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MICI VERSUS SII : ATTEINTE ORGANIQUE VERSUS SOMATISATION ?

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Revue bibliographique

MICI VERSUS SII : ATTEINTE ORGANIQUE VERSUS SOMATISATION ?

En résumé, la sensation gastro-intestinale et la perception de la douleur viscérale peuvent être grandement conditionnées par les influences modulatrices du SNP et de la MEp. L’hypothalamus, l’AMG et la PAG reçoivent des afférences somatiques et viscérales de la périphérie et des afférences corticales en provenance du mPFC, de l’insula et de l’ACC. Ce réseau produit les réponses neuro-endocrines de la glande pituitaire et la modulation des réponses autonomes par les noyaux ponto-médullaires (locus coeruleus, noyau raphe). Ce circuit central du stress est sous le rétro-contrôle des projections mono- aminergiques ascendantes venues de ces noyaux du tronc cérébral et sous le contrôle des gluco-corticoïdes circulants qui exercent une action inhibitrice grâce à leurs récepteurs centraux situés dans le mPFC et l’hippocampe. L’ensemble de ces interactions régule la réponse au stress par le “système émotionnel moteur” dont les composantes effectrices principales sont les voies descendantes spinales, le SNA et l’axe HPA. Les hormones sexuelles, quant à elles, constituent un système parallèle pouvant influencer les réponses

Chapitre 2. Mécanismes de l'HSV - Modulation de la nociception viscérale - Mini-synthèse #03

Les données concernant les influences modulatrices supra-spinales de la douleur viscérale dans les MICI sont très rares. Cette conclusion n’est pas étonnante au regard de l’étio-pathogenèse inflammatoire nettement marquée des MICI. Bien que d’origine(s) encore inconnue(s), les MICI sont des troubles fonctionnels impliquant des mécanismes physio-pathologiques organiques. Un déséquilibre des fonctions ortho- et para- sympathiques pourrait cependant amplifier ou entretenir le processus inflammatoire, par exemple en réponse au stress.

Les choses sont différentes pour le SII. Les effets intriqués des hormones du stress et probablement des hormones sexuelles féminines participent à la modulation des symptômes du SII en influençant les activités toniques du SNA. Actuellement, le rôle de ces facteurs dans le déclenchement et/ou l’entretien du SII n’est pas déterminé. Cependant, on peut émettre l’hypothèse que la perturbation du système moteur émotionnel peut contribuer à précipiter la maladie chez un individu vulnérable, par exemple chez un individu rendu fragile psychologiquement par des événements de vie très difficiles dans l’enfance. Ainsi, l’implication des structures supra-spinales (système limbique en particulier) dans le SII est une donnée clinique très robuste, soutenue par l’impressionnant effet placebo observé chez les patients atteints de SII (Akehurst and Kaltenthaler, 2001; Lieberman et al., 2004). Un modèle bio-comportemental prenant en compte toutes ces données a donc été proposé pour expliquer, si ce n’est l’étiologie, du moins la modulation de la symptomatologie dans le SII (Figure 27) (Mayer et al., 2001).

Figure 27. Modèle bio-comportemental prenant en compte les entrées et sorties du système moteur émotionnel. D’après Mayer et al., 2001. Les voies efférentes de l’EMS sont activées par des stresseurs

psycho-sociaux (extéroceptifs) et physiques (intéroceptifs). Les principales sorties vers la périphérie sont les réponses du SNA, les réponses modulatrices de la douleur et les réponses neuro-endocrines. Les sorties vers le cerveau se traduisent en termes de modulation attentionnelle et émotionnelle. Le rétro-contrôle de l’EMS par l’intestin s’effectue par des mécanismes neuro-endocrines (adrénaline, cortisol) et afférents viscéraux. EMS, système émotionnel moteur ; SNA, SNA.

