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Chapitre 2 : Diaspora, mobilisation et recadrage

3.1 Les acteurs collectifs

3.1.4 National Council of Canadian Tamils

Le National Council of Canadian Tamils (NCCT) se décrit comme une organisation sans but lucratif créée en 2010 et composée de représentants élus à la grandeur du Canada. Ce type de conseil national tamoul, qui a par ailleurs été reproduit en Norvège, en Suisse, en Italie et en France, vise le renforcement des communautés tamoules nationales (TamilNet 2010a). Bien que ses objectifs visent davantage le bien-être, ainsi que le développement politique, social et économique des Tamouls-Canadiens, le NCCT appuie également la résolution Vaddukoddai de 1976, en plus de militer pour la reconnaissance du génocide (National Council of Canadian Tamils, S.d.).

En consultant le site web du NCCT, il est possible de prendre connaissance des dernières campagnes de mobilisation de l’organisation, qui s’articulent autour de deux thèmes principaux: (i) la reconstruction des communautés tamoules au Sri Lanka et (ii) la sensibilisation politique et sociale des Tamouls-Canadiens. Par ailleurs, à chaque année, le NCCT organise deux évènements de commémoration. D’abord, la journée du Black July consiste à se rappeler des émeutes anti- tamoules qui se sont propagées à la grandeur du Sri Lanka au mois de juillet 1983 et qui marquent, du même coup, le début de la guerre civile sri lankaise. Ensuite, la deuxième journée de commémoration a lieu au mois de mai et s’organise, quant à elle, autour de la reconnaissance du génocide. En effet, elle vise à ce que la communauté internationale prenne connaissance des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et du crime de génocide dont ont été victimes les

Tamouls au Sri Lanka et dont ils sont encore victimes : « The protracted genocide of the Tamils today is carried out through a brutal military occupation, and a deliberate program of Sinhala colonization and settlements » (National Council of Canadian Tamils, S.d.). Partenaire officiel de TAG (TamilNet 2010b), leur portail web renvoie à une liste de ressources facilement accessibles, dont divers rapports sur le génocide tamoul et sur les violations des droits de l’homme commises par le gouvernement du Sri Lanka.

Sommairement, le NCCT se définit comme suit: « a grassroots organization composed of publicly elected representatives from across Canada that serves to organize Tamil-Canadians on a democratic and cooperative basis » (National Council of Canadian Tamils, S.d.). Bien que ses objectifs ne soient pas plus amplement élaborés, nous avons sélectionné cet acteur collectif en raison de sa nature, qui diffère des deux organisations précédentes. D’une part, en tant que conseil national, le NCCT ne fait pas partie du GTF, contrairement à plusieurs organisations nationales qui en sont membres. Amarasingam (2013) note également que certains perçoivent le NCCT comme étant en compétition avec le CTC, ce dernier faisant partie du GTF. D’autre part, son échelle d’action est différente et pertinente. Bien que ses actions soient organisées au niveau local, elles s’inscrivent toutefois au sein d’une mobilisation transnationale, notamment lors de la journée de commémoration du génocide qui a lieu simultanément dans plusieurs villes européennes et nord-américaines le 18 mai de chaque année. Dans cette optique, la cible de leur rallye de commémoration du génocide demeure également transnationale, puisqu’il s’agit de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Enfin, contrairement aux deux premiers acteurs collectifs présentés ci-dessus, le NCCT n’a aucun lien

présumé avec le LTTE, ses membres, ses réseaux et son idéologie. Pour cette raison, nous le catégorisons à titre de nouvel acteur collectif, au même titre que TAG.

3.2 TamilNet

Dans l’optique où la sphère publique diasporique virtuelle agit à titre de structure mobilisatrice12, il semblait adéquat et juste de construire notre échantillon discursif à l’aide du cyberespace. Autrement dit, puisque le cyberespace facilite non seulement l’émergence d’acteurs diasporiques, mais aussi la diffusion de leurs discours à une échelle transnationale (Parham 2005), ce présent mémoire utilise celui-ci comme terrain d’analyse. Encore une fois, puisque l’objet de ce mémoire demeure le cadrage des actions collectives de la diaspora, il semble évident d’opter pour un terrain d’analyse transnational, dans lequel on peut identifier le discours des acteurs collectifs. Ceci dit, nous pensions a priori pouvoir utiliser les sites web de chaque organisation à titre de sources primaires afin d’en extraire le discours de chaque acteur et d’identifier les cadres. Toutefois, la nature des documents disponibles sur chaque site web étant très hétéroclite il aurait été particulièrement difficile d’en faire une analyse systématique. Par conséquent, nous nous sommes tournés vers TamilNet, un média diasporique en ligne depuis 1997.

TamilNet se définit comme étant un service d’information indépendant, sans but lucratif, basé à l’extérieur du Sri Lanka, qui rapporte et rassemble les nouvelles concernant le Sri Lanka et plus particulièrement les communautés tamoules vivant dans le nord-est du pays (TamilNet 2005). Bien que le site insiste sur sa crédibilité, ainsi que sur son indépendance, TamilNet a                                                                                                                

souvent été perçu comme étant un média pro-Tigres, agissant à titre de porte-voix pour le LTTE, notamment par le gouvernement sri lankais (Ubayasiri 2006). En revanche, son importance et sa pertinence sont non négligeables et ne peuvent être écartées de nos considérations à son égard (Whitaker 2004; Wayland 2004) particulièrement puisque son site internet échappe à la censure du gouvernement sri lankais (Ubayasisi 2006). En effet, TamilNet offre une alternative pertinente aux médias de masse sri lankais:

Tamilnet has become a leading source on conflict related news, with more than 20,000 reports published since its inception as a website in June 1997, and a significant number of reports prior to its web-presence as a internet based wire-service, with records indicating its existence as a mailing list as early as January 1996 (Ubayasisi 2006, 2).

Au-delà de sa pertinence dans le paysage médiatique sri lankais, TamilNet revêt une importance particulière au sein de la sphère publique diasporique tamoule, adéquatement résumée par Whitaker (2004) :

I remember thinking, as I went back to my own room to write up my notes and prepare for the interviews I would be doing that day, how very domestic were the circumstances of Tamilnet.com's production—and how much Tamil people in the diaspora depended on it. All the Tamil adults that I interviewed that summer in Toronto and London (twenty-five in all) reported that they checked Tamilnet.com (among other websites) for news several times a week (480).

En plus de son utilité et de son usage presque quotidien par les membres de la diaspora tamoule, Eriksen (2006) ajoute qu’à titre de réseau transnational de nouvelles, TamilNet renforce le sentiment d’appartenance à la nation tamoule et, qu’en ce sens, il contribue à la formation identitaire des Tamouls vivant dans la diaspora. Kumar (2012), quant à elle, constate que la

diaspora tamoule est particulièrement active sur le web et utilise TamilNet comme un outil stratégique afin d’enrichir les débats concernant le conflit sri lankais.

Ainsi, notre choix d’utiliser TamilNet pour construire notre échantillon d’articles s’explique d’une part, par son usage répandu au sein de la diaspora tamoule et d’autre part, par la place qu’il occupe dans la sphère publique sri lankaise, à titre de média indépendant offrant une alternative aux médias de masse sri lankais. Ceci dit, nous nous pencherons maintenant sur la construction de notre échantillon d’articles par l’entremise de la banque d’archives de TamilNet, pour ensuite présenter notre grille de codage.