soit d'ailleurs à ce moment la valeur absolue de la tension intra-pleurale. »
Cetterègle,proposéeparM. le Prof. Pitres, nousdonne
donc
lepoint limite de la bénignité de
l'opération.
Elle expliqueaussi l'innocuité des évacuations fractionnées. Avec celle-ci,
on n'estjamais arrivé à produire une décompression de plus
de 16 millimètres demercure
(une
seulefois
sur12faits tandis
quele chiffre de 20 millimètres demercuren'a été atteintqu'a¬prèsl'écoulement de2, de 3 et même de 4 litres deliquide. Le manomètre sera donc le guide de l'opérateur. Nous verrons qu'un autreprocédé permet de se passer de cet instrument.
Mais la véritable raison de cette indication est la suivante: nous savons que l'exsudat pleural contient une
notable
quantité de substance fibrinogène qui, en se
dédoublant,
au contact de l'épithélium altéré, laisse déposer de la fi¬
brine.
Le
dépôt
fibrineux s'accumule peu à peu en formant descouches stratifiées dont l'épaisseur varie de quelques milli¬
mètres à 1 centimètre etplus : ce sont les fausses membra¬
nes.Molles et friables, presque
diffluentes,
quand ellessontjeunes,
elles prennentde la résistance en vieillissant, avectendance à s'organiser.
Leur présence est un véritable danger, car elles vont con¬
tracter desadhérences avecles différents points de la cavité pleuraleet former des brides qui empêcheront le poumon de
revenir àsa formephysiologique.
«Cequ'il faut éviter avant tout
(Castiaux. Thèse
Paris 1873),cest lacompression du poumon, son emprisonnement par
des fausses membranes, suites inévitables de la présence du liquide dans la plèvre. Lesparties du poumon, quelque temps comprimées par du liquide,
s'affaissent,
perdent de leur élasticité sans que leparenchyme
ait pour cela subi des altérations irrémédiables.Empêcher
cette atélectasic tempo¬raire de devenir permanente,,tel est le but de l'extraction totale du liquide pleural. »
| V.
Siphonage.
Telles sont les conditions quel'on doit rempliren évacuant
une plèvre.
Il nous faut donc, en résumé, un appareil : 1° Qui assurera un écoulement lent et
continu3';
2° Qui videra la plèvreaussi entièrement que la prudence
le permet;
3° Dont le fonctionnement s'arrêtera
automatiquement,
juste au point limite du danger:-4° Qui sera simple dans sa construction et son manie¬
ment.
Cesera le siphon ordinaire, ou mieux, ce que les auteurs ont nommé ainsi. Nous verrons plus loin que tous les ins¬
trumentsdécrits sous ce nom, composésd'un trocart
auquel
fait suiteun tube plus ou moins long, ne sont pas des
si¬
phons et que, si à
première
vue ils semblent fonctionnercomme ces derniers, en réalité ils en diffèrent essentielle¬
ment; j'entendspar là qu'ils nesont pas soumis aux mêmes lois
physiques.
Quoi qu'il en soit, ces instruments remplissent bien
les
conditions énumérées il y a uninstant;et celui de M. le
Prof-Pitresme paraît devoir être choisi entre tous : sonauteurlui donne lenom de
trocart-siphon.
Il secompose : 1° d'une canule; 2° d'un trocart; 3°
d'un
tube de caoutchouc.
a) La canule, de 2 millimètresde diamètre et de 12centimè¬
tres de longueur, porte une clef qui permet de la fermer
— 35 —
et unepetite
branche
de 2 cent. I 2 soudée à sa paroi inté¬rieure sous un angle très aigu.
