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Modulation de l’activité des enzymes impliquées dans la synthèse de l’amidon

2. La synthèse de l’amidon

2.6 Modulation de l’activité des enzymes impliquées dans la synthèse de l’amidon

Si la synthèse du glycogène ne nécessite qu’une seule forme de glycogène synthase et d’enzyme de branchement, l’édification d’une structure aussi complexe et ordonnée que l’amidon (qui implique plusieurs isoformes de synthase, d’enzymes de branchement et de débranchement) exige de ce fait une action coordonnée entre les enzymes impliquées dans son métabolisme.

En effet, la synthèse de l’amidon n’est pas le résultat d’une action séquentielle des enzymes de son métabolisme mais découle d’une synergie entre elles. Cela a été confirmé par l’analyse de mutant de plantes où l’absence d’une ou plusieurs enzymes du métabolisme de l’amidon impacte le fonctionnement des autres enzymes de ce métabolisme. Par exemple, dans le mutant amylose

extender du riz, qui correspond à une mutation du gène codant l’isoforme SBEIIb, la mutation de cette

dernière se répercute par une diminution de l’activité de SSI dans l’albumen (Nishi, Nakamura et al.

2001).Chez le maïs, la mutation de SBEIIb cause une réduction de l’activité de SBEI dans l’albumen

(Colleoni, Myers et al. 2003; Liu, Makhmoudova et al. 2009) etl’absence de SSIII engendre quant à elle

une diminution de l’activité de SBEIIa et de SSII, (Boyer and Preiss 1981; Cao, James et al. 2000). De la même manière, la mutation de SSIIa a montré un impact (réduction) sur l’activité dans l’albumen de SSI, SBEIIa et SBEIIb chez le blé, l’orge et le riz (Yamamori, Fujita et al. 2000; Morell, Kosar-Hashemi et al. 2003; Umemoto, Aoki et al. 2004; Umemoto and Aoki 2005).

Toutes ces observations indiquent l’existence de complexes enzymatiques

hétéromultimériques au sein desquels les enzymes fonctionneraient de manière coordonnée et se réguleraient entre elles.

La mise en évidence de la présence de complexes constitués de différentes isoformes de synthases et de BEs a été effectuée chez divers organismes. Dans les amyloplastes de blé, SBEI, SBEIIb

et une phosphorylase interagissent entre elles pour former un complexe dont la formation et le maintien sont rendus possibles par la phosphorylation de ces 3 enzymes (Tetlow, Wait et al. 2004). Il apparaît également que SSI, SSIIa et SBEIIa forment un complexe hétéromultimérique (Tetlow, Beisel et al. 2008). (Figure 21A).

Figure 21 : Représentation schématique des complexes retrouvés chez le blé et le maïs. Complexes

mis en évidence dans l’albumen de blé (Tetlow, 2004 et 2008) (A) et de maïs (B) (Hennen-Bierwagen 2008 et 2009). Les amidon-synthases I, IIa et III sont représentés en violet, bleu et rouge respectivement. La BE de type I et les deux isoformes de BEs de type II (a et b) sont indiquées en dégradé de vert, la phosphorylase (SP) est représentée en noir.

Le même type de complexe (SS/BE) a pu être mis en évidence dans les amyloplastes de maïs. Chez cette céréale, c’est la forme la plus exprimée d’enzyme de branchement, SBEIIb, qui s’associe avec les amidon-synthases SSI et SSIIa. (Liu, Makhmoudova et al. 2009). De plus, l’existence d’autres complexes de plus haut poids moléculaire impliquant l’interaction des isoformes de synthase I,II et III avec les deux BEs de type II a également été observée. Il apparaît cette fois encore que la phosphorylation intervient dans le processus de formation et de maintien du complexe (Hennen- Bierwagen, Liu et al. 2008; Hennen-Bierwagen, Lin et al. 2009). D’autres études menées chez le riz (Crofts, Abe et al. 2015) et l’orge (Ahmed, Tetlow et al. 2015) ont confirmé l’existence de complexes similaires dans ces organismes, suggérant une organisation conservée dans le règne végétal.

