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Chapitre 1 Revue de littérature

1.1 Le microbiote gastro-intestinal

1.1.6 Modèles in vitro de fermentation pour étudier le microbiote colique

De nombreux modèles de fermentation in vitro ont été proposés afin de simuler le microbiote colique humain. Ces modèles présentent une opportunité inégalée pour la réalisation d’études souvent contestées chez les humains et les animaux en raison des préoccupations éthiques. La conception et la complexité de ces systèmes in vitro de fermentation ont engendré une multitude de modèles allant de simples modèles en «batch» à des modèles en continu avec plusieurs niveaux avec une multitude de technique d’inoculation fécale [96-100]. L’usage de ces modèles permet d’étudier un microbiote intestinal complet et stable pendant une période de temps définie et spécifique au modèle utilisé. La sélection du modèle approprié nécessite une évaluation minutieuse des objectifs de l’étude étant donné les avantages et les limites exposés par chacun des types de système (tableau 1.3)

1.1.6.1 Les systèmes de fermentation en «batch»

Les fermentations en «batch» sont des modèles statiques et décrivent la croissance d’une suspension bactérienne dans un milieu sélectionné. Ces modèles sont généralement constitués de bouteilles refermant une suspension de matières fécales et du milieu étudié dans des conditions anaérobes. Ces modèles sont utilisés pour l’évaluation de l’utilisation de certains composants alimentaires tels que des polysaccharides ou des fibres comme potentiels prébiotiques [101, 102]. Ils sont aussi utilisés pour l’étude des profils métaboliques des AGCCs résultant de la métabolisation des composés alimentaires par le microbiote intestinal [98, 103]. Ces systèmes sont faciles d’utilisation, peu coûteux ce qui permet de tester rapidement un grand nombre de substrats et/ou d’échantillons fécaux. Par contre, certains

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aspects négatifs sont liés à l’utilisation de ces systèmes comme une accumulation de composés tels que les AGCCs qui entraine une modification continue du pH et du potentiel redox. En effet, ces systèmes ont certaines limites comme une absence du contrôle du pH, une vitesse d’épuisement qui dépend de la taille de l’inoculum et du substrat. Ces limites ont pour conséquence un usage limité à de courtes durées (24-48h).

1.1.6.2 Les systèmes de fermentation en continu

Les modèles de fermentation en continu peuvent être soit avec un seul ou plusieurs réacteurs en série et sont nécessaires pour réaliser des études à long terme étant donné qu’il y a un renouvellement du substrat et l’élimination des composés toxiques en continu. Les modèles avec un réacteur unique sont souvent utilisés pour élucider dans une partie spécifique du côlon (proximal ou ascendant) l’activité métabolique du microbiote. Ils ont aussi été utilisés pour étudier le mécanisme d’infection de Salmonella chez les enfants [104], la colonisation de l’intestin du nourrisson [96] ainsi que l’activité inhibitrice de composés antimicrobiens contre des souches pathogènes [105].

Il a été démontré que les fonctions du côlon humain dépendaient de la région du colon (partie ascendante, transversale ou descendante) car on y observait des différences au niveau de l’activité métabolique et de la composition du microbiote [106]. Un des avancements majeurs dans les modèles de fermentation in vitro a été le développement de modèles de fermentation à réacteurs multiples qui sont capable de simuler la totalité du côlon [107]. Ce modèle permet de recréer les propriétés spatiales, temporelles, nutritionnelles et physicochimiques du microbiote humain par la combinaison de trois réacteurs connectés en série et qui reproduit la partie proximale, transverse et distale du côlon [107]. L’adaptation, la survie et la prolifération d’un microbiote issu d’un humain aux conditions du modèle in vitro de fermentation en continu sont dépendantes des paramètres environnementaux comme le pH, le temps de rétention, la température, l’anaérobie et le débit du milieu de culture. La maitrise de ces facteurs permet l’établissement d’un état d’équilibre de la composition et de l’activité métabolique du microbiote, et cet état d’équilibre est nécessaire pour créer un modèle reproductible. De nombreuses d’études et de nouveaux résultats sur la modulation de la

