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VI.2. L’évaluation de la réponse à court terme des micropellets de cartilage à des stimulations

VI.2.2. Mise en place du protocole de stimulation

Pour ce projet, nous souhaitions analyser, dans un premier temps, l’impact des stimuli mécaniques sur le phénotype des cellules en analysant l’expression des gènes SOX9, AGG et COL IIB. Plusieurs problématiques se sont alors posées. Nous nous sommes demandé (1) à quel temps il était préférable d’observer l’expression de ces gènes, (2) à partir de combien de jours de culture nous pouvions stimuler mécaniquement les micropellets et (3) si ces stimulations devaient être continues ou discontinues.

76 VI.2.2.a. 24 heures sont suffisantes pour observer l’impact des stimulations mécaniques sur l’expression géniques des micropellets

Afin de déterminer à quel temps il était plus opportun d’observer l’expression des gènes des cellules après l’application de stimuli mécaniques, nous avons choisi d’analyser les échantillons 24, 48 ou 72 heures après leur stimulation. Ces stimulations ont été faites, après 21 jours de culture des micropellets, par pression sinusoïdale à une fréquence de 1 Hz, une amplitude de 12,86 ± 4,90 kPa et une pression minimale (Pm) de 3,33 ± 0,35 kPa durant 30 minutes. Après 21 jours de culture, la différenciation des CSMs est amorcée et le micropellet admet déjà une certaine rigidité (Dusfour et al., 2020). 1 Hz est la fréquence de stimulation la plus utilisée et est généralement favorable à l’expression des gènes chondrocytaires. L’amplitude choisie est incluse dans la gamme de contraintes utilisées pour la compression de néo-tissus de chondrocytes ou de CSMs (voir V.6.1.b et V.6.2.b).

La Figure 15A montre que l’expression du gène SOX9 reste stable durant les 72 heures après les stimulations. En revanche, les stimuli ont régulé positivement l’expression des gènes AGG et COL IIB. Cette régulation est transitoire puisque l’expression de ces gènes diminue 48 et 72 heures après. Ainsi, observer l’expression des gènes chondrocytaires après 24 heures semble être suffisant.

VI.2.2.b. 21 jours de préculture sont nécessaires pour appliquer des stimulations mécaniques via le dispositif fluidique

L’analyse de l’expression des gènes pour évaluer la différenciation chondrocytaire des CSMs dans le modèle biologique du micropellet est souvent réalisée après 21 jours de culture (Huang et al., 2004; Liu et al., 2013). La différenciation des CSMs est pourtant progressive. L’expression du gène AGG augmente dès les premiers jours après l’induction de la culture en micropellets des CSMs. L’expression du gène COL II augmente plus tardivement, plus d’une dizaine de jours après (Barry et al., 2001). De même les propriétés mécaniques des micropellets augmentent au cours des 21 premiers jours de culture mais ne sont pas mesurables à J7 (Dusfour et al., 2020). Ainsi, stimuler mécaniquement des micropellets de 7 jours avec notre dispositif était peu envisageable du fait de la très faible rigidité des objets à ce stade mais nous avons testé l’impact de stimulations sur des micropellets après 14 ou 21 jours de culture. Des stimulations sinusoïdales de fréquence 1 Hz, d’amplitude 10,85 ± 5,68 kPa et de Pm 3,40 ± 0,36 kPa ont été appliquées durant 30 minutes.

Lors de ces expérimentations, la manipulation des micropellets de 21 jours était plus aisée que celle des micropellets de 14 jours. Ces dernières étaient plus souples et moins denses, ce qui rend plus difficile leur maintien dans le cône.

La Figure 15B montre que la différenciation des CSMs au sein du micropellet augmente entre les jours 14 et 21 puisqu’une augmentation de l’expression des gènes SOX9, AGG et COL IIB est observable (NS J14 et NS J21). À la suite des stimulations mécaniques, l’expression des trois gènes est augmentée à J21 tandis que seule l’augmentation de l’expression du gène AGG est identifiable à J14. Par comparaison des groupes stimulés à leur témoin respectif, l’expression du gène SOX9 est

77 multipliée par 0,41 à J14 et par 3,53 en moyenne à J21. On remarque une tendance à l’augmentation de l’expression des gènes AGG et COL IIB à l’issue des stimulations des micropellets de 14 jours puisqu’elle est multipliée par 1,95 environ mais cette augmentation est plus importante pour les micropellets de 21 jours puisque l’expression des gènes est multipliée par 3,91 en moyenne pour le gène AGG et par 8.64 pour le gène COL IIB.

