• Aucun résultat trouvé

4 Les sites sur terrasses lœssiques et collines calcaires

4.3.4 Les mesures de susceptibilité magnétique sur la nécropole Grossgartach

Des mesures de susceptibilité ont été réalisées sur la fenêtre 3 avec le MS2-D de Bartington, en réponse au manque de contraste entre les fosses de sépultures et le substrat limoneux. Les sépultures ont initialement été repérées d’après les éléments mobiliers qu’elles contenaient, situation déjà rencontrée sur d’autres sites (Koziol 2012, Landolt 2012), ce qui implique un décapage jusqu’au niveau d’apparition de ces objets. Sa profondeur est difficile à estimer à cause des variations des profondeurs des fonds de fosses. A titre expérimental, nous avons donc essayé de mesurer des contrastes de propriétés magnétiques entre le comblement des sépultures et l’encaissant géologique, mesures qui n’ont pu être menées sur toute l’étendue de la nécropole par manque de temps alloué au projet.

Il s’avère que les valeurs de susceptibilité magnétique sont nettement plus importantes dans le comblement des structures invisibles ou quasi-invisibles que sur le substrat. Quatre sépultures ont été choisies comme exemples sur les douze testées

Sépulture 3212

Figure 85 : Carte de susceptibilité magnétique de la structure 3212 et vue en cours de fouille (cliché C. Leprovost)

La sépulture 3213 (fig. 85) a été reconnue en partie grâce à la présence de mobilier et d’un léger contraste visuel sur sa partie ouest, la seule qui a pu être fouillée (les autres ne présentant pas d’indice de comblement). Des mesures ont été effectuées dans le prolongement de cette sépulture mal délimitée et partiellement traitée : une anomalie cohérente par rapport à la zone fouillée est apparue avec un contraste de 20.10-5 u.S.I. entre l’encaissant et la structure (40.10-5 u.S.I.).

141 Sépulture 3096

Figure 86 : Carte de susceptibilité magnétique de la structure 3096 et vue en cours de fouille (cliché C. Leprovost)

Cette sépulture a été en partie reconnue visuellement (fig. 86). Les mesures de susceptibilité ont mis en évidence son prolongement sur 2 m vers l’est et la possibilité qu’elle soit en réalité dissociée en 2 structures distinctes. Les observations visuelles et l’absence de matériel n’ont pas permis ici de distinguer ces deux parties lors de la fouille.

Sépulture 3099 et 3100

Figure 87 : Carte de susceptibilité magnétique de la structure 3099 et 3100 et vue en cours de fouille (cliché C. Leprovost)

Les mesures effectuées autour de deux indices visuels ont présentées des résultats en contradiction avec les observations de terrains (fig. 87): l’anomalie géophysique, orientée Nord-Ouest Sud-est, relie les deux structures apparues comme distinctes lors du décapage. Deux indices proches ont été interprétés comme deux structures différentes. La fouille a néanmoins confirmé les résultats géophysiques notamment grâce aux nombreux objets découverts.

142 Sépulture 3022

Figure 88 : Carte de susceptibilité magnétique de la structure 3022 et vue en cours de fouille (cliché C. Leprovost)

Cette sépulture a été repérée grâce à de la céramique apparente en surface, à deux endroits distincts qui ont été reliés afin de créer une forme assimilable à une structure (fig. 88). Les mesures de susceptibilité magnétique on validé cette hypothèse : les valeurs de susceptibilité magnétique forment bien une anomalie de susceptibilité de 40.10-5 u.S.I. dans un substrat de 20.10-5 u.S.I.

Il est fort intéressant de remarquer que les comblements des sépultures présentent des valeurs de susceptibilité quasiment identiques. Ces forts contrastes de susceptibilité magnétique par rapport au substrat auraient entraîné, en tenant compte de l’aimantation visqueuse accumulée sur 5000 ans, des anomalies assez importantes du champ magnétique terrestre. Il aurait été possible de couvrir une surface plus importante afin de cartographier l’ensemble du site. Aucune prospection de grande ampleur n’a cependant été mise en œuvre, car des bermes assez importantes, résultant des difficultés de lecture des structures lors du décapage, auraient contrariées l’acquisition des données. De plus, de nombreux repères - étiquettes associées à des clous susceptibles de bruiter les donnée) étaient déjà égarés et dissimulés sous la mince couche de colluvionnements recouvrant le terrain.

Sur le site de Bernolsheim la géophysique semble être une alliée solide qui a permis d’une part de dépasser les limites du diagnostic auxquels elle se montre totalement complémentaire mais aussi d’envisager de nouvelles méthodes d’approches sur les structures peu lisibles rencontrées, afin de se donner les moyens de les étudier de façon exhaustives.

143

5 Les sites de plaines – les terrasses alluviales

5.1 Sainte-Croix-en-Plaine

Un projet géophysique portant sur l’ensemble du territoire de la commune de Sainte-Croix-en-Plaine (fig. 89) fait partie intégrante d’une synthèse sur son occupation aux époques protohistoriques. Les relevés photographiques des prospections aériennes des 20 dernières années laissaient entrevoir un fort potentiel archéologique sur ce secteur, ce qui a été confirmé par les opérations d’archéologie préventive qui ont livré au cours des 15 dernières années un nombre important de sites datés du Bronze Final à la Tène. Cette étude apporte un regard nouveau sur les potentialités de la géophysique pour la caractérisation des sites protohistoriques de plaine en Alsace, et permet de réaliser des comparaisons entre les résultats géophysiques, les résultats de fouilles et de diagnostics, les photographies aériennes, les données LIDAR et les cartes anciennes.

