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1.4 Milieu continu et d´efauts

1.4.2 Milieu continu g´en´eralis´e

1.4.2.1 Vari´et´e mat´erielle de Riemann-Cartan

Le cadre naturel de travail de la m´ecanique du continuum est la g´eom´etrie diff´erentielle [Mar83]. Dans ce contexte on dispose d’une connexion affine ∇ dont les coefficients seront not´es Γγαβ [Car86]. Elle d´ecrit le transport des quantit´es vectorielles et ten-sorielles sur le fibr´e tangent, parall`element `a la fibre. Par exemple, elle permet d’exprimer un vecteur tangent en P dans l’espace tangent en M . Plus pr´ecis´ement, on peut alors d´efinir la d´eriv´e covariante qui g´en´eralise pour les tenseurs, la notion de d´eriv´ee direc-tionelle des fonctions. La premi`ere application de la connexion est intervenue lors d’une collaboration entre Einstein et Cartan dans le cadre de la relativit´e [Dev92].

Habituellement la connexion est suppos´ee sym´etrique ; cela signifie que le transport par-all`ele d’un vecteur u dans la direction v donne le mˆeme vecteur lorsque l’on transporte parall`element v dans la direction u. Dans ce cas la connexion est dite de Levi-Civita dont les coefficients sont les symboles de Christoffel d´efinis uniquement par le tenseur m´etrique, comme c’est le cas en relativit´e g´en´erale.

Cependant Cartan remarqua qu’en r`egle g´en´erale, il n’y a aucune raison particuli`ere pour que cette connexion soit sym´etrique. La partie anti-symm´etrique est en fait un tenseur : le tenseur de torsion S. En r´esum´e cela veut dire qu’il y a un d´efaut de fer-meture du parall´elogramme que l’on obtiendrait apr`es le transport parall`ele de u (resp. v) dans la direction v (resp. u). Ce d´efaut de fermeture est mesur´e par l’op´erateur de torsion appliqu´e `a ces deux vecteurs. Appliquer ces deux transports parall`eles est connu comme le circuit de Cartan. Lorsque la m´etrique ne varie pas lors d’un

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port parall`ele, on dit que la connexion est compatible avec la m´etrique. Sous cette hypoth`ese, on peut montrer que les symboles de connexions se d´ecomposent sous la forme [Nak96] :

Γγαβ = Γγαβ+ Kαβγ ,

avec Γγαβ les symboles de Christoffel et Kαβγ le tenseur de contortion calcul´e `a l’aide de la m´etrique et de la torsion. Une vari´et´e comportant une connexion asym´etrique avec une courbure non nulle est une vari´et´e de Riemann-Cartan.

On peut aussi introduire ces vari´et´es au moyen des vielbein (triads en 3D). Ce sont des applications locales non-holonomes. Dans le contexte de notre ´etude on consid`erera des triads d´efinis sur l’espace Euclidien R3 `a valeur dans l’espace tangent mat´eriel `a un point M arbitraire de la connexion mat´erielle. La m´etrique et les coefficients de connexion sont alors d´eduits des triads et de leurs d´eriv´ees partielles. Cela permet de g´en´eraliser la notion de mouvement ´evoqu´e pr´ec´edemment. On peut voir ces triads comme des transformations ´elastoplastiques et on met alors en ´evidence le lien entre les dislocations et le tenseur de torsion. Ses composantes repr´esentent la densit´e surfacique de vecteur de Burgers locaux associ´es `a une surface et une direction pour le vecteur de Burgers.

1.4.2.2 Milieux de Cosserat

Selon Cartan lui mˆeme, ses travaux furent inspir´es par la th´eorie de nouveaux types de continuum introduits en 1909 par les fr`eres Eug`ene et Fran¸cois Cosserat, dans leur livre intitul´e ”Th´eorie des corps d´eformables”. Au cours du 20i`eme si`ecle, et plus par-ticuli`erement dans sa deuxi`eme moiti´e, l’id´ee des fr`eres Cosserat inspira de nombreux travaux en m´ecanique des milieux continus et en physique des mat´eriaux (par exemple [Min64], [EC64]).

Le continuum imagin´e par les fr`eres Cosserats est un milieu continu muni d’une mi-crostructure. `A chaque point mat´eriel, on associe aussi trois axes appel´es directeurs. En plus du d´eplacement usuel u, il faut donc consid´erer un champ de rotation ind´ependant du d´eplacement, attach´e `a chaque point de la microstructure et agissant sur les di-recteurs. Ce champ de rotation est mesur´e par le bivecteur ω tel que ωij =−ωji. En cons´equence, la d´eformation du continuum doit ˆetre mesur´ee par la distortion β et la contortion κ :

βij =∇iuj − wij, κijk=∇iωjk,

o`u∇ est la d´eriv´e covariante de l’espace Euclidien R3. En posantL le potentiel ´elastique (ou encore ´energie libre de Helmholtz), il faut consid´erer non seulement la contrainte σ ∼ δLδβ, qui est asym´etrique, mais aussi la nouvelle r´eponse induite par le champ de rotation : le spin moment stress τ ∼ δL

δκ. Ainsi les ´equations d’´equilibre statique satifaites par les forces et les moments sont :

div σ + f = 0, div τ + m = σ,

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o`u f et m sont respectivement les densit´es volumiques de forces et de moments alors que σ est la partie sym´etrique du tenseur des contraintes.

