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Morphologie d’une barkhane

5.3 Barkhanes aquatiques : résultats

5.3.4 Morphologie d’une barkhane

Nous étudions maintenant en détails la morphologie d’une barkhane dont la reconstruction par PTF est visible sur la figure 5.20. Cette barkhane particulière est constituée de grains de verre de diamètre Dv50= 130 µm, la vitesse de cisaillement du canal vaut uτ = 18.7 mm/s (Re = 26600). Cette dune se déplace à la vitesse vd = 0.99 mm/s, a une hauteur maximale H = 4.1 mm, sa longueur L est de 41.4 mm, sa largeur W est de 53.5 mm et la longueur moyenne de ses cornes vaut Lc= 8.2 mm. Le durée qui s’est écoulée depuis le lancement du canal pour aboutir à cette dune est t = 129.3 s soit en temps adimensionnel t/tc = tvd/L '3. D’après le paragraphe 5.3.2, on peut raisonnablement dire que la barkhane de la figure5.20est dans un état stationnaire.

Dans la suite, on s’inspire du travail deSauermann et al. (2000) propo- sant de décrire la morphologie 3D des barkhanes à partir d’un jeu de trois paraboles dont les paramètres sont déterminés par régression de mesures de la forme de dunes de terrain (barkhanes éoliennes). En effet,Sauermann

et al. (2000) utilisent deux profils de hauteur (un dans le plan de symétrie, un dans le plan transverse passant par le sommet de la dune) ainsi que le bord de la face d’avalanche (projetée sur le plan horizontal) pour décrire complètement le dos de leurs dunes ; au delà du bord, Sauermann et al. (2000) fixent la pente comme étant égale à la pente d’avalanche. L’ensemble

Figure 5.20 – Morphologie 3D d’une barkhane à l’équilibre (grains de verre,

Dv50 = 130 µm, uτ = 18.7 mm/s). La ligne continue blanche repère le plan de symétrie (cf. figure 5.21 (a)), la ligne blanche discontinue passe par le sommet et coupe la dune transversalement (cf. figure 5.21 (b)), la ligne blanche pointillée repère le pied de la face d’avalanche (cf. figure 5.22).

Figure 5.21 – Profils de hauteur dans le plan de symétrie (a) et dans le plan transverse (b) de la dune de la figure5.20. ( ), ajustements parabo- liques, cf. équations (5.28) et (5.29). Les longueurs caractéristiques lp, hp et

wp seront utilisées dans la suite pour adimensionnaliser les axes x, y et z respectivement.

paraboloïde/face d’avalanche ainsi obtenu a une forme très similaire aux barkhanes naturelles.

La figure5.21montre que les profils de hauteur de notre barkhane dans le plan de symétrie (ligne continue noire, cf. figure5.21(a)) et dans le plan transverse passant par le sommet de la dune (ligne discontinue noire, cf. figure5.21(b)) sont très proches de paraboles (courbes bleues). De la même manière que dans l’article deSauermann et al. (2000), on adimensionne les axes x, y et z en prenant pour longueurs caractéristiques respectives lp la demi-longueur de la parabole de la figure5.21(a), hpsa hauteur maximale et

wpla demi-largeur de la parabole de la figure5.21(b). Les nouvelles variables sans dimension sont alors notées ˜x, ˜y et ˜z. Cet adimensionnement présente l’avantage de simplifier l’écriture des différentes équations des paraboles. La parabole dans le plan de symétrie (cf. figure5.21(a)) vérifie alors (l’origine des ˜x est fixée au pied de la dune) :

˜y = −˜x(˜x − 2), (5.28)

où ˜y = y/hp et ˜x = x/lp avec, ici, hp = 5.7 mm et lp = 67.3 mm. Dans le plan transverse passant par le sommet (cf. figure 5.21 (b)), la parabole a pour équation (l’origine des ˜z correspond au plan de symétrie) :

˜y = 0.7(1 − ˜z2), (5.29)

où ˜z = z/wp avec wp = 25.4 mm et le facteur 0.7 provient du rapport des hauteurs maximales des paraboles dans les plans transverse et de symétrie (4.1/hp = 4.1/5.7 ' 0.7).

On construit un paraboloïde en s’appuyant sur les équations (5.28) et (5.29) de sorte que le maximum de la parabole transverse (cf. figure5.21(b)) coïncide avec celui de la parabole du plan de symétrie selon ˜x (cf. fi- gure5.21 (a)). L’équation de la surface d’un tel paraboloïde est :

˜ydos= −˜x(˜x − 2) − 0.7˜z2. (5.30)

La formule (5.30) décrit le dos de la barkhane, elle est valable uniquement pour ˜ydos0 et pour tout ˜x et ˜z effectivement sur la face amont de la dune. On peut s’attarder sur la première condition (˜ydos ≥ 0) et en particulier chercher l’intersection du paraboloïde avec l’horizontale (˜ydos = 0) qui se réécrit :

(˜x − 1)2+ ˜z2

(1/0.7)2 = 1. (5.31)

On reconnaît l’équation d’une ellipse dont les coordonnées du centre sont (˜x, ˜z) = (1, 0) avec un demi-petit axe (selon ˜x) de longueur 1 et un demi- grand axe (selon ˜z) de longueur 1/0.7 ' 1.2.

