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1 L’article L. 5231-2 du code de la santé publique est complété par un 3° ainsi rédigé :

2 « 3° Des jouets ou amusettes comportant du bisphénol A. »

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l'article.

M. Maurice Antiste. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, de nombreuses substances chimiques se retrouvent dans les plastiques, détergents, produits pharmaceutiques, parfums, etc. Les études

améri-caines sur ce sujet ont recensé pas moins de 111 substances chimiques. Or ces dernières peuvent avoir des conséquences sur la santé des personnes et sur l’environnement.

Pensons, notamment, au bisphénol A, qui est un pertur-bateur endocrinien susceptible d’altérer le fonctionnement du système hormonal, et donc d’être à l’origine de certains cancers ou de troubles de la reproduction : il est désormais interdit dans tous les contenants alimentaires, depuis le 1er janvier 2015. Le Sénat avait montré la voie et engagé une première étape en interdisant le recours à cette substance chimique dans les biberons et autres objets à destination des tout-petits.

Certes, toutes les substances chimiques que l’on retrouve dans nos produits quotidiens ne présentent pas la même dangerosité. Toutefois, pour un bon nombre d’entre elles, les effets à moyen et à long terme ne sont pas assez connus, que ce soit sur l’environnement ou sur la santé.

C’est pourquoi il semble opportun que des études relatives aux dangers potentiels pour le sol, l’eau ou l’air, ainsi que pour la santé – développement de cancer, ménopause ou puberté précoces, dysfonctionnement du métabolisme, etc. – soient réalisées.

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, dont la compétence s’étend aux cosmétiques, ainsi que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, pourraient y apporter toutes leurs compé-tences.

Ces études permettraient au consommateur de disposer de renseignements fiables, lui qui est aujourd’hui confronté à une non-information, voire, pire, à une désinformation via les divers forums sur internet ou les rumeurs qui peuvent circuler.

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, sur l'article.

Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article 11 quater provient d’un amendement adopté à l’Assemblée nationale sur la présence de bisphénol A dans les jouets.

En janvier 2014, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, traditionnellement plutôt laxiste face aux perturbateurs endocriniens en général et au bisphénol A en particulier, a recommandé de réduire la dose journalière tolérable, la DJT, de 90 %, en la ramenant de 50 à 5 micro-grammes par kilogramme de poids corporel et par jour. Cette position est insuffisante.

Le rapport Kortenkamp commandé par la Commission européenne, voté par le Parlement européen et présenté par son auteur devant la commission des affaires européennes du Sénat le 17 juillet 2013, nous éclaire : au cours des phases sensibles du développement de l’être humain - la période prénatale, la petite enfance et l’adolescence -, l’absorption, même à très faible dose, de substances perturbatrices endocri-niennes peut sérieusement altérer l’homéostasie hormonale et donc modifier l’évolution normale des individus touchés, au détriment de leur santé et de celle des générations futures.

L’ANSES a proposé, dans son rapport de 2013, sur la base d’une mise en évidence de tumeurs mammaires chez les souris exposées pendant la gestation, une dose journalière admissible de bisphénol A de 25 nanogrammes par

kilogramme de poids corporel et par jour, soit une DJA 160 fois plus faible que celle que recommande l’Autorité européenne de sécurité des aliments.

Pour la protection des populations, nous devons donc et nous pouvons agir sans attendre la définition de l’Union européenne sur les perturbateurs endocriniens, définition qui est sans cesse repoussée depuis 1999 et que nous atten-dons toujours - Mme la ministre a annoncé que nous l’aurions dès l’année prochaine.

C’est la raison pour laquelle, en attendant, mon collègue député Jean-Louis Roumégas avait proposé cette interdiction pure et simple du bisphénol A dans les jouets, afin de protéger nos enfants.

Je voulais vous rappeler ces éléments scientifiques avant d’examiner les amendements qui suivent, car certains d’entre eux prévoient la suppression de cet article dont l’adoption à l’Assemblée nationale a constitué une avancée majeure pour la santé publique.

