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Le premier chapitre comporte un état des lieux des travaux relatifs aux termes,

diaspora et transnationalisme, qui prédominent dans les études sociologiques des migrations internationales. En focalisant progressivement sur l’engagement à distance, il conviendra essentiellement, pour nous, de préciser le positionnement de cette recherche qui, à la croisée de deux courants de pensée, mobilise deux notions parallèles qui se croisent sans constituer un ensemble.

1- Définition de l’objet : Etat des lieux de la recherche relative aux migrations internationales 1.1.Des travaux tardifs et incomplets

Pour mieux saisir la complexité du sujet, nous avons parcouru le champ d’étude des migrations, précisément sur deux volets. Le premier s’attache à établir un état des lieux de la recherche actuelle, le second approfondit la question à partir d’une étude de la terminologie d’usage permettant l’existence, par la désignation, de cette catégorie d’individus et du sujet en soi.

Les travaux sur les migrations sont riches en informations, mais quelquefois contradictoires, dans la façon de présenter les concepts, et incomplets à certains niveaux. Néanmoins, ils offrent l’occasion de comprendre et d’analyser les comportements sociaux ancrés dans plusieurs espaces, parfois administrés par des institutions gouvernementales différentes (cf. chapitre II).

L’analyse de la littérature consacrée à ce sujet prend en considération les recherches internationales, en mettant l’accent sur les travaux français en rapport avec la thématique. Cette démarche nous conduira, finalement, à choisir un concept adapté à notre approche.

A partir des divers travaux sur la question, nous constatons que le migrant et sa descendance ne sont plus envisagés dans un espace unique et figé, mais dans un continuum mobile et en constante circulation, ce qui fait de lui un nouvel acteur dit « transmigrant ». Le concept intéresse quelques chercheurs américains, GLICK SCHILLER, BLANC et BASCH, qui tentent d’en déterminer le sens en 1994 :

« A new concept of transnational migration is emerging, however, that questions, this long-held, conceptualization of immigrants suggesting that in both of U.S, and Europe, increasing numbers of immigrants are best understood as transmigrants » (GLICK SCHILLER et al. 1994)75.

75Nina, Glick Schiller, Linda, Basch & Cristina Szanton Blanc (1994); Nations UnboundTransnational Projects,

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Le contexte hybride d’apparition de ces champs sociaux transnationaux, après les années 90, se traduit par la double expérience et la double appartenance (territoriale et a- territoriale). En effet, le passage de l’immigrant au « transmigrant » s’accompagne d’une évolution comportementale qui se définit par deux formes de lien. L’une serait liée au pays d’accueil ainsi qu’aux problématiques d’installation, l’autre à l’attachement et aux préoccupations pour le pays d’origine.

La définition que nous proposent GLICK-SCHILLER et al.76renvoie à la notion de double appartenance territoriale, centrale dans la désignation du transmigrant :

« Transmigrants are immigrants whose daily lives depend on multiple and constant interconnections accross international borders and whose publics identities are configured in relationship to more than one nation-state »

Nous traduisons cette définition comme suit :

« Les transmigrants sont des immigrés dont la vie quotidienne dépend d'interconnexions

multiples et constantes à travers les frontières internationales et dont les identités dans l’espace public sont façonnées par la relation qu’elles entretiennent avec plus d'un État. ». C’est à partir de ces travaux que la notion de double appartenance territoriale devient objet d’intérêt scientifique en sortant du cadre strictement politique ou institutionnel.

Les travaux de sociologues et géographes mettent, également, en exergue l’engagement croissant des transnationaux pour leur pays d’origine à partir de leur territoire de résidence. Pour les géographes, l’enjeu est bien territorial, la trans-localité _ translocality _ que l’on retrouve dans la littérature anglo-saxonne77, décrivant le phénomène migratoire comme étant une forme d’agencement de réseaux organisés autour de deux ou plusieurs localités.

