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Mesure de la consommation bactérienne en oxygène sur le macrosystème à optodes 87

3.4 Les technologies de la biologie : de la culture à l’expérimentation

4.1.1 Mesure de la consommation bactérienne en oxygène sur le macrosystème à optodes 87

Nous utilisons dans ces premières expériences le dispositif « macro », présenté dans le chapitre 3. Une optode placée dans la culture mesure la consommation de l’oxygène dissous en présence de bactéries et de carbone organique. L’oxygène dissous est un indicateur direct de la biodégradation du

carbone organique par les bactéries. Ces expériences ont été réalisées avec du milieu Luria-Bertani (LB), habituellement utilisé comme bouillon de culture. Les bactéries s’y développent facilement car tous les éléments nécessaires à la croissance bactérienne y sont présents.

Dans cette étape « macro », l’objectif est de valider le concept de mesure, de définir un « point de mesure référent » comparable aux tests normalisés de DBO en macro-volume. Cela afin de pouvoir les comparer, ensuite, avec les résultats obtenus en micro-volume sur biopuces.

4.1.1.1 Effet de la concentration en carbone organique sur la consommation des bactéries Nous avons commencé par observer l’effet de la concentration en carbone organique sur la cinétique de consommation des bactéries. Pour cela nous avons préparé plusieurs échantillons en diluant du milieu LB avec une solution d’eau DI et de NaCl à 5 g/l (concentration en NaCl dans le milieu LB), afin de ne pas changer la pression osmotique du milieu.

La figure 4.1 présente les courbes du suivi de l’oxygène dissous au cours du temps et selon différentes concentrations en carbone organique. Nous avons préparé un échantillon de milieu LB, quatre di-lutions (par 10, 100, 300 et 500), et un témoin (Eau DI dont NaCl à 5 g/l). Les échantillons ont été ensemencés avec un inoculum d’E Coli d’environ 1, 2.108cell/ml. Ils ont été placés dans la mallette, que nous avons fabriquée, permettant d’isoler les échantillons de la lumière et de les réguler à une température de 30°C. 6 4 2 Oxygène dissous (mg/L) 10 8 6 4 2 0 Temps (h) LB LB/10 LB/100 LB/300 LB/500 Eau DI

FIGURE4.1 – Expériences de consommation de l’oxygène par E. Coli (1, 2.108cell/ml) exposées à 5 concentrations de milieu LB (LB, dilutions par 10, 100, 300 et 500) et 1 témoin (eau DI + NaCl à 5 g/L). Nous observons une effective diminution de la concentration en oxygène dissous dont la dynamique croit avec la concentration en carbone organique. Nous remarquons que certains des niveaux mini-maux atteints sont non-nuls. Cela indique une dégradation totale de la matière organique. Notons toutefois que les valeurs de ces niveaux sont fonction de la concentration initiale en carbone : plus

4.1. Principaux résultats expérimentaux

il y a de carbone organique plus la quantité d’oxygène nécessaire à sa dégradation est importante. La quantité d’oxygène dissous étant limitée, si la culture s’opère dans un module hermétique, nous observons une limitation de la gamme de carbone mesurable. En effet, pour les échantillons fortement concentrés en carbone organique, l’oxygène dissous est consommé avant que la totalité du carbone n’ait été dégradée. C’est donc dans le cas des faibles concentrations que la mesure de la DBO peut être faite dans les meilleures conditions, puisque l’on a les valeurs initiales et finales de l’oxygène dissous. Ce qui permet de remonter à la concentration en matières carbonées. En première analyse, ce type de mesure va donc nécessiter un ajustement des concentrations (dilution du prélèvement), pour rentrer dans la zone de validité de la mesure et dans un délai d’obtention du résultat de quelques heures. Les courbes présentent une différence de cinétique selon l’échantillon. Il semble que le taux de consommation de l’oxygène dissous soit fonction de la concentration initiale en carbone organiqueS0. Cette hypothèse est validée par les travaux de Liu [Liu, 2000] sur l’influence du rapportS0/X0sur le rendement de croissance bactérienne. Il indique que ce dernier est d’autant plus fort que le rapport S0/X0est faible.