Si on revient au cas de la barkhane, il nous reste maintenant à décrire la face d’avalanche. Nous faisons un choix différent de Sauermann et al. (2000) qui utilisent le bord de la face d’avalanche pour délimiter le dos de la dune et sa face d’avalanche. Ici, le bord n’est pas aisément repérable car la transition entre la crête (le point le plus haut de la dune) et le début de la face d’avalanche se fait de manière continue et non de façon abrupte (cf. figure 5.21 (a)). Pour cette raison, on utilise plutôt le pied de la face

Figure 5.22 – Position du pied de la face d’avalanche de la dune de la figure5.20. ( ), ajustement parabolique, cf. équation (5.32).

d’avalanche qu’on trace (en version adimensionnelle) à la figure 5.22. Un troisième et dernier ajustement parabolique nous permet d’obtenir :

˜xpied= −0.18˜z2+ 0.59. (5.32)

On utilise la valeur usuelle de l’angle de repos soit Θr = 30◦ (valeur en accord avec nos mesures) et on génère la face d’avalanche avec des droites de pente − tan(Θrπ/180) = −0.58, telles que :

˜yavlch= −0.58lp/hp(˜x − ˜xpied) = −6.8(˜x − ˜xpied), (5.33) avec ˜xpied donné par l’équation (5.32).

Nous avons désormais toutes les informations nécessaires pour recons- truire complètement la barkhane : on utilise l’équation (5.30) pour le dos de la dune et les équations (5.32) et (5.33) pour la face d’avalanche. Il reste cependant à déterminer l’intersection des deux faces : pour ˜z fixé, il suffit d’égaliser les équations (5.30) et (5.33) et de résoudre l’équation du second degré en ˜x ainsi obtenue pour trouver la position du bord ˜xbord de la face d’avalanche.

Le résultat de notre paramétrisation de la morphologie de la barkhane est visible sur la figure 5.23 (b) avec en regard, la barkhane expérimentale sur la figure5.23(a). La courbe noire en trait plein correspond à la réunion de l’ellipse (5.31) et de la parabole du pied (5.32), la courbe noire en trait pointillé marque le bord de la face d’avalanche. Qualitativement, on voit que l’accord entre les deux morphologies 3D semble être bon ; en particulier l’ellipse du pied de la face amont (qui est en quelque sorte une prédiction de la "modélisation") coïncide bien avec la forme du pied amont expérimental.

Figure 5.23 – (a) Morphologie 3D de la barkhane de la figure 5.20 avec les axes adimensionnés. (b) Résultat de la "modélisation" de la barkhane à partir de paraboles. La ligne continue noire correspond au pied de la barkhane "modèle" et la ligne discontinue à sa ligne de crête c’est-à-dire à l’intersection entre le dos et la face d’avalanche.

Figure 5.24 – ( ) et ( ), profils de hauteur de la dune de

la figure 5.23 (a) dans le plan de symétrie (˜z = 0) et pour

˜z = ±0.2, ±0.4, ±0.6, ±0.8, ±1. ( ), profils de la dune "modèle" (cf. figure5.23 (b)) en ˜z = 0, 0.2, 0.4, 0.6, 0.8, 1 (la dune est symétrique).

Figure 5.25 – Profils de hauteur des dunes des figures5.23(a) et (b) dans les plans ˜x = 0.1, 0.2, 0.3, 0.4 (a) et ˜x = 0.5, 0.55, 0.60, 0.65 et 0.7 (b). ( ), dune expérimentale. ( ), dune "modèle".

On fait une comparaison plus quantitative des deux dunes en présentant des profils de hauteur selon ˜x et ˜z aux figures 5.24 et 5.25 respectivement. Les profils longitudinaux (cf. figure 5.24) de la dune modèle (lignes pleines rouges) collent assez bien avec la dune expérimentale (lignes pleines et poin- tillées noires), et ce, d’autant plus qu’on est proche du plan de symétrie. Sur les côtés, cependant, on voit que la dune "modèle" surestime la hauteur des cornes. Le bord de la face d’avalanche est aussi très marqué contrairement

à celui la barkhane de laboratoire qui est arrondi. La figure5.25(a) montre un accord très satisfaisant entre les profils transverses sur le dos de la dune. Au delà du bord d’avalanche, des différences morphologiques un peu plus importantes sont visibles (cf. figure 5.25 (b)) et, en particulier, au niveau des cornes.

En conclusion, nous pouvons dire que le dos de notre barkhane aquatique est très bien décrit par le paraboloïde de l’équation (5.30). En ce qui concerne les cornes et le bord et la face d’avalanche, la barkhane "modèle" reproduit qualitativement la forme expérimentale même si on peut noter des différences non négligeables.