Comme le souligne WALDINGER (2006), une importante partie de la littérature transnationale _ notamment les travaux d’historiens sur la migration de retour, du début du XXème siècle _ traite des liens bilocaux, ainsi que de leur activité associative (DINO CINEL 1991, Bruno RAMIREZ 1992, David WYMAN 1991)78

DE MONTLIBERT, BADIE ET WITHOL DE WENDEN (1994)79mettent l’accent sur la mondialisation des flux migratoires, ce que nous retrouvons, d’ailleurs, dans les récents

76Ni a, Gli k “ hille ; Li da, Bas h & C isti a “za to Bla ; F o I ig a t to T a s ig a t: Theo izing T a s atio al Mig atio . Anthropological Quarterly, Vol.68, No.1, pp.48-63.

77Les t a au e F a e atta he t ie plus d i po ta e à la o st u tio du te itoi e, ota e t, le te itoi e i ulatoi e tel u o le et ou e hez Alai Ta ius

78Cités par Roger Waldinger(2006), in Le t a s atio alis e des i ig a ts et p se e du pass , Revue

Européenne des Migrations Internationales, V. 22, 2 (2006)

79 Catherine, De Montlibert; Bertrand, Badie et Catherine, Wihtol de Wenden (dir.) (1994). « Le défi migratoire - questions de relations internationales ». In: Politique étrangère, n°4 - 1994 - 59ᵉannée. pp. 1157-1159.

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travaux latino-américains qui démontrent la complexité de ces systèmes (CORTES, 2008)80. TARRIUS et al. (2001)81 évoquent, également, l’idée « d’autonomisation » des réseaux migratoires. Partant de la thèse de WALDINGER, selon laquelle « les réseaux sociaux lubrifient les migrations de tout type »82, les questions sociales et démocratiques se révèlent être fondamentales.

Du côté des historiens, cette même idée d’émancipation des diversités sociales et des réseaux extra nationaux est contextuellement sociale. De fait, les grands bouleversements historiques sont d’abord sociaux (Lucien FEBVRE, 1930)83. Gérard NOIRIEL84 souligne que dans les enjeux empiriques, deux événements principaux, en France, ont affecté les sociétés contemporaines et contribué aux bouleversements de l’ordre social dans leur rapport avec l’Etat-Nation : d’abord la révolution industrielle, puis la révolution politique de 1789, qui avaient consacré la rupture avec la monarchie et la nationalisation du monde social. Ce changement a eu un impact sur l’idée de réappropriation de la chose publique (la res publica), en donnant une nouvelle vision de la citoyenneté partagée, qui s’émanciperait progressivement du contrôle de l’Etat et supposerait une certaine autonomie sociale et civique des divers groupes.

1.2.Etat des lieux de la recherche en France

Pour les sociologues français, l’approche est quasi similaire. En effet, la question migratoire reste assurément sociale. Didier LAPEYRONNIE la traite, dans son évolution sociétale, en s’intéressant davantage aux comportements des nouvelles générations issues de l’immigration maghrébine. Ceux-ci seraient, selon lui, « le signe le plus visible de l’installation

durable de nouvelles populations sur les territoires européens » (LAPEYRONNIE 1993)85. L’auteur souligne un élément fondamental pour notre recherche, en rappelant l’importance des contextes et en remettant en question la dimension monolithique du phénomène migratoire :

« L’immigration n’est pas un bloc et son installation peut prendre bien des visages en fonction

des contextes locaux, économiques, historiques ou culturels »86.

80 Geneviève, Cortes (2008) ;« Migrations, espaces et développement. Une lecture des systèmes de mobilité et des constructions territoriales en Amérique latine » ; Poitiers, Habilitation à diriger des recherches, vol. 3, 251 p.

81 Alain, Tarrius ; Jacqueline, Costa-Lascoux et Hily Marie-Antoinette (2001) ; « Au-delà des États-nations : des sociétés de migrants ». In: Revue européenne des migrations internationales, vol. 17, n°2,2001. Débats contemporains, sous la direction de Jacqueline Costa-Lascoux et Marie-Antoinette Hily. pp. 37-61.

