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2.5 Di ffusion multiple et non-linéarités

2.5.1 Sur le milieu caractérisé

Pour mettre en évidence la diffusion multiple, nous avons tout d’abord réalisé des expé- riences en transmission. Si les ordres de diffusion sont élevés et l’absorption faible, la contribu- tion incohérente au signal transmis peut s’étaler sur des durées importantes [45].

Dans la plage de fréquences accessibles avec un transducteur centré autour de 500 kHz, nous avons vu que l’onde cohérente était très proche de l’onde mesurée en transmission sur une réalisation du désordre. Il n’y a donc pas d’espoir de combiner diffusion multiple et non- linéarités à cette fréquence. Nous représentons à nouveau ces signaux, ainsi que ceux acquis à 3,5 MHz, à l’échelle du signal transmis dans l’eau, sur la figure 2.15.

Sur la figure 2.15, il faut tout d’abord constater que les signaux acquis sur une réalisation du désordre à 3,5 MHz présentent également de fortes similitudes avec l’onde cohérente à cette même fréquence. Le caractère automoyennant du milieu de propagation se manifeste donc non seulement à des fréquences proches de la résonance des bulles (500 kHz), mais également à plus haute fréquence.

2.5. Diffusion multiple et non-linéarités 151

(500 kHz) (3,5 MHz)

F. 2.15 – Signaux mesurés en transmission à 500 kHz et 3,5 MHz dans l’eau (bleu) et sur le milieu bulleux créé avec 2 fils de platine alimentés en 30 V (une acquisition en rouge, onde cohérente en noir).

En comparant le maximum de l’onde cohérente dans le milieu bulleux au maximum d’am- plitude transmise dans l’eau, il est possible de déterminer le libre parcours moyen l de l’onde dans le nuage de bulles. Celui-ci combine l’atténuation de l’onde due à la diffusion (reliée au libre parcours moyen élastique le) et l’atténuation due à l’absorption (reliée au libre parcours

moyen d’absorption la) : 1 l = 1 le + 1 la (2.20) Rappelons que le libre parcours moyen est la distance caractéristique de décroissance de l’intensité cohérente. On le détermine traditionnellement en mesurant la décroissance exponen- tielle de l’intensité cohérente sur plusieurs échantillons d’épaisseur différente. Ici, notre dispo- sitif expérimental ne nous permet pas de modifier l’épaisseur du milieu, et nous devons donc nous contenter d’une seule mesure pour l’obtenir.

Si on note L l’épaisseur du milieu††, A

0l’amplitude maximale du signal transmis dans l’eau

et A l’amplitude maximale du signal transmis à travers le nuage de bulles, on calcule le libre parcours moyen avec la formule suivante :

l= L

2 ln (A0/A)

(2.21) Dans le nuage de bulles créé avec une tension d’électrolyse de 30 V, nous mesurons un libre parcours moyen de 11 mm à 500 kHz et 29 mm à 3,5 MHz.

L’absence de contribution incohérente significative, ainsi que la forte réduction de l’ampli- tude du signal balistique que nous observons sur la figure 2.15 nous indiquent que l’absorption

est majoritaire à 500 kHz, ce qui signifie que le libre parcours moyen que nous mesurons est essentiellement dû à l’absorption et non à la diffusion.

Compte tenu de la distribution des rayons des bulles que nous avons déterminée sur ce mi- lieu, cette constatation est confirmée par l’étude que nous avons menée dans le premier chapitre. A 500 kHz, une fraction importante de la population de bulles est encore proche de la résonance, ce qui est source de beaucoup d’absorption. Les signaux transmis à 500 kHz (figure 2.15) té- moignent d’ailleurs du caractère dispersif du milieu de bulles à cette fréquence, et donc de la proximité des résonances.

A 3,5 MHz, l’atténuation du balistique est moins forte et la contribution incohérente au si- gnal transmis est supérieure à celle mesurée à 500 kHz (figure 2.16). Cette expérience confirme l’idée que les fréquences supérieures d’un facteur 10 à la résonance deviennent favorables à l’étude de la diffusion multiple dans les nuages de bulles.

(500 kHz) (3,5 MHz)

F. 2.16 – Signaux mesurés en transmission à 500 kHz et 3,5 MHz dans le nuage de bulles créé avec 2 fils de platine alimentés en 30 V. Le balistique est normalisé à 1, de manière à mettre en évidence la faible contribution incohérente.

En mesurant la transmission de l’échantillon aux plus hautes fréquences accessibles expéri- mentalement, nous évitons l’absorption. La contrepartie est que les diffuseurs sont peu efficaces (sections efficaces géométriques). Il est donc nécessaire d’augmenter la densité du milieu si nous souhaitons observer de la diffusion multiple.

