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2. Les cellules souches germinales

2.2.2 Modèles proposés chez les poissons

Chez les poissons téléostéens, la classification des différentes populations de spermatogonies A indifférenciées et différenciées reste encore divergente selon les espèces. Plusieurs modèles ont été proposés chez différentes espèces de poissons incluant la truite arc-en-ciel. Le modèle de division des SSC proposé chez la truite arc-en-ciel distingue différentes sous-populations de spermatogonies A indifférenciées qui diffèrent par la taille, le nombre de lobes et la taille du nucléole, et le nombre de cellules dans les cystes. Le modèle décrit une

sous-population de spermatogonies A0 qui sont considérées comme des cellules quiescentes,

mais susceptibles d’être recrutées au début de la saison de reproduction (Loir, 1999a) (Figure 6). Ces cellules de grande taille (environ 15 µm) possèdent une morphologie et des caractéristiques ultra structurales très proches des PGC de poissons avec des mitochondries rondes, une membrane nucléaire invaginée, un noyau avec très peu d’hétérochromatine visible, un nucléole très peu fragmenté presque au centre du noyau, et un grand rapport nucléocytoplasmique (Bellaiche et al., 2014a). Le modèle décrit une deuxième sous

population de spermatogonies A1 avec les mêmes caractéristiques morphologiques et

ultrastructurales, mais de taille légèrement plus petite et parfois observées en paires. Une

sous-population de spermatogonies A2 est observée associée à une spermatogonie A1 dans des

doublets formant un syncytium. Les spermatogonies A2 pourraient se diviser pour former des

spermatogonies filles de type B1 interconnectées par un pont cytoplasmique et prises en

charge dans un cyste délimité par une à deux cellules de Sertoli. Il y aurait ensuite une succession de 5 divisions mitotiques synchrones des spermatogonies B à l’intérieur de chaque

Figure 7 : Schéma général de la différenciation des cellules germinales sein du testicule de poisson zèbre. Trois étapes composent la spermatogenèse: la prolifération et

la différenciation des spermatogonies, les deux divisons de méiose et la spermiogenèse qui aboutit à la formation des spermatozoïdes. Les cellules sont ordonnées en fonction de leurs apparitions et classées entre elles selon des critères morphologiques, Aund* : spermatogonie de type A indifférenciée (considérées comme les cellules souches originelles, Aund : spermatogonie de type A indifférenciée, Adiff : spermatogonie de type A différenciée, B: spermatogonie de type B (Schulz et al., 2010).

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cyste qui génèrent des spermatogonies de type B2, B3, B4, B5 et B6 de tailles décroissantes,

avec un noyau contenant une quantité plus importante d’hétérochromatine.

Un autre modèle a été proposé chez le poisson-zèbre pour classer les différentes populations de spermatogonies. La classification des spermatogonies repose notamment sur des caractéristiques morphologiques, telles que la forme du noyau, la quantité d'hétérochromatine, les caractéristiques nucléolaires et le nombre de cellules germinales dans un cyste. Ce modèle distingue quatre populations majeures de spermatogonies indifférenciées de type A. Une première sous-population de spermatogonies indifférenciées de type A (Aund*) montrerait des contours irréguliers de l'enveloppe nucléaire et un rapport élevé entre le cytoplasme et le noyau. Il existerait une deuxième sous-population de spermatogonies de type A indifférenciées (Aund), avec un contour lisse de l'enveloppe nucléaire et un faible rapport entre le cytoplasme et le noyau. Ces populations seraient à l’origine de deux générations successives de spermatogonies différenciées de type A et de 5 générations de spermatogonies de type B (Leal et al., 2009a) (Figure 7).

Un troisième modèle a été proposé chez un poisson cartilagineux, la roussette (Scyliorhinus canicula) en se basant sur le modèle de Huckins et Oakberg (Figure 8). La classification des sous-populations de spermatogonies a été réalisée selon le nombre de divisions mitotiques dans les lobules qui progressent le long des tubes séminifères. Les spermatogonies indifférenciées sont présentes des stades I à IIc. Elles incluent des

spermatogonies As (single) qui sont isolées et qui, lorsqu’elles se divisent, forment des

doublets cellulaires de spermatogonies Ap (Paired). Les spermatogonies Ap se divisent pour

former différentes sous-populations de progéniteurs appelés spermatogonies Au

(undifferenciated), qui dans cette espèce peuvent aller de Au4 à Au512. Elles correspondraient

aux spermatogonies Aal des rongeurs. Une fois les cystes formés au stade IIIa, les

spermatogonies sont appelées spermatogonies de type A en différenciation (differentiated) et

elles sont subdivisées en spermatogonies Ad1, Ad2, Ad4 et Ad8. Ces cellules sont présentes des

stades IIIa à V (Bosseboeuf et al., 2014). Au stade VI, la division des spermatogonies Ad8

génère des spermatocytes primaires au stade préleptotène de la prophase I de la méiose. En résumé, en l‘état de nos connaissances, les modalités de la différenciation des SCC semblent assez différentes entre les mammifères et les poissons téléostéens. Par contre, ces

