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LE METAMORPHISME DES DOLOMIES ET DES CALCAIRES AU CONTACT DES SERPENTINES

GÉNÉRALITÉS. - DESCRIPTION DES CONTACTS. - CONCLUSIONS.

GÉNÉRALITÉS

Comme nous l'avons mentionné précédemment, les massifs de serpentine de la région de Divrik présentent l'apparence de roches sédimentaires, grâce à l'interstratification de bancs dolomitiques dans la roche éruptive. Quand on étudie en détail la composition de ces bancs de dolomie, on constate que la roche sédimentaire passe progressivement à une serpentine, tout en gardant une structure stratiforme; tandis que les dolomies sont gris jaune, les serpentines gris-vert, vert-jaune ou noirâtres, les termes de transition sont en général fortement bigarrés et d'une teinte moyenne violacée. Toutefois, ce n'est que par l'examen microscopique que l'on peut différencier d'une façon certaine la roche sédimen-taire de la roche éruptive.

Cette stratification des serpentines et ce passage progressif de la dolomie à la roche éruptive peuvent s'expliquer par une métasomatose des sédiments carbonatés par la roche éruptive basique. Dans ce processus, la structure de la roche sédimentaire est relativement bien conservée; les dolomies en bancs épais conduisent à des serpentines relativement massives, tandis que les dolomies schisteuses et les calcschistes font place à des serpentines feuilletées. Un bel exemple de cette structure feuilletée se rencontre à l'entrée des gorges de l'Effendi dere, où de belles serpentines rubanées, contenant encore de nombreux grains d'olivine, supportent en parfaite concordance les gros bancs ruiniformes de dolomie jaune.

Nous décrivons ci-après quelques échantillons caractéristiques des contacts serpentine-dolomie; rappelons que le coefficient Re appliqué aux carbonates exprime le rapport en poids de CaC03 à (CaC03

+

MgC03), ce coefficient étant de 0,54 pour la dolomie pure.

CONTACT No 1 Flanc ouest de Magara tepe.

L'affleurement montre une apophyse intrusive de serpentine (échantillon n° 5) dans les dolomies jaunes (échantillon n° 4). La dolomie forme des bancs relativement épais, traversés par des veinules d'asbeste soyeuse. Sous le microscope, on observe une masse finement grenue de dolomie brun clair (Re = 0,53), traversée par une veine de talc et par une veine de chrysotile gamma (fibres transversales positives, signe optique positif, ng-np =

0,014). En outre, on retrouve le talc et la serpentine sous forme d'écailles infiltrées parmi les grains de dolomie. La préparation contient un peu de pyrite et de gros grains opaques, parfois translucides et rougeâtres, de magnétite chromifère (à noyau de chromite).

Diagnostic: Dolomie talqueuse légèrement serpentinisée.

La serpentine est gris-noir et jaunâtre; elle renferme des veinules entrecroisées de couleur claire, bordées d'un liséré gris foncé. Sous le microscope la préparation présente une masse serpentineuse écailleuse, partiellement isotrope, renfermant des rubans de chrysotile alpha et des fibres de chrysotile gamma. La masse serpentineuse, jaune verdâtre, contient de petits grains opaques de magnétite et quelques gros grains, en partie opaques, en partie translucides et rougeâtres, souvent éclatés, correspondant à une magnétite chromi-fère. On distingue aussi de rares lamelles pléochroïques vertes, à basse biréfringence. Tout cet agrégat écailleux est traversé par un réseau de veinules plus ou moins parallèles de giobertite (Re = 0,18).

Diagnostic: Serpentine carbonatée.

La présence de magnétite chromifère dans la dolomie montre que celle-ci a subi déjà une métasomatose notable de la part de la roche éruptive basique.

CONTACT No2

Versant oriental de l'arête minéralisée de Magara tepe.

L'affleurement montre des bancs de serpentine carbonatée intercalés entre les dolomies jaunes et le minerai de fer.

Echantillon n° 7. - Roche d'apparence serpentineuse, de couleur gris-rose clair. Sous le microscope, la préparation est formée de serpentine isotrope ou faiblement biréfringente renfermant de nombreux petits anneaux cellulaires de carbonate (Re

=

0,31: dolomie

+

giobertite) et de nombreux grains opaques; ces derniers, examinés en lumière réfléchie, apparaissent formés de magnétite chromifère (isotrope, plus sombre que la magnétite, plus dure que la magnétite, fortement magnétique, donnant la réaction du ehrome) sillonnée de veinules de magnétite franche. La présence de nombreuses cellules de carbonate suggère un processus de remplacement d'une serpentine cellulaire par la dolomie et la giobertite.