M. le président. Je vous rappelle que les deux amendements nos 378 et 645 sont appelés par priorité. Ces deux amende-ments font l’objet d’une discussion commune.

L'amendement no 378, présenté par MM. Durain et Cabanel, n'est pas soutenu.

L'amendement no 645, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

ne respectant pas la limite de concentration ou la limite de migration pour cette substance définies par arrêté des ministres chargés de la santé, de la consomma-tion, de l’industrie et de l’environnement

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Comme l’a souligné à l’instant Mme Archimbaud, l’adoption de l’article 11 quater a constitué un moment important de la discussion du texte à l’Assemblée nationale.

Il s’agit d’interdire la présence de bisphénol A dans les jouets ou les amusettes, c'est-à-dire ces petits objets que les enfants portent à la bouche.

Nous avons eu au Sénat un débat dans le passé sur la dangerosité du bisphénol A dans toute une série de produits, notamment les contenants alimentaires. Il a semblé nécessaire d’élargir le champ des interdictions afin que les enfants, qui sont particulièrement vulnérables, ne soient pas exposés à des perturbateurs endocriniens au travers de ces objets qu’ils manipulent beaucoup.

Depuis, cet article a été adopté. Il est apparu néanmoins que l’absence de seuil minimal de présence de bisphénol A constituait une difficulté pour l’application même de cet article.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Tout à fait !

Mme Marisol Touraine, ministre. En effet, non seulement nous ne nous donnons pas les moyens d’avoir un seuil de détection identifié, mais aussi il semble problématique d’imposer une interdiction sans s’assurer que cela correspond à un seuil de migration depuis l’objet vers l’enfant.

C’est la raison pour laquelle, à la lumière des données scientifiques, techniques et juridiques, nous nous interro-geons sur les valeurs limites de migration et de concentration du bisphénol A dans les jouets et amusettes.

Nous proposons donc de compléter l’article tel qu’il a été adopté en renvoyant à un arrêté des ministres chargés de la santé, de la consommation, de l’industrie et de l’environne-ment, pour la fixation de valeurs limites de migration et de concentration au-delà desquelles le bisphénol A serait interdit.

Telle est la proposition que le Gouvernement vous soumet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, corapporteur de la commission des affaires sociales. La commission n’a pas eu le temps de se réunir depuis l’annonce, ce soir, de la censure par le Conseil constitutionnel d’une partie de la loi de 2012 sur le bisphénol A.

Néanmoins, cet amendement du Gouvernement est l’occa-sion pour la commisl’occa-sion de dire que nous sommes favorables à une telle proposition et que nous la suivrons, madame la ministre.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je n’ai pas évoqué la décision rendue par le Conseil constitutionnel cet après- midi, mais sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’elle conforte l’essentiel de la loi qui a été adoptée, notam-ment la possibilité d’interdire le bisphénol A dans les conte-nants alimentaires.

Le Conseil constitutionnel a simplement considéré qu’il n’était pas possible d’étendre cette interdiction à la fabrica-tion sur le territoire nafabrica-tional de tels contenants dans la mesure où d’autres pays que le nôtre n’ont pas adopté cette interdiction. Il faut donc que les industriels français puissent fabriquer ces produits afin de pouvoir les exporter.

En revanche, l’interdiction de la vente et de l’importation sur le territoire national est validée. L’amendement que nous venons de proposer pour les jouets et les amusettes s’inscrit donc dans cette démarche d’ensemble.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Cet amendement du Gouver-nement vient rassurer une partie des acteurs concernés tout en mettant l’accent sur l’importance d’aller de l’avant.

À la différence d’autres dispositifs, comme les biberons, qui posent problème dès lors qu’ils sont chauffés, les jouets paraissent moins problématiques, d’autant que la sécurité du secteur est encadrée par un certain nombre de directives, notamment celle de 2009. De plus, le Gouvernement a pris récemment un arrêté au début de l’année 2015.

