrait | 2020)

« Le livre commence par la Bible où le logos s’inscrit en loi. Le livre ici atteint son sens indépassable, incluant ce qui de toutes parts le déborde et ne saurait être dépassé. La Bible rapporte le langage à l’origine : toujours, qu’il soit écrit, qu’il soit parlé, c’est l’ère théologique qui, à partir de ce langage, s’ouvre et dure, aussi longtemps que durent l’espace et le temps bibliques » (Maurice Blanchot).

J’aime imaginer Parménide. Il marche. Et il se demande si le sol d’Élée est le sol de l’humanité. J’aime imaginer lire entre les lignes de son Peri Physeos. Et l’entendre y parler sans mots de la patrie véritable de l’Homme : la patrie de l’exil, ce lieu Autre. Il y a ce que l’on sait : le latin exul / exilium repose sur deux notions : celle d’un point et celle d’un mouvement. Il y a un point, un point de départ, un site que l’on quitte et il y a une marche, un en avant, en mouvement. Et il y a ce que l’on ne sait pas : le Latin, avec ce mot, a-t-il voulu, en son origine, marquer l’idée d’expulsion ou celle d’errance ? Et puis l’Histoire et la clinique nous enseignent que c’est du pareil au même. Alors la question est la suivante : c’est quoi la tienne ? Elle est comment la patrie de ton humanité ? C’est quoi le paysage de ce lieu Autre qui est le tien ? Son histoire ? Ses reliefs ? Et son climat, sa langue, sa lalangue, à cette patrie de l’exil ? Question en pérégrinant, nécessairement. Question en marchant, ou plutôt en navigant. Le bateau, oniya en hébreu, est en quelque sorte le pendant féminin du mot ani, je. C’est une question-ontologie.

C’est une question-auto-poiêsis. C’est une question-pérégrination. C’est une question au féminin.

Bien sûr, au féminin : elle se fonde de ce lieu Autre. Un point et un mouvement.

Parménide

C’est une histoire topologique que nous raconte Guillaume Nemer. La topologie : Gottfried Wilhelm Leibniz. Il va naître 112 ans après Luria. Son Analysis Situs. L’idée est simple et géniale : la possibilité de construire une théorie du lieu indépendante de la distance métrique. Ce qui compte, c’est comment les objets sont localisés les uns par rapport aux autres. Alors, on peut parler de proximité par exemple, mais sans aucun lien avec une distance qui quantifie l’écart entre deux objets.

C’est ainsi que s’ouvre la notion d’espace topologie… L’espace topologique : c’est une structure qui permet de penser, de lire le lieu de manière qualitative. C’est un espace non métrique mais logique.

C’est un espace nouveau. Qui va ouvrir à un espace-temps nouveau.

C’est une manière logique et non métrique de lire la dialectique d’un point et d’un mouvement, une manière logique et non métrique donc de lire l’exil et l’exode. C’est dans ce livre profond et émouvant une des réalisations de Guillaume Nemer.

Depuis que j’ai lu son livre, j’aime imaginer Luria. Il marche. Et il se demande si le sol de Safed est le sol de l’humanité. Rabbi Isaac Ashkenazi se promène et écrit entre les lignes bleues de son paysage.

Pendant ce temps-là, il se passe des choses en Europe. Comme par exemple l’invention des nombres complexes, l’assassinat de Bruno, l’Édit de Nantes. Des mathématiciens italiens (Ludovic Ferrari, Niccolò Fontana, dit Tartaglia – le Bègue –, Gerolamo Cardano) introduisent un ensemble mathématique nouveau : les nombres complexes. C’est une extension du Réel… Pour ça, cet ensemble nouveau contient un nombre imaginaire, i, tel que i²=-1. Giordano Bruno (1548-1600) avance une théorie : Copernic et de Cues ont ouvert la voie, mais en réalité le soleil n’est le centre que d’un système, le système solaire.