Diagnostic: Dolomie remplacée par la roche basique ultérieurement serpentinisée et carbonatée.

CONTACT No3

Versant oriental de l'arête minéralisée de Magara tepe, au-dessous de la lentille de magnétite no 5.

Une coupe à travers l'affleurement donnerait, de bas en haut, la succession ci-dessous:

Serpentine no 14.

Roche de mélange n° 13.

Dolomie no 12.

• Minerai de fer.

Echantillon no 12. - Roche jaunâtre, esquilleuse, compacte. Sous le microscope, masse finement grenue formée de dolomie chargée de matières argileuses brunâtres et de subs-tances écailleuses de couleur orange (Re = 0,58). Cette masse est traversée par des veinules remplies de dolomie plus largement cristallisée et de quartz; elle contient des grains opaques de pyrite limonitisée et de magnétite.

Diagnostic: Dolomie argileuse.

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Echantillon n° 13. - Roche rougeâtre, compacte, dure, formée en majeure partie de carbonates finement grenus (Re = 0,76: dolomie+ calcite) associés à des chapelets de petits grains opaques (magnétite entourée d'oligiste), et d'une masse cellulaire de carbonates associés à des agrégats écailleux de serpentine (uniaxe, signe positif) et à des grains opaques à noyaux translucides rougeâtres (magnétite chromifère avec veinules de magnétite franche).

I.es cellules carbonatées ont leurs contours soulignés par des filaments opaques et par des traînées de matières ferrugineuses rougeâtres.

Diagnostic: Mélange de calcaire dolomitique et de serpentine en voie de carbonatation.

Echantillon n° 14. - Roche bigarrée, gris-mauve et jaune verdâtre, formée essentielle-ment de dolomie paraissant remplacer une serpentine, dont on distingue encore de larges écailles, des plaquettes et des rubans fibreux (chrysotiles gamma et alpha). Des traînées de matières opaques dessinent la sfa-ucture maillée de la serpentine originelle d'uni:; manière très accusée; la préparation contient en outre de gros grains opaques à noyaux translucides rouges. En lumière réfléchie, la section polie montre de nombreux petits grains et veinules de magnétite sillonnée de minuscules veines d'oligiste et quelques gros grains craquelés formés de magnétite chromifère à noyau plus sombre et plus dur de chromite.

Diagnostic: Dolomie remplacée par la roche basique ultérieurement serpentinisée et carbonatée.

CONTACT N°4

Grande croupe de serpentine coiffée de chapeaux dolomitiques au nord-ouest de Kilisecik.

Echantillon n° 73. - Roche grise, compacte, formée de serpentine (chrysotile gamma) en fibres enchevêtrées ou réticulées, souvent disposées en gerbes et associées à une serpentine jaune verdâtre isotrope, à des filaments et granules opaques et à de nombreuses plages de dolomie constituant aussi de larges veinules. En lumière réfléchie, on observe de gros grains gris de magnétite chromifère, des chapelets de petits grains de magnétite franche et des plages fibreuses de melnikowite.

Diagnostic: Serpentine en voie de dolomitisation.

Echantillon n° 74. - Roche dolomitique rose, compacte, laissant après attaque par HCl un fort résidu floconneux, rose saumon. Sous le microscope, la préparation montre une masse finement grenue, parfois d'apparence hornfelsitique, formée de petits grains de dolomie et de calcite (Re = 0, 72), de granules opaques et de très petits grains d'un minéral incolore, faiblement biréfringent, parfois isotrope, correspondant probablement à une serpentine. La roche est traversée par un treillis de veinules de dolomie.

Diagnostic: Dolomie serpentineuse.

CONTACT No5

Colline d~ Magara tepe, bancs concordants de serpentine et de dolomie.

Echantillon n° 211. - Cette roche, formant le so-iibassement de l'affleurement, est constituée par une dolomie jaune renfermant des grains métalliques et des veinules gris-violet foncé. Sous le microscope, la préparation montre une masse grenue de dolomie bru-nâtre, un peu concrétionnée, striée de veines dolomitiques plus largement cristallisées et renfermant des matières opaques ou légèrement translucides et rougeâtres (magnétite et magnétite chromifère). Par endroits, la roche contient des amygdales remplies de matières serpentineuses faiblement biréfringentes.

Diagnostic: Dolomie faiblement serpentinisée.

1 .