L’ensemble de ces résultats d’expression des gènes AGG, COL IIB et SOX9 montre que les stimuli mécaniques appliqués avec le système fluidique sont plus adaptés et favorables pour des micropellets de 21 jours.

VI.2.2.c. L’application de stimulations mécaniques continues est néfaste à l’expression des gènes chondrocytaires

Lors de la mise en place du protocole, nous avons également essayé de changer l’orientation des micropellets en cours des stimulations afin de répartir de manière plus homogène les contraintes. Pour se faire, nous avons découpé les 30 min de stimulation en 10 cycles de 3 minutes de stimulation et 23 secondes de pause. Ces 23 secondes sont composées de 15 secondes à pression atmosphérique (Patm) et 8 secondes de mise en pression pour retrouver la Pm du signal de stimulation. Cette découpe du signal avait pour objectif le rebond des micropellets dans leur cône et leur changement de position. Si cette technique était efficace pour les premiers cycles, ce n’était pas le cas pour les suivants. En effet, la pression positive appliquée crée un fluage des micropellets dans leur cône et leur extraction du cône à l’issue des stimulations nécessite une pression négative relativement à Patm. Etant donné l’inefficacité de cette technique, nous avons éliminé l’utilisation de cycles de stimulation et appliqué une stimulation continue. Cependant, la Figure 15C montre que pour des stimulations sinusoïdales de fréquence 1 Hz, d’amplitude 12,9 ± 5,36 kPa et de Pm 4,33 ± 1,70 kPa, durant 30 min, l’application de ces stimulations de manière continue a conduit à la diminution de l’expression des gènes chondrocytaires par comparaison à des stimulations intermittentes qui ont généré une régulation positive de ces gènes. Nous avons donc conservé par la suite des stimulations intermittentes. En revanche, les pauses de 23 secondes ont été maintenues à Pm afin que l’orientation de l’ensemble des micropellets soit conservée tout au long de la stimulation et éviter le rebond aléatoire des micropellets lors des premiers cycles de stimulations.

Ces résultats préliminaires ont montré la faisabilité de la stimulation mécanique de micropellets de cartilage par le dispositif fluidique que nous avons développé. En effet, les stimulations mécaniques ont provoqué la déformation des micropellets dans leur cône et la modification de l’expression des gènes. Aucune différence significative n’a été observée pour ces résultats qui indiquent donc seulement des tendances. Néanmoins, ces expériences préliminaires ont servi à mettre en place le protocole de stimulation tel que défini ultérieurement.

78 Figure 15 – Expression des gènes chondrocytaires par des micropellets de cartilages lors de l’évaluation des paramètres expérimentaux nécessaire à la mise en place d’un protocole de stimulation des micropellets de cartilage avec le dispositif fluidique. (A) Expression des gènes chondrocytaires à 24, 48 et 72 heures après la stimulation de micropellets de CA à J21 (n = 2 ou 3). Les résultats sont normalisés par rapport au contrôle non stimulé. (B) Expression des gènes chondrocytaires à J22 de micropellets de 14 ou 21 jours (J14 ou J21 et, n = 2 ou 4, respectivement) stimulés mécaniquement ou non (S ou NS, respectivement) en fonction de l’expression de ces gènes lors de la mise en micropellet (J0). (C) Impact de stimulations mécaniques continues (n = 4) ou intermittentes (n = 3) sur l'expression des gènes chondrocytaires de micropellets de 21 jours par comparaison au témoin non stimulé (NS).

À noter qu’une irrégularité des amplitudes des sinusoïdes a été observée lors de ces expérimentations. Le signal sinusoïdal est généré par un mouvement oscillatoire régulier du galet de la pompe mono-galet. L’amplitude de déplacement du galet est déterminée lors d’une session d’initiation des stimulations par des incréments de déplacements jusqu’à obtenir la bonne amplitude. Cependant, si l’enfoncement des micropellets dans leur cône évolue au cours des stimulations et que les fuites de fluide dans les cônes, du fait de la forme irrégulière des micropellets change, l’amplitude de pression obtenue au cours de la stimulation change aussi. Ainsi, la programmation du signal sinusoïdal nécessite de nouveaux ajustements pour être adaptatif au cours des stimulations. Nous avons donc fait le choix de stimuler les micropellets avec un signal de pression carré pour la suite des investigations. Ce dernier a été décrit précédemment (voir VI.1.2), comme répétable et reproductible. De plus, le fluage des plateaux de pression a été éliminé en utilisant un rétrocontrôle de la pompe mono-galet (voir VI.2.3).

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VI.2.3. Analyse de l’impact de divers paramètres de stimulation mécanique sur le