'
h)
Le trocart glisse à frottement doux dans la canule, mais seulement vers sa pointe, sur une longueur de 1 centimètre, tandis que la tige est plus fine. Cette dernièrejoue dans une armature qui vient obturer la canule lorsque le trocart y est placé. Cette armature est légèrement conique à son extré¬mitéobturatrice, l'autre extrémité a la forme d'une crosse de pistolet, cequi permet de tenir l'ensemble solidement. La ponction faite, on retire le trocart qui entraîne l'armature, grâce à sa pointe plus volumineuse. En môme temps on tourne la clef d'un quart,de cercle et la canule est fermée.
c)
Le tube de caoutchoucou tube d'écoulement est adoptéà la petite branche de la
canule;
il a 00 centimètres de lon¬gueur etporte dans son tiers supérieur un index de verre par lequel on voit couler le liquide.
On peut, à l'aide d'un robinet à trois voies, y brancher un autre tube se rendant à un manomètre à mercure.
Tel estl'instrument dont l'emploi a donné à M. le Prof.
Pitres toutessatisfactions, depuis 1881 qu'il s'en sert.
Avec lui, l'écoulement se fait avec lenteur.
Reportons-nous auxobservations, et nous voyons que pour une opéra¬
tion dont la durée ne
dépasse
jamais 30 minutes d'abondants épanchements ont été évacués; et cela d'une façon continue,sans
à-coup,
les dernières centaines de centimètres cubes s'écoulent à peu près dans le même laps de temps que lespremières,
bien que la pression intra-thoracique diminue progressivement à mesure que l'évacuation s'avance.Feuilletons encore les observations: dans presque toutes
noustrouvons, l'opération terminée, le signe dusoudisparu, tandis que vibrations thoraciques et murmure vésiculaire
sont de nouveau perçus, quelquefois avec des frottements.
Quereste-t-i 1 de liquide? Pas du tout, ou si peu que la quan¬
tité en est négligeable.
De plus, nous pouvons limiter l'action de l'instrument à
notre gré et d'avance nous connaissons le point
où
il cessera— 36
-de fonctionner. En effet, sa puissance est subordonnée à la
longueur du tube d'écoulement, c'est à dire au poids de la colonne de liquidequi le remplit. Donc, en faisant varier de niveau son extrémité inférieure nous ferons aussi varier sa
puissance. « La pression
atmosphérique
(Pitres, in Arch.cliniques de Bordeaux,
1898, p. 533etsuivantes)
faisant équi¬libre à unecolonne d'eau de 10m33, si le tube du siphon avait im03 de longueur, sa puissance
d'aspiration
égalerait 1/10 d'atmosphère ou 0,076 millimètres de mercure. S'il était longde 0m50 elle serait d'environ 1/20 d'atmosphère, ou de 0,038 millimètres de mercure et, s'il était réduit à 0ra25, elle attein¬
drait, sans jamais pouvoir aller au delà, 0,019 millimètres de mercure ». Nous verrons comment on peut arriver au même résultatsans réduire autant la longueur du tube.
Enfin la description même de l'instrument nous
dispense
d'insistersur sa grande simplicité, qui en rend le prix
très
modique.Quant àson maniement, il se réduit à la seule ponction : il n'est donc guère compliqué non plus.
CHAPITRE III
11. Thorax artificiel. Recherches expérimentales.
Bien des fois, dans les pages précédentes, j'ai parlé de la pression
intra-thoracique.
La cavité pleurale, distendue par l'accumulationprogressive de liquide, de virtuelle devient réelleet repousseexcentriquement
tout ce qui l'environne.Poumon, médiastin, diaphragme, paroi
thoracique subissent
tousune poussée et cèdent d'autant plus facilement que leur élasticité respective est plus grande.
C'estainsi que le poumon se laisse refouler avec plus de facilite que le diaphragme, tandisque la paroiselaisse moins bien distendre que celui-ci.
En somme, c'est cettedernière, la plus résistante, qui est déformée en dernier lieu, avecvoussurecaractéristique,sou¬
venttrès appréciable.
Toutes ces parties réagissent chacune suivant son degré
d'élasticité,
et la somme de ces énergies a pour résultat la pressionintra-thoracique.