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communauté microbienne et de l’activité métabolique ont été obtenues en utilisant ces modèles de fermentation en continu à plusieurs étages [97, 99, 107, 108]. Le principal facteur de discrimination de ces modèles est la technique utilisée pour l’inoculation fécale. Laplupart des systèmes in vitro utilise une suspension fécale liquide comme inoculum. Il en résulte plusieurs limitations dues à l'état acellulaire des populations bactériennes [96]. Les systèmes avec un inoculum fécal liquide connaissent généralement un lavage rapide des bactéries moins compétitifs et sont par conséquent limités dans le temps opérationnel à moins de 4 semaines [107, 109, 110]. Ces systèmes ont également du mal à reproduire à la fois l’état planctonique (acellulaire) et l’état sessile (biofilm) des populations bactériennes dans le côlon [98, 111]. Pour résoudre les problèmes liés au lavage de l’inoculum, un processus d'immobilisation du microbiote fécal a été développé [96, 97, 108]. Ici, le microbiote fécal est mis en suspension dans une matrice de polysaccharides poreux conduisant à la formation de perles de matières fécales, qui sont transférées dans le milieu de croissance d'un modèle de fermentation en continu. Ces perles permettent d’obtenir une haute densité cellulaire [96, 112-114]. Le temps opérationnel de ces systèmes utilisant des cellules immobilisées pouvaient atteindre des durées de 29, 54 et jusqu'à 71 jours [96, 97, 115].

Certains modèles de fermentation en continu ont essayé d’aller plus loin dans l’ajout de paramètres supplémentaires comme le modèle du TIM-2 ou le modèle SHIME. Dans le modèle TIM-2, il y a l’ajout de fonctions reproduisant les mouvements péristaltiques et l’absorption d’eau et de métabolites du côlon [116]. Le modèle SHIME comprend une série de cinq réacteurs qui reproduit le duodénum/jéjunum, l’iléon et les trois parties du côlon [117].

Malgré les nombreux modèles permettant d’effectuer des fermentations intestinales in vitro, plusieurs difficultés et limites ont été exposées pour cette technologie. La reproductibilité et la stabilité métabolique du microbiote intestinal dans ces modèles in vitro sont souvent contestées. La robustesse de chaque modèle dépend de la certitude que les effets observés sur la composition ou l’activité métabolique du microbiote sont uniquement dues aux traitements expérimentaux appliqués et non à l’adaptation à l’environnement du modèle [99]. L’inoculation et la colonisation du système influencent l’équilibre du nouveau microbiote

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Tableau 1.2 : Avantages et limites des modèles in vitro de fermentation [118].

Modèles Avantages Limites Réfs

Culture en «batch» Simple d’utilisation

Étude sur la digestion de composant alimentaire Étude sur le métabolisme du microbiote

Usage limité à de courtes durées Pas de contrôle microbiologique

[101, 102]

Culture en continu Conditions continues imitant le in vivo Contrôle des paramètres environnementaux

Aucune fonctionnalité de l’hôte Expériences sont limitées temps (jours ou semaines)

[119, 120]

Culture en continu à étages multiples

Conditions continues dans plusieurs réacteurs imitant les différentes parties du côlon

Aucune fonctionnalité de l’hôte Expériences sont limitées temps (jours ou semaines)

[99, 120]

Culture en continu avec immobilisation

Haute densité cellulaire Stabilité à long terme

Aucune fonctionnalité de l’hôte [104, 108] Système artificiel de digestion

(TIM-2, SHIME)

Conditions continues imitant le in vivo Absorption des métabolites et de l’eau

Aucune réponse immunitaire et neuro-endocrinienne

Limite de temps de quelques jours

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intestinal produit. En effet, les facteurs environnementaux du système in vitro ainsi que la diversité qualitative initiale de l’inoculum sont responsables des variations observées sur les ratios des populations bactériennes entre le modèle in vitro et in vivo chez l’humain [86, 99]. Ces changements observés reflètent les conditions appliquées dans les modèles in vitro (par exemple : temps de rétention, milieu de culture, pH, etc.) qui ne peuvent jamais être une simulation absolue des conditions rencontrées chez l’hôte. De plus, la limitation majeure de ces modèles est l’incapacité de simuler les principales fonctions de l’hôte [118].

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