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5. Résultats et discussion

5.7 Modélisation

Tel qu’expliqué à la section 4.3, les valeurs des 14 traceurs pour les sédiments en suspension et pour les sources de sédiments ainsi que le fichier de coefficients de discrimination ont été entrés dans le logiciel MixSiar. Les fichiers utilisés sont joints à l’annexe F pour les neuf sites étudiés.

Afin de vérifier si les données de sédiments en suspension et des sources se comparent de manière logique, des graphiques de type isospace sont produits par MixSiar. Dû à certains problèmes d’affichage des graphiques produits, certains graphiques ont été construits manuellement. Tous les graphiques construits à partir des données de sources et de sédiments en suspension aux neuf sites, en considérant leur division selon les deux unités physiographiques, sont disponibles à l’annexe G. Pour chaque graphique permettant la comparaison de deux traceurs à la fois, la moyenne de chaque source est représentée par un point, borné par son écart type. Les polygones ainsi formés représentent l’enveloppe de valeurs possibles provenant des sources pour chaque traceur. Il est donc attendu que les points représentant les valeurs des échantillons de sédiments en suspension pour ces mêmes traceurs soient inclus dans les polygones. Le non-respect de cette observation signifie qu’une source autre que celles identifiées doit être considérée. L’étude des 91 graphiques isospace montre que seulement deux graphiques contiennent chacun un point de sédiment en disponibles à l’annexe H. Les diagnostics de Gelman-Rubin et Geweke montrent que les modélisations des neuf sites à l’étude respectent les valeurs attendues, ce qui donne un indice de la validité des résultats obtenus. Les conclusions pouvant être tirées de la modélisation et leur concordance avec la réalité du bassin versant sont cependant les meilleures indicateurs de la validité de la modélisation.

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Les diagrammes à moustaches présentés ci-après indiquent la contribution en pourcentage de chaque source de sédiments à chaque site de récolte des sédiments en suspension. Le trait rouge indique la contribution médiane de chaque source, alors que la boite est délimitée par les premiers et troisièmes quartiles (25 et 75%) de la distribution. Les moustaches indiquent les contributions minimales et maximales aux 2,5e et 97,5e centiles. La Figure 40 montre d’abord les résultats obtenus pour les trois sous bassins versants des sites 2, 7 et 9. La Figure 41 montre quant à elle les résultats obtenus pour les sites de la rivière Bulstrode, le site 8 représentant l’amont et le site 1, l’aval du bassin versant.

Figure 40 Contributions des sources aux sédiments en suspension pour les sous bassins versants

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AgriField Bankbot Banktop ForestFields AgriField Bankbot Banktop ForestFields

Figure 41 Contributions des sources aux sédiments en suspension dans la rivière Busltrode

Les résultats présentés ci-après sont la médiane des contributions des sources combinées avec les valeurs des premiers et troisièmes quartiles. Les résultats de la modélisation du sous bassin versant du site 2, qui est d’utilisation majoritairement agricole, montrent que 78% [70,1 – 85.8%] des sédiments en suspension récoltés à l’embouchure de la rivière L’Abbé proviennent des champs agricoles. Les berges, représentées dans ce sous bassin versant par seulement les

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échantillons Banktop vu leur faible épaisseur, fournissent 22 % [14.2 -29.9%] des sédiments en suspension récoltés.

Dans les sous bassins versants majoritairement forestiers, soit ceux des sites 7 et 9, les tendances des contributions des trois types de sources sont semblables.

Les horizons situés à la base des berges (Bankbot) constituent la source la plus importante de sédiments dans les rivières Gobeil et du Huit. Ils contribuent dans une proportion de 54.6 % [49.9 – 59.5 %] et de 79.7 % [76.2 – 82.7 %] aux sédiments en suspension des sites 7 et 9, respectivement. Les sols forestiers sont la deuxième plus importante source de sédiments aux rivières, avec des proportions de 27.9 % [19.4 – 35.8 %] et de 13.7 % [11 – 21.7 %] aux sites 7 et 9, respectivement. Les horizons supérieurs des berges (Banktop) sont la source la moins importante de sédiments en suspension dans ces deux bassins versants.

