• Aucun résultat trouvé

Une mobilité urbaine partagée

Dans le document Urbanisme et mobilité (Page 98-104)

13. Les évolutions techniques et comportementales

13.2. Une mobilité urbaine partagée

On sait aujourd’hui que la mobilité urbaine du futur devrait être partagée, grâce notamment au co-voiturage et à l’auto-partage, et qu’elle devra être multi-modale : que ce soit d’un point de vue énergétique ou d’emprise au sol, les TC, le scooter et le vélo sont les moyens de transport les plus efficaces dans des espaces limités et contraints.88

Quatre raisons justifient l’arrivée de nouveaux modes de déplacements doux ou alternatifs :

la première, c’est l’incompatibilité de notre utilisation actuelle de l’automobile avec les objectifs à la fois énergétiques et environnementaux que se sont fixés les États ;

la seconde raison pour la promotion de nouvelles mobilités est celle du risque d’exclusion sociale et territoriale, la voiture est devenue à ce point indispensable que ceux qui n’en sont pas dotés, pour des raisons variées dont la première peut être le coût de la possession d’une automobile et de son entretien, sont marginalisés. De nombreuses offres d’emplois, notamment en région, exigent d’avoir le permis B et d’avoir un véhicule. 40% de la population française vit dans des territoires à faible densité, où donc ce risque est accru. Si l’on prend en compte le covoiturage, ce système permet de transporter plus de personnes avec autant de véhicules ;

la troisième raison de passer à de nouveaux modes de transports, la gestion de l’espace. Et cet espace peut être trouvé sur les routes et rues qui traversent nos cités. (Par rapport aux pietons, aux deux- roues et aux transports collectifs urbains, une automobile consomme en moyenne beaucoup plus d’espace : de 4 à 10 m2 au sol, mais 15 à 20 m2 dans un parking, et entre 50 et 250 m2 en circulation, selon la vitesse et la categorie de voies. ). Moins de voitures, plus de transports en communs et de modes de déplacements doux, c’est l’assurance de disposer de plus d’espace de vie ;

enfin, dernière raison qui nous incite à changer de comportement lors de nos déplacements, la crise économique qui a mis en exergue le décalage entre des modèles de voitures coûteux et qui ne correspondent pas aux attentes de la

88 Cf. pour ce paragraphe : « Nouvelles mobilités et répartition de l’espace public en zone urbaine : quelles solutions ? » Tangi FOUYER, CCI Rennes, novembre 2014

clientèle. De nombreuses études notent ainsi la part décroissante du budget des ménages accordée à l’achat d’un véhicule neuf.

Inciter le public à choisir le mode de déplacement le plus adéquat, qui n’est pas obligatoirement le plus rapide ou le plus court est une des fonctions de certaines applications internet de calculateurs de temps de trajet. Cette information donnée à l’usager a l’avantage de lui permettre de comparer et souvent de se rendre compte que les modes actifs ne sont pas forcément dirimants. Ainsi, la ville de Nantes a-t-elle installé des panneaux d’information qui renseignent le public sur les différents temps de transport selon le mode choisi. Cette initiative paraît à la mission devoir être largement diffusée afin de favoriser sa généralisation.

(source CEREMA la signalisation pour les cyclistes et les piétons)

Agir sur la tarification des péages et des voies réservées

Pour favoriser un usage sobre de la voiture individuelle, des initiatives intéressantes ont été menées pour promouvoir le co-voiturage. Ainsi, les systèmes de transport utilisés sur certaines autoroutes américaines permettent de réserver une voie aux véhicules ayant à leur bord plusieurs personnes. Une discrimination à l’encontre de l’autosolisme pourrait être pratiquée aux péages routiers ou même en matière de parcs de stationnement. L’action sur le renchérissement de l’usage individuel du véhicule pourrait avoir un effet extrêmement bénéfique sur l’emploi des transports collectifs dans les grandes villes bien dotées en la matière. Elle pourrait conduire des villes moyennes à favoriser le développement de leurs armatures de transport pour contenir l’intrusion des véhicules individuels polluants en centre-ville.