Quoi qu’il en soit, cet amendement apporte une réponse à de légitimes inquiétudes. Pour ma part, je m’y rallierai volon-tiers.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, corapporteur. Mon intervention ira dans le même sens que celle de notre collègue Jean-Baptiste Lemoyne.

Il y a quelques années, quand nous avons discuté au Sénat du bisphénol A lors de l’examen de la proposition de loi de Gérard Dériot, les scientifiques affirmaient que le bisphénol A

n’était pas dangereux en tant que tel, mais qu’une fois chauffé il pouvait devenir un perturbateur endocrinien. Nous l’avons donc interdit, car nous avons supposé que les biberons étaient chauffés de temps en temps.

Puis, l’interdiction s’est étendue aux boîtes contenant des produits alimentaires, étant rappelé qu’un vernis empêche les aliments d’être en contact direct avec le métal de la boîte.

Un problème se pose, dont les agriculteurs, en particulier les maraîchers, nous ont saisis il y a quelque temps : il n’existe pas encore de produit qui permette de remplacer le vernis comportant du bisphénol A. Les phtalates existent, mais il semblerait qu’ils ne soient pas encore bien efficaces.

Or, quand on fait des conserves, on met le produit à l’intérieur et on chauffe la boîte, et par conséquent on chauffe le vernis, lequel devient perturbateur.

Le problème n’est donc pas résolu de la conservation des produits pour l’industrie agroalimentaire.

En revanche, l’amendement no 645 présenté par le Gouver-nement satisfait les producteurs de jouets, d’après ce qu’ils nous ont dit. C’est pourquoi je vous demande de le voter.

M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

M. Olivier Cadic. J’avais moi-même déposé un amendement visant à supprimer cet article, car il me semblait que l’inter-diction totale du bisphénol A dans les jouets n’était pas applicable sur le plan juridique et exposerait la France à des sanctions au niveau européen.

La proposition de Mme la ministre semble raisonnable et, par conséquent, je m’y rallierai.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Mme Catherine Génisson. Compte tenu de l’intervention de Mme la ministre, nous voterons avec plaisir l’amendement présenté par le Gouvernement. Il est tout à fait raisonnable et, en même temps, il ouvre des perspectives pour la recherche.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 645.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements identi-ques nos 30 rectifié bis, 225 rectifié ter et 895 rectifié n'ont plus d'objet.

Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes.

L'amendement no 30 rectifié bis est présenté par M. Lefèvre, Mme Procaccia, MM. Gilles, Bouchet, Vasselle et Lenoir, Mme Deseyne, MM. César, Longuet, Charon et Mandelli, Mme Deromedi, M. Chaize, Mme Imbert, M. Raison, Mme Des Esgaulx, MM. G.

Bailly, Chasseing, D. Laurent, Houel, Vaspart, Cornu, Laménie, Pillet, Doligé, Houpert, Mouiller et P. Leroy, Mme Primas, M. de Legge, Mme Duchêne, MM. Bizet et Carle, Mme Gruny et MM. de Raincourt, Husson et de Nicolaÿ.

L'amendement no 225 rectifié ter est présenté par M. Cadic, Mme Billon et MM. Canevet, Delahaye, D.

Dubois, Gabouty, Guerriau, Kern et Vanlerenberghe.

L'amendement no 895 rectifié est présenté par MM. Barbier, Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Requier et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés : Supprimer cet article.

Je mets aux voix l'article 11 quater, modifié.

(L'article 11 quater est adopté.)

Articles additionnels après l’article 11 quater M. le président. Je suis saisi de deux amendements identi-ques.

L'amendement no 589 rectifié bis est présenté par Mme Jouanno, M. Médevielle, Mme Férat, M. L. Hervé, Mme Billon, M. Guerriau et Mme Laborde.

