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Dans cette section nous détaillons les diérentes motivations de l'étude des isotopes

18B,19B ainsi que 21C,22C. La première partie de la section traite de la modélisation des systèmes à trois corps alors que la deuxième s'intéresse à l'évolution de la structure en couches à l'approche de la drip line neutron

1.2. Motivation de l'étude 13

1.2.1 Systèmes à trois corps

Le 19B et le 22C sont les derniers isotopes liés de carbone et de bore et ont été découverts au milieu des années 80 [26, 27]. Au moment où l'étude a été réalisée, ces isotopes sont les noyaux à halo de deux neutrons les plus lourds connus. Leurs ratio N/Z étant particulièrement élevé il a fallu attendre plus d'une décennie après leur découverte, pour que les premières mesures sur ces noyaux soient réalisées.

La première mesure sur le19B fut eectuée par Suzuki et collaborateurs à travers la mesure de la section ecace de réaction à très haute énergie [28]. Le rayon de l'isotope a été déduit de cette mesure, montrant une extension spatiale supérieure à celle du17B et suggérant la présence d'un halo de deux neutrons (voir gure 1.2.1). Ultérieurement une mesure de masse fut réalisée par Gaudefroy et collaborateurs (voir gure1.2.3) montrant que l'énergie de liaison de l'isotope était particulièrement faible4: S2n = 0.14±0.39MeV [29]. En utilisant le modèle simple de Hansen et Jonson [15] cette mesure du rayon fut utilisée an d'estimer la conguration des neutrons de valence du noyau. Les conclusions semblaient soutenir une conguration fortement dominée par ν(1d5/2)2 pour les deux neutrons du halo.

Figure 1.2.1: Évolution du rayon des isotopes de bore en fonction du nombre de neutrons du noyau. Les résultats entourés sont ceux obtenus par Suzuki et collaborateurs pour les isotopes de

17B et 19B. La valeur importante du rayon de ces deux isotopes, comparée à celles des autres

isotopes de bore, indique la présence d'un halo de neutrons. Les diérentes lignes représentent des calculs théoriques réalisés pour interpréter les résultats expérimentaux. Pour plus de détails voir l'article [28].

En ce qui concerne le 22C la première étude expérimentale fut une mesure de section ecace de réaction. Cette dernière fut réalisée récemment par Tanaka et collaborateurs

Figure 1.2.2: Évolution du rayon des isotopes de carbone en fonction du nombre de neutrons. Les cercles pleins correspondent aux mesures expérimentales et les cercles vides à des prédictions

théoriques. L'isotope entouré en rouge est celui de22C. La valeur mesurée du rayon de ce noyau

étant signicativement plus grande que celle des autres isotopes de carbone, elle laisse supposer la formation d'un halo de neutrons. Pour plus de détails voir l'article [30].

[30] à 40 MeV/nucl´eon. Les résultats montrèrent une section ecace beaucoup plus large que celle du20C et du 19C (voir gure1.2.2). La mesure de la masse par Gaudefroy et collaborateurs [29] montra que l'énergie de liaison était particulièrement faible (S2n ≤ 0.32MeV) soutenant une image de noyau à halo. Dans les deux articles précédents, les interprétations amenèrent à indiquer que la structure des neutrons de valence de l'isotope était fortement dominée par la conguration ν(2s1/2)2 pour les deux neutrons du halo.

An de pouvoir construire une modélisation de ces systèmes à trois corps il est impor-tant de disposer d'une description précise des interactions dans les sous-systèmes non liés (17B+n+n et20C+n+n). Si l'interaction neutron-neutron a déjà été étudiée par l'inter-médiaire de réactions où deux neutrons interagissent dans l'état nal, les sous-systèmes c÷ur-neutron18B et21C sont très mal connus.

