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5. Vers le transport routier électrique : Le projet GREEN TRUCK

5.2. Motivation

Les changements climatiques sont potentiellement l’une des plus graves menaces environ-nementales auxquelles notre planète est aujourd’hui confrontée, c’est pourquoi sa protection devient un des défis majeurs. S’il est difficile de déterminer la cause principale de ce phé-nomène, des études spécifiques placent les transports largement en tête devant l’industrie, le

5.2. MOTIVATION 106

résidentiel-tertiaire et l’agriculture en termes de leurs contributions aux émissions de gaz à effet de serre (GES).

En France, comme partout dans le monde, les émissions de GES liées aux transports connaissent depuis des décennies une progression quasi ininterrompue et les projections pour les années à venir sont alarmantes. En termes de répartition statistique, le secteur de transport jusqu’en 2013 est responsable de près de 26.9% des émissions de GES comme le montre la figure1.

Déchets 4% Procédés industriels 8,2% Agriculture 16,2% Industrie de l'énergie 10,6% Transport 26,9% Industrie manufacturière et construction 13,0% Résidentiel 12,0% Tertiaire 5,7% Agriculture 2,6% Autres 0,9% Utilisation de l'énergie 71,6 %

Source : Agence européenne pour l'environnement, octobre 2015

FIGURE1. Répartition par source des émissions de GES en France en 2013.

Voulant lutter contre ces pollutions atmosphériques ainsi que contre ce réchauffement clima-tique causé par le GES, la France en tant que pays industriel s’est particulièrement mobilisée pour définir, optimiser et maîtriser sa consommation d’énergie fossile (essence, diesel, gaz) en adoptant des nouvelles technologies propres. Et c’est ainsi qu’est né le concept de renaissance énergétiquechez le gouvernement français en admettant la nécessité d’adopter de nouvelles mesures dont, entre autres, l’exploitation des énergies renouvelables, le développement du-rable, les nouvelles technologies et les découvertes de nouvelles ressources. Cette politique de transition énergétique concerne, en premier lieu, le secteur de transport routier de marchandises qui doit intégrer des véhicules hybrides ou entièrement électriques.

Le projet Green Truck s’inscrit dans cette optique visant à adhérer l’activité des acteurs portuaires dans un développement durable avec moins de pollution atmosphérique et une em-preinte carbone plus faible grâce à une transition énergétique réussie. L’activité plus particuliè-rement visée est celle du transport routier du dernier kilomètre sur la zone industrialo-portuaire du Havre. Pour ce projet réalisé en six mois, un partenariat a été constitué. Il est composé de :

5.3. CONTEXTE INDUSTRIEL 107

• Le porteur du projet : le GPMH en tant qu’aménageur du domaine portuaire, assisté d’un cluster nommé O.I.E. (Observatoire de l’Innovation dans l’Énergie) regroupant des industriels engagés dans le développement de la route électrique.

• Des utilisateurs finaux, acteurs du transport : Transports DUBOC en tant que transporteur routier et la GMP en tant que gestionnaire de terminal maritime.

• Des laboratoires de l’université du Havre et de l’INSA de Rouen (Institut National des Sciences Appliquées) :

V Le LMAH, Laboratoire de Mathématiques Appliquées du Havre, en charge de la mo-délisation des routes des véhicules et de l’optimisation des solutions techniques.

V Le GREAH, Groupe de Recherche en Electrotechnique et Automatique du Havre, en charge du calcul des besoins énergétiques.

V Le NIMEC, Normandie Innovation, Marché, Entreprise, Consommation, en charge des calculs et des analyses économiques.

V Le LITIS, Laboratoire d’Informatique, de Traitement de l’Information et des Systèmes, en charge de l’élaboration d’une interface homme-machine permettant aux futurs conduc-teurs d’appréhender les spécificités de la traction électrique.

5.3. Contexte industriel

5.3.1. Problématique et objectifs. — Le port du Havre, le premier port en France en termes de trafic conteneurisé, contribue avec une bonne part aux émissions de GES. Dans l’objectif de limiter ces émissions, le Grand Port Maritime du Havre (GPMH) en association avec les partenaires cités auparavant ont lancé une étude sur la faisabilité d’une alternative électrique au transport terrestre des marchandises. La région Normandie, y voit une opportunité écologique si la viabilité économique est prouvée. L’étude, appelée Green Truck, porte sur la logistique du dernier kilomètre en milieu portuaire. Autrement dit, son terrain de jeu se limite à la zone portuaire du Havre présentée sur la figure 2. Le long de ce territoire, se sont implantés des activités en relation avec le transfert des marchandises entre les navires et les différents modes terrestres ; le routier, le fluvial et le ferroviaire mais aussi des activités industrielles attirées par l’accès aisé aux matières premières (centrale thermique au charbon, raffinerie, pétrochimie, etc).