Figure 8 Modèle de prolifération des spermatogonies chez la roussette. Modèle basé sur celui de Huckins et Oakberg. Les spermatogonies entre le stade I et IIc sont appelées spermatogonies A indifférenciées et sont subdivisées en : As(single), Ap (Paired) et Au (Au4 à Au512). Du stade IIIA à V, on retrouve les spermatogonies A en différenciation et elles sont subdivisées en Ad1, Ad2, Ad4et Ad8. PL: spermatocytes préléptotene et SPCI: Spermatocytes. Adapté de Bosseboeuf et al., 2014.

Figure 9 : Modèle de division symétrique et asymétrique décrite dans la littérature retrouvée chez différentes espèces.

Deux modes de division peuvent caractériser une cellule souche. 1- une division symétrique qui aboutit à la production de deux cellules filles identiques, qui soit s’engagent dans un processus de différenciation soit restent indifférenciées et assurent l’autorenouvellement, 2- une division asymétrique qui permet de produire deux cellules filles différentes, l’une restant indifférenciée et permettant l’autorenouvellement et l’autre s’engageant dans un processus de différenciation.

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modalités apparaissent assez proches entre les poissons cartilagineux et les mammifères en accord avec la relation d’orthologie de ces deux espèces.

2.3. Mode de division des cellules souches germinales 2.3.1. Division symétrique

La division symétrique des cellules souches germinales adultes représente le mode de division privilégié chez les mammifères, que ce soit pour les PGC chez les embryons, les prospermatogonies chez les nouveau-nés, ou les SSC à l’âge adulte. Dans ce mode de division, la division mitotique d’une cellule mère génère deux cellules filles identiques entre-elles. Ce mode de division permet de multiplier de manière exponentielle le stock de cellules spermatogoniales souches. Cependant, la division mitotique de la cellule spermatogoniale souche peut aussi aboutir à la formation de deux cellules identiques mais plus différenciées que la cellule mère. Ces mitoses symétriques permettent l’apparition rapide d’une nouvelle population de spermatogonies. Les mécanismes impliqués dans le choix entre ces deux types de division symétrique restent mal compris chez les mammifères. Chez la drosophile (Drosophila melanogaster), la perte de contact cellulaire avec la région du Hub pourrait induire une division symétrique aboutissant à la formation de deux progéniteurs à partir d’une cellule spermatogoniale souche. Ce modèle d’entrée en différenciation peut être perçu comme un processus stochastique du plan de division (Salzmann et al., 2014; Sheng and Matunis,

2011) (Figure 9) .

L’importance du mode de division symétrique des cellules souches spermatogoniales à l’âge adulte pourrait être surestimée en raison des modèles expérimentaux utilisés chez les mammifères basés sur la déplétion des cellules spermatogoniales non souches par un composé chimique antimitotique comme le busulfan ou par une irradiation. Ces modèles expérimentaux pourraient être plus proches d’un processus de régénération cellulaire qu’un processus de maintien de l’homéostasie cellulaire.

Les modèles de renouvèlement des SSC proposés chez le poisson-zèbre (Leal et al., 2009)

(Leal et al) et le tilapia (Lacerda et al., 2013) favorisent la division symétrique mais pas celui proposé chez la truite (Loir, 1999).

15 2.3.2. Division asymétrique :

Il a été proposé que le mode de division symétrique vient compléter un autre mode de division dit « asymétrique » et c’est la complémentarité des deux modes qui permettrait d’assurer l’homéostasie du stock de cellules souches germinales au sein de la gonade adulte

(Nakagawa et al., 2007; De Rooij and Russell, 2000b).

Une division cellulaire asymétrique est définie comme une division qui donne lieu à deux cellules filles qui se distinguent par différentes caractéristiques morphologiques ou destinées fonctionnelles. Cette division asymétrique est bien documentée dans le cas de la spermatogenèse chez la drosophile (Shahriyari and Komarova, 2013). Les cellules souches spermatogoniales en contact avec le Hub initient une division mitotique avec un plan de division perpendiculaire de sorte que l’une des cellules filles perd contact avec les cellules du Hub. Cette cellule qui devient aussi plus distante du Hub se différencie progressivement. Les molécules d’adhésion cellulaire qui unissent la cellule spermatogoniale souche aux cellules somatiques du Hub pourraient fournir des indications de polarité destinées à maintenir l’orientation du fuseau mitotique perpendiculaire au plan d’interaction entre les cellules souches spermatogoniales et les cellules somatiques du Hub.