Point 1 : Gestion de l’offre et de la demande (BSM ou « Both Side Management »)
Ce point traitera de l’importance de mieux connaître la demande en quantité (temporellement, mais aussi spatialement) et en qualité (températures de fonctionnement du chauffage et de l’eau chaude sanitaire ‐ ECS), avec des aspects techniques mais aussi comportementaux des gestionnaires et des utilisateurs.
Au vu de la durée des infrastructures mises en jeu, l’évolution de cette demande doit aussi être soigneusement étudiée, en particulier :
la part grandissante de l’ECS par rapport au chauffage, que ce soit dans le neuf ou dans l’existant après rénovation, et ses conséquences en quantité et en qualité ;
Les possibilités de stockage de chaleur pour l’ECS, aussi bien du côté primaire que du côté secondaire ;
Les demandes de froid et de chaud et leur complémentarité spatiale et temporelle (exemple de GLN / GéniLac) ;
La complémentarité ou la concurrence entre productions centralisées et décentralisées.
Les contraintes de l’évolution attendue des réseaux thermiques doivent être bien cernées :
Vers la basse densité (Impacts des rénovations des bâtiments sur la demande de chaleur et concernant l’économicité des réseaux) ;
Vers des basses températures, ce qui favorise la pénétration de la chaleur fatale et des ressources renouvelables.
Point 2 : Modèles économiques du financement du développement des réseaux thermiques :
De façon comparable à la mise en place de la valorisation des ressources énergétiques renouvelables, la mise en place de réseaux thermiques est intensive en capital et doit être considérée comme une opération de long terme.
Dès lors, comment mettre en œuvre des modèles de financement pour le développement de ces infrastructures de long terme ? Quels politiques ont‐elles été appliquées dans les pays
« exemplaires » tels que le Danemark ? Quelles planifications et quelles gestions pourraient être appliquées sur Genève, respectivement la Suisse ?
Point 3 : Synergies et conflits entre les réseaux thermiques et électriques
Aujourd’hui, les approches et les analyses ne peuvent plus être purement électriques ou thermiques.
En effet, le développement actuel et futur de nombreux usages non spécifiques de l’électricité (pompe à chaleur, voiture électrique, chauffage partiel des bâtiments par récupération de l’air vicié, etc…) ou les modifications importantes de l’utilisation électrique dans certaines filières (climatisation via des réseaux hydrothermiques de type GLN plutôt que des machines de froid) amènent à se questionner sur les synergies et les conflits entre des filières restées souvent cloisonnées.
A titre d’exemple, on peut citer le cas du réseau de Skagen au Danemark, où lorsque le marché spot électrique est bas, les surplus de production électrique renouvelable (essentiellement éolien dans ce cas car celles‐ci représentent près de 30% de la puissance électrique installée au Danemark) peuvent être stockés dans le réseau de chaleur pour une optimisation économique du système permettant d’éviter un arrêt des éoliennes (Figure 13) :
Figure 13: évolution du stockage de chaleur du CAD de Skagen au Danemark (en haut) et évolution des sources de productions de la chaleur pour le CAD selon le prix spot de l’électricité (en bas) – adapté d’après Nast 2012
L’étude des synergies et conflits des filières thermiques et électriques dans un contexte d’optimisation global de système est un objectif ambitieux, qui ne pourra qu’être ébauché dans ce projet. Il devra être repris dans un projet plus vaste de développement des compétences en efficacité énergétique, tel que mentionné au paragraphe 2 (page 4) et :
traitant aussi bien la filière thermique qu’électrique ;
prenant en compte les synergies et les conflits entre ces deux filières ;
sans favoriser l’approche par l’offre ou par la demande (concept de « Both Side Management », BSM).
Prix Electricité↓
→ Stockage chaleur ↑ (« électricité fatale »)
6. Méthode pour le projet REMUER
Afin de répondre à ces nombreux questionnements, la méthode générale suivie sera d’effectuer plusieurs retours d’expérience sur des systèmes réels, en intégrant les aspects techniques, économiques, environnementaux, politiques et sociaux. Même si ces études de cas sont en eux‐
mêmes des projets intéressants, le but est de les insérer dans un contexte plus large. Une thèse de doctorat est prévue, financée à moitié par SIG et à moitié par l’Université. Elle sera encadrée par un groupe interdisciplinaire, composé d’universitaires et de professionnels, dont une partie sera directement financée par le projet. Des collaborateurs de SIG seront intégrés dans le projet de recherche à l’aide d’un financement interne.
Plus pratiquement, il est proposé d’effectuer deux études de cas en détails :
1. Étude de cas Laurana‐Parc (Genève) : remplacement d’une chaufferie à mazout de quartier par une production combinée gaz / pompe à chaleur géothermique
2. Étude de cas de la liaison des réseaux CADIOM (100% chaleur fatale) et CAD Lignon (100%
fossile) à Genève : analyses, enjeux et évolutions possibles.