L'amendement no 991 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés : Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 5214–1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2020 sont interdites la fabrication, la vente, la mise en vente, l’exposition et l’importation de tout dispositif médical destiné aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes, aux nourris-sons ou aux enfants jusqu’à trois ans comportant du bisphénol A. »

L'amendement no 589 rectifié bis n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement no 991.

Mme Aline Archimbaud. Cet amendement reprend en partie la proposition no 10 de la mission commune d’infor-mation portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique. Il interdit la présence de BPA, c'est-à-dire de bisphénol A, dans les dispositifs médicaux destinés aux nourrissons, aux jeunes enfants et aux femmes enceintes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, corapporteur. Nous avons déjà débattu de cet amendement à plusieurs reprises lors de l’examen des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Le risque lié au bisphénol A dans ces dispositifs ne paraît pas avéré.

C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Indépendamment de l’argument avancé par Mme la rapporteur, il faut aussi prendre en compte le fait que nous ne disposons pas aujour-d'hui de produits de substitution sûrs. Si nous interdisions le bisphénol, nous serions face à un véritable problème : nous ne pourrions plus utiliser des dispositifs médicaux pour les populations concernées.

En l’absence de solution de rechange, comme nous avons besoin de dispositifs médicaux pour les femmes enceintes et les enfants de moins de trois ans, je vous demande, madame Archimbaud, de retirer cet amendement, faute de quoi le Gouvernement émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Archimbaud, l'amendement no 991 est-il maintenu ?

Mme Aline Archimbaud. Non, je vais le retirer, monsieur le président.

Je vous l’accorde, cet amendement n’est pas complet. En effet, il faudrait prévoir un calendrier. Je comprends bien qu’il est nécessaire de laisser du temps aux fabricants de ces produits pour qu’ils trouvent des solutions alternatives.

Cela dit, cette proposition n’est pas nouvelle. Je l’entends au Sénat depuis que j’y ai été élue. Un certain nombre de collègues qui sont à la fois sénateurs et médecins m’en ont déjà parlé.

Il y a là un vrai problème à propos duquel j’interpelle le Gouvernement. Nous devons trouver un moyen pour qu’une discussion s’engage dès maintenant avec les fabricants de ces dispositifs médicaux afin d’anticiper l’interdiction du bisphénol A. Sinon, celle-ci ne sera jamais possible. Il faudrait sans doute rédiger un sous-amendement qui tende à accorder deux ou trois ans de délai.

Si on ne prend aucune mesure d’anticipation, on n’avance pas. Il est nécessaire de commencer à réfléchir à d’autres technologies, sinon on repoussera toujours la solution au problème.

Encore une fois, je me souviens très bien que cette question a été posée ici à de nombreuses reprises. Nous la poserons de nouveau en projet de loi de financement de la sécurité sociale, ou en projet de loi de finances, même si, j’en suis sûre, on m’opposera alors que c’est avant tout une question médicale.

L’anticipation est un vrai problème. Madame la ministre, ne pensez-vous pas qu’il serait souhaitable d’organiser une rencontre avec les fabricants de ces dispositifs médicaux pour établir avec eux un calendrier raisonnable, sur plusieurs années si nécessaire, le temps de trouver un produit de substitution ?

Je retire l’amendement, mais que pensez-vous de cette proposition, madame la ministre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est une suggestion intéressante. Nous verrons quelle forme elle peut prendre dans nos travaux.

M. le président. L'amendement no 991 est retiré.

L'amendement no 605 rectifié, présenté par Mmes Jouanno, Billon et Férat, M. L. Hervé et Mmes Laborde et Bouchoux, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quarter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre unique du titre VII du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est complété par un article L. 1171-… ainsi rédigé :

« Art. L. 1171-… - Les pouvoirs publics prennent dans les cinq ans à compter de la promulgation de la loi no … du … relative à la santé, toutes les mesures qui s’impo-sent pour interdire l’exposition des femmes enceintes, des femmes allaitantes et des enfants de moins de trois ans au bisphénol A. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Article 11 quinquies A

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