82 Roger, Waldinger (2006) ; Idem

83 Lucien, Febvre (1930); Civilisation. Évolution d'un mot et d'un groupe d'idées, Paris, Renaissance du livre, 56p.

84 Gérard, Noiriel (2001) ; Op.Cit,p.7

85Didier, Lapeyronnie(1993) ; L'Individu et les Minorités. La France et la Grande-Bretagne face à leurs immigrés, Paris, PUF, 1993

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Dans le même ordre d’idées, les travaux de Roger WALDINGER mettent en corrélation la question transnationale et les questions sociales liées à l’installation des immigrants sur les territoires de résidence. Trois modalités sont mises en valeur. La première évoque « La constante réapparition des lieux ethniques et trans-Etats qui relient ici et là-bas ». La seconde concerne les changements dans l’organisation politique qui contrôlent les mouvements de population entre pays (Cf. Chapitre 2). Enfin, la troisième vise l’imprévisibilité des contextes sociaux, politiques et économiques pouvant avoir un impact sur le transnationalisme87.

Alors que certains voient ce phénomène comme étant nouveau (GLICK- SCHILLER, BASCH, BLANC-SZANTON 1992), WALDINGER le perçoit comme « une

tradition historique du passé (…), le transnationalisme [étant]un particularisme longue-distance »88. PORTES, HALLER et GUARNIZO ajusteront ces deux approches en affirmant que le phénomène n’est pas nouveau mais qu’il apporterait une valeur ajoutée significative89. Le particularisme évoqué et qui serait lié au phénomène migratoire, souligne la difficulté des transnationaux dans le double rôle que leur confère leur statut social : un rôle de transmission vers les nouvelles générations et un rôle de soutien pour le pays d’origine. Les chercheurs ayant contribué à la Harvard Encyclopedia of American Ethnic Groups, en 1980, évoquent l’idée de « double loyauté » des immigrés, installés dans les pays de résidence.90

Les travaux américains ont certes devancé les travaux européens sur un plan chronologique et structurel (conceptualisation, définitions et dénominations du phénomène migratoire), mais la qualité de l’engagement scientifique des recherches européennes et françaises a apporté un véritable équilibre contextuel et scientifique, en prenant en considération l’aspect évolutif et imprévisibledu phénomène migratoire. D’ailleurs, force est de constater l’apport incontesté de la Revue Européenne des Migrations Internationales (REMI), lancée en 1985, sur initiative de Gildas SIMON91.

Cet effort de recherche sur les migrations nous amène à constater la place importante des travaux français sur la question. En effet, les recherches portant sur le lien entre migration

87 Roger, Waldinger (2006);Op.Cit. p.42

88 Idem

89 Cités par Roger Waldinger (2006) ;Idem

90 Stephan, Thernstrom; Ann, Orlov et Oscar, Handling (1980), Harvard Encyclopedia of American Ethnic Groups. Harvard University Press. 1104p.

91 La Revue Européenne des Migrations Internationales (REMI), a pour vocation de publier les travaux de recherche, empiriques et théoriques, des différentes disciplines concernées par les migrations internationales et les relations interethniques. Tout en privilégiant la dimension européenne comme cadre spatial de référence, la revue est ou e te à d aut es ha ps, à t a e s d aut es s st es ig atoi es da s le onde.

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et ethnicité (AMIRAUX, GIRAUDON 2010, HAMIDI 2012)92, les migrations internationales (WITHOL DE WENDEN, BADIE 2002)93, la transformation des identités (SAYAD 1999, DARGENT 2003, BACQUE et SINTOMER 2001)94, les questions d’intégration et de participation politique (BANEGAS 1998 ;SIMON et TIBERJ, 2012, BRACONNIER et DORMAGEN 2007, GEISSER 2010), les réseaux diasporiques (SIMON 1981, GONIN et al. 2009, MA MUNG et De TAPIA 2007, TARRIUS 1989) ou de développement (PORTES, 1996, LACROIX, 2012) ont tous contribué à l’élaboration d’un lexique de la double appartenance, essentiel à la désignation des migrations internationales95, d’un point académique :

Champs, filières, réseaux migratoires, réseaux circulatoires, réseaux transnationaux, réseaux diasporiques, réseaux polycentrés et multipolarisés, circulations migratoires, double allégeance, double absence, espace, expérience migratoire, héritiers de l’immigration, etc.