Ces deux projets sont détaillés dans les annexes 1 et 2. On retiendra les points clés suivants :
Analyse du fonctionnement du système réel et comparaison à la situation initiale ;
Caractérisation de l’évolution du taux de couverture en énergie renouvelable ;
Analyse des coûts de production ;
Évaluation de scénarios d’évolution ;
Mise en évidence des points forts et faibles du système ;
Pistes d’améliorations et potentiel de généralisation.
Les scénarios évolutifs et le potentiel de généralisation seront établis sur la base de projets concrets ainsi que du corpus de connaissances du groupe énergie‐Forel, notamment dans le domaine de la thermique des bâtiments et des CAD incluant des énergies renouvelables (Cartigny, GLN, GéniLac, etc…)
En parallèle, des fonds complémentaires permettraient de rajouter à ces retours d’expérience une analyse :
Des données nationales et internationales à des fins de comparaison ;
Des synergies et des conflits potentiels entre les filières thermiques et électriques ;
Des synergies et des conflits potentiels entre les économies d’énergie et le développement des réseaux thermiques et/ou de gaz ;
Des évaluations des modèles de financement pour le développement d’infrastructures de type réseaux thermiques ;
Des évaluations des cadres politique et juridique associés.
L’appel à projet de la confédération qui se déroulera en 2013 est le lieu idéal pour ce type de projet, avec l’objectif de construire des équipes sur le long terme et trois types de contributions attendues pour le financement : Universités (> 20%), privés, par exemple SIG (> 20%) et Confédération (< 60%).
7. Compétences interdisciplinaires du groupe énergie Forel
A partir principalement d’évaluations et de retours d’expérience sur des systèmes énergétiques innovants mais inscrits dans la réalité locale, le groupe énergie‐Forel cherche à mieux comprendre et à améliorer la diffusion des innovations dans la société. Ses compétences portent sur la physique, la technique, l’économie et la politique de l’énergie. Il travaille sur les systèmes énergétiques, l’efficience, les énergies renouvelables en mettant l’accent sur la relation énergie‐territoire, principalement au niveau de l'Agglomération Franco‐Valdo‐Genevoise (Grand Genève).
Les retours d’expériences sur de nombreux systèmes énergétiques ont déjà été réalisés, entre autre :
Audit‐bois : Ressource bois et chauffage à distance : rendement global, émissions polluantes et tarification de l’énergie bois. Etude basée sur le retour d’expérience de l’installation de Cartigny (Genève) ;
COP5 : Source froide solaire pour pompe à chaleur avec un COP annuel de 5 généralisable dans le neuf et la renovation ;
Evaluation des économies d’électricité (éco21) ;
GLN : projet Concerto/Tetraener : étude de cas de Genève‐Lac‐Nation (GLN) ;
Gros‐Chêne : Suivi énergétique d'un immeuble de logements rénové Minergie (Onex‐
Genève) ;
Polimmo : Suivi énergétique du bâtiment tertiaire Polimmo (Genève) ;
Pommier : Evaluation énergétique d'un immeuble MINERGIE (Grand‐Saconnex‐ Genève) ;
Solaire thermique : analyse et suivi de la cité solaire de Plan‐les‐ouates (Genève) ;
Solaire Photovoltaïque (développement du logiciel PV Syst, www.pvsyst.com) ;
Stockage saisonnier à Marcinhes (Meyrin, Genève).
D’autre part, afin d’inciter à la diffusion des bonnes pratiques d’économies d’énergie dans les entreprises, une nouvelle formation continue en management de l’énergie (CAS – Certificate of Advanced Studies), coordonnée par le groupe énergie‐Forel de l’Université, va débuter en 2013 (http://www.unige.ch/formcont/managementenergie.html).
Les deux principaux chercheurs qui seront fortement impliqués dans ce projet ont le profil suivant : Loic Quiquerez:
Après un baccalauréat en géographie à l’UNIGE sur la dimension sociale du développement durable dans les projets écoquartiers, M. Quiquerez a effectué une maîtrise universitaire en sciences de l’environnement. Son travail de mémoire, qui a reçu le prix SIG 2012, a pour titre l’« Evaluation du potentiel solaire photovoltaïque et thermique dans un environnement urbain. Etude de cas de deux territoires du canton de Genève : Les Pâquis et Veyrier ». En parallèle, il a terminé le certificat complémentaire en géomatique de l’UNIGE en 2011.
Il travaille depuis début 2012 au groupe énergie‐Forel, notamment sur les températures de distribution de chauffage à Genève (expertise thermique réalisée dans le cadre du partenariat SIG). Il est inscrit comme assistant‐doctorant avec l’objectif de réaliser une thèse d’ici 2015.
Jérôme Faessler :
Après un baccalauréat en biochimie et un master en sciences naturelles de l’environnement à l’UNIGE sur la récupération de la chaleur du processus de compostage, M. Faessler a travaillé 6 ans au site de Châtillon à Genève (pôle multifonctionnel de traitement de déchets).