Ceseront d.onclesparties les moinsélastiquesqui tendront
a reprendre leur place avec le plus
d'énergie,et
les autres les suivront.En d'autres «termes, les organes reviendront à leur place
normale en raison inverse de leur déplacement, chacun épuisant à la suite sa qualité
élastique.
.Si nous raisonnons alors ces données nous arrivons aux
conclusionssuivantes.: puisque, quand on évacue un
épan-chement,
ce sont les parties les plusrésistantes,
paroi et dia¬phragme,
qui reviennent sur-elles-mêmes lespremières
etavec le plus
d'énergie,
la pression doit baisser avec rapidité dès les premières centaines de centimètres cubes de liquide— 38 —
écoulé, et la courbe qui peut traduire cet abaissement pré¬
sentera une chute presque
brusque.
Puis, la paroi et ensuite le
diaphragme
revenus à leur place, répancliement n'estplussoumis qu'à la faible réaction du médiastinet du poumon, et la chute de la courbe devra sefaire lentement.
Or, si nous consultons les
graphiques
et les tableaux an¬térieurement publiés
(Dumont5,
in Thèse Bordeaux1883),
ainsi que les indications
manométriques
des observations qui suivent, nous nous apercevrons que les choses ne sepassent pas toujours ainsi et que le raisonnementest main¬
tes fois en défaut.
Chez certains malades la chute rapide seproduitau
début;
chez d'autres, au contraire, elle a lieu vers la fin de
lathora-centèse;
chez d'autres enfin, pendant l'écoulement des cent premierscentimètres cubes, nous constatons même uneélé¬vation de pression qui a été de G millimètres, de 14 milli¬
mètres, de 11 millimètres de mercure, suivie immédiatement d'une chute
brusque
dequelques
millimètres.Ailleurs, la chuterapidea lieuversle milieu de
l'opération;
ailleurs encore, la chute est lente et continue du commence¬
mentà la fin.
Donc, rien de régulier dans la marche de la décom¬
pression. On ne peut expliquer des phénomènes si diver¬
gents qu'en
invoquant
desfacteurs propres àchaque malade.Chezl'un, il peutyavoir des adhérences assez fortes pour combattre l'élasticité des organes; elles peuvent céder tout à coup;chez
l'autre,
l'élasticité des côtes, du diaphragme, peut êtrediminuée de qualité; des fausses membranespeuvent
lutter contre
l'expansion
du poumon;l'amplitude
des mou¬vements respiratoiresvarie,nonseulement d'un malade àun
autre, mais à
chaque
instantchez le même, tout le tissu pul¬monaireatélectasié ne recouvrant pas partout sa
perméabi¬
lité à la fois.
Quant aux faits où l'on a noté une élévation au début, pa¬
radoxale pour ainsi dire, je crois, et ce n'est qu'une hypo¬
thèse, qu'elle est due à une contraction de toute la poitrine,
immobilisée en expiration forcée, contraction appréiiensive, provoquée par
la douleur de la
ponction. Cequi semble le
prouver, c'est que_cette élévation, dont la durée ne dépasse
pas30
à
40 secondes, est suivie immédiatement d'unechute
brusque, à angle aigu, dans lesgraphiques, chute
qui coïn¬ciderait alors avec uneinspiration.
Mais, je le
répète,
cette explication n'est qu'une simplehypothèse
queje n'ai puvérifier,
n'ayant pas eu lachance
de rencontrer, à mon vif regret, de malade présentant ce
phénomène, insuffisammentexpliqué, donc intéressant.
Nous nous sommes livré à quelques expériences
in vitro,
pourchercher si le raisonnement était vraiment faussé par lamultiplicité des facteurs sus-mentionnés, différents chez chaque pleurétique, et pour indiquer aussi certains avanta¬
ges du trocart-siphon, sur lesquels j'ai passé plus haut rapi¬
dement, me réservant d'y revenir plus tard.
M. le Prof. Pitres a mis à notre
disposition
unappareil
construit sur ses indications et qui constitue un
véritable
« thorax artificiel ».
Cet appareil se compose d'un bocal