Nous notons aussi une légère diminution de l’oxygène dissous dans le témoin. Cela dénote d’une activité bactérienne malgré l’absence de carbone organique. Les biologistes attribuent ce phénomène au fait que les bactéries cumulent des réserves de nutriments et puisent dans ces réserves lorsque le carbone organique est manquant.

Finalement, une dernière observation peut être faite, une augmentation de l’oxygène apparait sur trois des cinq concentrations de LB (LB/100, LB/300 et LB/500) au bout d’environ 3 heures de mesure. Ceci s’explique par la diffusion de l’oxygène de l’air extérieur vers l’intérieur de la chambre de mesure, et également des bulles d’air piégées dans la chambre. La diffusion existe depuis le début de l’expérience mais la vitesse de diffusion est plus faible que la vitesse de consommation de l’oxygène, on ne la voit donc pas avant 3 heures. Lorsque le milieu commence à être purifié de toute trace de carbone organique, l’activité bactérienne ralentie, la diffusion prend alors le dessus sur la consommation de l’oxygène. Cette diffusion peut poser des problèmes sur l’exploitation des résultats pour la mesure précise de la DBO.

4.1.1.2 Effet de la densité de population sur la vitesse de dégradation

Pour tester l’effet de la densité de population de l’inoculum sur la cinétique de consommation de l’oxygène, nous avons mené trois expériences dans les mêmes conditions de milieu de test et de température, à savoir en milieu LB et à 30°C. Les densités testées sont 1, 12.105, 1, 12.106et 1, 2.107 cell/ml. La figure 4.2 montre les résultats de ces expériences.

Les résultats obtenus montrent clairement que la vitesse de consommation de l’oxygène dissous, et donc de dégradation des matières organiques, est fonction de la densité de population de

l’inocu-6 5 4 3 2 1 Oxygène dissous (mg/L) 6 5 4 3 2 1 0 Temps (h) 1,2e7 cell/ml 1,12e6 cell/ml 1,12e5 cell/ml

FIGURE4.2 – Effet de la densité de population de l’inoculum sur la cinétique de consommation d’oxygène.

lum. En effet, l’oxygène sera plus rapidement consommé si la population initiale est importante, et inversement si la population est faible, elle mettra plus de temps à consommer la même quantité d’oxygène. Sur la figure 4.2, dans le cas de la plus forte densité, la cinétique de consommation de l’oxygène est quasiment une droite. Plus la densité initiale en bactéries est faible, plus la courbe tend vers une parabole.

Le tracé des pentes à l’origine permet de suivre l’évolution de la consommation d’oxygène par les bactéries. On constate, ainsi, qu’on passe de 5,34 mg/l/h pour la plus forte densité bactérienne à 0,14 mg/l/h pour la plus faible densité et 1,29 mg/l/h pour la densité intermédiaire. L’épuisement d’oxygène présent dans l’échantillon est presque total au bout d’une heure pour la densité 1, 2.107 cell/ml, alors que pour la densité la plus faible, 1 , 12.105cell/ml, sa consommation reste négligeable pendant une durée proche de 3 h.

La durée de la mesure est donc liée à la densité de population de l’inoculum. Pratiquement, il paraîtrait alors logique de positionner le point de mesure à une forte densité afin de réduire le temps de mesure et de travailler sur la pente pour avoir très vite des indications sur la DBO. Le risque, identifié par les biologistes, est que l’inoculum injecté puisse contenir des bactéries mortes qui représentent alors une source de carbone parasite pour les bactéries vivantes et donc être une source de variabilité des résultats. De ce fait, plus l’inoculum est dense plus la variabilité des sources de carbone est importante, ce qui expliquerait la forte variabilité du test standardisé de DBO (autour de 20%).

4.1. Principaux résultats expérimentaux

4.1.1.3 Analyse des performances et limites du système 4.1.1.3.a Reproductibilité des mesures

Afin d’avoir un système de mesure efficace, nous devons nous assurer de la reproductibilité des mesures. Pour cela, nous nous sommes placés dans des conditions expérimentales qui ont bien fonc-tionné, et nous avons répété les mesures. Nous avons choisi les conditions expérimentales suivantes : échantillons de milieu LB dilué par 10, température de 30 °C et un inoculum de 4.106cell/ml.