L’univers, lui, est dépourvu de centre… car il est sans limites, sans fin… Eyn Sof… Avec ça, Bruno ajoute que les âmes peuvent se réincarner… dans un lieu autre, premier… L’Inquisition le brulera vif, après lui avoir cloué la langue sur un pilori. L’Édit de Nantes est promulgué le 13 Avril 1598. Henri IV y accorde le droit de culte, des droits civils et politiques aux protestants. Les mathématiciens italiens créent un espace mathématique nouveau, au-delà de l’ensemble des réels. Au-delà : on part de là et on se déplace. Avec un nombre imaginaire. Un point et un mouvement. Un espace mathématique autre. Bruno est torturé et tué pour avoir évoqué l’espace sans centre, parce que sans limites. Un espace sans centre, ça rebat les cartes du jeu possible entre un point et un mouvement. Un espace physique autre. L’Édit de Nantes : une loi énonce qu’il est possible que des personnes aux lieux Autres, aux patries d’exils différents, puissent vivre ensemble sur un même sol, un sol comme celui d’Élée, de Safed ou de Nantes. Un espace politique autre.

Tout cela est au cœur de mon métier ; un métier qui tient à un topos. Je suis psychanalyste ou plus exactement : je fais vivre un lieu où un être analyste peut advenir. Question de points et de mouvements. Pour cela il faut du trou ; du trou qui n’est pas du rien. Et qui fait tenir. Le moment politique du traitement, de Nemer, est un concept. Un concept au sens de Kant. Parce qu’il est spacio-temporalisable. Il peut ainsi devenir mathématiquement (ici, topologiquement) interprétable.

Le moment politique… le moment, ce mot, il vient d’une contraction de movimentum, le mouvement.

Le moment est donc un point dans le temps, mais une ligne dans l’espace ; un espace pour le coup non-euclidien. Le moment en mathématiques (en statistiques et probabilités) est un indicateur de la dispersion d’une variable aléatoire réelle. Le moment, en mécanique quantique, le moment de London, est un phénomène quantique où l’axe d’un champ magnétique s’aligne très exactement avec l’axe de spin. Le spin, qui fait de l’électron l’« aimant ultime », aiment à dire les physiciens, de la matière. Le spin, qui fait, de ce que nous en comprenons aujourd’hui, que les oiseaux migrateurs

… ne perdent jamais le nord.

La Kabbale, qabbala en hébreu, c’est la réception. Avec Wolfgang Iser et Hans Robert Jauss nous savons qu’il existe une esthétique de la réception. C’est l’œuvre de Luria : une certaine esthétique

de la réception. Guillaume Nemer ici nous invite probablement à cela : prendre soin de l’esthétique – geste bien sûr politique –, prendre soin de l’esthétique de réception de nos patries de l’exil, de ce lieu Autre. Guillaume Nemer est en train, entre un point et un mouvement, de construire une œuvre aussi belle que nécessaire.

Librairie

Editions du Retrait

Corona, psychanalyse Petit manuel de survie Joseph Rouzel

L’irruption sur la scène mondiale du Corona virus dit SARS-COV-2 fait trou dans nos manières de vivre ensemble, de penser, d’échanger, etc. Trou dans les pouvoirs, les savoirs, les avoirs. Comment apprivoiser ce trou, subjectivement et collectivement, en border les entours ? Comment prendre la mesure de ses effets politiques, sociaux, économiques, symboliques, sémantiques, psychiques ? L’irruption du réel vient déchirer les images et les mots qui soutiennent pour chaque sujet sa position dans le monde, parmi les autres. Devant ce trou laissé béant qui pirate toute forme d’image et de symbole, chacun y va de son propre appareillage. Il s’agit de border et broder là où ça s’effondre. Travail de mineur de fond qui étaye la galerie.

Frontispice de Martine Blanchard

125 X 215 – 68 pages – 12€ - ISBN : 978 2 492070 04 4

Si le virus nous parlait Et si Freud lui répondait ? Gérard Pommier

Du fond de son invisibilité, le Virus a parlé dans une langue universelle. L’angoisse de l’épidémie a mis en évidence l’état du monde comme un révélateur de photographie argentique. Il a mis en relief l’injustice, et derrière elle, l’incroyable déni de la réalité des puissants : ils ont détruit les moyens de se défendre, alors qu’ils étaient prévenus de ce qui se tramait. Et encore en arrière-fond, se sont dessiné la violence et la soumission.

