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Les modalités de dispensation des traitements substitutifs sont remises en cause :

REMERCIEMENTS À notre Président de Thèse,

B) Les modalités de dispensation des traitements substitutifs sont remises en cause :

B.1) Un contrôle de la prise des traitements substitutifs majoritairement critiqué : Il est mal vécu par beaucoup d’infirmiers, qui ont l'impression de « faire du flicage ».

E2 : « Et puis finalement, je me dis après tout je suis pas là pour faire le gendarme ».

E4 : « Je suis tombée dans un truc de fou à ce moment-là : on m’a demandé de vérifier la prise, et on se retrouvait à noter sur le cahier où on marque les prises, je me suis retrouvée à lire ce que marquaient les collègues, et je voyais « bouchon vert, bouchon rouge… ». Et là je me suis dit : « c’est quoi ? ». Et en fait, elles avaient fliqué parce que les détenus avaient tous les trucs pour partir avec leur Subutex®. Donc ils mettaient un bouchon sous la langue. Donc ils jetaient le cachet, ça tombait dans le bouchon, soit ils le vendaient derrière, soit ils le prenaient à d’autres heures, soit ils le sniffaient ou… Mais moi me retrouver dans le rôle de l’infirmière qui va noter : « bouchon rouge, bouchon vert », non c’est pas possible ça ».

E9 : « Je dirai plus qu’on est un peu gendarme parfois (…).C’est de regarder la personne prendre son traitement qui est difficile ».

Ce contrôle « flique » les détenus, et une infirmière n'a, de ce fait, plus l’impression d’être dans une démarche de soins.

on est plus dans le soin. On peut faire ça, mais ça veut dire qu’on fait plein de choses autour (…). Si c’est distribuer pour distribuer, et dire: « ah vous l’avez pas mis dans la bouche, c’est pas bien », moi je suis pas contente (…). Mais c’est fou, comment on peut être dans le soin dans un truc comme ça ? ».

La surveillance de la prise des traitements semble nuire à l’instauration d’une relation de confiance entre soignants et patients.

E7 : « C’est un climat de suspicion, et c’est vrai que c’est déjà difficile d’enlever cette image de suspicion, même quand nous… Sauf que là c’est difficile de parler de confiance alors qu’on demande de venir nous voir tous les jours et qu’on regarde s’ils ont bien pris ».

E7 : « Parfois ils me le disent : « oui, vous me dites la confiance, machin, tout ce que vous voulez, mais tous les jours on vient là » ».

Le contrôle de la prise des traitements substitutifs, ainsi que la dispensation quotidienne, déresponsabilise les patients et ne les préparent pas à l’autonomie quand ils sortiront de prison.

E7 : « Parce qu’on est dans le contrôle, moi je trouve que ce n’est pas les responsabiliser. Ce n’est pas les remettre dans un rôle où ils sont acteurs de leur soin. On les infantilise et surtout on les suspecte (…).C’est encore plus scinder l’extérieur et l’intérieur, l’extérieur où vous aurez toute votre Méthadone® pour une semaine, et ici, quotidiennement. Et de plus on surveille votre prise ».

Pour une infirmière somatique, cette surveillance avec visite quotidienne à l’UCSA est inutile, dans la mesure où cela n’empêche pas les mésusages.

E1 : « Le Subutex® ou la Buprénorphine maintenant, euh, de les voir partir avec, on a beau leur expliquer c’est comme ça que ça doit se prendre, et pas autrement, et quand vous voyez qu’ils le mettent dans la poche ou alors qu’ils le recrachent ou… Et puis qu’ils le prennent n’importe comment, je trouve un peu ridicule qu’ils viennent ici. Autant qu’on leur donne carrément comme un autre comprimé ».

B.2) Le manque de contrôle favorise le mésusage :

On retrouve aussi l’idée inverse, à savoir qu’il n’y a pas assez de surveillance de la prise des traitements substitutifs, dans le sens où cela va faciliter les mésusages, les erreurs de prise ou le trafic.

E10 : « En plus, sur Aiton, on n’a pas de regard sur la bonne prise du traitement, parce que le traitement est distribué en cellule (…). Parce qu’on sait pas ce que devient le traitement qu’on a donné. On ne sait pas s’il est pris, comment il est pris. S’il est réellement pris, s’il est revendu. S’il est sniffé. S’il est pris en plusieurs prises ».

E14 : « Je pense que le mieux c’est de prendre un traitement devant l’infirmier, comme ça… »

B.3) Un passage quotidien à l’UCSA qui nuit au respect du secret médical :

La dispensation quotidienne des traitements à l’UCSA de la maison d’arrêt de Chambéry est critiquée, parce qu’elle contribue grandement à rompre le secret médical.

Cf. chapitre 2 : Le secret médical est difficilement respecté en prison.

B.4) Une dispensation qui ne laisse pas de temps pour créer un lien avec le patient : À cause d’une délivrance des médicaments « à la chaîne », les infirmières n’ont pas le temps d’améliorer les relations avec les malades.

E2 : « Sur le plan personnel, j’aimerais avoir plus de temps à leur consacrer, au moment de la distribution, parce que bon, c’est un petit peu… ».

E6 : « De toute façon, je distribue, je n’ai pas le temps. La distribution, ça a été fait à un certain moment où ils avaient estimé qu’on avait une demi-heure pour les faire. Il y a quand même six ailes à faire, et le nombre de détenus a augmenté (…). Le problème c’est qu’il y en a de plus en plus (…).On n’a pas de temps et c’est systématique parce qu’on n’est jamais dans les clous ». E10 : « Parce qu’en fait, le rapport qu’on a à la toxicomanie, il se réduit dans la préparation et la distribution des traitements par Buprénorphine ».

C) Les dangers des associations de psychotropes et de traitements