Echantillon n° 210. - La roche a été recueillie au toit de l'échantillon précédent; elle est de couleur gris foncé un peu violacé et renferme des veinules noirâtres. Sous le micros-cope, on distingue de nombreux petits grains de dolomie (Re = 0,60), associés à des matières opaques disposées en filaments, en chapelets de petits gTains et en gros grains à noyaux rougeâtres translucides (magnétite et magnétite chromifère). On observe en outre des veines de chrysotile gamma, bordées de matières opaques, et de petites cavités remplies de matières serpentineuses.

Diagnostic : Dolomie en voie de serpentinisation.

Echantillon n° 209. - La roche forme un banc épais qui surplombe les formations précédentes; elle est de couleur grisâtre et striée de veinules plus foncées bordées de parties vert clair. Sous le microscope, la coupe mince est formée essentiellement d'une masse grenue de giobertite (Re

=

0,16) formant par endroits un réseau qui enrobe des cellules de serpen-tine isotrope et de chrysotiles alpha et gamma. La préparation est traversée par de grosses veines de serpentine fibreuse, bordées de matières opaques ou légèrement translucides (magnétite et magnétite chromifère).

Diagnostic: Serpentine en voie de carbonatation.

CONTACT No 6

Croupe occidentale de Magara tepe; bancs de dolomie jaune reposant sur des serpentines feuilletées et des serpentines massives (fig. 12).

Echantillon n° 216. - Roche jaune striée de veinules quartzeuses grises; sous le micros-cope, on distingue une masse grenue de dolomie (Re = 0,60) souillée de matières ferrugi-neuses brunâtres; quelques cryptes

sont remplies de plages de quartz enrobant des rhomboèdres de dolo-mie. On observe aussi des traînées de petits octaèdres de magnétite.

Diagnostic: Dolomie siliceuse.

Echantillon n° 215. - Roche gris-brun foncé, à cassure esquil-leuse. Sous le microscope, on ob-serve de nombreux grains bru-nâtres de dolomie (Re = 0,48), associés à des matières opaques et à des amas de serpentine finement écailleuse. La structure de la roche est par endroits cellulaire, les noyaux des cellules étant formés

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~-Fic. 12. - Contact des dolomies et des serpentine~ .

de serpentine tandis que les parois sont constituées par des veines de dolomie associées à des filaments opaques; en outre, la préparation est traversée par des veines de carbo-nate cristallin accompagné de matières opaques. De gros grains opaques à noyaux brun rouge foncé (magnétite chrom1fère) sont dispersés dans toute la roche.

Diagnostic: Serpentine celhùaire fortement dolomitisée et renfermant des résidus de dolomie sédimentaire (roche de mélange).

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Echantillon n° 213. --- Roche verdâtre, finement rubanée, formée d'une masse serpen-tineuse faiblement biréfringente (en partie, chrysotile alpha) striée de minces granules opaques et traversée par de nombreuses veines parallèles remplies de carbonate (Re = 0,35, dolomie et giobertite).

Diagnostic: Serpentine en voie de carbonatation.

Echantillon n° 214. - Roche vert foncé, compacte, friable, renfermant de petits grains métalliques. Sous le microscope, on observe une masse réticulée de serpentine (chrysotile alpha et serpentine isotrope), formée surtout de rubans à fibres transversales et associée à des matières opaques ou translucides (magnétite et magnétite chromifère). Des veines remplies de giobertite (Re =' 0,06) forment un réseau relativement serré.

Diagnostic: Serpentine en voie de carbonatation.

Il est utile de souligner la décroissance graduelle du facteur Re à mesure que l'on

Les serpentines présentent des séries de bourrelets parallèles ayant la même orientation que les dolomies interstratifiées. Ces bourrelets, d'une épaisseur moyenne de 1 mètre, sont formés d'une roche noire à patine blanche, très dure (diabase amphibolique mélanocrate), flanquée au toit d'une serpentine compacte (échantillon n° 298) et au mur de roches car-bonatées (échantillons n° 300 et n° 301); en outre, la serpentine contient des enclaves anguleuses jaunâtres (échantillon n° 302).

Echantillon n° 300. - Roche gris-vert foncé, compacte, striée de veinules blanchâtres;

sous le microscope, une partie de la préparation est formée d'une masse serpentineuse finement écailleuse (chrysotile alpha), traversée par de larges veines remplies de carbonate lamellaire (Re

=

0,45) et par des rubans de chrysotile gamma. Dans une autre partie de la préparation, on observe des carbonates finement grenus et brunâtres (dolomie sédimen-taire). La coupe mince renferme de gros grains opaques, craquelés, à noyaux rouges trans-lucides (magnétüe chromifère) et des chapelets de petits grains opaques idiomorphes (magné-tite), localisés dans les veines de carbonate et de serpentine.

Diagnostic: Dolomie partiellement remplacée par la roche basique ultérieurement serpentinisée et carbonatée.

