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Chapitre 3. Cadre conceptuel : prise en charge de la détresse émotionnelle en oncologie 17

3.2 Approches psychothérapiques 19

3.3.4 Neuroleptiques 26

Les neuroleptiques, sont, depuis les années 50, utilisés dans le traitement des psychoses chez la clientèle en psychiatrie et c’est pour cette raison qu’on les appelle aussi « antipsychotiques ». En oncologie et plus particulièrement en phase palliative, l’utilisation des neuroleptiques dépasse largement cette indication. Par exemple, ils peuvent être prescrits pour les états confusionnels, les nausées, les vomissements, l’anxiété, l’insomnie, la dépression et le trouble bipolaire. (Mazzocato, et al. 2000). Il y a trois sous-catégories de neuroleptiques. D’abord, les neuroleptiques de première génération, aussi appelés neuroleptiques conventionnels ou classiques puis les neuroleptiques de deuxième et de troisième génération, appelés aussi neuroleptiques atypiques.

Les neuroleptiques conventionnels tels que : chlorpromazine, flupenthixol, halopéridol, fluphénazine, loxapine, méhotriméprazine, péricyazine, perphénazine, pimozide, prochlorpérazine, thiopropérazine, thiothixène, trifluopérazine et zuclopenthixol ont tous un effet antipsychotique. Leur principale propriété pharmacologique est de posséder un antagonisme D2, c’est-à-dire qu’ils

ont la capacité de bloquer les récepteurs dopaminergiques D2 particulièrement au niveau de la voie

dopaminergique mésolimbique. Cela a pour effet de diminuer l’hyperactivité de cette voie, reconnue pour être la cause des symptômes positifs de psychose comme le délire, les hallucinations, le discours désorganisé, le comportement dissocié, la catatonie et l’agitation. Les neuroleptiques de deuxième génération ont la même efficacité que les neuroleptiques de première génération sur les symptômes positifs de la psychose, mais génèrent moins d’effets indésirables. Parmi ceux-ci, on compte l’asénapine, la clozapine, la lurasidone, l’olanzapine, la palipéridone, la quétiapine, la rispéridone et la ziprasidone. Ils se distinguent des neuroleptiques conventionnels par leur propriété antagoniste sérotonine-dopamine. Cela signifie qu’en plus de posséder un antagonisme D2, ils possèdent aussi un antagonisme des récepteurs

sérotoninergiques 5 -HT2A qui permet une libération de dopamine dans le striatum pour

contrebalancer l’action antagoniste D2. En diminuant le taux d’occupation des récepteurs D2,ils

permettent de diminuer les risques de réactions extrapyramidales tout en conservant l’efficacité antipsychotique. Comme la dopamine et la sérotonine ont des rôles antagonistes sur la sécrétion de prolactine, le blocage des récepteurs 5 -HT2A permet aussi de limiter la libération de prolactine

occasionnée par le blocage des récepteurs D2. Cela explique en partie le fait que les

neuroleptiques de deuxième génération occasionnent moins de galactorrhée ou d’aménorrhée que ceux de la première génération.

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Les neuroleptiques de troisième génération tels que l’aripiprazole et le brexpiprazole sont aussi des neuroleptiques atypiques, mais ayant un mécanisme d’action un peu différent. L’aripiprazole est un agoniste partiel des récepteurs dopaminergiques D2 et agoniste partiel des 5 -HT1A. C’est

un neuroleptique atypique qui entraîne moins de symptômes extrapyramidaux et d’hyperprolactinémie malgré une activité antagoniste des récepteurs 5 -HT2A inférieure à son action

sur les récepteurs D2. De plus, ce médicament ne possède pas de propriété antagoniste des

récepteurs muscariniques M1 et histaminiques H1 et donc n’entraîne pas d’effet de sédation.

Finalement, il occasionne moins de prise de poids et présente un risque métabolique moindre que les autres neuroleptiques qui pourrait s’expliquer par l’absence de fixation sur les récepteurs impliqués dans l’insulino-résistance et l’hypertriglycéridémie.

En général, les neuroleptiques atypiques ont presque toujours une plus grande affinité pour les récepteurs 5 -HT2A que D2, cependant chaque médicament possède une affinité et une puissance

de fixation différente avec les récepteurs ce qui explique la variabilité des effets thérapeutiques et des effets indésirables chez les patients (Stahl, 2015).

3.3.4.1 Mises en garde

Les neuroleptiques conventionnels, en bloquant les récepteurs D2 de la voie dopaminergique

mésolimbique responsables des symptômes positifs de psychose, bloquent aussi les mécanismes de récompense du cerveau. Cela rend les patients apathiques, anhédoniques, et diminue leur intérêt et leur plaisir pour les interactions sociales. Ils bloquent aussi des récepteurs D2 ailleurs

dans le cerveau ce qui entraîne des effets indésirables tels que des symptômes cognitifs, des symptômes extrapyramidaux, une dyskinésie tardive, une galactorrhée et une aménorrhée. Finalement, en plus de bloquer les récepteurs dopaminergiques, certains neuroleptiques conventionnels bloquent aussi les récepteurs cholinergiques muscariniques M1 occasionnant une

sécheresse de la bouche, une vision trouble ou de la constipation. Ils peuvent aussi bloquer des récepteurs histaminiques H1 entraînant une prise de poids et de la somnolence ou bloquer des récepteurs adrénergiques α1 occasionnant certains effets indésirables cardiovasculaires comme

l’hypotension orthostatique et la somnolence (CPS, 2018). Évidemment, tous les neuroleptiques de première génération ne causent pas les mêmes effets indésirables ni la même intensité de symptômes.

Les neuroleptiques atypiques occasionnent moins d’effets indésirables que leurs prédécesseurs, particulièrement les effets extrapyramidaux, grâce à leur action antagoniste des récepteurs sérotoninergiques 5 -HT2A. Cependant, ils interagissent avec de nombreux autres récepteurs et systèmes de neurotransmetteurs qui contribuent à leur effet thérapeutique, mais aussi à une panoplie d’effets indésirables variables d’un produit à l’autre. Par exemple, le blocage des récepteurs cholinergiques muscariniques M1, des récepteurs histaminiques H1 et des récepteurs

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neuroleptiques atypiques sont aussi à risque de provoquer des effets indésirables cardiométaboliques comme : prise de poids, obésité, dyslipidémie, diabète, maladie cardiovasculaire et même la mort prématurée. Mais ils n’ont pas tous le même niveau de risque métabolique. Par exemple, la ziprazidone, l’aripiprazole et la lurazidone présentent un faible risque métabolique. La rispéridone, la palipéridone et la quétiapine présentent un risque moyen (surtout une prise de poids), tandis que la clozapine et l’olanzapine présentent des risques élevés (Stahl, 2015). Il convient de préciser que le risque cardiométabolique n’est pas nécessairement une préoccupation importante en contexte de cancer avancé. On se préoccupe davantage de l’akathisie qu’ils peuvent occasionner lorsqu’ils sont prescrits concomitamment à d’autres agents antinauséeux, de la sédation qu’ils peuvent entraîner et des effets anticholinergiques (augmentant le risque de délirium, constipation, sécheresse de la bouche et rétention urinaire) particulièrement chez les patients faisant usage d’analgésiques opioïdes ou d’agents antimuscariniques qui sont souvent prescrits en phase avancée de cancer (Grassi et al. 2014). L’hyperprolactinémie peut aussi devenir un problème, particulièrement chez les patients ayant un cancer du sein.

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