Synthèse

SYNTHESE

La revue des bibliographies scientifique et clinique nous a permis de montrer que les MICI et le SII sont deux entités pathologiques bien distinctes d’un point de vue étiologique (composante génétique forte pour les MICI et composante psycho-biologique pour le SII). Cependant, les facteurs environnementaux pourraient être prédominants dans les MICI de forme sporadique et les gènes pourraient être critiques dans la vulnérabilisation au SII, notamment dans le SII-PI. La synthèse des données rapportant les principales caractéristiques des MICI et du SII (Tableau XV) permet de dégager un point important : l’existence d’altérations physio-pathologiques similaires dans ces deux maladies (en gras). En effet, bien que probablement d’origine différente, les symptomatologies des MICI et du SII pourraient reposer sur le développement de mécanismes périphériques de même nature. Ces mécanismes sont : (1) l’altération de la communication neuro-immunitaire (inflammation neurogène et fonction immunitaire muqueuse perturbée) ; (2) l’altération de la communication nerveuse (dysfonction du SNA) et (3) l’altération de la communication neuro-endocrine (dysfonction de l’axe adréno- hypothalamo-hypophysaire, hormones sexuelles).

Nous pouvons en tirer plusieurs conclusions. Premièrement, l’axe cerveau-intestin est au cœur de toutes ces dysfonctions. Son étude est donc indispensable pour la compréhension des symptômes et de leur origine. Deuxièmement, certaines données sur les MICI et le SII dégagent des pistes de recherche qui se complètent. En effet, il existe très peu d’informations sur les mécanismes de sensibilisation centrale dans les MICI. Les recherches sur le SII suggèrent que des mécanismes de neuro-plasticité peuvent intervenir pour augmenter les entrées centrales et alimenter l’hyper-activation tonique de l’axe cerveau-intestin. A l’inverse, les recherches très complètes sur les facteurs déclenchant l’inflammation au niveau de la muqueuse colique dans les MICI fournissent des hypothèses sur le rôle pathogène potentiel de la flore commensale dans le SII. Elle pourrait participer à l’initiation d’une micro-inflammation à l’origine de la sensibilisation périphérique. Troisièmement, le nombre important de facteurs étiologiques potentiels permet d’expliquer pourquoi il est si difficile d’identifier la physio-pathologie des douleurs chroniques coliques. L’hyper-activité motrice, l’hyper-sensibilité viscérale et les altérations centrales des circuits de la douleur sont encore mal comprises en raison des interactions

Synthèse

Tableau XV. Caractéristiques épidémiologiques et physio-pathologiques validées dans les MICI et le SII. En gras : caractéristiques communes. TNF, tumor necrosis factor; NOD, nucleotide oligomerization

domain; PLT, potentialisation à long terme; NMDA, N-méthyl-D-aspartate; GABA, acide g-amino-butyrique; CB, récepteur cannabinoïdergique; CIDN, contrôles inhibiteurs descendants diffus; ACTH, adreno- corticotropic hormone; CRH, corticotropin releasing hormone; HPA, axe adréno-hypothalamo-hypophysaire; CMV, cytomégalovirus; trkA, récepteur tyrosine kinase A; B1, récepteur à la bradykinine 1; NK1, récepteur aux neurokinines 1; NGF, NGF ; P2X, récepteur purinergique P2X; IL23R, récepteur à l'interleukine 23 ; ATG16L1, autophagy related 16 like 1; IRGM, immunity-related GTPase family M; IgLC, immunoglobulin light chain; CLR, calcitonin-like receptor.

Synthèse

Afin de déterminer la part respective des facteurs génétiques ou environnementaux,des atteintes précoces ou tardives, des mécanismes coliques ou spinaux et supra-spinaux (Figure 28), il est indispensable d’étudier les modèles animaux qui sont des systèmes “simples” permettant d’agir sur un nombre limité de paramètres.

Figure 28. Chronologie de la survenue des facteurs physio-pathologiques dans les MICI et le SII.

Adapté de Mayer et al., 2004.

Les modèles animaux fournissent des explications à certaines caractéristiques cliniques et physio-pathologiques clés par la reproduction des symptômes. Ils permettent alors d’émettre des hypothèses qui peuvent être testées chez l’animal puis chez le patient.

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