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I.4 Métriques sur la performance humaine

I.4.1 Mesures physiologiques

L’utilisation des mesures physiologiques repose sur l’hypothèse que des changements de la charge de travail provoquent des différences mesurables dans certains processus physiologiques de l’opérateur humain (généralement involontaires). L’avantage principal de (certains) indicateurs physiologiques est qu’ils restent disponibles même en l’absence de comportement manifeste. En conséquence, ils sont potentiellement utiles dans l’évaluation de la charge de travail dans des scénarios de validation dans lesquels les demandes de réponse sont lentes (comme dans les cockpits avion fortement automatisés). Par ailleurs, la plupart des mesures peuvent être collectées de façon continue et relativement non intrusive, grâce à la miniaturisation des technologies. Les inconvénients de ce type de mesures sont l’équipement spécialisé requis, la grande quantité de données nécessitant une analyse sophistiquée, la nécessité d’une expertise technique, les rapports signal–bruit critiques, etc. [7], [41].

Les indicateurs physiologiques les plus employés sont les mesures provenant de deux types de structures anatomiques distinctes, [94] : le système nerveux central (central nervous system, CNS) et le système nerveux périphérique (pheriperal nervous system, PNS). Le CNS comprend l’encéphale et la

Mesures de Performance Mesures Physiologiques et subjectives Mesures de Performance Mesures Physiologiques et subjectives

moelle épinière. Le PNS peut être divisé en le système nerveux somatique, contrôlant l’activation des muscles volontaires, et le système nerveux autonome (autonomic nervous system, ANS), qui contrôle les organes internes et est autonome dans le sens que les muscles associées ne sont pas sous un contrôle volontaire. Le ANS est encore subdivisé en le système nerveux sympathique (sympathetic nervous system, SNS) et le système nerveux parasympathique (parasympathetic nervous system, PNS). Tandis que le PNS maintient les fonctions corporelles, le SNS est dirigé vers les réactions de secours. Le SNS provoque des réactions de fuite ou de combat, en réaction à un stress ou à un stimulus, comme, par exemple, une augmentation de la fréquence cardiaque, de la sécrétion de salive et de sueur. Le PNS contrebalance ces effets en ralentissant la fréquence cardiaque, en dilatant les vaisseaux sanguins et en relâchant les fibres des muscles lisses involontaires.

I.4.1.1 L’activité cérébrale

Les mesures CNS incluent l’activité électrique, magnétique et métabolique du cerveau. L’électroencéphalogramme (electroencephalogram, EEG) est un ensemble de mesures provenant de l’activité électrique cérébrale.

L’analyse fréquentielle des EEG permet de déterminer le niveau d’endormissement d’un individu. On distingue typiquement quatre zones de fréquence de ce signal :

< 4 Hz. ondes delta, présents durant un sommeil profond, 4 Hz. – 8 Hz. ondes thêta, diminution importante de la vigilance, 8 Hz. – 13 Hz. ondes alpha, diminution modérée de la vigilance, 13Hz. < ondes bêta, prédominent pendant un état éveillé actif.

Cependant, les différences entre des différents individus peuvent être grandes. Des caractéristiques associées à ce signal EEG sont :

Sûreté L’effet apparaît comme reproductible

Validité La fréquence est proportionnelle au niveau de vigilance

Sensitivité Très sensible, car la méthode es basée sur des mesures précises de l’activité cérébrale.

Diagnosticabilité La fréquence des EEG augmente avec la charge de travail.

Mise en œuvre Difficulté pour l’analyse des données ; relation signal–bruit important ; calibration personnalisée, coût élevé d’instrumentation et de support humain spécialisé.

Intrusivité Electrodes EEG posées sur le cuir chevelu

D’autres métriques issues de l’EEG sont les potentiels relatifs à des événements (event-related potentials, ERP). En particulier, la métrique P300 (appelé de cette manière car due aux changements électriques qui se produisent environ 300 millisecondes après la présentation d’un stimulus) est utilisée pour mesurer la charge de travail. Néanmoins, cette méthode est réservée pour des recherches de base très détaillées de la charge de travail, [53]. Caractéristiques de la métrique P300 :

Sûreté L’effet apparaît comme reproductible

Validité L’amplitude du P300 est inversement proportionnelle à la charge de travail

Sensitivité Très sensible, car la méthode est basée sur des mesures précises de l’activité cérébrale.

Diagnosticabilité L’amplitude du P300 augmente avec la difficulté de la tâche.

Mise en œuvre Difficulté pour l’analyse des données ; relation signal–bruit important ; calibration personnalisée, coût élevé d’instrumentation et de support humain spécialisé.

I.4.1.2 L’activité cardiaque

Le fonctionnement du cœur est associé au PNS et au SNS. Chaque contraction du cœur pompe le sang à travers tout le système circulatoire. La contraction est produite par des impulsions électriques qui peuvent être mesurées par un électrocardiogramme (electrocardiogram, ECG), [41], [53].

