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La normalisation des intensités est préconisée pour les modalités d’images dont la valeur des niveaux de gris n’a pas de lien avec une quantité physique absolue, comme c’est le cas des IRM, exprimées dans une unité arbitraire (cf section 2.1). L’intensité des voxels exprime une intensité du signal qui n’a pas de signification fixe y compris entre deux images issues d’un même protocole, d’une même région du corps et d’un même patient sur le même scanner [NKUZ00].

Pour l’analyse, les caractéristiques de texture doivent pourtant décrire uniquement des motifs et non des altérations liées à l’acquisition. Certains marqueurs dépendent en partie de la luminosité ou du contraste global de l’image. L’homogénéisation des valeurs d’intensité sur IRM est nécessaire pour pouvoir faire une comparaison pertinente des caractéristiques radiomiques entre les examens.

Beaucoup d’études se sont intéressées à la normalisation d’IRM du cerveau. Une étude de 2004 [CSM04] fait exception en comparant la texture à l’IRM de fromages suisses, extraite

après trois types de normalisations simples visant à conserver une moyenne, un maximum ou un interval similaire. Plus tard Bergeest et al [BJ08] comparent les qualités respectives de cinq méthodes plus complexes basées sur les histogrammes (distances, points de référence etc.), les particularités du cerveau, ou la divergence de l’entropie relative.

Shah et al. ont effectué une revue très complète des différentes méthodes de normalisation des IRM du cerveau [Sha+11]. Ils évaluent notamment un des cinq algorithmes comparés dans l’étude de Bergeest, la méthode de normalisation par alignement d’histogramme (Histogram Matching) de Nyul et Udupa [NKUZ00]. Cette méthode présente plusieurs avantages. Même si d’autres algorithmes ont depuis montré des performances légèrement supérieures, elle est robuste et fournit des images de bonnes qualité. Rapide à implémenter et à exécuter [BJ08], elle est également populaire dans les études radiomiques [Zac+09 ; Sha+11 ; Li+17 ; Bak+17 ; Rat+18] et largement documentée.

2.3.1 Principe de l’alignement d’histogrammes

L’alignement d’histogrammes normalise les niveaux de gris d’une image en se basant sur un histogramme de référence. La technique proposée par Nyul et Udupa a été conçue pour normaliser efficacement des IRM de parties du corps similaires. Il s’agit d’un alignement linéaire par morceau entre l’image à normaliser et une échelle standard de référence (standard scale).

Figure 2.4 – Alignement d’histogrammes, phase d’entrainement. Les bornes s1 et s2 de l’échelle standard sont préalablement fixées. Les histogrammes de deux images sont utilisés

pour calculer un point de repère µ0 sur l’échelle standard.

La première étape est un entrainement qui consiste à mettre en place l’échelle standard. Il s’effectue à partir d’une série d’images de référence issues d’une même partie du corps. Ces images sont préalablement seuillées à leur valeur moyenne pour retirer les intensités correspondant à l’arrière-plan. L’analyse de l’histogramme de ces i images fournit des points de repère ou points de comparaison :

— les percentiles minimum p1i et maximum p2i

— N percentiles µN i choisis régulièrement le long de l’histogramme.

La figure 2.4 montre un cas simple d’entrainement avec deux images et un seul point de repère supplémentaire, la médiane µi. L’échelle de référence représente un histogramme artificiel dont les bornes maximales, s1et s2sont préalablement choisies. On fait correspondre ces bornes aux percentiles p1i et p2i des images d’entrainement de façon à trouver pour

chacune une fonction linéaire. Cette fonction permet de calculer les équivalents des médianes µi sur l’échelle, les valeurs µ0i. La moyenne des µ0i donne le point de référence µ0 de l’échelle standard.