La double présence des immigrés suppose un engagement à distance dont les motivations sont plurielles et évolutives.

2- L’engagement à distance : Etat des lieux d’une recherche en constante évolution.

Les flux migratoires se sont mondialisés en intensifiant, d’une part, le rôle des acteurs infra-étatiques (DE MONTIBERT, WITHOL DE WENDEN et BADIE 1994)96 et, d’autre part, leurs nouveaux réseaux polycentrés et multipolarisés (SIMON ,1996)97 , ce qui complexifie, pour le chercheur, la définition du phénomène et de son impact sur les territoires concernés.

De ce fait, l’engagement à distance revêt plusieurs formes et suscite une réflexion sur la nature des transferts migratoires et leur lien avec l’engagement_ matériel et immatériel_ pour le pays d’origine. La question du vote à distance n’a pas fait l’objet des premiers travaux sur les migrations internationales du fait, sans doute, d’un intérêt centré, essentiellement, sur les migrations massivement économiques et intellectuelles.

De nombreux travaux sur le transnationalisme mexicain confirment ce constat.

92Voir référence in « Bibliographie », pp. 695-726

93Idem

94Ibid

95 Toutes les références relatives aux auteurs cités figurent in « Bibliographie » , pp. 695-726.

96Catherine, De Montlibert; Bertrand, Badie et Catherine, Wihtol de Wenden (dir.) (1994); Op.Cit. p.42

97Gildas, Simon (1996) ; « La France, le système migratoire européen et la mondialisation ». In: Revue européenne

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OROZCO et al. (2005)98, DELGADO WISE et RAMIREZ (2004)99 mettent l’accent sur la notion detransferts collectifs et productifs. KEARNEY100 a démontré, en 1995, que l’effet de la mondialisation a accentué les liens sociaux transnationaux qui relient les territoires éloignés en façonnant les localités d’origine depuis le lieu de résidence des immigrés. Cette forme d’intensification a fait l’objet d’études dans le domaine économique, notamment concernant l’implantation d’industries (TORRES, 2002)101.

L’originalité de ces analyses, reprises par LACROIX, en 2012102, réside dans le fait qu’elles mettent en exergue « les spécificités d’une unité qui est soumise à la fois à une logique

d’insertion au sein de son territoire d'implantation, mais également à une logique d'intégration au sein de son groupe d'appartenance »103. En lien avec notre thématique, nous constatons que cette thèse trouve son affirmation au niveau de la double implication citoyenne de l’immigré tunisien résidant en France _à la fois au groupe communautaire et au territoire d’origine_ ce qui génère des formes atypiques d’attache territoriale.

Almudena CORTES et Alicia TORRES (2009) insistent sur l’intensification des liens dans la mobilité : « il a été nécessaire de comprendre la migration depuis une optique

rendant compte de l’intensification de la mobilité des personnes, du maintien des liens entre les lieux d’origine et de destination de la migration et l’ensemble des pratiques habituelles et

soutenues qui transcendent les frontières politiques, économiques et culturelles ».(CORTES , TORRES 2009)104

Cette transcendance des frontières et des objets, à l’origine des regroupements ici

pour là-bas, intéresse notre recherche au niveau de l’impact de ses formes d’action, d’un point de vue sociologique. Pour ainsi dire, les migrants sont pris entre deux territoires, celui qui

98Manuel, Orozco (2005); « Transnationalism and Development: Trends and Opportunities », in Latin

America. Dans Samuel Munzele Maimbo et Dilip Ratha (coord.) Remittances: Development Impact and Future Prospects. Washington, the International Bank for Reconstruction and Development / The World

Bank, pp. 307-329.