Agir sur la gestion du temps

Les emplois du temps de nos concitoyens sont de plus en plus désynchronisés : multiplication des horaires atypiques, allongement des temps de transport, flexibilité des rythmes de travail.

Le temps fait ressortir et creuse des inégalités profondes : inégalité entre ceux qui peuvent s'offrir des services et ceux qui sont soumis à des horaires imposés ; inégalité

entre les femmes et les hommes ; inégalité de temps d'accès aux services entre habitants des centres-villes et des périphéries.

Pour tenter de répondre à cette évolution des temporalités, et sous l'impulsion du rapport parlementaire de son maire Edmond Hervé sur le "temps des villes", la Ville de Rennes crée, en 2002, le premier bureau des temps afin de favoriser l'harmonisation des temps sociaux sur le territoire de l’agglomération et d'améliorer la qualité de vie collective des habitants et usagers de la ville dans un souci d'égalité.

Depuis, une trentaine de villes et métropoles ont mis en place des bureaux (ou agences) des temps qui imaginent des activités culturelles ou sportives à horaires décalés, luttent contre la congestion des transports, élargissent les créneaux d’ouverture des services administratifs, des piscines, des crèches ou des bibliothèques. Ils contribuent à penser le développement et l’aménagement du territoire et à soutenir les initiatives locales en accord avec ces nouvelles données temporelles.

Leur action porte donc principalement sur le renforcement de la qualité des services publics, notamment par la définition d'horaires conciliant au mieux demandes des usagers et conditions de travail des salariés assurant les services ; le développement de services innovants pour mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle (guichets uniques de services, services aux salariés dans les zones d'activité, garde d'enfants à horaires atypiques, etc.) ; et enfin, la prise en compte des questions temporelles dans les opérations d'aménagement et de déplacements.

Au-delà d’une action en faveur d’une plus grande égalité sociale, ils agissent pour rendre leurs territoires plus fluides. Les déplacements impactent l'environnement mais aussi la répartition du temps au quotidien. L'approche temporelle propose, par exemple, de décaler les horaires scolaires, universitaires ou professionnels sur une zone donnée ou d'agir sur les horaires de livraisons, afin de limiter les encombrements sur les routes et dans les transports collectifs (comme à Lyon, Montpellier ou Bordeaux). Elle peut aussi apporter quelques éléments de réponse pour mieux adapter la ville à ces contraintes: mutualisation des équipements (bâtiments, parkings, etc.) prise en compte de la réversibilité possible des aménagements et des bâtis pour les adapter en fonction de l'évolution des modes de vie et adaptation des horaires d'ouverture des services publics tout en respectant les conditions de travail des agents.

Interlocuteurs privilégiés des producteurs de temps (publics comme privés) les bureaux du temps peuvent aussi agir auprès du monde du travail par la promotion de la pratique du télétravail auprès des chefs d’entreprise ou l’utilisation de lieux de travail partagés (‘coworking’), de tiers lieux, ou encore travailler avec les exploitants de réseaux de transport et les autorités organisatrices à la « valorisation » des temps de transport pour réduire les phénomènes de congestion urbaine ou de rocade, transformer le temps de transport en temps ressource et en l’optimisant (temps passé dans les transports, temps d’attente en station de transports collectifs ou encore pause méridienne).

Un exemple de l’évolution des comportements : l’autopartage

Par la mutualisation d’un véhicule sur une journée, il permet la diminution du nombre de véhicules en zone urbaine et la libération de places de stationnement. Avec

l’utilisation de la motorisation électrique il contribue également à la diminution de la pollution et à la démocratisation de cette technologie.