Au site 7, ils représentent 16.3 % [8.7-25.6 %] des sédiments en suspension alors qu’ils représentent seulement 6.1 % [3.1 – 9.9 %] au site 9. Dans ces sous bassins versants, l’apport de sédiments aux rivières Gobeil et du Huit est donc davantage gouverné par l’érosion du bas des berges, soit en plus faible débit, que par l’érosion des sols environnants et des berges en périodes de crue.

Dans le cas de la rivière Bulstrode, les contributions de chaque source de sédiments évoluent de l’amont vers l’aval, en direction du réservoir Beaudet. À l’amont du bassin versant, au site 8, les sols agricoles et forestiers et les horizons de berges contribuent de manière semblable à la charge sédimentaire en suspension, avec des proportions de 18 % [13.1 – 22.9%] et de 33.3 % [23.2 – 42.9 %] pour les sols agricoles et forestiers, de 23.1 % [16.9 – 29.4 %] pour le bas des berges et de 25 % [18.6 – 31.3 %] pour le haut des berges.

Du site 8 au site 6, en se dirigeant vers l’aval, les terrains bordant la rivière Bulstrode deviennent de plus en plus utilisés pour l’agriculture, ce qui se reflète par l’augmentation de la contribution des sols agricoles aux sédiments en suspension. Au site 6, les sols agricoles deviennent la source la plus importante de sédiments, avec un apport de 42.9 % [33.6 – 50.9 %]. Les tendances de contribution des sols forestiers et des berges demeurent les mêmes qu’au site 8, mais avec des valeurs plus basses, étant donné l’augmentation de l’importance des sols agricoles aux sédiments en suspension.

89 période de faible débit, c’est plutôt seulement le bas de la berge qui est érodé. La contribution plus importante de l’horizon supérieur de la berge peut être expliquée par sa connectivité avec les sols forestiers. L’horizon du haut peut en effet être considéré comme l’extension spatiale des sols présents en amont hydrauliquement, que représentent ici les sols forestiers. L’érosion du haut des berges au site 5 résulterait donc davantage de l’érosion des sols forestiers jusqu’en bord de rivière que de l’érosion de berges par les crues de la rivière.

À l’aval du barrage de Sainte-Sophie, au site 4, les sédiments en suspension de la rivière Bulstrode proviennent encore majoritairement des sols forestiers, qui en représentent 43.7 % [38.5 – 48.7 %]. Le transport des sédiments provenant des sols forestiers présents de manière plus importante à l’amont du site 5 ne semble donc pas être influencé par la présence du barrage de Sainte-Sophie, une hypothèse également soulevée lors de l’étude spatiale des distributions granulométriques des sources et des sédiments en suspension. Le barrage semblait n’avoir un impact que sur la fraction grossière, ce qui n’inclut pas les sédiments en suspension. À ce site, le bas des berges et les sols agricoles contribuent aux sédiments en suspension dans une proportion similaire, soit de 24.7 % [14.4 – 36.3 %] et de 24.2 % [14.9 – 33 %] respectivement, alors que le haut de la berge contribue de manière moindre avec 5.2 % [2.3 -9.5 %]. Cette inversion des contributions des deux horizons de berges par rapport aux résultats du site 5 indique qu’au site 4, l’érosion des berges est davantage reliée à l’hydrologie de la rivière Bulstrode qu’à la connectivité avec les sols agricoles adjacents. L’augmentation de l’importance de la contribution des sols agricoles aux sédiments en suspension par rapport au site 5 reflète l’utilisation de plus en plus agricole du territoire à l’aval du site 5.