99Raúl, Delgado Wise y , Héctor , Rodríguez Ramírez (2005); "Los dilemas de la migración y el desarrollo en Zacatecas: el caso de la región de alta migración internacional", en Raúl Delgado y Beatrice Knerr (coords.), Contribuciones al análisis de la migración internacional y el desarrollo regional en México, Miguel Ángel Porrúa–Universidad Autónoma de Zacatecas, México, pp.171-179

100Mi hael, Kea e ; The Local and the Global: The Anthropology of Globalization and

Transnationalism ; Annual Review of Anthropology, Vol. 24 (1995), pp. 547-565

101 Olivier,Torres. (2000) ; "Du rôle et de l'importance de la proximité dans la spécificité de gestion des PME", 5ème Congrès International Francophone PME, Lille, octobre 2000.

102Thomas, Lacroix (2012) ; « Transnationalisme villageois et développement : Kabyles algériens, Chleuhs marocains en France et Panjabis indiens en Grande-Bretagne ». Revue Européenne des Migrations Internationales, 28 (1), pp. 71-84.

103 Idem

104Almudena, Cortés y Alicia, Torres, eds. ; Codesarrollo en los Andes: contextos y actores para una acción transnacional »; Quito: FLACSO. Ecuador / IMEDES.

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fabrique et transmet et celui qui reçoit et transpose. Le passage de la citoyenneté à la

trans-citoyenneté est bien plus explicite à travers cette analyse. L’enjeu est donc bien territorial, social, identitaire et spatial (nous aurons l’occasion de développer ce dernier point dans les chapitres, II, IV et VIII).

LACROIX (2012)105développe implicitement l’analyse de chercheurs sur cette idée d’intensification des liens au groupe communautaire d’appartenance : « Plus une unité est intégrée décisionnellement et industriellement au sein de son groupe et moins elle est ouverte sur son environnement (territorial et a-territorial)»(DUPUY et GILLY ,1993)106.

En lien avec notre champ d’étude, cette analyse nous donne la possibilité d’appréhender les liens sociaux transnationaux tributaires des dynamiques, existant au sein de la communauté présente sur le territoire de résidence. L’engagement à distance permet, ainsi, de maintenir le lien a-territorial (lien identitaire informel) en le légitimant par une cause formelle : investir et contribuer au développement local du pays d’origine.

2.1. Les travaux sur la migration-développement

Les premières études portant sur le champ transnational constituent des travaux de littérature, faisant essentiellement le lien entre migration et développement.

Toutefois, il convient, de souligner la prédominance du territoire originel, le pays, mais surtout le territoire local d’appartenance, la ville natale. En effet, la dimension tribale, que l’on retrouve dans l’engagement de l’immigré pour son village d’origine, contribue fortement à maintenir le lien transnational, tout en accordant une place primordiale à sa condition d’immigré. Dans la revue de littérature, Latin American Research Review, GOLDRING (2002)107 souligne l’importance des hometown organisations, à travers le récit d’activités des associations villageoises latino-américaines, aux États-Unis. En France, Christophe DAUM (1998)108, Catherine QUIMINAL (1991) 109 et Patrick GONIN (2010)110 ont réalisé d’importantes études sur les migrants en rapport avec le maintien du lien organique avec le

105Thomas, Lacroix (2012) ; Op.Cit., p.46

106 C., Dupuy et J.-P. , Gilly (1993) ;«Les stratégies territoriales des grands groupes industriels». Toulouse: LEREP,

Les Cahiers de recherche, n° 1

107Luyn, Goldring(2002); The Mexican state and transmigrant organizations: Negotiating the boundaries of membership and participation . Latin American Research Review, 37, pp. 55-99.

108Christophe , Daum (1998) ; Les associations de Maliens en France. Migrations, développement et

citoyenneté, Paris, Karthala, 253 p.

