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Les modèles de glaucome les plus documentés sont ceux faisant appel à une intervention chirurgicale ou une procédure laser afin de limiter l’évacuation de l’humeur aqueuse et ainsi

augmenter la PIO (pour revue voir Biswas et Wan., 2019). Pour des raisons éthiques

(recommandations de l’ARVO, « Association for Research in Vision and Ophthalmology »), la

procédure est effectuée sur un seul œil, le controlatéral servant de témoin. Quelques-uns des modèles

disponibles en laboratoire de recherche sont brièvement décrits ci-dessous.

4.1.2.1.Injection de microbilles

Des microbilles de latex ou de polystyrène, de 5 à 10 µm de diamètre, sont injectées dans la

chambre antérieure de l’œil, afin d’obstruer les pores du trabéculum. Si une seule injection est réalisée,

les effets sur la PIO et la mort des RGC sont en général modestes. Il est donc nécessaire de répéter

fréquemment la procédure pour maintenir l’hyperpression sur une longue période, au risque de

produire à terme une opacité cornéenne et une inflammation. Avec des injections hebdomadaires de

microbilles de latex chez le rat, Urcola et al. (2006) ont réussi à augmenter progressivement la PIO,

avec un pic au 26

ème

jour, correspondant à un doublement de sa valeur. Au 30ème jour, la perte de

RGC annoncée par les auteurs est de 23%. L’utilisation de billes magnétiques dirigeables par

l’expérimentateur dans l’angle irido-cornéen, a plus récemment été proposé. Samsel et al. (2011) ont

ainsi décrit, suite à une injection unique chez le rat, une élévation de 25% de la PIO pendant 13 jours

et une perte de RGC de 36%.

4.1.2.2.Injection d’acide hyaluronique

L’acide hyaluronique est le glycosaminoglycane majoritaire de la matrice extracellulaire du

trabéculum (Acott et al., 1985). Des études ont montré que l’injection de ce composé dans la chambre

antérieure de l’œil permet, chez le rat, d’augmenter la PIO pendant plus d’une semaine (Benozzi et al.,

2002). En injection journalière Moreno et al. (2005) ont obtenu une augmentation de 86% la PIO,

stable pendant 10 semaines, et associée à une perte de RGC de 40%.

4.1.2.3.Injection d’une solution hypertonique dans les veines

épisclérales

L’injection d’une solution hypertonique de NaCl (1,5-2 M) dans les veines épisclérales,

structures impliquées dans l’élimination de l’humeur aqueuse, est également utilisée comme modèle

de glaucome (Morrisson et al., 2018). Les expériences de Morrison et al (1997) chez le rat montrent

que l’élévation de la PIO dépend notamment de la concentration en sel de la solution injectée : plus

celle-ci est importante, plus la pression est élevée et maintenue dans le temps, mais plus

l’inflammation est forte également. Pour une solution de 1,85 M, la PIO est doublée les premiers jours,

puis redescend petit à petit à sa valeur initiale. L’hyperpression est maintenue pendant près de 200

jours chez certains animaux. Concernant la mort des RGC, les auteurs annoncent une perte presque

totale des axones du nerf optique lorsque la PIO est doublée, que ce soit au bout d’une ou de 5

semaines.

Le geste chirurgical est difficile à maîtriser et demande donc beaucoup d’entraînement, ce qui

limite l’utilisation de cette technique. De plus, les résultats obtenus sont très variables entre les

animaux.

4.1.2.4.Photocoagulation laser

La photocoagulation est la méthode la plus utilisée pour produire un modèle de glaucome chez

l’animal, et que nous avons jugé la plus reproductible dans notre laboratoire. Avec cette technique sont

ciblés, seuls ou en combinaison, les veines épisclérales, le plexus limbique et/ou le trabéculum (Figs. 2

et 10). Sur chacune des structures, plusieurs points d’impact sont réalisés. Le laser est soit à argon soit

à diode, la puissance du premier étant supérieure mais les lésions produites par le second étant plus

profondes et plus étendues (voir Biswas et Wan, 2019). Le faisceau laser peut être appliqué

directement à la surface de l’œil à l’aide d’une sonde endoscopique ou bien au travers d’une lampe à

fente. D’après Biermann et al (2102), la puissance du faisceau laser, le temps de coagulation et le

nombre de points d’impact permettent, dans une certaine mesure, de contrôler la durée et le

pourcentage d’augmentation de la PIO.

Levkovitch-Verbin et al. (2002) ont développé une méthode de référence, chez le rat, qui

comprend la coagulation du trabéculum (60-80 impacts) et des veines épisclérales (15-20 impacts). Le

laser utilisé est à diode et les impacts sont délivrés, via une lampe à fente, pendant 0,7 seconde à la

puissance de 0,4 W (groupe 1) ou pendant 0,5 sec à 0,6 W (groupe 2). Le profil de PIO obtenu est

relativement similaire entre les groupes 1 et 2, avec une hyperpression importante (+100 %) dès les

premiers jours suivant la photocoagulation et un retour à sa valeur basale autour du 20

ème

jour. A noter

que la procédure laser est réitérée une semaine après la première intervention si l’hyperpression n’est

pas maintenue. Concernant la perte axonale, elle est beaucoup plus importante dans le premier groupe

(-71%, à 9 semaines) que dans le second (-50%). Les auteurs proposent également de photocoaguler

uniquement le trabéculum (60-80 impacts, 0,7 sec, 0, 4 W). Le profil de pression observé est similaire

à celui des groupes précédents et la perte axonale est de 48 % à 9 semaines. De nombreux auteurs ont

repris et adapté la méthode publiée par Levkovitch-Verbin (2002). Il est notable que les profils de PIO

et le pourcentage de mort de RGC obtenus sont variables d’une étude à l’autre (Salinas-Navarro et al.,

2010, Johnson et al., 2010, Scnebelen et al., 2009). Cette approche a également été transposée avec

succès chez la souris (Salinas-Navarro et al., 2009a, Yun et al., 2014).

L’avantage de la photocoagulation au laser est de conduire à une élévation acceptable de la PIO

après une seule, ou maximum deux, interventions. En effet, une PIO trop élevée correspondrait alors

plus à un modèle d’ischémie reperfusion qu’à un modèle de glaucome. L’inconvénient de cette

procédure relève par contre du degré important de technicité qu’elle requiert de la part de

l’expérimentateur, afin d’obtenir une élévation durable de la PIO et de limiter les effets secondaires

qui lui sont associés. Dans notre laboratoire les plus courants sont une sécheresse et une opacité

cornéenne, une cataracte, et une inflammation importante, également décrites par d’autres auteurs

(voir Biswas et Wan, 2019). L’hyphéma, correspondant à la présence de sang dans la chambre

antérieure, est également courante (Levkovitch-Verbin et al., 2002). Enfin, les lasers sont des

dispositifs coûteux qui ne sont pas accessibles dans toutes les structures de recherche.

Figure 10. Structures oculaires classiquement photocoagulées au laser dans le cadre de

l’induction d’un glaucome expérimental.

Les veines épisclérales, le plexus limbique et le trabéculum sont trois structures essentielles pour

l’élimination de l’humeur aqueuse.Alors que les veines épisclérales et le plexus limbique sont visibles

à l’extérieur de l’œil, le trabéculum est plus difficile à atteindre, car localisé dans l’angle

irido-cornéen, à l’intérieur du globe.

A gauche, photo d’œil de rat de Morrison et al., 2015. A droite, schéma d’un quart d’œil vu en coupe,

d’après Levkovitch-Verbin et al., 2002

En résumé, il apparait que la même méthode utilisée par différents auteurs apporte des résultats