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IX. Traitements actuels

2.2 Les traitements immunosuppresseurs

2.2.1 Mitoxantrone (Elsep®)

La mitoxantrone est une anthracycline, initialement prescrite en cancérologie pour ses propriétés cytotoxiques (cancers du sein, leucémies). Elle a ainsi été étudiée dans la SEP pour ses propriétés cytotoxiques ciblant les cellules immunitaires (Papeix et al. 2010, Brochet et al.

2012). Cet agent intercalant de l’ADN inhibe la synthèse d’ARN et d’ADN en inhibant la

topo- isomérase de type II. La mitoxantrone a également une action immonomodulatrice: elle inhibe la sécrétion de cytokines inflammatoires telles que l’IFN γ, le TNF et l’IL-2 (Gout et

al. 2010).

Il semblerait qu’elle exerce son action sur l’immunité humorale (en réduisant le nombre et la prolifération des LB) et sur l’immunité cellulaire (en augmentant la fonction T suppressive). Dans les modèles expérimentaux, il a été montré que la mitoxantrone empêchait l’induction d’une EAE (Edan 2001).

Indications et Prescription

À la charnière des formes rémittentes et des formes secondaires progressives de SEP, se situe un groupe de patients caractérisés par une maladie très active et très inflammatoire, la SEP de forme agressive. En France l’Agence nationale de la sécurité des médicaments(ANSM) a approuvé l’utilisation de la mitoxantrone en octobre 2003 dans les formes agressives de SEP de type RR ou SP définies par au moins deux poussées avec séquelles ou une aggravation de deux points d’EDSS au cours des douze derniers mois associé à une nouvelle lésion IRM prenant le gadolinium datée de moins de trois mois (Brochet. 2006, Papeix et al. 2010 ,

Papeix et al. AAIHP). La mitoxantrone n’est pas indiquée dans les formes progressives

primaires et ne doit pas être utilisée en première intention (HAS Elsep 2004).

L’Elsep® est en réserve hospitalière, sa prescription, sa délivrance et son administration doivent se faire uniquement à l’hôpital par des neurologues des services spécialisés en neurologie, avec une hospitalisation de jour tous les mois pendant six mois. Une surveillance particulière est nécessaire pendant le traitement et cinq ans après l’arrêt du traitement. Un formulaire d’accords de soins, exposant notamment les risques hématologiques et cardiaques, doit être préalablement rempli et signé par le patient (HAS Elsep 2004, Edan 2004).

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Posologie et mode d’administration

La dose recommandée d'ELSEP est de 12 mg/m2 en cure mensuelle sans dépasser 20 mg par perfusion intraveineuse, sur une période de 6 mois (soit au maximum 6 perfusions au total) avec une dose maximale cumulée limitée à 72 mg/m2 et à une dose totale cumulée de 120 mg. En raison de sa cardiotoxicité dose-dépendante, le traitement par mitoxantrone doit être impérativement limité au maximum à six perfusions par patient; il ne devra en aucun cas être ré-administré plus tard chez un même patient (VIDAL).

Efficacité

Trois études randomisées contrôlées dont la plus récente publiée en 2006, ont montré l’impact clinique de ce traitement sur la fréquence des poussées, la progression du handicap ainsi que son impact sur l’accumulation de lésions actives en IRM (HAS Elsep 2004, Papeix

et al. 2010).

Etude française Etude italienne Etude MIMS Forme clinique RR ou SP très

active

RR RP ou SP

Schéma thérapeutique 20mg/mois pendant 6mois

8 mg/m²/mois pendant 1 an

12 mg/m²/3mois Pendant 2 ans

Réduction des poussées -77% -60% -60%

Réduction > 1 pt de la progression à l’EDSS -84% -79% -64% Réduction du nombre de lésions à l’IRM -84% -52% -88%

Tableau 8. Mitoxantrone : résultats des trois études contrôlées (D’après Edan. 2004)

RR : récurrente rémittente, SP : secondairement progressive, RP : rémittentes progressive (= SP avec poussées surajoutées). Etude française (Edan et al. 1997), Etude italienne (Millefiorini et al. 1997), Etude MIMS (Hartung et al. 2002).

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Effets indésirables

La mitoxantrone peut entrainer deux effets indésirables graves pouvant mettre en jeu le pronostic vital du patient :

- Cardiotoxicité dose-dépendante et cumulative (diminution de la fraction d’éjection ventriculaire)

- Toxicité hématologique tardive (Leucémie Aigüe Myéloïde) pouvant se développer jusqu’à quinze ans après l’exposition au produit

Ces effets indésirables sont les deux grands freins à une utilisation prolongée et plus large de la mitoxantrone (HAS Elsep 2004, Papeix et al. 2010).

Les effets indésirables à court terme sont une toxicité hématologique aigue (leucopénie, neutropénie, thrombocytopénie) survenant deux semaines après l’injection, des nausées et vomissements et une alopécie. La survenue d’aménorrhée (parfois définitive) peut également être observée (HAS Elsep 2004, Gout et al. 2010).

Surveillance du traitement

En raison de ses toxicités cardiaques et hématologiques, et du risque de stérilité chez la femme, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) recommande aux professionnels de santé d’effectuer une surveillance particulière pendant et après le traitement :

 Numération de formule sanguine (NFS) et taux de plaquettes avant l’instauration du traitement et au cours du traitement. En cas de neutropénie ou de thrombocytopénie, le traitement sera différé jusqu'au retour aux valeurs antérieures.

 Hémogramme trimestriel pendant au moins 5 ans après l'arrêt du traitement (risque de Leucémie Aigüe Myéloïde).

 mesure de la fraction d'éjection ventriculaire par échographie cardiaque avant le début du traitement, à la fin du traitement puis tous les ans pendant 5 ans.

 contraception efficace chez la femme et chez l'homme (jusqu'à six mois après l'arrêt du traitement).

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 tests de grossesse plasmatiques chez les femmes en âge de procréer avant la mise en place du traitement, pendant la durée du traitement et trois mois après l'arrêt (ANSM

mitoxantrone 2003).

Pour conclure, la mitoxantrone constitue aujourd’hui une option thérapeutique précieuse pour les patients ayant une SEP très inflammatoire échappant aux traitements immunomodulateurs classiques (IFN bêta et acétate de glatiramère), permettant dans bien des cas d’obtenir une rémission spectaculaire. Son risque d’effets secondaires graves doit cependant rendre prudent et réserver son indication aux critères retenus dans l’AMM, après une information claire et complète du patient, et en proposant le suivi clinique, biologique et échocardiographique recommandé par l’ANSM. Ce profil de tolérance doit également amener à rechercher des solutions alternatives, comme le cyclophosphamide ou le natalizumab (Brochet. 2006).

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