Ainsi l’existence de ces complexes soulève la question de leur contribution respective dans l’édification de la structure de l’amylopectine. A titre d’exemple, chez le maïs, la présence de SBEIIb inactive (Figure 22B) mène à la formation d’un complexe différent de celui observé dans le mutant SBEIIb, (Figure 22C) lui-même différent du sauvage (Figure 22A). Chaque mutant présentant un phénotype amidon altéré et spécifique (Liu, Makhmoudova et al. 2009; Liu, Ahmed et al. 2012). Chez l’orge, lorsque SSIIa est sous exprimée, aucune isoforme de SS (à l’exception de la GBSS) ni de BEs ne

sont retrouvées dans le grain et aucun complexe n’a pu être mis en évidence. Les auteurs ont ainsi suggéré un rôle de SSIIa dans l’adressage des protéines au grain par le biais de la formation de complexe (Ahmed, Tetlow et al. 2015).

Figure 22 : Complexes mis en évidence dans le grain de maïs d’une lignée sauvage et de lignées mutantes exprimant ou non SBEIIb inactive. Complexes retrouvés piégés dans le grain chez le maïs

d’une lignée sauvage (A), présentant l’enzyme SBEIIb inactive (B) ou en absence de SBEIIb (amylose

extender) (C). Les amidon-synthases I, IIa sont représentés en violet, bleu respectivement. La BE de

type I et les deux isoformes de BEs de type II (a et b) sont indiquées en dégradé de vert, la phosphorylase (SP) est représentée en noir. Lorsque la SBEIIb est présente et inactive (B), cette dernière est grisée.

L’étude des phénotypes amidons de lignées mutantes pour une ou plusieurs enzymes du métabolisme est une base pour la compréhension du rôle des enzymes. Il est maintenant admis que les complexes jouent un rôle prépondérant dans la structuration du polysaccharide. Les phénotypes observés pour les lignées mutantes reflètent donc de la contribution à la fois des enzymes individuelles mais également des complexes impliqués dans l’édification de la structure.

Impact de la phosphorylation des enzymes du métabolisme

Comme mentionné précédemment, il a été démontré que les enzymes impliquées dans la synthèse de l’amidon sont phosphorylées. Cette phosphorylation favorise la formation de complexes hétéroenzymatiques mais impacte également, de manière variable, l’activité de ces enzymes. En effet, il a été montré chez le blé que les BEs de type II voient leur activité augmentée lorsqu’elles sont phosphorylées. En revanche, l’activité de SBEI chez cet organisme ne se trouve pas impactée par la phosphorylation (Tetlow, Wait et al. 2004). Une étude de la SBEIIb du maïs a permis de mettre en évidence plusieurs sérines pouvant être phosphorylées in vitro par 2 kinases amyloplastiques calcium

dépendantes. Parmi ces résidus, la Ser297 (selon la numérotation de la SBEIIb du maïs) est très

La mutation de ces 2 résidus en alanine a montré une diminution importante de l’activité de l’enzyme, ce qui renforce l’idée selon laquelle ces résidus Ser auraient un rôle primordial dans la catalyse. Une

troisième sérine (Ser649) a également été mise en évidence, et la mutation de celle-ci en alanine n’a

pas conduit à une perte d’activité. L’analyse des séquences des BEs suggère que la Ser649 pourrait avoir

une fonction plus spécifique, car elle n’est retrouvée que chez certaines SBEIIb de céréales et est absente des BEs de type I. De manière intéressante, chez les SBEII de plantes cette serine est parfois substituée par un aspartate qui est un mime de phosphorylation comme c’est le cas chez SBE2.2 d’Arabidopsis (Makhmoudova, Williams et al. 2014).

Les différentes isoformes de synthase ont également été retrouvées phosphorylées chez diverses espèces végétales (Tetlow, Wait et al. 2004; Grimaud, Rogniaux et al. 2008; Hennen- Bierwagen, Liu et al. 2008; Tetlow, Beisel et al. 2008; Liu, Makhmoudova et al. 2009; Liu, Ahmed et al. 2012). A l’heure actuelle, il est connu que leur phosphorylation est impliquée dans le processus de formation des complexes mais rien n’est connu d’un éventuel impact de cette phosphorylation sur leur activité.