Diérentes études théoriques ont souligné l'importance de l'étude de ces sous-systèmes non liés an de comprendre la structure des noyaux à halo de deux neutrons. On peut notamment mentionner l'étude théorique réalisée par Thompson et collaborateurs qui ont montré que l'introduction d'un état virtuel, près du seuil neutron, dans le10Li et le

1.2. Motivation de l'étude 15

Figure 1.2.3: Évolution des énergies de séparation de deux neutrons S2n en fonction du

nombre de neutrons pour diérentes chaines isotopiques [29]. La diminution générale de cette

énergie de séparation traduit la diminution de l'énergie de liaison des neutrons dans les isotopes à l'approche de la drip-line. La valeur particulièrement faible de S2n pour les isotopes19B et22C (entourés en bleu) est l'une des conditions nécessaires à la formation d'un halo de neutrons.

1.2.2 Évolution des orbitales de la couche s-d

Outre leur rôle dans la compréhension des systèmes à trois corps, les isotopes 18B,

19B et21C,22C représentent un intérêt important en terme d'évolution de la structure en couches autour de N = 14 et N = 16.

Dans la sous section1.1.2 nous avons mentionné que la vision du modèle à particules indépendantes montrait ses limites pour les noyaux riches en neutrons, avec notamment une évolution de l'ordre des orbitales. En particulier, les isotopes d'oxygène et de carbone présentent de nouveaux nombres magiques N = 14 et N = 16 loin de la stabilité. Cette observation fut faite par Stanoiu et collaborateurs dans le cadre d'une étude par spectroscopie des rayonnements gamma portant sur les isotopes riches en neutrons du carbone et de l'oxygène. (voir gure1.2.4).

La comparaison de l'évolution de l'énergie du premier état excité 2+ des isotopes d'oxygène d'un part, et des isotopes de carbone d'autre part, permet de mettre en avant deux tendances distinctes. An de les interpréter, Stanoiu et collaborateurs se sont ap-puyés sur les prédictions d'un calcul de modèle en couches. L'énergie du premier état excité des isotopes pair-pair est généralement utilisée pour quantier la position relative des diérentes orbitales. En eet l'excitation d'un isotope correspond, en utilisant un modèle en couches naïf, à la promotion d'un nucléon sur l'orbitale supérieure et permet donc d'estimer l'énergie séparant les deux orbitales. L'étude de Stanoiu et collaborateurs

Figure 1.2.4: Comparaison des énergies mesurées du premier état excité 2+ pour les chaines isotopiques de l'oxygène et du carbone. Cette comparaison est mise en relief avec l'évolution des énergies des orbitales eectives neutron uni-particule prédites par un calcul de modèle en couches. L'énergie du 2+des isotopes de22O et24O, mis en évidence par les lignes verticales, est signicativement plus importante que celle des autres isotopes d'oxygène et marque l'apparition des nombres magiques N = 14 et N = 16. Figure adaptée de [8] avec les résultats de [33].

a montré que les isotopes d'oxygène présentent l'apparition de nouveaux nombres ma-giques N = 14 et N = 16, ceux-ci provenant de l'évolution relative des orbitales neutron uni-particule 2s1/2, 1d5/2 et 1d3/2. Les isotopes de carbone montrent, quant à eux, un rapprochement de ces deux premières orbitales qui deviennent dégénérées pour N = 16. L'évolution des orbitales pour les isotones N = 14 a été partiellement étudiée. Dans un premier temps, l'isotope de 20C fut étudié par spectroscopie gamma [34]. Puis, dans un second temps, l'isotope de 21N fut étudié à partir de la même méthode [35]. Ces études montrèrent une diminution de l'écart entre les orbitales 1d5/2 et 2s1/2 marquant une diminution du caractère magique N = 14.

En ce qui concerne le nombre magique N = 16, la mesure de l'état excité 2+ du 22C permettrait d'observer si l'écart entre les orbitales 2s1/2 et 1d3/2 est similaire à celui vu pour l'24O. Une expérience de mesure de la section ecace de cassure du22C réalisée par Kobayashi et collaborateurs semble indiquer à ce titre que l'état fondamental du noyau serait dominé par une conguration neutron (2s1/2)2 [36].