La monoubiquitination de l’histone H2A sur la lysine119 (H2AK119ub) est une MPT abondante, comptant pour environ 10% du total d’histone H2A chromatinienne. Cette MPT est le premier exemple d’ubiquitination d’une protéine à avoir été décrit (Ericsson, Goldknopf, et Daneholt 1986). H2AK119ub est impliqué dans la régulation de nombreux processus touchant au génome dont la réparation de l’ADN (Kakarougkas, Downs, et Jeggo 2015a; Lin et al. 2015).
PRC1 (Polycomb Repressive Complex 1) est responsable de la monoubiquitination d’H2AK119, via ses sous‐unités catalytiques RING1B accompagnée de BMI1 ou MEL18, formant le cœur du complexe (Hengbin Wang et al. 2004; Z. Li et al. 2006). PRC1 et PRC2 sont des régulateurs bien connus de la transcription. Ce sont deux complexes multiprotéiques composés de différentes sous‐unités et possédant donc une activité distincte. PRC2 catalyse la triméthylation d’H3K27 (Schwartz et Pirrotta 2014).
De façon intéressante, l’inhibition de l’ARN polymérase I et II au niveau des CDB est dépendante à la fois de l’activation d’ATM et de la monoubiquitination d’H2AK119 (Shanbhag et al. 2010; Harding, Boiarsky, et Greenberg 2015), suggérant un rôle important d’H2AK119ub dans la répression de la transcription (Shanbhag et al. 2010). BMI1/RNF2 étant recrutées au niveau des CDB, H2AK119ub permettrait d’inhiber la transcription au niveau des CDB afin de faciliter leur réparation (Ginjala et al. 2011).
Schéma 13 : Illustration u rôle de PRC1 au niveau de l’histone H2A au cours de la DDR.
4) Implication des déubiquitinases (DUB) d’histone H2A/H2A.X
Étant donné l’importance de la mono‐ ou poly‐ ubiquitination d’H2A/H2A.X, la régulation de cette MPT par des déubiquitinases est un aspect important à considérer. Près d’une décennie plus tôt, l’étude de DUB telle que BRCC36, USP3 ou USP16 a montré l’importance de ces dernières dans la réparation de l’ADN (Nicassio et al. 2007a; Doil et al. 2009; Shanbhag et al. 2010). Depuis, plusieurs travaux, dont des screening réalisés par siARN, ont montré une connexion entre de multiples DUB et la DDR (Panier et Durocher 2009; S. P. Jackson et Durocher 2013; Nishi et al. 2014).
Le génome humain code approximativement 90 DUB divisées en cinq familles suivant leur domaine catalytique, leur structure ou leur fonction (Clague et al. 2013). Ces cinq familles sont : - les protéases ubiquitine‐spécifiques ou USP. - les hydrolases d’ubiquitine en C‐terminal ou UCH. - les protéases à domaine OTUB ou OTU - les protéases de la maladie Machado‐Joseph ou MJD - et les métalloprotéases à domaine JAMM.
Parmi ces DUBS, six USP (USP3, USP11, USP16, USP21, USP22 et USP44), une protéine UCH (BAP1) et deux métalloprotéases (MYSM1 et BRCC36) ont montré une activité envers l’histone H2A ubiquitinée (Belle et al. 2015), et certaines, comme introduit précédemment, possèdent un rôle dans la DDR.
a) USP3
USP3 déubiquitine H2AK13/15mono‐ub en réponse à un événement clastogène et affecte donc le recrutement de 53BP1 (Doil et al. 2009; Sharma et al. 2014). Un modèle murin USP3 KO montre des niveaux élevés d’H2A et H2B monoubiquitinées, une diminution progressive du pool de cellules souches hématopoïétiques, un défaut de réparation des CDB ainsi qu’une prédisposition tumorale (Lancini et al. 2014a).De manière générale, USP3 semble impliqué dans différents processus cellulaires allant d’une régulation de la phase S (Nicassio et al. 2007b), à la maintenance des cellules souches hématopoïétiques (CSH) (Lancini et al. 2014b). Concernant la DDR, USP3 apparait essentielle pour la
la souris USP3 KO (Lancini et al. 2014b). Cependant, le mode d’action d’USP3 est encore incertain. USP3‐GFP ne montre aucun recrutement au niveau de CDB. Son action pourrait donc se révéler indirecte, via la déubiquitination de substrats encore inconnus (Gudjonsson et al. 2012; S. P. Jackson et Durocher 2013). Enfin, une surexpression d’USP3 catalytiquement active a démontré une inhibition du recrutement de RNF8 et 53BP1 au niveau de foyers de réparation (IRIF) sans affecter le signal pH2A.X (Mosbech et al. 2013). USP3 pourrait donc limiter la signalisation de RNF168 en antagonisant son activité d’ubiquitination.
