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2. MRC DE MEMPHÉMAGOG

2.2.1. Mixité sociale et fonctionnelle du territoire

Alors que la MRC de Memphrémagog reconnaît que les profils socioéconomiques, les aspirations et les attentes des individus de même que les usages du territoire diffèrent entre les résidants de longue date, les villégiateurs et les nouveaux résidants permanents (MRC de Memphrémagog, 2005), certaines communautés reconnaissent éprouver des difficultés à rallier les intérêts des nouveaux arrivants à ceux des résidants de longue date (Municipalité d’Austin, 2010; Caron, 2013d). Ainsi, pour les acteurs de la MRC de Memphrémagog, « [i]l paraît donc pertinent de développer un mode de gestion des conflits d’usage qui serait fondé sur la concertation » (MRC de Memphrémagog, 2005, p. 13). Dans ce contexte, la municipalité de Potton a entrepris en 2013 de former un comité de conciliation, composé idéalement de citoyens « de souche », de citoyens « d’adoption » et de villégiateurs (Caron, 2013d). L’idée derrière ce projet était de rassembler la population autour d’enjeux de développement délicats qui suscitent ordinairement des positions divergentes afin de trouver des compromis, des terrains d’entente et des solutions acceptées par l’ensemble de la communauté. Bien entendu, cette démonstration d’ouverture de la part de la municipalité sous-entend une volonté de débattre des différentes opinions citoyennes ainsi qu’une capacité à gérer les enjeux de politisation liés au développement local. Néanmoins, l’expérience de Potton suggère que les résidants de longue date sont peut-être moins intéressés que les nouveaux arrivants à débattre de leurs points de vue et à trouver

des solutions mitoyennes (Ibid), ce qui laisse supposer que des efforts importants doivent être déployés par les communautés intéressées à gérer la mixité sociale liée à l’arrivée de nouvelles populations.

Par ailleurs, dans un contexte où une forte demande résidentielle est attendue dans les prochaines années sur le territoire, une entente a récemment vu le jour entre la MRC de Memphrémagog, l’Union des producteurs agricoles du Québec et la Commission de protection du territoire agricole du Québec en vue de faciliter la construction éventuelle de sept cents nouvelles résidences sur des terrains situés en zone agricole, tout en protégeant la pérennité des activités agricoles (Caron, 2012). Cette entente traduit certainement la volonté des acteurs de la MRC de gérer les flux migratoires en planifiant la croissance résidentielle qui s’opérera dans les prochaines années, tout en évoquant une préoccupation pour la gestion de la mixité fonctionnelle du milieu. En effet, la MRC semble sensible au besoin d’éviter que la fonction économique de l’agriculture ne restreigne le développement de la fonction résidentielle, tout en s’assurant que le développement résidentiel ne nuira pas au maintien de la fonction économique de l’agriculture.

Par conséquent, certaines communautés de la MRC ont déjà commencé à réfléchir à l’impact de l’étalement urbain et du développement domiciliaire sur le milieu naturel, alors que la protection de l’environnement et l’aménagement du territoire sont des préoccupations déjà très présentes chez les acteurs de la MRC, telle qu’en témoigne la démarche de planification stratégique de la municipalité d’Austin (Municipalité d’Austin, 2011a). Ainsi, alors que « les projets domiciliaires modifient rapidement les paysages champêtres [de la MRC] et créent une pression importante sur les écosystèmes » (Drouin, 2013), on constate depuis quelques années un engouement des promoteurs pour les développements domiciliaires qui favorisent la construction d’habitations se conformant à des normes élevées en matière de consommation d’énergie et de propriétés environnementales (Mathieu, 2013b; Drouin, 2013). Puisque ces projets répondent aux objectifs de développement durable fixés par certaines des municipalités de la MRC, on constate qu’elles deviennent de plus en plus populaires. En effet, comme le mentionne le

maire de Sainte-Catherine-de-Hatley, également préfet de la MRC de Memphrémagog, « il est important de repenser l'occupation de nos campagnes » (Drouin, 2013). À cet effet, on observe la mise en place d’un nouveau moyen pour attirer les résidants sur le territoire, soit l’offre d’un crédit de taxes pour les nouveaux propriétaires d’habitations certifiées LEED (« Leadership in Energy and Environmental Design »). Or, de telles initiatives font en sorte que les résidences se vendent autour de 300 000$ et qu’elles sont particulièrement prisées par les 50-64 ans (Mathieu, 2013b).

Ainsi, il apparaît que l’intérêt des acteurs de la MRC concernant la gestion de la mixité fonctionnelle des communautés se tourne davantage vers les enjeux résidentiels, économiques et environnementaux de l’occupation du territoire, alors que l’intérêt pour la mixité sociale des milieux se manifeste plutôt en marge des questions liées à la mixité fonctionnelle du territoire. Conséquemment, un certain clivage semble exister entre les perceptions des acteurs en provenance d’organismes socio-économique concernant la situation de précarité, de pauvreté et d’exclusion sociale des jeunes et l’intérêt des communautés de la MRC envers les enjeux résidentiels, économiques et environnementaux de l’occupation du territoire. En effet, il s’agit actuellement pour les milieux « de gérer dans l’harmonie » « la tendance chez les nouveaux résidents à rejeter tout type de développement qui pourrait remettre en question leur quiétude et leur usage de l’environnement », alors que les nouveaux venus « [s]ouvent financièrement aisés » « défendent et protègent cet environnement, qui a su les séduire » (MRC de Memphrémagog, 2005, p. 5). Bref, alors qu’on observe une préoccupation de plus en plus grandissante chez les acteurs du développement envers le phénomène de déséquilibre de la pyramide des âges au sein de la MRC, il apparaît qu’aux yeux des communautés, « [t]oute forme de développement doit […] [d’abord] être compatible avec la protection de l’environnement » et de l’agriculture (Ibid, p. 3).