Le cholestérol est un lipide appartenant à la famille des stérols. Il est composé d’un squelette carboné,
comprenant un noyau stérane à 4 cycles de carbones (A, B, C, D), et d’une chaine latérale. Sur le cycle
A, en position 3, est lié une fonction hydroxyl (-OH) qui confère au cholestérol la propriété d’être
amphiphile. Au sein des membranes, il s’insère entre les phospholipides et régule la fluidité des
bicouches lipidiques. De plus, il est requis pour la formation des rafts, plateformes de signalisation
localisées dans la membrane plasmique. Par ailleurs, le cholestérol est le précurseur d’autres molécules
bioactives que sont les hormones stéroïdiennes. Enfin, le catabolisme du cholestérol sert à la synthèse
des sels biliaires primaires par les hépatocytes, transformés en sels biliaires secondaires, comme
l’acide désoxycholique, par les bactéries intestinales. Ces sels permettent d’émulsifier les lipides du
bol alimentaire lors de leur passage dans l’intestin grêle.
2. Répartition du cholestérol dans l’organisme et importance dans
le système nerveux
On retrouve en moyenne 140 g de cholestérol chez un Homme de 70 kg, soit 2 mg de
cholestérol/ kg (Sabine, 1977 dans Pikuleva et Curcio, 2014). Environ 8% de ce pool sont localisés
dans la circulation sanguine, majoritairement sous forme estérifiée au cœur des lipoprotéines. Les 92%
restants sont présents dans les organes, principalement dans les membranes cellulaires sous forme non
estérifiée. Dans la rétine, 90% du cholestérol serait présent sous cette forme (Bretillon et al., 2008,
Pikuleva and Curcio., 2014). Les tissus stéroïdogènes font exception, les cellules stockant dans leur
cytoplasme de grandes quantités d’esters de cholestérol pour la synthèse hormonale.
Le cerveau, et plus généralement le système nerveux, font partie des organes les plus riches en
cholestérol, avec 20 mg/g de tissu sec (Sabine, 1977). Ils contiennent d’ailleurs à eux seuls 23 % de la
quantité totale de cholestérol dans l’organisme. Les tissus stéroïdogènes, comme les glandes
surrénales, présentent également des teneurs en cholestérol très élevées (25 à 150 mg/g). A titre de
comparaison, le foie contient environ 3 mg de cholestérol/g (Sabine, 1977). La rétine présente une
teneur similaire à celle observée dans le foie, mais la mesure ayant été réalisée chez le bœuf demande
à être validée chez l’Homme (Bretillon et al., 2007). Chez le rat, nous avons mesuré une quantité
moyenne de 2,7 mg de cholestérol/g de rétine, ce qui est proche des données publiées chez le bœuf.
Dans l’organisme, les tissus nerveux sont particulièrement dépendants du cholestérol. En effet,
les neurones synthétisent en permanence de grandes quantités de membranes, notamment pour pouvoir
assurer l’exocytose synaptique des neurotransmetteurs et la croissance des épines dendritiques.
Comme mentionné précédemment, le cholestérol module les propriétés physiques des membranes et
influence ainsi le « trafficking » et la signalisation cellulaire. Il est donc probable que la quantité de
cholestérol dans les membranes des neurones soit un élément déterminant de la régulation de la
transmission nerveuse. Certains canaux ioniques et récepteurs impliqués dans la transduction
post-synaptique seraient d’ailleurs localisés dans les rafts (Korade et Kenworthy, 2008, Tsui-Pierchala et
al., 2002). Par ailleurs, les gaines de myéline qui entourent les fibres nerveuses sont extrêmement
riches en cholestérol : 70 à 80 % du cholestérol cérébral serait contenu dans ces structures. Les
membranes des neurones et de la glie représentent les 30% restants (Diestchy et al., 2009). Les gaines
de myéline correspondent à des extensions de la membrane des oligodendrocytes, rendue très dense et
compacte notamment grâce à la présence de cholestérol en grande quantité (ratio cholestérol /
phosphatidylcholine en moyenne de 5,1 dans la myéline contre 1,6 dans la matière grise, Saher et
Stumpf., 2015). Elles possèdent ainsi une haute capacité d’isolement électrique, permettant une
conduction rapide de l’influx nerveux le long des axones. La mise en place des gaines de myéline a
lieu principalement pendant la maturation du cerveau, qui débute en général à la naissance et se
poursuit jusqu’à un âge plus ou moins avancé selon les espèces (Dietschy et al., 2009, Miller et al.,
2011). Dans la rétine, le cholestérol est réparti de manière homogène entre les différentes couches
cellulaires, principalement présent au sein de la membrane des neurones et des cellules gliales. Les
segments externes des photorécepteurs font exception car ils possèdent une teneur en cholestérol bien
inférieure à celle du reste de la rétine, les bâtonnets étant plus pauvres que les cônes (Fig. 13) (Zheng
et al., 2012, Pikuleva et Curcio, 2014). Au sein des segments externes, c’est plus précisément la
membrane des disques apicaux qui présente une teneur en cholestérol réduite. Dans les bâtonnets elle
est trois fois inférieure à celle des disques basaux ou à celle de la membrane plasmique
(Boesze-Battaglia et al., 1989, Fliesler and Schroepfer, 1982). Les disques prennent naissance à la base du
segment externe, probablement à partir d’évaginations de la membrane plasmique, et maturent le long
de leur trajet vers l’extrémité apicale du segment (sur une période d’environ 10 jours chez les
vertébrés) (Goldberg et al., 2016). Dans les bâtonnets cette maturation comprend notamment la
déplétion partielle de leur membrane en cholestérol, étape indispensable à l’activation du pigment
visuel qu’est la rhodopsine. En effet, l’environnement membranaire « rigide » créé par la présence de
cholestérol empêcherait le changement de conformation de la rhodopsine, qui fait normalement suite
la fixation d’un photon (Albert et al., 2016). L’extrémité apicale des photorécepteurs est en
permanence phagocytée par les microvillosités du RPE et il est probable que, comme pour les
pigments visuels ou d’autres composés de la membrane des segments externes, le cholestérol soit
recyclé et retourne en partie aux photorécepteurs.
Dans le document
Régulation du métabolisme du cholestérol dans la rétine en conditions expérimentales associées au glaucome
(Page 73-76)