10 8 6 4 2 0 Oxygène dissous (mg/L) 5 4 3 2 1 0 Temps (h) LB/10 exp 1 LB/10 exp 2 LB/10 exp 3

FIGURE4.3 – Graphique résumant la reproductibilité des mesures.

Nous pouvons voir sur la figure 4.3, que les courbes sont bien différentes. Cela dit, nous observons que les cinétiques sont très semblables, mais les niveaux d’oxygène dissous sont différents.

Cette différence peut s’expliquer par un défaut de calibrage de l’oxymètre. Il s’effectue en 2 points : 0% et 100% de la saturation en oxygène dissous dans l’eau DI à température et salinité connues. La saturation en oxygène dissous est très dépendante de ces deux derniers paramètres. Si la désoxygénation pour le point 0% et l’oxygénation pour le point 100% ne sont pas réalisés scrupuleusement identiquement d’une expérience à l’autre, la concentration initiale en oxygène dissous peut différer.

Il y a là une difficulté de mise en œuvre de la mesure : le protocole de calibration est impératif, et délicat, car il suppose de maîtriser parfaitement les conditions environnementales. Il sera plus utile dans les applications futures de revenir sur ce point, afin de trouver un système de calibrage mieux adapté.

4.1.1.3.b Diffusion parasite de l’oxygène

Rappelons que selon notre interprétation, l’oxygène qui diffuse de l’air extérieur vers la chambre de mesure perturbe le processus de mesure. C’est un trou réalisé sur le capot du système macro, afin de laisser l’air de la chambre s’échapper lors du remplissage, qui peut principalement être mis en cause. Dans le but d’éliminer cette diffusion, nous avons utilisé de l’huile paraffine comme bouchon à la diffusion de l’oxygène. L’huile est un liquide non miscible dans l’eau et moins dense, ce qui lui permet de rester au-dessus de l’eau. L’expérience réalisée visant à déterminer l’efficacité de l’huile comme frein à la diffusion consiste à utiliser une chambre de mesure de manière habituelle, c’est-à-dire avec seulement l’échantillon à analyser, et dans une seconde chambre, un échantillon issu de la même préparation auquel on ajoute un volume d’huile paraffine. L’échantillon préparé est composé de milieu LB dilué par 200 ensemencés par un inoculum d’environ 1, 2.107cell/ml.

7 6 5 4 3 2 1 0 Oxygène dissous (mg/L) 7 6 5 4 3 2 1 0 Temps (h)

puits fermé avec de l'huile paraffine puits ouvert

à l'air libre

FIGURE 4.4 – Résultat du test de réduction de la diffusion de l’oxygène avec une couche d’huile paraffine.

Les résultats présentés sur la figure 4.4 indiquent bien que la diffusion de l’oxygène dans la chambre avec l’huile paraffine ralentit la diffusion comparée à la chambre sans huile. Cependant, elle n’est que ralentie, cette méthode n’est donc pas suffisamment concluante.

Notons également, que certaines bactéries sont capables de dégrader les huiles. Il est possible que des souches bactériennes du panel utilisé dans le futur système rentrent dans cette catégorie de bactéries. L’huile paraffine serait donc une source de carbone parasite. L’ajout d’huile paraffine complexifie également le système. En effet, cela rajoute un fluide à gérer dans le système fluidique car il doit être ajouté à chaque chambre pour chaque mesure. Un dernier point, l’huile étant un corps gras, des traces peuvent rester sur les parois d’une mesure à l’autre. Ces traces peuvent contaminer la mesure suivante si elles emprisonnent des bactéries ou des matières organiques dégradables.

4.1. Principaux résultats expérimentaux

Nous voulions, par la conception d’une mallette de mesure utilisant des chambres de culture « macro », définir un point de mesure servant de mesure référente et préfigurer un système opérationnel terminal complet intégrant une gestion automatique des fluides. Les résultats de ce paragraphe montrent la faisabilité du principe mais mettent en évidence des difficultés de reproductibilité.