Elles font parler le Marquis de Sade et Sacher Masoch, le désastre de la Kultur passée par le crible de l’Aufklärung qui, selon Adorno, engendre la barbarie. Déni ? Sadisme ? Masochisme ? Dans ces circonstances, c’est bien à Freud qu’il faut prêter parole.

Frontispice de Paco Broca

125 X 215 – 130 pages – 13€20 - ISBN : 978 2 492070 00 6

Editions Stilus

Ouvrages parus ou à paraître La comète incandescente

Romantisme, surréalisme, subversion Michael Löwy

Quel est le rapport du surréalisme au romantisme ? Dans un célèbre paragraphe du Second Manifeste du surréalisme (1930), André Breton écrivait : nous sommes d’accord pour être considérés, historiquement, comme la queue de la comète romantique. Mais il ajoute une note d’humour : il s’agit d’une queue éminemment préhensile… Une comète avec une queue de singe : l’image est sans doute surréaliste. On peut l’interpréter comme une référence au caractère actif du surréalisme, et sa capacité à saisir ce qui lui semble important. Mais d’autre part, la queue d’une comète n’est pas moins une jetée météorique de feu dans les hauteurs, une trace incandescente de lumière dans le dôme céleste.

Préface d’Alex Januário, Illustrations de Sergio Lima, Guy Girard &

Penelope Rosemont

125 X 215 – 210 pages – 15€20 - ISBN : 978 2 492070 05 1

Racine cubique du crime Incestes

Gérard Pommier Parution : 6 mai 2021

Le crime ne concerne que l’être humain. Quelle est la cause de cette sorte de malédiction ? La psychanalyse met au premier plan du désir inconscient le parricide et l’inceste pour donner la première place dans l’ordre de la causalité à l’angoisse de l’inceste.

La racine infantile du crime reste inconsciente et « refoulée ». On ne veut rien savoir du désir incestueux. Ce livre porte sur l’angoisse de l’inceste maternel, le trauma sexuel de l’inceste paternel, et enfin l’inceste avec la sœur, le plus méconnu, qui sera l’objet d’une attention particulière. Enfin les conséquences criminelles seront examinées : elles ne sont qu’une lentille grossissante d’une culpabilité toujours à l’œuvre.

Linguisteries

Pour une grammaire des affects

Federico Bravo Parution : 8 avril 2021

Ce livre s’inscrit à la croisée de la linguistique et de la psychanalyse. Il vise à montrer comment les faits de langue sont traités différemment par la linguistique et par la psychanalyse. L’ouvrage est un plaidoyer pour une ouverture des sciences du langage à la psychanalyse et une illustration de ce que la linguistique « rate » à lui tourner le dos.

Site de la FEP /https://fep-lapsychanalyse.org Page facebook de la FEP

Adresse de la FEP : fondationneuropsy@gmail.com Pour vos annonces écrire à : baliaspasie@gmail.com

La clinique lacanienne

Laura de Capraris, Wanda Dabrowski, Lydie Grandet, Anita

Izcovich, Luis Izcovich, Marie-Noëlle Jacob-Duvernet, Ana Martinez, Corinne Philippe, Leonardo Rodriguez, Florence Signon, Radu Turcanu

Douze analystes, chacun avec sa singularité, tentent de rendre compte de ce qui fait pour eux l’essence de la clinique lacanienne. Ce livre a une portée internationale et témoigne de l’expansion du discours analytique dans le monde.

Chacun, avec son propre style, explique comment il est venu à faire le choix de l’orientation lacanienne en psychanalyse, en quoi consiste cette spécificité et ce qui change par rapport aux autres pratiques de la psychanalyse.

La parole ses limites et son au-delà Luis Izcovich

La psychanalyse est une expérience de parole. Qu’est-ce qu’elle nous enseigne sur ce que parler veut dire ? Qu’est-ce qui change dans le rapport du sujet à la parole à partir de l’expérience analytique ? Les axes que nous suivrons concernent l’incidence de la parole dans les structures cliniques, la place décisive qu’ont certaines paroles dans l’inconscient, ainsi que les limites de la parole et ses enjeux. Cela revient à explorer le rapport entre la parole et l’indicible, mais aussi à saisir les liens entre la parole et l’acte.

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