Le transfert des marchandises conteneurisées s’est accompagné d’un développement de ser-vices logistiques tels que le dépotage et rempotage des conteneurs, le stockage et la réparation des conteneurs. Ces différentes activités génèrent des flux importants de véhicules routiers à l’intérieur de la zone portuaire. À cet effet, le projet Green Truck s’intéresse à trois types d’ac-tivités routières :

5.3. CONTEXTE INDUSTRIEL 108

FIGURE2. La zone industrialo-portuaire du Havre.

• Pré- et post-acheminement portuaire : c’est le transport de conteneur, vide ou plein, entre un terminal maritime et le dépôt d’un transporteur situé en zone portuaire sans dépotage ni empotage mais dont la destination finale est hors zone portuaire, dans un sens et l’autre. • Traction portuaire ou brouettage (jargon) : C’est le transport de conteneur, vide ou plein, entre un terminal maritime et un entrepôt situé sur le domaine portuaire pour une opération de dépotage et/ou d’empotage.

• Trafic de conteneurs vides : c’est le transport de conteneurs vides appartenant aux compa-gnies maritimes qui doivent leur être restitués dans un dépôt de conteneurs vides de la zone portuaire, une fois qu’ils ont été déchargés en France par un transporteur routier ou dans un centre logistique de la zone portuaire par un manutentionnaire. En sens inverse, ces mêmes acteurs doivent aller y chercher des conteneurs vides qui auront été nettoyés et réparés par les gestionnaires de dépôts de vides.

En ce qui a trait au mode de travail, les chauffeurs des transporteurs routiers travaillent à la journée sur une amplitude de 10 à 11 heures et réalisent 5 à 6 missions par jour. Quant aux Dockers(1), ils travaillent par shifts(2)de 7 heures et réalisent entre 2 et 3 missions par shift. Pour la plupart, ces missions sont des allers-retours d’une distance comprise entre une vingtaine et une quarantaine de kilomètres. De plus, ces missions sont effectuées suivant un système de rendez-vous mis en œuvre dans les terminaux maritimes. À chaque origine et destination, il existe des temps d’attente causés par les procédures administratives et par la manutention des conteneurs. Ces temps d’immobilisation des véhicules sont de l’ordre d’un quart d’heure sur les terminaux maritimes, de 5 à 10 minutes chez les transporteurs routiers et quasiment inexistants chez les dépôts de vides (il y a aussi parfois des temps d’attente aussi chez les gestionnaires des dépôts de vides, mais ils sont dus à des encombrements et sont trop aléatoires).

1. Ouvriers travaillant sur les docks au chargement ou au déchargement des navires, et assurant la manutention dans les entrepôts.

5.3. CONTEXTE INDUSTRIEL 109

L’objectif est donc de profiter de ces arrêts d’exploitation pour recharger, en temps masqué, la batterie des véhicules. En résumé, notre contribution à la fois stratégique et opérationnelle, porte sur deux points :

• Faire une analyse critique du réseau actuel de transport par véhicules thermiques pour une meilleure maîtrise des coûts de transport. Cette analyse porte aussi bien sur les moyens que sur les itinéraires empruntés par les véhicules thermiques qui transportent des conteneurs entre les différents acteurs portuaires (transporteurs routiers, terminaux maritimes, zones logistiques, etc.).

• Étudier la mise en œuvre des conditions d’une transition des véhicules thermiques vers des véhicules électriques. Cette transition se traduit par (1) le choix de la technique et le mode de recharge des batteries de véhicules électriques, (2) l’allocation optimale d’infrastructure des véhicules électriques, compte tenu de la technique adoptée et des contraintes techniques et pratiques de la traction portuaire, et enfin (3) l’optimisation de ces itinéraires en fonction de la nouvelle source d’énergie tout en maintenant la qualité de service, quel que soit le trafic présent sur la zone portuaire.

5.3.2. Caractéristiques du problème. —

• Différentes zones desservies : terminaux maritimes, bases logistiques, dépôts de vides et entrepôts des transporteurs routiers (transports DUBOC).

• Nature du transport de marchandises : déterministe. • Type de produit transporté : conteneur.

• Type de transport considéré : transport routier. • Type de la flotte utilisée : hétérogène.

• Durée d’utilisation d’un véhicule : connue et fixée.

• Temps de chargement/déchargement, empotage/dépotage : connus (en moyenne).

• Horaire d’arrivée du transporteur routier au terminal : connu. Il s’agit d’une réservation d’une fenêtre de temps "rendez-vous" d’une heure durant laquelle le routier doit se présenter.

5.3.3. Hypothèses. —

• Les conteneurs sont numérotés selon leur ordre de priorité, puisque les plans de transfert routier de conteneurs sont connus à l’avance.

• Il existe deux types de conteneurs : import et export.

• Deux conteneurs au maximum peuvent être chargés sur la même remorque du véhicule. • Les véhicules opérationnels sont considérés comme suffisants pour remplir leurs missions. • À part l’heure de midi, les véhicules sont opérationnels durant tout le temps de service.