109Catherine , Quiminal (1991) . Ge s d’i i, ge s d’ailleu s ; Paris : Christian Bourgeois, 222 p.

110Patrick , Gonin(2010) ; « L ig e spatiale des “u saha ie s ». Hommes et migrations, 1286-1287 | 2010, pp. 6-15.

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territoire d’origine. « Partir pour rester »111 exprime une attitude transnationale dont l’objectif vise la lutte contre les difficultés conjoncturelles. La migration est ainsi reconnue comme une voie potentiellement salvatrice pour ceux qui restent.

Conséquemment à ce déterminant, vivre mieux et se former mieux, les études portant sur les migrations ont majoritairement mis l’accent sur les questions de développement et d’investissement pour le pays d’origine.

D’importants travaux sur le rapport migration-développement ont commencé à se développer en Europe, après les années 90. Les formes de mobilisation des migrants de France ont beaucoup intéressé la recherche sur la contribution des migrants au développement du pays d’origine. Certains collectifs ont mis l’accent sur les formes de mobilisation sociale, contribuant, ainsi, à répondre à des besoins locaux, en réalisant des projets de développement dans leur terre natale.

Dans ce contexte, les réseaux locaux (villageois et familiaux) sont très importants (LACROIX 2012112). Les collectifs internes (pays d’origine) permettent de maintenir et de consolider les activités transnationales, orientées vers le développement. C’est même leur concrétisation qui donne du sens à la condition des transnationaux. S’ils sont partis là-bas, c’est bien pour aider à améliorer le quotidien ici, « partir pour que d’autres restent » (GONIN,

2010)113 , soit d’une manière individuelle (du cas par cas) telle que l’aide au financement d’un mariage, un investissement immobilier, une rente pour les parents, etc., soit d’une manière

collective, comme la participation active à des projets locaux de développement.

LACROIX114 rend compte d’une enquête sur les hometown organisations, effectuée sur un échantillon de 477 villages du Panjab, qui démontre le pouvoir et l’impact de telles activités transnationales. En effet, plus de 4,5 milliards de dollars seraient investis par les migrants pour la mise en œuvre de projets d’infrastructure. D’ailleurs, les travaux de CHANA ont également fait ressortir l’existence de projets orientés essentiellement vers l’édification d’établissements de type culturel, sanitaire ou cultuel (CHANA, 2009)115.

De nombreux chercheurs se sont intéressés à ces formes d’organisation sociale (HERRERA et SANCHEZ, 2009)116, particulièrement celles de migrants latino-américains

111 Idem

112 Thomas, Lacroix (2012) ; Op.Cit. p.46

113 Patrick , Gonin (2010) ;Op.Cit.p.47

114 Thomas, Lacroix (2012) ; Idem

115Satnam, Chana (2009); « NRI Investment in social development projects. Findings from two sample surveys in

Doaba, Punjab », in Verne A. Dusenbery and Darsham S. Tatla, New Delhi, Oxford University Press, pp. 107-119. 116 Cités par Silvia E., Giorguli Saucedo et Edith Y., Gutiérrez (2012), in « Migration et développement », Hommes et

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installés dans les pays industrialisés (LANLY et VALENZUELA, 2004 ; MEJIA OCHOA, 2007 ; DELGADO WISE et RAMIREZ, 2004, GIORGULI SAUCEDO et GUTIERREZ 2012117)

WITHOL DE WENDEN (2009 : 212118) a longtemps défendu le transnationalisme comme définissant le lien migration-développement. Bien plus qu’un vecteur de réussite à travers leurs contributions pour la localité d’origine, la chercheure démontre la force des transnationaux jusqu’à remettre en cause la souveraineté de l’Etat. Gildas SIMON(1996) rappelle le rôle croissant des émigrés restés dans l’exil qui, après avoir achevé leur projet de construction d’une maison, intègrent des réseaux diasporiques et passent à une nouvelle « phase