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L’utilisation majoritairement agricole du territoire entre les sites 4 et 3 explique le fait que les sols agricoles deviennent la source la plus importante de sédiments à la rivière Bulstrode au site 3, avec un apport de 49.7 % [42.6 – 66.9 %]. La contribution des sols forestiers s’en retrouve fortement diminuée atteignant seulement 4.8 % [2.3 – 16.6 %]. Les sédiments provenant des sols forestiers semblent donc ne pas atteindre le site 3, ceux-ci étant dominants au site 4. La présence du barrage de Princeville entre ces deux sites peut expliquer la baisse de l’importance des sédiments forestiers. Entre ces deux sites, les sédiments semblent donc provenir de sources plus locales, telles que les sols agricoles. Les deux horizons de berges contribuent de manière similaire aux sédiments en suspension, le bas représentant 15.5 % [7.7 – 39.1 %] et le haut 25.1 % [14.9 – 52.9 %] de l’apport en sédiments. Il est donc difficile de conclure sur l’importance du régime hydrologique de la rivière Bulstrode sur l’érosion des berges à ce site, puisque celle-ci semble autant liée à l’érosion du profil complet des berges, tel qu’il a été observé sur le terrain, qu’à la connectivité des sols agricoles avec la rive du cours d’eau. l’horizon inférieur des berges devient la source majeure de sédiments à la rivière Bulstrode, atteignant une proportion de 81.9 % [75.7 – 86.9 %]. Les sols agricoles, les sols forestiers et le haut des berges deviennent des sources négligeables de sédiments, avec des contributions respectives de 4.1 % [1.7 – 8.4

%], de 4.3 % [1.8 – 8 %] et de 5.5 % [2.3 – 10.6 %]. Duhamel et Bariteau ( 2012) avaient identifié le segment de la rivière Bulstrode compris entre les sites 1 et 5 comme étant le segment le plus susceptible de contribuer à la charge sédimentaire en suspension. Les résultats de la modélisation montrent que le segment de rivière situé entre les sites 1 et 3 est celui subissant le plus important processus d’érosion des berges. La faible contribution de l’horizon supérieur des

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berges sous-entend également que l’érosion des berges ne survient pas principalement en période de crue et de fonte des neiges.

L’étude de traçage des sédiments dans le bassin versant du réservoir Beaudet permet d’identifier des sources principales de sédiments variant selon le site étudié. En général, en se dirigeant de l’amont vers l’aval, des sites 8 à 4, les sols forestiers constituent une part importante des sédiments en suspension dans la rivière Bulstrode. Le bas des berges est cependant la source principale de sédiments dans les sous bassins versants forestiers des rivières Gobeil et du Huit. Le barrage de Princeville semble limiter le transport de ces particules à l’aval. Les sols forestiers ne constituent plus une source importante de sédiments au site 1 et représentent donc une source négligeable de sédiments en suspension dans le réservoir Beaudet, malgré leur présence à l’amont du bassin versant. Les sols agricoles sont une source dominante de sédiments entre les sites 8 et 6 ainsi qu’entre les sites 4 et 3, ce dernier segment étant localisé sur un territoire majoritairement agricole. Dans le sous bassin versant de la rivière l’Abbé, les sédiments en suspension proviennent également majoritairement des sols agricoles. Comme les sols forestiers, les sols agricoles ne constituent cependant pas une source importante de sédiments à l’entrée du réservoir. Les berges de rivière, malgré leur contribution parfois moindre, sont une source de sédiments en suspension de la rivière Bulstrode constante à tous les sites. À l’entrée du réservoir, les sédiments provenant des berges dominent largement les apports à la charge sédimentaire.

L’érosion des berges, surtout le bas de celles-ci, semble donc être la source principale de sédiments au réservoir Beaudet. Le segment compris entre les sites 1 et 3 semble particulièrement générateur de sédiments. Des mesures de contrôle de sédiments et de leur transport jusqu’au cours d’eau doivent donc être prioritairement mises en place dans cette partie du bassin versant pour avoir un impact significatif sur la problématique de sédimentation du réservoir Beaudet.