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Chapitre 4 L’étude des couronnes à grains fins dans la météorite de Paris

4.5. Les collaborations débutées avec le CRPG et l’IAS

4.5.1. Les mesures en microscopie infrarouge

La première signature que nous avons tenté de tracer est celle de l’abondance en eau dans les deux composants, autrement dit le rapport eau/roche. Pour cela nous avons débuté une collaboration avec l’IAS afin de réaliser des mesures par microscopie infrarouge. L’objectif de cette collaboration est de suivre les bandes vibrationnelles des molécules d’eau ou des liaisons hydroxyles contenues dans les phases hydratées de ces assemblages.

La collaboration mise en place avec l’IAS (Rosario Brunetto, Zelia Dionnet) avait pour but dans un premier temps de réaliser des mesures en réflexion sur des surfaces assez grandes avec le microscope infrarouge. La section étant enduite dans de l’époxy, l’objectif n’était pas de quantifier précisément la bande d’absorption des OH dans le matériel inter-chondre mais de vérifier la possibilité d’appliquer un traitement hyper-spectral nous permettant de suivre les différentes phases minéralogiques, de réaliser des cartographies de ces phases et de donner une première valeur relative de la profondeur de bande des OH entre la matrice et les couronnes de la météorite de Paris.

Nous avons réalisé des mesures en réflexion sur des échantillons plans. Seule la surface de l’échantillon a donc été analysée (entre des dizaines de nanomètres et des dizaines de microns, selon les valeurs de l'indice de réfraction complexe du matériau) sur des gammes de longueurs d’onde se situant entre 2.5 µm et 12.5 µm (environ 4000-850 cm-1). L’utilisation d’un détecteur FPA (Focal Plane Array) a permis de collecter simultanément les spectres sur 128*128 pixels fournissant un champ de vision de 84 × 84 µm2. Ces données ont d’abord été calibrées sur une cible en or et une première réduction du bruit a été appliquée par le logiciel d’acquisition situé sur la ligne SMIS du synchrotron SOLEIL par PCA (analyse en composante principale). Ces données ont ensuite été traitées en utilisant le logiciel Hyperspy. Deux modes ont été utilisés. Le premier permet de se déplacer sur le spectre et d’afficher (à un certain nombre d'onde) une image des intensités de réflectance correspondantes. Il permet de localiser les silicates anhydres, par exemple en plaçant le curseur sur les gammes (1000 et 800 cm-1) et de vérifier la correspondance avec l’image optique. Le deuxième mode permet au contraire de déplacer le curseur en chaque pixel afin d’afficher le spectre correspondant. Ce deuxième mode nous a permis de créer un modèle pour venir ajuster un background et des gaussiennes aux longueurs d’onde qui nous intéressaient.

Chapitre 4 : L’étude des couronnes à grains fins dans la météorite de Paris

Les données ont d’abord été normalisées à un pixel situé sur un silicate anhydre. Ceci nous permet de visualiser rapidement les variations relatives entre les zones anhydres et hydratées. La fenêtre de longueur d’onde a ensuite été modélisée en utilisant un polynôme de degré 2 pour ajuster le fond continu et deux gaussiennes aux valeurs de 3599 et 3400 cm-1 afin de modéliser les bandes d’absorption liées aux vibrations des groupements OH. Un exemple d’ajustement du modèle choisi est présenté dans la Figure 4.19.

Figure 4.19 : Exemple du modèle utilisé pour un pixel donné. En vert le fond continu polynomial et en bleu le modèle final. Deux gaussienne de différentes amplitudes ont été utilisées à : 3599 et 3400 cm-1 en raison de la multiplicité des bandes liées aux liaisons OH.

Ce modèle nous permet ensuite d’extraire le paramètre profondeur de bande qui correspond à l’amplitude de la gaussienne. Celle-ci étant dirigée vers le bas, plus les valeurs sont négatives plus la profondeur de bande est importante et plus il y a de groupements OH dans le pixel. Une cartographie de cette profondeur de bande est présentée dans la Figure 4.20.

Figure 4.20 : Cartographie de la profondeur de bande des OH obtenue par le modèle ajusté aux données brutes. La couronne autour du chondre montre en général une profondeur de bande plus faible (en valeur absolue) que la matrice.

Plusieurs cartographies ont été réalisées pour différentes espèces minérales (carbonates, silicates anhydres, etc.) puisque nous disposions des cartographies hautes résolutions obtenues par la méthode

Chapitre 4 : L’étude des couronnes à grains fins dans la météorite de Paris

ACADEMY, les masques obtenus présentaient un intérêt de calage entre les deux techniques, mais aussi un intérêt astrophysique. En effet, ces spectres nous permettent de pouvoir associer un spectre IR à une minéralogie extraterrestre bien déterminée (application aux observations des disques protoplanétaires ou des surfaces primitives).

La cartographie de la profondeur de bande des OH nous renseigne sur les différences existant entre matrice et couronnes à grains fins. La Figure 4.20 montre différents contrastes en fonction de la localisation dans l’échantillon. Le chondre est constitué majoritairement d’olivine et de pyroxène pauvre en eau (il apparait en rouge foncé sur la figure 4.20). La couronne, bien qu’elle ne comporte que peu de silicate anhydre, montre une profondeur de bande relativement constante et faible en comparaison de ce qui est retrouvé dans la matrice. Dans cette dernière, les profondeurs de bandes les plus importantes sont observées. Des silicates anhydres en rouge foncé sont aussi retrouvés dans la matrice ce qui confirme le bon ajustement du modèle.

Bien que ces résultats soient difficile à confirmer en raison de la présence de l’époxy, ils nous ont permis de vérifier que cette méthode permettait bien de cartographier les espèces minérales principales, mais aussi l’abondance des liaisons OH. Malgré la présence de l’époxy, une différence relative d’abondance en eau semble être visible entre la matrice et les couronnes à grains fins. Les variations de cette bande d’absorption sont locales et pourraient être reliées à l’histoire de l’altération du corps parent. En effet, Leroux et al., (2015) ont montré dans la météorite de Paris que l’altération pourrait avoir été locale, sur quelques micromètres dans des environnements chimiques bien particulier. Il n’est cependant pas exclu que cette différence soit liée à une différence de porosité et donc de volume de résine. L’utilisation par la suite de la section non enrobée de Paris nous permettrait de confirmer ou d’infirmer cette conclusion.