La g´eom´etrie de Riemann-Cartan (RC) peut ˆetre obtenu dans les milieux de Cosserat `

a travers les associations :

distortion←→ triads, contortion←→ connexion.

Cependant pour assurer l’asym´etrie de la connexion, la distortion et la contortion ne doivent pas d´eriver respectivement d’un d´eplacement ni d’un champ de rotation. De tels milieux de Cosserat sont dits incompatibles parce que la contortion et la distortion ne satisfont pas les conditions de compatibilit´e.

1.4.2.3 Dislocations

Nous revenons rapidement sur le concept de dislocations afin de faire un rapide rappel de son histoire mais aussi afin d’´etablir le lien avec la g´eom´etrie (RC). Ce concept fut introduit `a la fin des ann´ees 30 [Bur39], dans le but de comprendre les d´eformations plastiques au sein d’un solide disposant d’une structure cristalline. Lorsque l’on dispose d’un nombre cons´equent de dislocations, il est pertinent de d´evelopper une th´eorie du continuum avec dislocations. Pour ce faire, on introduit le tenseur de densit´e de dislo-cations dont les composantes sont en relation avec l’´el´ement de surface et la direction du vecteur de Burgers. En 1953 Nye ´etablit la relation entre la densit´e de dislocations et les rotations relatives entre les plans de r´eseaux voisins [Nye53]. Dans sa th´eorie des d´efauts, Kr¨oner exprime les relations entre le tenseur de Nye, d´efini grˆace au tenseur densit´e de dislocations, et les conditions d’incompatibilit´e dans le cadre des milieux de Cosserat [Kro86, Kro60]. Dans la mˆeme p´eriode il a ´et´e montr´e par Kondo [Kon55], Bilby et al [BBS55], et Kr¨oner que le chemin de Burgers est isomorphe au circuit de Cartan. De ces travaux on montre alors que la densit´e de dislocation et le tenseur de torsion sont ´equivalents dans une th´eorie g´eom´etrique du milieu continu. Cependant `a ce niveau, on perd les informations sur la description cristallographique. En effet les seules caract´eristiques de la torsion ne sont pas suffisantes pour d´eterminer de fa¸con unique la distribution des dislocations. Une telle vision sugg`ere une homog´en´eisation pr´ealable.

1.4.2.4 Milieu faiblement continu

Partant de la structure cristalline dans les mat´eriaux simples, Noll et Wang [Nol67] ´etablirent le lien entre les inhomog´en´eit´es (densit´es de discontinuit´es) et les tenseurs de courbure et torsion induits par une connexion mat´erielle. En suivant cette approche, Rakotomanana introduisit une classe de milieu particulier : les milieux faiblements continus. Dans un milieu faiblement continu, la mati`ere est suppos´ee avoir une distri-bution continue mais des discontinuit´es de champ scalaires tels que la densit´e massique, ou encore de champ vectoriel comme la vitesse, peuvent intervenir. Ces milieux peu-vent ˆetre obtenus `a partir d’une configuration qui estC1 par morceaux. Il montre alors que les sauts induits dans les champs scalaires et/ou vectoriels peuvent ˆetre d´ecrits au moyen des tenseurs de courbure et de torsion.

32 Rappels th´eoriques

Th´eor`eme 1.5 Soit θ un champ scalaire d´efini sur un continuum B. La variation de θ d’un point `a un autre d´epend du chemin suivi si et seulement si le tenseur de torsion est non nul sur la vari´et´eB. De plus la torsion caract´erise le saut de θ.

Ainsi un continuum avec des discontinuit´es d’un champ scalaire et une vari´et´e mat´erielle, dite de Weitzenbock, sans courbure mais avec une torsion non nulle, sont ´equivalentes. Th´eor`eme 1.6 Soit w un champ de vecteur d´efini sur un continuumB. Si la variation de w d’un point `a un autre d´epend du chemin suivi alors la torsion et la courbure sont non nulles sur la vari´et´e mat´erielle B et elles caract´erisent le saut de w.

L’id´ee de la preuve de ces th´eor`emes est de suivre les champs le long d’un circuit de Cartan et de prendre la limite quand celui-ci tend vers le chemin trivial. Malheureuse-ment le raisonneMalheureuse-ment ne peut pas ˆetre appliqu´e pour des d´efauts de type inclusion pr´esents en multi-diffusion car il n’existe pas de chemin que l’on pourrait suivre pour mettre en ´evidence le saut. En effet il faudrait traverser l’interface, l`a o`u le champ n’est pas continu donc a fortiori pas diff´erentiable.

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