b) USP16
USP16 est responsable de la régulation de la voie RNF8/RNF168 (Joo et al. 2007) et serait impliquée dans la répression transcriptionnelle au niveau des CDB (Shanbhag et al. 2010).
c) USP44
Après screening de multiples DUBs, USP44 a montré une implication dans la DDR ainsi qu’un recrutement, via USP44‐GFP au site de CDB (Nishi et al, 2014). De plus, une surexpression de cette dernière a démontré une importante réduction d’ubH2A au sein du génome (USP44 posséderait ainsi une activité envers H2AK119ub qui est la forme la plus abondante d’ubH2A), une réduction d’H2A mono‐, di‐ et tri‐ ubiquitinée et également une diminution du recrutement de RNF168 au site de cassures (Mosbech et al. 2013). USP44 affecte également de façon négative le recrutement de 53BP1 (Nicassio et al. 2007a), suggérant une activité directe en H2A antagonisant l’action de RNF1/RNF68. Paradoxalement, son recrutement an niveau des CDB semble dépendant de l’activité de RNF8/RNF168 (Mosbech et al. 2013).
USP44 semble ainsi partager certaines fonctions avec USP3. Une régulation de leur activité respective en fonction du cycle cellulaire ou de l’état de la chromatine serait alors envisageable.
d) USP51
USP51 déubiquitine spécifiquement H2AK13/15 in vitro. Au niveau cellulaire, une déplétion d’USP51 entraine une hypersensibilité aux RI, une augmentation des foyers 53BP1 et une disparition plus lente de ces derniers au cours du temps (Z. Wang et al. 2016).
e) BAP1
BAP1 pour BRCA1‐associated protein1 (également nommé UCHL2) possède une activité DUB envers H2AK119ub (Scheuermann et al. 2010). Un défaut de la DDR a pu être observé après déplétion de BAP1 via siARN (Ismail et al. 2014; H. Yu et al. 2014, 1), ainsi qu’une hypersensibilité au RI dans des cellules cancéreuses BAP1‐déficientes (Nishikawa et al. 2009; H. Yu et al. 2014). Parallèlement à ces résultats, une augmentation d’ubH2A/H2A.X est observable après RI et déplétion de BAP1 (Ismail et al. 2014; H. Yu et al. 2014), laissant donc supposer un rôle de BAP1 dans la régulation de la transcription au site de CDB. En effet, BAP1‐GFP est recruté au niveau de CDB générées par microirradiation laser (Ismail et al. 2014; Nishi et al. 2014).
Enfin, de manière similaire à BRCA1, une déficience cellulaire en BAP1 entraîne une hypersensibilité aux inhibiteurs de PARP, suggérant l’implication de BAP1 dans la voie RH (Ismail et al. 2014; H. Yu et al. 2014).
f) BRCC36
BRCC36 appartient à la famille MPN+/JAMM. Tout comme BAP1, BRCC36 est nécessaire pour une résistance normale des cellules aux RI (Dong et al. 2003). BRCC36 fait partie du complexe BRCA1 et possède une activité catalytique dirigée contre les chaines poly‐ubiquitine d’H2AK63. L’activité de BRCC36 antagonise celle de RNF168 paradoxalement responsable du recrutement du complexe BRCA1 (Shu et al, 2009). BRCC36 est fortement surexprimé dans un grand nombre de cancer du sein et posséderait donc un rôle dans la cancérogénèse (Dong et al. 2003).
g) Autres exemples de DUBs
Les exemples de DUBs détaillés ci‐dessus ne peuvent suffire à expliquer la complexité des processus régulant la DDR. Un grand nombre de DUBs possèdent une implication directe ou indirecte dans la DDR et peuvent agir sur des cibles bien plus diverses que les histones. Par exemple, USP47 permet de réguler la voie BER en ciblant la polymérase POL(beta) (Parsons et al. 2011). USP28 interagit avec 53BP1 et possède donc un rôle dans la voie NHEJ. De plus, une délétion d’USP28 entraine une hypersensibilité aux RI (D. Zhang et al. 2006, 28). OTUB1 inhibe l’activité de RNF168 en bloquant son interaction avec l’enzyme E2 UBC13 (Nakada 2016). Ou à l’inverse, USP34 qui permet de stabiliser