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1.3 Modélisation du comportement mécanique d’un sol

1.3.4 Modèles élastoplastiques classiques

Modèles à une surface de charge

Les premiers modèles avec une seule surface de charge sont les modèles élastiques par- faitement plastiques associés se basant sur les critères classiques utilisés en géotechnique (par exemple Mohr-Coulomb et Drucker-Prager). La réponse de ce type de modèles à l’échelle du laboratoire n’est pas satisfaisante. Bien qu’ils permettent de simuler la résis- tance ultime pour les essais de cisaillement, la non linéarité du comportement n’est pas simulée et les déformations volumiques sont sur-estimées surtout si la règle d’écoulement est associée. La limite principale de ces modèles est que leur surface de charge est ouverte. Ceci implique qu’ils supposent que la résistance du sol en compression isotrope est infinie. Plusieurs auteurs ont proposé des améliorations à ces modèles pour des applications en géotechnique. Par exemple, Doherty et Wood (2013) proposent d’ajouter un mécanisme d’écrouissage déviatorique au modèle de Mohr-Coulomb et une règle d’écoulement non as- sociée pour mieux prévoir les tassements de fondations superficielles dans le sable. Cette extension du modèle de Mohr-Coulomb a été utilisée par (Dong & Anagnostou, 2014) pour la simulation du creusement d’un tunnel très profond en conditions non drainées. Ils avaient conclu que l’apport de ce modèle pour la simulation de déplacements n’était pas significatif par rapport au modèle de Mohr-Coulomb classique.

Pour les sols argileux, il a été établi que leur réponse est mieux simulée avec la théorie de l’état critique avec une surface de charge fermée (Wood, 1990). Dans ce contexte, le prototype des modèles de comportement est celui de Cam-Clay Modifié (Roscoe et al., 1958) que l’on va noter MCC (Modified Cam Clay) par la suite. Il compte cinq para- mètres et sa formulation est présentée en détail dans la partie 1.4.4. C’est un modèle avec écrouissage volumique qui présente le défaut de surestimer la résistance en cisaillement d’un sol surconsolidé (Gens & Potts, 1988) avec une amplification de la dilatance (Lagioia & Potts, 1988). Une estimation réaliste de la résistance au cisaillement pour les argiles surconsolidées peut être obtenue en modifiant la formulation du modèle MCC d’un seul côté de la droite de l’état critique (J. Chen, 2017) ou en modifiant sa surface de charge. En ajoutant trois paramètres par rapport au modèle MCC, Yu (1998) propose le modèle "Clay and Sand Model" (CASM). Ce modèle élastoplastique corrige la surestimation de la résis- tance et améliore la simulation de la dilatance dans le cadre de la théorie de l’état critique.

Modèles à double surface de charge

Les modèles avec deux surfaces de charge ou à double critère se sont développés au départ en ajoutant un cap ou un critère en compression isotrope aux critères classiques à surface de charge ouverte. La première proposition dans ce sens était faite par Drucker (1957).

Ce type de modèle a été ensuite intégré dans les codes de calcul en éléments finis com- mercialisés et très utilisé en ingénierie comme le rapporte Sandler (2005). On trouve par exemple dans le logiciel Abaqus le modèle de comportement dit de Drucker-Prager avec cap modifié (Abaqus, 2016) avec écrouissage volumique. Entre le critère de cisaillement et le cap de la surface de charge, une surface de transition est ajoutée dans ce modèle comme l’illustre la Figure 1.15. Cette surface de transition permet de faciliter la conver- gence numérique lorsque l’écrouissage volumique est activé avec le cap.

Figure 1.15 – Surface de charge du modèle de Drucker-Prager avec cap modifié (figure modifiée d’après Abaqus (2016))

Pour l’application particulière de creusement de tunnels, le sol autour de l’excavation étant sollicité en cisaillement, la prise en compte d’un mécanisme d’écrouissage déviato- rique s’avère utile et nécessaire au dimensionnement et à la prévision de déplacements induits par ces travaux. Dans ce sens, des modèles à double écrouissage volumique et déviatorique sont proposés. Après le modèle élastoplastique de Mohr Coulomb, le mo- dèle de comportement le plus utilisé dans la pratique pour la simulation du creusement de tunnels est le modèle Hardening Soil Model (HSM) proposé par Schanz et Vermeer (2000) notamment en France et en particulier pour les études du projet du Grand Paris (Gilleron, 2016). Ce modèle est caractérisé par une double surface de charge avec double écrouissage volumique et déviatorique. Son critère de rupture en cisaillement est celui de Mohr-Coulomb. En outre, le cap de sa surface de charge peut évoluer avec un mécanisme d’écrouissage isotrope comme l’illustre la Figure 1.16 où fd est la surface de charge en cisaillement et fc est le cap de la surface de charge dans le plan défini par la contrainte moyenne effective p et le déviateur q. La formulation de base de ce modèle est donnée dans l’Annexe B.

Le modèle HSM présente plusieurs limites dans la simulation du comportement du sol et dans la modélisation des tunnels même s’il intègre les deux mécanismes d’écrouissage

1.3. Modélisation du comportement mécanique d’un sol

Figure 1.16 – Surface de charge de HSM (figure modifiée d’après (Brinkgreve, 1994)) volumique et déviatorique. Ce modèle qui n’intègre pas l’état critique est incapable de correctement simuler la dilatance. Par conséquent, le comportement radoucissant ne peut pas être modélisé ainsi que la réponse non drainée des argiles surconsolidées. Un choix d’un angle de dilatance ψ non nul résulte en des réponses non réalistes pour le sol (Truty & Obrzud, 2015). Pour illustrer ces propos, nous avons simulé un essai triaxial non drainé normalement consolidé avec ce modèle. La comparaison de la réponse avec un angle de dilatance nul et un angle de dilatance de 10° en gardant toutes choses égales par ailleurs est donnée par la Figure 1.17.

Le modèle résulte en une réponse infiniment durcissante avec un angle de dilatance non nul tandis qu’un plateau est atteint avec un angle de dilatance nul. De plus, l’écrouissage positif est accompagné par une diminution de la pression interstitielle. La réponse non drainée du modèle est alors irréaliste et aberrante si la dilatance est prise en compte.