Pour étudier la non-linéarité de ce premier milieu de propagation, nous avons insonifié le nuage de bulles en régime impulsionnel au moyen d’un transducteur plan à 400 kHz. Un gé- nérateur programmable de type Agilent 33220A est utilisé pour créer un signal de 20 périodes modulé par une fenêtre de Hanning. La réception est assurée par un hydrophone ponctuel de bande passante suffisante, relié à un préamplificateur de type Panametrics 5670. Le signal est ensuite numérisé sur 12 bits avec une fréquence d’échantillonnage de 100 MHz.

2.5. Diffusion multiple et non-linéarités 153

A 400 kHz, nous avons acquis l’onde cohérente dans le nuage de bulles en réalisant une centaine de moyennes d’ensemble. Nous présentons les spectres des signaux enregistrés dans l’eau et dans le milieu bulleux sur la figure 2.17. Les expériences ont été répétées avec deux tensions d’alimentation du transducteur source : 5V et 10V.

(eau) (bulles)

F. 2.17 – Spectre des signaux à 500 kHz moyennés, enregistrés dans l’eau et dans le nuage de bulles pour une tension de tir de 5 V (noir) et 10V (bleu). Les niveaux du fondamental et de l’harmonique sont repérés par des points rouges. Entre les deux tensions de tir, on relève un gain de 11 dB sur l’harmonique dans l’eau, contre 23 dB dans le nuage de bulles.

Dans l’absolu, le niveau de l’harmonique mesuré en transmission dans le nuage de bulles est inférieur à celui mesuré dans l’eau : 112 dB contre 120 dB. Cela peut s’expliquer tout d’abord par l’absorption intrinsèque du nuage à 800 kHz (de l’ordre de 10 dB), mais également par l’absorption du faisceau principal à 400 kHz, ce qui occasionne une efficacité de génération harmonique plus faible.

En revanche, le doublement de la tension du transducteur source occasionne un gain de 11 dB à l’harmonique dans l’eau, contre 23 dB dans le nuage de bulles. Si les phénomènes qui sont à la base de la génération harmonique dans les milieux continus permettent d’expliquer le gain de 11 dB dans l’eau, la différence entre 11 et 23 dB est intégralement due à la présence de bulles proches de leur résonance.

A 3.5 MHz, le gain à l’harmonique quand on double la tension de tir est de 11 dB dans l’eau, et seulement de 13 dB en présence des bulles (figure 2.18). Cette expérience confirme donc l’efficacité réduite des bulles à générer des harmoniques quand on s’éloigne de la réso- nance, conformément au calcul présenté en section 1.2.3.

Pour résumer les expériences menées sur le nuage de bulles créé par électrolyse sur 2 fils de platine, nous constatons une absence de coda‡‡ à 500 kHz, mais d’importantes non-linéarités à

(eau) (bulles)

F. 2.18 – Spectre des signaux à 3,5 MHz moyennés, enregistrés dans l’eau et dans le nuage de bulles pour une tension de tir de 5 V (noir) et 10V (bleu). Les niveaux du fondamental et de l’harmonique sont repérés par des points rouges. Entre les deux tensions de tir, on relève un gain de 11 dB sur l’harmonique dans l’eau, contre 13 dB dans le nuage de bulles.

cette même fréquence. A 3,5 MHz, on observe un peu de diffusion multiple, beaucoup moins d’absorption qu’à 500 kHz, mais une efficacité de génération non-linéaire réduite.

Pour autant, est-il possible d’observer des non-linéarités dans la faible contribution incohé- rente à 3,5 MHz, qui seraient intrinsèquement dues aux oscillations non-linéaires des bulles ? Pour répondre à cette question, nous réalisons une expérience dans laquelle la tension d’alimen- tation du transducteur source est réduite au seuil où l’on n’observe pas de non-linéarités dans l’eau (ou du moins, en deçà du seuil de bruit). Nous présentons sur la figure 2.19 la superposi- tion de 30 signaux temporels acquis en transmission à 3,5 MHz au seuil de non-linéarité, ainsi que leurs spectres.

En raison du faible rapport signal sur bruit, nous ne parvenons donc pas à détecter de non- linéarité dans le signal transmis à 3,5 MHz.

Dans tous les cas, la contribution incohérente au signal transmis dans le milieu créé par électrolyse sur deux fils reste faible, même aux fréquences les plus élevées accessibles expéri- mentalement. Il est donc nécessaire de densifier le milieu en bulles si l’on souhaite diminuer le libre parcours moyen élastique.