Echantillon n° 301. - Roche vert clair, d'apparence serpentineuse mais faisant forte-ment effervescence dans HCl (72

%

de matières solubles). Sous le microscope, la roche est formée essentiellement de carbonates finement grenus (Re = 0,45) recouvrant partiellement de grandes plages écailleuses d'antigorite contenant de fines lamelles de mica vert-bleu clair.

On distingue de gros grains opaques de magnétite chromif ère.

Diagnostic: Dolomie remplacée par la roche basique (péridotite à diallage), laquelle a été ultérieurement serpentinisée, puis carbonatée.

Echantillon no 302. - Roche jaune verdâtre, légère, compacte, formée de serpentine finement écailleuse, renfermant de fines inclusions opaques et de minuscules écailles de mica vert-bleu.

Diagnostic: Enclave de dolomie remplacée par la serpentine.

CONTACT No8

Sur la rive droite du Çaltî suyu, dans le défilé calcaire situé au nord-ouest de Kilisecik.

Les calcaires gris renferment des infiltrations stratiformes de serpentines; dans la zone de contact, sur quelques centimètres d'épaisseur, nous avons recueilli les échantillons suivants :

Echantillons n° 305" et n° 306. - Calcaire gris, cristallin, formé d'un agrégat de petites plages de calcite avec des imprégnations sporadiques de quartz.

Echantillon n° 305'. - Mince veine de calcite cristalline, un peu fibreuse, imprégnée de quartz et renfermant des inclusions anguleuses d~ dolomie jaunâtre.

Echantillon n° 305. - Sous le microscope, on observe une masse grenue de dolomie jaunâtre, contenant des inclusions opaques et des veinules plus largement cristallines.

Echantillon n° 304. - Roche bréchiforme comportant des parties gris-mauve et des parties vert-jaune clair avec de fines veinules rougeâtres. Sous le microscope, la préparation présente une masse rubanée, concrétionnée, formée en partie de petits grains de carbonate, de traînées de matières opaques ou brunâtres dessinant des microplissements et d'un peu de quartz, cette masse étant recoupée par des veinules remplies de carbonate cristallin. Sur une autre partie de la préparation, on observe des cryptes remplies de serpentine fibreuse (chrysotile gamma) ~t quelques gros grains rouges isotropes (chromite).

Echantillon n° 303. - Roche écrasée, bréchiforme, comprenant des parties claires, vert ainande, et des parties grises. Sous le microscope, on observe une masse serpentineuse (chrysotile gamma et serpentine isotrope) renfermant de nombreux petits grains idiomorphes de magnétite et quelques gros grains opaques à noyau rougeâtre de magnétite chromifère.

La masse serpentineuse présente de nombreuses crevasses remplies de giobertite.

CONCLUSIONS

1. Les calcaires gris sont rarement en contact éruptif avec les serpentines; ce contact se manifeste par une très mince dolomitisation des calcaires et par une faible serpentini-sation de la roche sédimentaire.

2. Les dolomies jaunes sont partout en contact avec les serpentines, sous forme de bancs paraissant interstratifiés avec la roche éruptive. Au voisinage des dolomies, les ser-pentines affectent elles-même une allure stratiforme.

3. Au contact des dolomies et des serpentines, on observe la succession suivante de roches: Dolomies franches - Mélanges de dolomie et de serpentine - Serpentines forte-ment carbonatées - Serpentines faibleforte-ment carbonatées.

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4. La carbonatation des serpentines diminue d'intensité en s'éloignant du contact avec les dolomies, tandis que la teneur en MgC03 de ces carbonates varie en sens inverse.

5. La carbonatation totale des serpentines condUit à la formation d'une dolomie magnésienne secondaire, qui se distingue des dolomies sédimentaires par sa teneur plus élevée en MgC03, par sa structure cellulaire résiduelle et par la présence de grains de magnétite chromifère.

6. Le processus métamorphique semble avoir comporté les stades suivants: a) Intrusion des péridotites dans les formations sédimentaires et remplacement partiel de celles-ci par le magma basique, la structure stratifiée des sédiments ayant subRisté dans les parties métasomatosées; b) Serpentinisation des péridotites; c) Carbonatation des serpentines au voisinage des dolomies.

Quant à l'origine de la magnesie dans les dolomies sédimentaires, elle reste encore dans le domaine de l'hypothèse; il est possible, bien que non prouvé, que les dolomies jaunes de Divrik aient été formées primitivement de calcaires et que leur dolomitisation soit un résultat de l'intrusion des péridotites.

LE MÉTAMORPHISME DE CONTACT DES INTRUSIONS