Figure 2.5 – Alignement linéaire par morceaux des niveaux de gris d’une image i sur une référence avec un point de répère. (gauche) Version originale de l’algorithme. La référence est l’échelle standard. On lui fait correspondre les premiers et derniers percentiles p1i et p2i

et la médiane µi de l’image à normaliser. (droite) Version implémentée dans ITK. La référence est l’histogramme d’une image unique. On lui fait correspondre les intensités min

(m1i) et max (m2i) et la médiane µi de l’image à normaliser.

Les valeurs s1, s2 et µ0 permettent ensuite de transformer l’histogramme de nouvelles images une fois associées à leur p1i, p2iet µN i. On obtient dans ce cas deux fonctions linéaires permettant de transformer par morceau les valeurs d’intensité des images à normaliser (voir Fig. 2.5 à gauche). Elles sont ainsi alignées sur l’histogramme de l’échelle standard.

2.3.2 Nos choix d’implémentation

Nous avons utilisé l’implémentation de la librairie ITK (HistogramMatchingImageFilter ). Contrairement à ce qui est sous-entendu dans la documentation, le code ne suit pas exacte-ment l’algorithme de Nyul dans la mesure où il s’agit d’une simplification pour une échelle standard constituée d’une unique image de référence. La figure 2.5 à droite montre que cette version définit les N + 1 morceaux de l’histogramme d’une image i obtenus à partir de N quantiles et de ses deux valeurs extrêmes m1i et m2i. Elle les aligne ensuite directement sur les quantiles et extrema correspondants de l’image de référence. Il n’y a donc pas de phase d’apprentissage ni de création d’une échelle standard, ni d’utilisation des percentiles.

La Fig. 2.6 montre la normalisation de l’IRM d’un patient atteint d’un sarcome. Nous utilisons ici des histogrammes à 100 classes et un seul point d’alignement en plus des extrema.

Figure 2.6 – IRM T2 du bassin d’un patient atteint d’un sarcome, image de référence (cuisse d’un patient sain) et IRM normalisé par alignement par morceaux de leurs histogrammes respectifs. La médiane est représentée en vert et la moyenneen pointillés

bleus (les voxels de l’arrière-plan sont exclus). source IRM : institut Bergonié

La soustraction des voxels de l’arrière-plan est activée, la moyenne et la médiane représentées sont celles du reste des voxels. Le pic de l’histogramme initial est décalé vers la droite de façon à correspondre au pic de l’histogramme de référence.

Les images de référence potentielles que nous avons rassemblées proviennent généralement de la même modalité d’IRM d’un patient sain sur une région du corps similaire. Si aucune image de ce type n’est disponible pour une étude donnée, nous sélectionnons une image aléatoirement parmi la cohorte étudiée. Nous retirons les niveaux de gris correspondant aux lésions de son histogramme pour ne pas fausser l’alignement. Dans l’exemple proposé ici et dans l’ensemble du projet sarcomes décrit au chapitre 5, nous avons choisi l’IRM de la cuisse d’un patient sain pour référence. Les membres inférieurs sont en effet l’emplacement majoritaire des tumeurs de cette cohorte (58.5%).

Nous avons par la suite empiriquement fixé le nombre de points d’alignement basés sur les quantiles à 2, des valeurs supérieures améliorant peu la correspondance avec l’histogramme de l’image de référence. La figure 2.7 montre en effet le même exemple d’IRM normalisé avec 1, 2 ou 10 points de repère. À mesure de l’augmentation du nombre de points, on constate sur l’histogramme du VOI l’éloignement des deux principaux modes et l’apparition d’un troisième pic, traduit visuellement par une légère hausse de contraste.

Remarque Même lorsqu’ils sont normalisés avec l’alignement d’histogramme, les niveaux de gris obtenus ont une unité arbitraire qui n’a pas de signification biologique. Les valeurs

Figure 2.7 – IRM normalisée par alignement d’histogrammes à 1, 2 et 10 points de repère. L’histogramme de l’image de référence est visible en rose. Les histogrammes de la partie droite montrent l’impact de la normalisation sur le VOI de la tumeur (encadrés rouges).

ont simplement la même signification pour un même tissu d’un examen à l’autre.