CHAPITRE II – LE CADRE CONCEPTUEL : ADAPTATION DU MODELE
I. 2 Les modèles de qualité perçue appliqués au secteur du commerce
De nombreux chercheurs ont adapté l’échelle Servqual au secteur de leur recherche. Cette adaptation a consisté dans la plupart des cas à sélectionner les items les plus pertinents par rapport à l’objet étudié. Ainsi, Dabholkar et al. (1996) proposent une adaptation de Servqual au secteur du commerce grâce à une méthodologie de triangulation des données qualitatives particulièrement rigoureuse.
Cette échelle reprend de nombreuses dimensions et items de Servqual mais en incorpore quelques autres. Elle est présentée dans le tableau 4.
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CHAPITRE II
Tableau 4 - Echelle de la qualité perçue dans le commerce de détail
Dimensions Items de perception
Installations et équipements récents Décoration et esthétique
Supports matériels associés au service en magasin Lieux de détente ou de pause propres et agréables Signalisation
Aspects physiques
Facilité de déplacement Respect du délai Respect de la promesse
Le « bon service » du premier coup Disponibilité des produits
Fiabilité
Absence d’erreurs de facturation Compétence du personnel Confiance dans le personnel Sécurité des transactions Service rapide
Information du délai précis de réalisation ou de livraison Réponse aux demandes d’information
Attention individualisée au client Disponibilité
Interaction avec le personnel
Courtoisie au téléphone Echanges et retours Résolution des problèmes Résolution de problème
Réclamations des clients
Haut niveau de qualité pour ces marchandises Parking
Horaires d’ouverture pratiques Cartes de crédit acceptées Politique générale
Carte de crédit magasin
Source : Dabholkar et al. (1996)
L’originalité de la recherche de Dabholkar et al. (1996) tient non seulement à l’adaptation de l’échelle au commerce de détail mais également à la structure du modèle de la qualité perçue. Dabholkar et al. (1996) proposent un modèle hiérarchique à trois niveaux :
une perception globale de la qualité,
des dimensions constitutives de cette perception, des sous-dimensions.
Ce modèle hiérarchique reconnaît les multiples facettes des dimensions de la qualité perçue. La qualité perçue est vue comme un facteur d’ordre supérieur défini par deux niveaux d’attributs qui contribuent hiérarchiquement à la formation d’une qualité globale perçue du point de vente.
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On observe une certaine similarité des modèles multidimensionnels de la qualité perçue dans le secteur du commerce et des modèles multi-attributs utilisés dans la mesure de l’attitude à l’égard d’un point de vente.
I.2.2 - Les modèles multi-attributs des attitudes envers les points de vente
Le concept d'attitude trouve son origine en psychologie, en psychologie sociale et en sociologie. Fishbein et Ajzen (1975) définissent l’attitude comme « une prédisposition
à répondre de façon constante (répétitive, cohérente dans le temps) favorablement ou défavorablement à l’égard d’un objet donné ». Dubois et Jolibert (1992) présentent les
caractéristiques de l’attitude. Celle-ci s’appuie sur des croyances ; elle est durable, même si elle peut évoluer dans le temps ; elle mène à une réponse préférentielle et constitue une base à des choix. Elle est formée par trois composantes : cognitive, affective et conati. De nombreuses recherches sur l’attitude ont étudié la manière dont différents attributs d’un produit se combinent dans l’esprit du consommateur pour aboutir à une évaluation. Les modèles d'évaluation sont généralement classés en deux catégories selon qu'ils sont compensatoires ou non (disjonctifs, conjonctifs ou lexicographiques).
Ces modèles multi-attributs combinent les croyances sur différents attributs pour obtenir un jugement global du consommateur vis-à-vis d’un objet donné. L’attitude à l’égard d’un point de vente a fait l’objet d’une littérature abondante depuis la fin des années 70. L’objet de ces différentes études consiste à comprendre les motivations qui guident le consommateur dans le choix de ses lieux d’achat. Cette notion de choix du point de vente est définie par Bearden (1977) comme étant « un ensemble d’attitudes
envers le magasin ». Ce dernier identifie sept dimensions constitutives du choix d’un type
de magasin :
le niveau du prix,
la qualité de la marchandise, la variété,
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La proximité des dimensions mises en avant par Bearden (1977) et de celles identifiées dans le modèle de Dabholkar et al. (1996) nous amène à nous interroger sur les différences conceptuelles entre qualité et attitude.
Olshasky (1985) considère la qualité comme « une forme d’évaluation globale
d'un produit, semblable sous de nombreux aspects à l'attitude ». Holbrook (1982) partage
cette opinion quand il suggère que la qualité joue le rôle d'un jugement de valeur relativement global. La qualité perçue d'une expérience de service spécifique, en fusionnant avec les évaluations nées d'expériences précédentes, influence la qualité globale et devient « similaire, en de nombreuses façons, à la notion d'attitude » (Parasuraman et al., 1985, 1994).
Dano et al. (2003) mettent en avant les différences entre ces deux concepts. Les fondements motivationnels de l’attitude sont plus profonds et plus liés à l’identité de l’individu que ceux du jugement de qualité. Interrogeant des clients, Dano et al. (2003) mettent en évidence que les clients envisagent d’abord l’attitude comme un comportement déclaré, une façon de réagir face à l’environnement. C’est donc la dimension conative qui vient le plus spontanément à l’esprit des consommateurs, bien que les personnes soulignent également les dimensions cognitives et affectives. Néanmoins, les répondants, comme dans la littérature, considèrent également l’attitude comme une évaluation globale et générale.
L’attitude présente donc une plus forte composante conative que cognitive par rapport à la qualité. Néanmoins, la qualité et l’attitude présentent de nombreuses proximités conceptuelles qu’il convient de prendre en compte dans l’ensemble de nos analyses du comportement du consommateur vis-à-vis des points de vente.
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I.3 - Synthèse
Le modèle Servqual continue à dominer largement l’état actuel de la littérature sans pourtant qu’un consensus se dégage sur l’approche qui serait considérée comme la plus appropriée. Les réplications effectuées sur le modèle Servqual montrent de nombreuses limites que nous avons identifiées dans ce chapitre et qui sont confirmées par Kettinger et Lee (1994) dans le cadre d’une méta-analyse de Servqual portant sur sept études ayant utilisé cette échelle. Les critiques portent principalement sur la conceptualisation et l’opérationnalisation de la qualité de service comme écart entre les perceptions et les attentes d’une part, et sur l’instabilité de la structure factorielle à travers les secteurs, d’autre part. C’est pourquoi de nombreux chercheurs ont adapté l’échelle Servqual au secteur de leur recherche. Cette adaptation a consisté dans la plupart des cas à sélectionner les items les plus pertinents par rapport à l’objet étudié. Ainsi, Dabholkar et
al. (1996) proposent une adaptation de Servqual au secteur du commerce. La
contextualisation de l’échelle Servqual à ce secteur est donc l’outil le plus approprié à cette recherche. Les dimensions constitutives de la qualité perçue de ce modèle sont retenues comme base pour la constitution de notre échelle de mesure de la qualité perçue en magasin.
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