Entre 2008 et 2011, il a mené et réalisé le projet VIRAGE (Valorisation Intensive des énergies Renouvelables dans l’Agglomération franco‐valdo‐GEnevoise), cofinancé par l’Etat de Genève et l’UNIGE. Ce projet interdisciplinaire a abouti à la réalisation de sept rapports plus une thèse de doctorat disponible sur le site de l’UNIGE (http://archive‐ouverte.unige.ch/). En parallèle, M. Faessler a terminé le certificat complémentaire en géomatique de l’UNIGE en 2010 sur le potentiel des toitures solaires du canton de Genève.
Il travaille depuis l’automne 2011 au groupe énergie‐Forel et a réalisé plusieurs études pour les SIG dans le cadre du partenariat (potentiels de froid du projet GLU/GLA, aspects énergétiques de la mobilité électrique, gisements des déchets organiques du Pôle Bio, éléments de réflexions pour la stratégie thermique).
8. Aspects financiers et temporels du projet REMUER
La planification temporelle du projet est prévue en deux parties, avec d’une part les deux études de cas et d’autre part les aspects plus généraux qui devront être étudiés en parallèle (Figure 14). Ces aspects pourraient être développés et reconduits en imaginant un élargissement de la problématique
Le financement de base a été validé dans le cadre du partenariat avec SIG (un élargissement à d’autres partenaires et institutions est envisageable) :
SIG‐UNIGE Partenariat : 150 kCHF (2 études de cas décrites)
SIG‐UNIGE Partenariat : 100 kCHF (projet REMUER)
SIG‐interne : 60 kCHF
UNIGE interne (y compris co‐financement d’une thèse) : 150 kCHF
Partenaires 2012 2013 2014 2015 2012‐2015 SOMME
SIG ‐UNI Partenariat 25 100 100 25 250
Université de Genève 15 60 60 15 150
SIG Interne 10 20 20 10 60
TOTAL 50 180 180 50 460
Tableau 1: planification financière du projet REMUER (y compris les deux études de cas)
A l’aide des retours d’expérience et à la suite des analyses plus générales, une thèse de doctorat cofinancée entre SIG (via le partenariat) et l’UNIGE sera effectuée par Loïc Quiquerez. Le titre sera précisé ultérieurement mais s’inscrira dans la problématique générale développée dans ce document.
1. Etudes de cas
Analyse de la situation antérieure doc/analyse
Analyse technique/énergétique /économique hiver no 1 été/hiver no 2
Scénarios d'évolution
oct.12 avr.13 oct.13 avr.14 oct.14 avr.15
9. Conclusions
De nombreux exemples montrent que les réseaux thermiques permettent une valorisation intensive de ressources renouvelables comme la géothermie, la biomasse, le solaire ou les chaleurs fatales (issues de l’incinération des déchets, de la production d’électricité thermique ou des rejets thermiques industriels et/ou de datacenters).
Malgré tout, cette voie est peu explorée et les réflexions autour d’elle peu présentes au niveau suisse. La situation à Genève est différente car un intérêt très grand est porté aux réseaux thermiques, que ce soit par le Canton, SIG ou l’Université. Le projet présenté, inscrit dans ce cadre, pourrait contribuer à développer au niveau régional, voir national, des compétences sur l’efficacité énergétique, ceci :
aussi bien pour la filière thermique qu’électrique ;
en prenant en compte les synergies et les conflits entre ces deux filières ;
et sans favoriser l’approche par l’offre ou par la demande (concept de «both side management», BSM).
Ce projet est composé de deux grandes parties :
1. deux retours d’expérience sur des projets pilotés par SIG, l’un sur la liaison entre deux grands réseaux (l’un fossile, l’autre chaleur « fatale »), l’autre sur le développement d’un réseau local avec intégration du renouvelable ;
2. des analyses transversales de thématiques plus larges, touchant des aspects techniques, financiers, de gestion, etc….
La question de base est :
Sachant que les réseaux sont très capitalistiques et qu’ils ont besoin d’une densité minimale pour être rentable, existent‐t‐il des modèles de développement coordonné afin de rendre les investissements dans le domaine de l’énergie les plus efficaces possible ?
Pratiquement, ce projet sera l’occasion d’un travail de thèse financé de façon égale par SIG et l’Université, travail appuyé par un groupe interdisciplinaire. En complément et à l’aide d’autres financements, un élargissement du projet à des thématiques plus larges et à d’autres acteurs permettrait de développer au niveau régional et national les compétences en efficacité énergétique.
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Annexes
Annexe 1 : Etude de cas 1 : Remplacement d’une chaufferie à mazout de quartier par une production de chaleur combinée gaz / pompe à chaleur géothermique. Etude de cas du complexe Laurana Parc, à Genève.
Annexe 2 : Etude de cas 2 : Liaison des réseaux de chauffage à distance CADIOM (100% chaleur fatale) et CAD Lignon (100% fossile) à Genève : analyses, enjeux et évolutions possibles.