Des analyses en temps, en fréquence et d’amplitude du ECG permettent l’extraction de plusieurs mesures. Dans le domaine du temps, la détection des ondes R permet de mesurer le temps entre les pics donnant l’intervalle intra–battement (inter-beat interval, IBI). La fréquence cardiaque (heart rate, HR) est directement liée à la période du coeur (heart period, HP) ou à l’IBI. Elle permet de mesurer l’effort physique impliqué dans la réalisation d’une tâche. Des caractéristiques associées à l’activité cardiaque sont :

Sûreté L’effet apparaît comme reproductible

Validité le HR varie avec la charge de travail, mais aussi avec d’autres facteurs. La validité reste discutable.

Sensitivité Sensible aux variations des demandes de la tâche, mais aussi à l’effort physique, émotions et stress

Diagnosticabilité Diagnosticabilité limité. Il s’agit d’un indice intégrant l’effet de toutes les demandes de la tâche et la réponse émotionnelle de l’opérateur.

Mise en œuvre Enregistrement portable possible. L’analyse des données est sophistiquée et la relation avec la performance est complexe.

Intrusivité Faible à moyenne. Les électrodes ne nécessitent pas une localisation précise.

Trois bandes fréquentielles caractérisent l’activité cardiaque :

0.02 Hz. – 0.06 Hz. fréquences impliquées dans la régulation de température du corps, 0.07 Hz. – 0.14 Hz. fréquences impliquées dans la régulation sanguine court terme, 0.15 Hz. – 0.50 Hz. fréquences influencées par les fluctuations respiratoires.

La puissance à 0.1 Hz., déterminée par une décomposition spectrale de la variation de la fréquence cardiaque (HRV), semble une bonne mesure de l’effort mental, [53]. Des caractéristiques sont :

Sûreté Une mesure sûre, appliquée avec succès dans des environnements variés Validité En général, une variable valide.

Sensitivité Grande sensibilité, mais vulnérable à la contamination par le stress et l’environnement.

Diagnosticabilité Une mesure globale de l’effort.

Mise en œuvre L’une des mesures physiologiques les plus pratiques. Non recommandé pour des tâches de courte durée, à cause de son analyse sur deux minutes d’enregistrement.

Intrusivité Faible à moyenne. Les électrodes ne nécessitent pas une localisation précise.

I.4.1.3 L’activité oculaire

L’activité oculaire est difficile à classer entre les mesures physiologiques et les mesures de performance mais, traditionnellement, elle est considérée parmi les paramètres physiologiques, probablement due à l’une des techniques de mesure, l’électrooculogramme (electrooculogram, EOG).

La stratégie de recherche visuelle est indicative de la recherche d’informations. La durée de fixation

du regard est liée à la difficulté de l’obtention/interprétation des informations, tandis que la fréquence

l’est à l’importance de ces informations. Des caractéristiques des mesures de l’activité oculaire sont :

Sûreté Existence de petites différences pouvant détecter la charge de travail dans différentes situations

Sensitivité Grande sensibilité, aussi aux facteurs émotionnels et environnementaux (lumière, etc.), ce qui ramène à un contrôle expérimental précis et difficile à maintenir.

Diagnosticabilité Diagnosticabilité limitée.

Mise en œuvre Equipement variée : EOG, enregistrement vidéo ou vision artificielle. Coût élevé d’instrumentation et besoin de calibration.

Intrusivité Les électrodes du EOG sont placées autour des yeux ; intrusivité moyenne. Les techniques de vision sont d’intrusivité faible, voire nulle. Bonne acceptation de la part de l’opérateur.

Les clignements des yeux ont comme paramètres le taux de clignements, la durée du clignement et

la latence des clignements, cette dernière liée au stimulus de l’occurrence d’une situation. Des recherches

ont montré que les résultats sur le taux de clignement sont mitigés, tandis que la latence augmente et la duré de fermeture suite à une augmentation des demandes de la tâche, [94]. La fréquence des

clignements est un indicateur de la fatigue. Les caractéristiques des mesures des clignements des yeux

sont :

Sûreté Des relations consistantes entre les demandes de la tâche et la latence/durée des clignements.

Validité Mesures valides de la charge de travail et de la fatigue. Sensitivité Sensibilité aux variations des demandes de la tâche. Diagnosticabilité Diagnostic de la charge de travail visuelle

Mise en œuvre Equipement variée : EOG, enregistrement vidéo ou vision artificielle. Besoin de calibration.

Intrusivité Les électrodes du EOG sont placées autour des yeux ; intrusivité moyenne. Les techniques de vision sont d’intrusivité faible, voire nulle. Bonne acceptation de la part de l’opérateur.

La réponse pupillaire est une mesure importante de la charge de travail, même si les changements les plus importants du diamètre de la pupille se produisent sous des facteurs émotionnels ou environnementaux (illumination). Caractéristiques :

Sûreté Des différences petites mais sûres, permettant l’évaluation de la charge de travail dans des situations différentes.

Validité Grand niveau de validité comme mesure globale de la charge de travail. Sensitivité Grande sensibilité aussi aux facteurs émotionnels et environnementaux. Diagnosticabilité Diagnosticabilité limité.

Mise en œuvre Pratique seulement dans des conditions de laboratoire. Equipement commercialement disponible mais coûteux.

Intrusivité Peut être intrusive, selon la tâche.