Figure 89 : Carte de localisation des différentes prospections sur la commune de Sainte-Croix-en-Plaine (source IGN). Celles-ci se concentrent essentiellement autour de la zone industrielle Nord.

5.1.1 Contexte archéologique

Les environs de l’actuelle commune de Sainte-Croix-en-Plaine sont assez densément occupés de l’Age du Bronze ancien à la Tène finale (Ferrier 2009, Ferrier 2011), ce qui en fait un site potentiellement important (fig. 90). Il existe également des indices d’occupation romaine mais les

144

quelques vestiges identifiés ici et là sur les différentes opérations de diagnostic ne sont pas comparables à la richesse et à la densité du matériel et des structures protohistoriques.

Dans les années 80 et 90, une série de prospections aériennes a été réalisée sur différentes communes du Haut-Rhin (Zehner et al. 1998). Ces prospections ont permis d’identifier plusieurs indices de sites - essentiellement des enclos funéraires circulaires.

Les premiers travaux de reconnaissance occasionnés par le tracé de l’A35 dans les années 80 ont donné lieu à la fouille d’une partie de la nécropole d’Oberesholzackerfeld (Simon 2010). Son prolongement a été récemment traité (Véber 2006), ce qui a permis de préciser sa période de fonctionnement, du Bronze final à la Tène ancienne.

Figure 90 : Carte des indices de sites protohistoriques connus par prospections aériennes, diagnostics et fouille archéologiques (Ferrier 2009)

Au nord, sur le lieu-dit Jebsen Boden et sur l’emprise de la zone d’activité Mermoz, des diagnostics (Georjon et Croutsch 1999, Kuhnlé 1999) ont confirmé les indices archéologiques déjà connus par le biais des photos aériennes et ont mis au jour une nécropole dont l’utilisation s’échelonne du Bronze Final au Hallstatt. La richesse de ses deux ensembles funéraires, distants d’à peine 2 km, la présence d’enclos découverts en photographie aérienne entre ces deux secteurs et leur attribution chronologique, nous poussent à imaginer une occupation continue du nord au sud. Même si cette hypothèse n’est pas vérifiée à ce jour, il faut souligner la proximité de ces deux ensembles funéraires synchrones et remarquables. A proximité de la nécropole d’Oberesholzackerfeld, un établissement

145

identifié en diagnostic se caractérise par des structures d’habitats (fosses, trous de poteau, puits), au lieu-dit Holzackerfeld (Zehner 2004, Landolt 2007). A la suite de ces découvertes, un autre secteur d’habitat occupé au Bronze Final et au Hallstatt a été reconnu au lieu-dit Oberer Kätzis (Boës 1999). Quelques fosses et fossés de l’âge du Bronze ont également été retrouvés au sud de la commune lors de diagnostics. Il est intéressant de noter que les structures d’habitat sont situées à l’ouest et les structures funéraires à l’est. Aucun élément paléohydrographique ou géomorphologique n’explique à ce jour cette séparation. Les deux systèmes fonctionnent probablement aux mêmes périodes (peut-être de façon discontinue).

5.1.2 Contexte géomorphologique

La commune est située en bordure du domaine alluvial de l’Ill, sur la basse terrasse rhénane tardiglaciaire qui surplombe le lit majeur du Rhin. Le substrat est composé de dépôts holocènes recouverts par des limons sableux de l’Ill et des rivières vosgiennes - la Lauch et la Vieille Thur (fig. 91). L’épaisseur des alluvions recouvrant les formations rhénanes varie de 40 à 60 cm. Ce secteur était sujet à des inondations avant les aménagements de l’Ill qui ont abaissé le toit de la nappe, toujours très proche de la surface (entre 1 et 4 m). A l’Ouest du village, une étude de terrain a permis la mise en évidence de lentilles de matériaux rouge-bruns, caractéristiques des apports vosgiens scellant les alluvions rhénanes et associées à la formation de concrétions calcaires à l’interface des deux dépôts. Les plus grands chenaux sont quant à eux comblés par des sables jaunes, apports alluvionnaires calcaires du massif alpin et de ses contreforts jurassiques.

Figure 91 : Carte géologique de Sainte-Croix-en-Plaine (source BRGM), l’ensemble de la commune est recouvert par des alluvions récentes Holocènes (Ferrier 2009)

146

A plusieurs endroits, des colmatages gris-bleus compacts, argileux et relativement profonds (Ferrier 2009) révèlent d’anciennes zones d’eaux stagnantes antérieures aux périodes d’inondations et de dépôts alluvionnaires. Enfin, sur plusieurs opérations (OberesKätzis, Oberholzackerfeld), des traces de sols rouges, typiques de ceux rencontrés dans la Hardt, dénotent d’un développement des sols en milieu forestier.