• Aucun résultat trouvé

II. Mode de fonctionnement des catalyseurs d’oxydation déshydrogénante du

6. Nature des oxygènes

Le débat reste ouvert quant au rôle et à la nature exacte des différents types d’oxygène présents en surface d’un oxyde. En présence de dioxygène gazeux dans le flux réactionnel, les nombreuses variétés d’espèces oxygénées en surface du catalyseur (Oads, O2-, O22-, O-, O2-réseau

(eux même de différents types))font de l’incidence de la nature de ces espèces oxygénées une

question primordiale pour les réactions d’oxydation. En effet, ces espèces oxygénées présentent des caractères plus ou moins électrophiles (O2-, O22-, O-) et nucléophiles (O2-réseau)18, 57, 65. Alors que les oxygènes nucléophiles vont permettre l’abstraction d’un proton, les oxygènes électrophiles conduisent à la rupture de la liaison π de l’alcène, puis à la formation de dérivés d’alcane oxygénés conduisant à l’oxydation totale (Figure I-6)49, 57.

Figure I-6 : Modèles d’attaques électrophile et nucléophile par les espèces oxygénés59.

D’après des études cinétiques réalisées par Haber et al.57 sur trois types de catalyseurs oxydes (Bi2O3/MoO3, Co3O4 et SnO2/MoO3), la concentration en oxygène nucléophile de surface repose sur l’équilibre dynamique entre les taux de dissociation de O2 et d’incorporation dans le réseau. Le niveau de conversion selon la voie d'oxydation nucléophile est proportionnel à la pression du propane et au nombre d'ions oxyde de réseau exposés à la surface. Dans tous les cas, l'ordre de réaction de l'oxydation nucléophile est de un par rapport au propane et de zéro par rapport à l'oxygène, alors que celui de l'oxydation électrophile est proche de un par rapport à l'oxygène. Par ailleurs, la création de lacunes au cours du mécanisme réactionnel peut modifier la structure électronique du cation. Suivant sa nature, son état d’oxydation et son environnement, la liaison métal-oxygène peut être plus ou moins polarisée en exposant des oxygènes aux propriétés électrophiles ou nucléophiles43. Dans ce cas, les espèces super oxo (Mn+-O-O°) ou peroxo sont considérées comme électrophiles tandis que les centres oxo (Mn+=O) sont nucléophiles.Ainsi, puisque la réactivité et la sélectivité dépendent de la nature de l’espèce oxygénée (O2-) de surface associée au cation Mn+, de leur énergie de liaison et de leur distribution en surface, il peut être conclu que la réaction d’oxydation est particulièrement sensible à la structure de l’oxyde étudié.

Par conséquent, la structure locale autour de l’élément de transition du catalyseur est un élément capital. D’ailleurs, les réactions d’oxydation ne sont pas catalysées par toute la surface du catalyseur mais uniquement par certains sites ou centres actifs16, 83. Ces sites actifs doivent être composés par un atome ou un ensemble d’atomes espacés en surface entourés d’un réseau d’anions oxygénés O2- susceptibles d’intervenir en tant espèces actives du fait de leur caractère nucléophile56, 65, 84. Il semble admis que les structures au sein desquelles les entités associant un grand nombre de noyaux d’élément de transition (entités polyédriques étendues comme dans V2O5) soient néfastes pour la sélectivité49, 52, 73. Cela correspond au principe d’isolation du site actif, qui limite la taille de ces entités afin de restreindre la suroxydation85, 86, 87. Pour autant, les considérations basées sur la nucléarité de l’élément de transition restent controversées, tant

pour les systèmes supportés que massiques, avec des tendances opposées, notamment entre les monomères isolés (tétraèdre isolé au sein de zéolithes74 ou dans Mg3V2O888) qui optimisent la dispersion du métal de transition contrairement aux dimères sur VOx/TiO284 ou dans Mg2V2O781

qui faciliteraient les échanges redox.

Au-delà de la nucléarité, le type d’oxygène réticulaire apparaît primordial. Parmi ces types de centres actifs constituant un oxyde, les nombreuses controverses présentes dans la littérature illustrent la confusion souvent faite entre les deux types d’oxygène importants pour la réaction, le premier basique (nucléophile) requis pour l’activation et le second, nécessaire à l’insertion d’oxygène réticulaire dans les produits de réaction et doit donc être particulière labile. Si de nombreux auteurs discutent de la liaison V=O, certains lui attribuent un rôle dans l’activation de l’alcane, d’autres dans l’insertion dans le substrat, et ce malgré la force particulière de cette liaison très courte29. Bien que le rôle des différents types d’oxygène réticulaires soit difficile à discriminer expérimentalement, des calculs DFT apportent des éclairages intéressants sur la réaction d’ODHP. Ainsi, de nombreux auteurs soutiennent que les oxygènes terminaux vanadyles (Vn+=O) sont les plus réactifs et seraient responsables de l’activation de la molécule de propane18, 75, 89, 90. Rozanska et al. ont montré que seuls les sites vanadyles sont impliqués dans la première étape d’activation du propane alors que la seconde extraction de proton peut se produire également sur des oxygènes pontés sans modification de la cinétique globale de réaction90. Cet argument est aussi supporté par Lo et al. qui indiquent que le mécanisme d’activation du propane sur un oxygène pontant est une voie de réaction moins favorisée en raison des intermédiaires très énergétiques et de l’importante énergie

d’activation de transformation des espèces dioxo91. L’équipe de Nguyen et al. a aussi conclu

que les centres actifs vanadyles jouent un rôle crucial dans la réaction d’ODHP et plus particulièrement dans l’étape d’activation de la liaison C-H en initiant la première extraction d’un proton du groupement méthylène pour former un isopropoxyde, cette étape présentant l’énergie d’activation la plus élevée parmi toutes les étapes de la réaction92. En revanche, les

oxygènes pontés de réseau (Mn+−O−Mn+) sont décrits comme des sites plus sélectifs, capables

de s’insérer dans la molécule d’hydrocarbure18, 37, 53, 77 et à la stabilisation des intermédiaires93

en facilitant l’oxy-déshydrogénation par formation d’eau43, 81. Cela pourrait être lié à l’allongement des longueurs de liaisons au sein des ponts Mn+−O−Mn+ et à leur affaiblissement rendant ces oxygènes plus labiles. Ainsi, le lien entre sélectivité et réductibilité reposerait sur la nature de la liaison M-O responsable de l’insertion d’oxygène.