Selon une étude conduite par la jeune start-up francilienne Carsonar, on dénombre en France 26 256 véhicules en autopartage dont la grande majorité (90%) sont des véhicules mis en location par des particuliers. Les véhicules les plus partagés sont les compactes (46%) et les citadines (16%).

En se basant sur les données de recensement géographique de l’INSEE, CarSonar a tenté d’évaluer le taux de couverture de l’autopartage en France. Les foyers se situant à moins de 15 minutes à pied d’un véhicule en autopartage sont considérés comme couverts. Ainsi, selon cette méthodologie, 54% de la population de France métropolitaine dispose d’un véhicule en autopartage à moins de 15 minutes de son domicile. D'après l’enquête de l'institut CSA pour Uber, 17 % des Français ont eu recours à «l'autopartage» en 2014

L’autopartage est un mode adapté pour des besoins ponctuels en milieu urbain, en complémentarité avec l’offre de transports existante. Le recours à l’autopartage occasionne des reports modaux. 30% des répondants à cette étude affirment pratiquer davantage la marché à pied, 30% le vélo, 25% les transports collectifs et 25% le train.

Ces chiffres sont plus élevés pour les autopartageurs ayant mentionné que leurs changements d’habitudes de transport étaient liés à leur adhésion à un service d’autopartage. La pratique de l’autopartage tendrait ainsi à diversifier les pratiques de mobilité.

L’autopartage entre particuliers présente un potentiel très élevé car (chiffres donnés pour la France):

tout le monde n’a pas une voiture. 5 millions de ménages (18 %) n’ont aucune voiture. Au total, 11 millions de ménages (40 %) ont moins de voitures que d’adultes ;

beaucoup de voitures roulent peu. 5 millions de voitures (16 %) font moins de 5 000 km par an. 7 millions de voitures (23 %) sont utilisées moins de 3 fois par semaine ;

une voiture coûte cher. Une voiture coûte en moyenne 4 350 € par an (0,34 € par km). Ce montant prend en compte tous les frais : achat du véhicule, entretien, assurance, carburant, usure... Ce coût va fortement augmenter dans les années à venir, notamment sous l’effet de la hausse inéluctable du prix des carburants.

Par ailleurs une enquête réalisée en 2013 par le cabinet 6-t et l’Ademe sur l’impact d’un service d’autopartage en boucle (exemple Mobizen) ou en trace directe,- (le cas d’Autolib’)-, donne les résultats suivants:

Des systèmes qui présentent des limites :

1. Mobizen est un mode majoritairement utilisé pour se rendre à l’extérieur de la ville.

2. Autolib' apparaît comme un mode qui n’est pas suffisamment intégré au système de transport existant et qui ne permet pas automatiquement le partage du véhicule. L’efficacité du service Autolib’ semble être très dépendante de la forte densité de l’offre : 5 stations et 11 véhicules par km² dans Paris. Ainsi, toutes les collectivités pourront-elles proposer le même niveau d’offre en trace directe ? Dans le cas contraire, une densité inférieure aura-t-elle la même efficacité ?

Réduire l'autosolisme89 et ses conséquences néfastes en termes de saturation du réseau routier ou de production de CO2 est un des objectifs d'amélioration des conséquences environnementales de nos déplacements. Pour y parvenir, il conviendrait de favoriser d'une part le covoiturage, notamment par l'implantation de places de parking dédiées, de stations d'embarquement et de débarquement matérialisées et, d'autre part, l'autopartage en particulier celui qui recoure à des technologies propres, notamment par la réservation et le renforcement d'emplacements spécifiques sur voiries et par des mesures visant à rendre moins coûteux le stationnement et la circulation pour les usagers des voitures mutualisées.

89 Ce terme désigne ainsi un automobiliste qui utilise seul son véhicule pour se déplacer, et qui ne pratique ni le covoiturage ni d'autres formes de mobilités alternatives.

14. La loi de modernisation de l’action publique territoriale et

Dans le document Urbanisme et mobilité (Page 98-104)